Conseil d'État
N° 459650
ECLI:FR:CECHR:2024:459650.20240412
Mentionné aux tables du recueil Lebon
4ème - 1ère chambres réunies
M. Jacques-Henri Stahl, président
Mme Thalia Breton, rapporteur
M. Raphaël Chambon, rapporteur public
SCP FOUSSARD, FROGER, avocats
Lecture du vendredi 12 avril 2024
Vu la procédure suivante :
Le comité social et économique (CSE) de la société Gazel Energie Génération, le syndicat CGT de la centrale de Gardanne, le syndicat CGT des mineurs et énergéticiens du Douaisis et environs, le syndicat CGT Mines énergies de Saône-et-Loire, le syndicat CGT de la centrale Emile Huchet, l'union départementale CGT des Bouches-du-Rhône, la fédération nationale des mines et de l'énergie CGT, la fédération chimie-énergie CFDT, la fédération CFE-CGC Energies, la fédération FO Energie et mines, M. AN... AK..., M. BA... BK..., M. K... AM..., M. Q... AO..., M. AZ... AP..., M. G... O..., M. BA... X..., M. A... Y..., M. BG... P..., M. BO... P..., M. BH... AQ..., M. AB... BL..., M. AY... BR..., M. BB... BM..., M. H... AR..., M. BE... BV..., M. AL... D..., M. E... D..., M. CC..., M. BF... F..., M. AX... AU..., M. Z... BS..., M. S... AV..., M. BQ... AE..., M. Q... AF..., M. N... B..., M. BW... BP..., M. Z... I..., M. AT... C..., M. BQ... AH..., M. AG... T..., M. BT... T..., M. U... BC..., M. CB... AJ..., M. BA... BX..., Mme AI... BD..., M. W... J..., M. E... BE..., M. CA... BY..., M. Q... BU..., M. BN... L..., M. AA... V..., M. AS... M..., M. AD... BI..., M. AC... BZ... et M. R... BJ... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 31 mars 2021 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi de la société Gazel Energie Génération. Par un jugement n° 2106055 du 27 juillet 2021, le tribunal administratif a rejeté leur demande.
Par un arrêt n° 21VE02342 du 20 octobre 2021, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté leur appel contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et cinq autres mémoires, enregistrés les 20 décembre 2021, 21 mars et 1er juin 2022 et 26 mai, 7 juin, 24 novembre et 27 décembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le comité social et économique (CSE) de la société Gazel Energie Génération, le syndicat CGT de la centrale de Gardanne, l'union départementale CGT des Bouches-du-Rhône, la fédération nationale des mines et de l'énergie CGT, M. AN... AK..., M. K... AM..., M. AZ... AP..., M. G... O..., M. BA... X..., M. AB... BL..., M. BB... BM..., M. H... AR..., M. BE... BV..., M. AL... D..., M. E... D..., M. CC..., M. S... AV..., M. BQ... AE..., M. Q... AW... M. BQ... AH..., M. U... BC..., M. CB... AJ..., Mme AI... BD..., M. W... J..., M. CA... BY..., M. Q... BU..., M. BN... L..., M. AS... M..., M. AC... BZ... et M. R... BJ... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;
3°) de mettre solidairement à la charge de l'Etat et de la société Gazel Energie Génération la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'énergie ;
- le code du travail ;
- la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 ;
- l'ordonnance n° 2020-921 du 29 juillet 2020 ;
- le décret n° 2021-297 du 18 mars 2021 ;
- le code de justice administrative ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 20 mars 2024, présentée par le comité social et économique (CSE) de la société Gazel Energie Génération et autres ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Thalia Breton, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat du comité social et économique de la société Gazel Energie Génération et autres et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société Gazel Energie Génération ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 31 mars 2021, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi de la société Gazel Energie Génération, qui a en charge la gestion de centrales de production d'électricité en France (gaz, charbon, énergies renouvelables) et la fourniture de l'électricité, ce plan prévoyant la suppression de 219 postes pouvant conduire à un maximum de 132 licenciements pour motif économique sur plusieurs sites de l'entreprise, dont celui de Gardanne (Bouches-du-Rhône), et 87 départs volontaires sur le site d'Emile Huchet à Saint-Avold (Moselle). Par un jugement du 27 juillet 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande du comité social et économique (CSE), d'organisations syndicales et de salariés de la société Gazel Energie Génération tendant à l'annulation de cette décision. Par un arrêt du 20 octobre 2021, contre lequel le CSE de la société Gazel Energie Génération et autres se pourvoient en cassation, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté leur appel contre ce jugement.
Sur le désistement de Mme AI... BD... :
2. Le désistement de Mme AI... BD... est pur et simple. Rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.
Sur le pourvoi :
3. D'une part, aux termes de l'article L. 1233-5 du code du travail : " Lorsque l'employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l'absence de convention ou accord collectif applicable, il définit les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements, après consultation du comité social et économique. / Ces critères prennent notamment en compte : / 1°Les charges de famille, en particulier celles de parents isolés : 2°/ L'ancienneté de service dans l'établissement ou l'entreprise ; 3°/ La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ; / 4°/ Les qualités professionnelles appréciées par catégorie. / L'employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l'ensemble des autres critères prévus au présent article. / Le périmètre d'application des critères d'ordres des licenciements peut être fixé par un accord collectif. / En l'absence d'un tel accord, ce périmètre ne peut être inférieur à celui de chaque zone d'emploi dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements de l'entreprise concernés par les suppressions d'emploi. / Les conditions d'application de l'avant-dernier alinéa du présent article sont définies par décret ".
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 1233-24-2 du code du travail : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63. / Il peut également porter sur : / 1° Les modalités d'information et de consultation du comité social économique (...) ; / 2° La pondération et le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements mentionnés à l'article L. 1233-5 ; / 3° Le calendrier des licenciements ; / 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées ; (...) ". L'article 1233-57-3 du même code prévoit qu'en l'absence d'accord collectif, ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 (...) ".
5. En vertu de ces dispositions, en premier lieu, il appartient à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi, de s'assurer, en l'absence d'accord collectif ayant fixé les critères d'ordre des licenciements, que le document unilatéral recourt aux quatre critères mentionnés à l'article L. 1233 5 du code du travail, cité au point 3. A cet égard, tel n'est pas le cas s'il prévoit, pour un ou plusieurs des critères d'ordre légaux, d'affecter la même valeur pour tous les salariés, empêchant ainsi par avance que ce ou ces critères puissent être effectivement pris en compte au stade de la détermination de l'ordre des licenciements.
6. En second lieu, il incombe à l'administration de contrôler que les éléments, déterminés par l'employeur, sur la base desquels ces critères seront mis en oeuvre pour déterminer l'ordre des licenciements, ne sont ni discriminatoires, ni dépourvus de rapport avec l'objet même de ces critères. L'administration prend en compte à cet effet l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment les échanges avec les représentants du personnel au cours de la procédure d'information et de consultation préalable à l'adoption du document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi, ainsi que les justifications objectives et vérifiables fournies par l'employeur.
7. A ce titre, s'agissant du critère d'ordre relatif aux qualités professionnelles, dont les éléments d'appréciation, à la différence de ceux des autres critères d'ordre, peuvent différer selon les catégories professionnelles définies par le plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient en particulier à l'administration de vérifier que les éléments d'appréciation de ce critère, retenus par l'employeur, ne sont pas insusceptibles de permettre de prendre en compte les qualités professionnelles des salariés de la ou des catégories professionnelles afférentes et n'ont pas été définis dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou à leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée. A cet égard, les résultats de l'évaluation professionnelle des salariés, lorsqu'ils existent, sont au nombre des éléments d'appréciation du critère d'ordre relatif aux qualités professionnelles qui peuvent être utilement retenus par l'employeur.
8. Il ressort des pièces de la procédure devant la cour administrative d'appel de Versailles que, dans leur requête d'appel, le CSE de la société Gazel Energie Génération et autres ont soulevé le moyen tiré de ce que la décision attaquée était illégale au motif que les éléments d'appréciation du critère d'ordre relatif aux qualités professionnelles retenus par l'employeur, à savoir, d'une part, la mobilité géographique, d'autre part, la mobilité professionnelle, étaient dépourvus de rapport avec l'objet de ce critère d'ordre. Or, il ressort des termes de l'arrêt attaqué que la cour n'a pas répondu à ce moyen, qui n'était pas inopérant. Son arrêt est, par suite, insuffisamment motivé.
9. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de leur pourvoi, le CSE de la société Gazel Energie Génération et autres sont fondés à demander pour ce motif l'annulation de l'arrêt du 20 octobre 2022 de la cour administrative d'appel de Versailles.
Sur la requête d'appel :
10. Le délai de trois mois imparti à la cour administrative d'appel pour statuer par les dispositions de l'article L. 1235-7-1 du code du travail étant expiré, il y a lieu pour le Conseil d'Etat, en application des mêmes dispositions, de statuer immédiatement sur l'appel formé par le CSE de la société Gazel Energie Génération et autres contre le jugement du 27 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision d'homologation du 31 mars 2021.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'illégalité de la décision attaquée en tant qu'elle a été prise par une autorité incompétente :
11. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 4 de leur jugement, d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée.
En ce qui concerne les moyens tirés de l'illégalité de la décision attaquée en tant qu'elle est relative au contrôle de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique de la société Gazel Energie Génération :
12. D'une part, aux termes de l'article L. 1233-57-3 du code du travail : " En l'absence d'accord collectif (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (...) la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique (...) ".
13. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article L. 1233-28 du code du travail que l'employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés dans une même période de trente jours doit réunir et consulter le comité social et économique. A ce titre, le I de l'article L. 1233-30 du même code dispose, s'agissant des entreprises ou établissements qui emploient habituellement au moins cinquante salariés, que : " (...) l'employeur réunit et consulte le comité social et économique sur : / 1° L'opération projetée et ses modalités d'application, conformément à l'article L. 2323-31 ; / 2° Le projet de licenciement collectif : le nombre de suppressions d'emploi, les catégories professionnelles concernées, les critères d'ordre et le calendrier prévisionnel des licenciements, les mesures sociales d'accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi et, le cas échéant, les conséquences des licenciements projetés en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail. (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-31 du même code : " L'employeur adresse aux représentants du personnel, avec la convocation à la première réunion, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif. / Il indique : / 1° La ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement ; / 2° Le nombre de licenciements envisagé ; / 3° Les catégories professionnelles concernées et les critères proposés pour l'ordre des licenciements ; / 4° Le nombre de salariés, permanents ou non, employés dans l'établissement ; / 5° Le calendrier prévisionnel des licenciements ; / 6° Les mesures de nature économique envisagées ; / 7° Le cas échéant, les conséquences de la réorganisation en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail ".
14. Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article L. 1233-34 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, le comité social et économique peut, le cas échéant sur proposition des commissions constituées en son sein, décider, lors de la première réunion prévue à l'article L. 1233-30, de recourir à une expertise pouvant porter sur les domaines économique et comptable ainsi que sur la santé, la sécurité ou les effets potentiels du projet sur les conditions de travail ". Aux termes de l'article L. 1233-35 du même code : " L'expert désigné par le comité social et économique demande à l'employeur, dans les dix jours à compter de sa désignation, toutes les informations qu'il juge nécessaires à la réalisation de sa mission. L'employeur répond à cette demande dans les huit jours. Le cas échéant, l'expert demande, dans les dix jours, des informations complémentaires à l'employeur, qui répond à cette demande dans les huit jours à compter de la date à laquelle la demande de l'expert est formulée ".
15. Il résulte des dispositions citées aux points 12 à 14 que, lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail et fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que la procédure d'information et de consultation du comité social et économique a été régulière. Elle ne peut légalement accorder l'homologation demandée que si le comité a été mis à même d'émettre régulièrement un avis, d'une part sur l'opération projetée et ses modalités d'application et, d'autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l'emploi. Il appartient à ce titre à l'administration de s'assurer que l'employeur a adressé au comité social et économique, avec la convocation à sa première réunion, ainsi que, le cas échéant, en réponse à des demandes exprimées par le comité, tous les éléments utiles pour qu'il formule ses deux avis en toute connaissance de cause. En outre, lorsque le comité social et économique a décidé de recourir à l'assistance d'un expert en application des dispositions de l'article L. 1233-34 du code du travail, il appartient à l'administration de s'assurer que l'expert a pu exercer sa mission dans des conditions permettant au comité social et économique de disposer de tous les éléments utiles pour formuler ses deux avis en toute connaissance de cause.
16. En premier lieu, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 10 à 12 de leur jugement, d'écarter le moyen tiré de l'illégalité de la décision attaquée au motif que le CSE n'aurait pas disposé des éléments utiles pour qu'il formule ses avis en toute connaissance de cause.
17. En second lieu, aux termes de l'article L. 1233-33 du code du travail : " L'employeur met à l'étude, dans le délai prévu à l'article L. 1233-30, les suggestions relatives aux mesures sociales envisagées et les propositions alternatives au projet de restructuration mentionné à l'article L. 2323-31 formulées par le comité social et économique. Il leur donne une réponse motivée ". Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail et fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'administration, dans le cadre de son contrôle global de la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique prévu par les dispositions de l'article L. 1233-57-3 citées au point 12, de vérifier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que l'employeur, d'une part, a étudié les suggestions et propositions formulées par le CSE, d'autre part, y a formulé, par tout moyen, une réponse motivée. Il ne lui appartient pas, en revanche, de porter une appréciation sur la pertinence de la réponse donnée par l'employeur à ces suggestions et propositions au regard de la situation de l'entreprise.
18. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que le CSE de la société Gazel Energie Génération a présenté, lors de sa réunion du 27 novembre 2020, des propositions alternatives au projet de restructuration engagée par la société Gazel Energie Génération, d'autre part, qu'en application des dispositions de l'article L. 1233-33 citées au point 17, ces propositions ont été étudiées par l'employeur, qui y a donné une réponse motivée, d'abord lors d'une réunion du CSE du 8 décembre 2020, ensuite par un document intitulé " Analyse des projets industriels alternatifs ", présenté à la réunion du CSE du 14 janvier 2021, indiquant les raisons pour lesquelles ces projets ne sont, selon lui, pas soutenables sur le plan économique, ni opérationnels, et permettant au CSE de disposer de tous les éléments utiles pour formuler ses deux avis en toute connaissance de cause. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la décision qu'ils attaquent, qui, eu égard à ce qui a été dit au point 17, n'avait pas à porter une appréciation sur la pertinence des réponses formulées par la société Gazel Energie Génération aux propositions du CSE, serait illégale au motif que l'employeur a méconnu les dispositions de l'article L. 1233-33 du code du travail.
En ce qui concerne les moyens tirés de l'illégalité de la décision attaquée en tant qu'elle est relative au contrôle de la définition des critères d'ordre des licenciements :
19. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, citées au point 4, que, lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, il appartient à l'administration de vérifier la conformité du contenu de ce document aux dispositions légales et conventionnelles applicables relatives aux critères d'ordre. Il ne lui revient pas, en revanche, de faire porter son contrôle sur les modalités d'application de ces critères au stade des licenciements individuels, dont il n'appartient qu'au juge du licenciement, le cas échéant ultérieurement saisi, d'apprécier le bien-fondé.
20. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que les requérants ne peuvent utilement soutenir que la décision qu'ils attaquent serait illégale en tant qu'elle porte sur le contrôle de la définition des critères d'ordre des licenciements au motif que l'employeur a entendu contourner l'application des critères d'ordre par la création d'un poste de technicien de gestion des procédés alors qu'il prévoyait la suppression de quatre postes de technicien de laboratoire et par l'embauche, par une autre société du groupe auquel appartient la société Gazel Energie Génération, d'un responsable des ressources humaines.
21. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi prévoit, en son chapitre 4, que les critères d'ordre retenus par l'employeur sont les quatre critères mentionnés par l'article L. 1233-5 du code du travail cité au point 3. S'agissant du critère des qualités professionnelles appréciées par catégorie professionnelle, ce même document prévoit qu'il sera apprécié, d'une part, pour les catégories professionnelles composées exclusivement de cadres, sur la base des évaluations professionnelles des années 2017 à 2019, d'autre part, pour les catégories professionnelles pour lesquelles les évaluations annuelles ne peuvent pas être utilisées, c'est-à-dire les catégories professionnelles composées de non-cadres ou à la fois de salariés cadres et non cadres, " en fonction du nombre de mobilités géographiques et/ou fonctionnelles des salariés " réalisées au sein de l'entreprise. Enfin, ce document prévoit que deux points seront attribués aux salariés relevant de ces dernières catégories professionnelles ayant réalisé au moins une mobilité géographique au cours de leur parcours professionnel dans l'entreprise, qu'un point sera attribué aux salariés ayant réalisé au moins une mobilité professionnelle et qu'un demi-point sera attribué aux salariés n'ayant réalisé aucune de ces mobilités, les points obtenus en cas de cumul d'une mobilité géographique et d'une mobilité fonctionnelle pouvant s'additionner.
22. D'une part, il ne résulte d'aucune règle ni d'aucun principe que le critère d'ordre relatif aux qualités professionnelles doit être apprécié en prenant en compte au moins deux indicateurs distincts. Par suite, les requérants ne peuvent utilement soutenir que la décision qu'ils attaquent serait illégale au motif que le document unilatéral homologué ne prévoirait qu'un seul élément d'appréciation de ce critère d'ordre. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 21, que ce document prévoit l'appréciation de ce critère au regard de deux indicateurs distincts, la mobilité géographique d'une part, la mobilité professionnelle d'autre part, chacun de ces éléments permettant d'obtenir des points pouvant s'additionner si un salarié a réalisé à la fois au moins une mobilité géographique et au moins une mobilité fonctionnelle au sein de l'entreprise.
23. D'autre part, d'abord, s'agissant de l'argumentation des requérants selon laquelle les éléments d'appréciation du critère d'ordre des qualités professionnelles retenus par l'employeur seraient constitutifs d'une discrimination indirecte, aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail : " (...) aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations (...), en raison (...) de sa situation de famille (...), de ses activités syndicales (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations : " Constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs mentionnés au premier alinéa, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés ".
24. Si les requérants soutiennent que certains salariés, en particulier les salariés titulaires d'un mandat syndical et les salariés ayant des enfants en garde partagée ou qui s'occupent d'un proche âgé dépendant, sont moins en mesure que les autres salariés de réaliser une mobilité géographique ou professionnelle et qu'un tel désavantage particulier serait susceptible de caractériser une discrimination indirecte, soit en raison des activités syndicales, soit en raison de la situation de famille, au sens des dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail citées au point 23, les requérants n'apportent, à l'appui de leur moyen, qui ne fait l'objet que d'une argumentation générale, aucun élément de fait, et, en particulier, aucun élément propre aux salariés de l'entreprise dont le licenciement est envisagé qui permettrait de retenir que certains de ces salariés seraient ou auraient été dans une situation faisant obstacle à la réalisation d'une mobilité.
25. Ensuite, si les requérants soutiennent que les éléments d'appréciation qui ont été retenus pour le critère d'ordre relatif aux qualités professionnelles sont sans rapport avec l'objet de ce critère d'ordre, la prise en compte de l'accomplissement d'une mobilité géographique ou professionnelle n'est, par elle-même, pas insusceptible de rendre compte de qualités professionnelles et, en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'administration ait entaché sa décision d'illégalité en estimant que, pour celles des catégories professionnelles dont la liste a été produite au cours de l'instruction contradictoire par l'employeur et par l'administration, de tels éléments n'étaient pas sans rapport avec l'appréciation des qualités professionnelles des salariés en relevant, notamment s'agissant de leur faculté d'adaptation aux évolutions de l'entreprise.
26. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité de la décision attaquée au motif que le plan de sauvegarde de l'emploi aurait méconnu les dispositions de l'article L. 1233-5 du code du travail doit être écarté.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'illégalité de la décision attaquée en tant qu'elle est relative au contrôle de la définition des catégories professionnelles :
27. L'article L. 1233-57-3 du code du travail prévoit qu'en l'absence d'accord collectif, ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 (...) ", le 4° de cet article étant relatif au nombre des suppressions d'emploi et aux catégories professionnelles concernées.
28. En vertu de ces dispositions, il appartient à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document qui fixe les catégories professionnelles mentionnées au 4° de l'article L. 1233-24-2, de s'assurer, au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment des échanges avec le comité social et économique au cours de la procédure d'information et de consultation ainsi que des justifications qu'il appartient à l'employeur de fournir, que ces catégories regroupent, en tenant compte des acquis de l'expérience professionnelle qui excèdent l'obligation d'adaptation qui incombe à l'employeur, l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune. Au terme de cet examen, l'administration refuse l'homologation demandée s'il apparaît que les catégories professionnelles concernées par le licenciement ont été déterminées par l'employeur en se fondant sur des considérations, telles que l'organisation de l'entreprise ou l'ancienneté des intéressés, qui sont étrangères à celles qui permettent de regrouper, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou s'il apparaît qu'une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée.
29. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 23 à 27 de leur jugement, d'écarter le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait illégale au motif que les catégories professionnelles retenues par l'employeur n'ont pas été valablement définies dans le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi.
En ce qui concerne les moyens tirés de la rupture de l'égalité de traitement entre salariés :
30. En premier lieu, les requérants ne peuvent utilement soutenir que la décision d'homologation qu'ils attaquent serait illégale au motif que le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi ne prévoit pas que les salariés des sites d'Hornaing et de Lucy, dont l'activité des " tranches charbon " a cessé en 2013 et en 2014, bénéficient des mesures prévues par l'ordonnance n° 2020-921 du 29 juillet 2020 et du décret n° 2021-297 du 18 mars 2021 pris pour son application, dès lors qu'il résulte des dispositions de l'article 1er de cette ordonnance et du II de l'article L. 311-5-3 du code de l'énergie que ces mesures ne sont applicables qu'aux installations cessant leur activité à compter du 1er janvier 2022.
31. En deuxième lieu, les requérants ne sont, en tout état de cause, pas fondés à soutenir que la décision attaquée serait illégale au motif, d'une part, que le document unilatéral homologué méconnaîtrait le principe d'égalité entre, d'une part, les salariés du site de Saint-Avold, pour lesquels le plan de sauvegarde de l'emploi ne prévoit qu'un plan de départs volontaires, et, d'autre part, les salariés des autres sites de la société Gazel Energie Génération, pour lesquels le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des licenciements au cas où les départs volontaires et les mesures de reclassement interne ne permettraient pas de les éviter, d'autre part, que le plan de sauvegarde de l'emploi ne pouvait valablement, au regard du principe d'égalité, ouvrir le bénéfice de certaines mesures aux seuls salariés volontaires au départ.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'illégalité de la décision attaquée en tant qu'elle porte sur le caractère suffisant du plan de sauvegarde de l'emploi :
32. En premier lieu, s'agissant du plan de sauvegarde de l'emploi devant précéder les licenciements pour motif économique de plus de dix salariés, aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement sur le territoire national des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-62 du même code : " Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des mesures telles que : / 1° Des actions en vue du reclassement interne sur le territoire national, des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; / 1° bis Des actions favorisant la reprise de tout ou partie des activités en vue d'éviter la fermeture d'un ou de plusieurs établissements ; / 2° Des créations d'activités nouvelles par l'entreprise ; / 3° Des actions favorisant le reclassement externe à l'entreprise, notamment par le soutien à la réactivation du bassin d'emploi ; / 4 Des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés ; / 5° Des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur des emplois équivalents ; / 6 Des mesures de réduction ou d'aménagement du temps de travail ainsi que des mesures de réduction du volume des heures supplémentaires réalisées de manière régulière lorsque ce volume montre que l'organisation du travail de l'entreprise est établie sur la base d'une durée collective manifestement supérieure à trente-cinq heures hebdomadaires ou 1 600 heures par an et que sa réduction pourrait préserver tout ou partie des emplois dont la suppression est envisagée ". En vertu de l'article L. 1233-57-3 du même code, l'autorité administrative homologue le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi, avoir notamment vérifié " le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1 ".
33. Il résulte de l'ensemble des dispositions citées au point 32 que, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, il appartient à l'administration, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier la conformité de ce document et du plan de sauvegarde de l'emploi dont il fixe le contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles applicables, en s'assurant notamment du respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des dispositions des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du même code. A ce titre, elle doit, au regard de l'importance du projet de licenciement, apprécier si les mesures contenues dans le plan sont précises et concrètes et si, à raison, pour chacune, de sa contribution aux objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés, elles sont, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire à ces objectifs compte tenu, d'une part, des efforts de formation et d'adaptation déjà réalisés par l'employeur et, d'autre part, des moyens dont disposent l'entreprise et, le cas échéant, l'unité économique et sociale et le groupe.
34. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 51 de leur jugement, d'écarter le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait illégale au motif que le plan de sauvegarde de l'emploi est insuffisant au regard des moyens du groupe EPH auquel appartient la société Gazel Energie Génération.
En ce qui concerne les moyens tirés de l'illégalité de la décision attaquée en tant qu'elle porte sur le contrôle du respect par l'employeur de ses obligations en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs :
35. D'une part, aux termes de l'article L. 1233-57-3 du code du travail : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (...) le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / (...) 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1 (...) ".
36. D'autre part, aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. / Ces mesures comprennent : / 1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ; / 2° Des actions d'information et de formation ; / 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. / L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ". En vertu de l'article L. 4121-2 du même code, l'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement de principes généraux de prévention, au nombre desquels figurent, entre autres, l'évaluation des risques qui ne peuvent pas être évités, la planification de la prévention en y intégrant, notamment, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales, et la prise de mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle.
37. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions qu'il incombe à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'homologation d'un document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi, de vérifier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, le respect, par l'employeur, de ses obligations en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. A ce titre, il lui revient de contrôler tant la régularité de l'information et de la consultation des institutions représentatives du personnel que les mesures auxquelles l'employeur est tenu en application de l'article L. 4121-1 du code du travail au titre des modalités d'application de l'opération projetée, ce contrôle n'étant pas séparable du contrôle auquel elle est tenue en application des articles du même code cités aux points 12 et 32.
38. En premier lieu, il découle de ce qui a été dit au point 37 qu'il incombe à l'administration, dans le cadre de son contrôle global de la régularité de la procédure d'information et de consultation, de vérifier que l'employeur a adressé au comité social et économique, avec la convocation à sa première réunion, ainsi que, le cas échéant, en réponse à des demandes exprimées par le comité ou à des observations ou des injonctions formulées par l'administration, parmi tous les éléments utiles qu'il doit lui transmettre pour qu'il formule ses deux avis en toute connaissance de cause, des éléments relatifs à l'identification et à l'évaluation des conséquences de la réorganisation de l'entreprise sur la santé ou la sécurité des travailleurs, ainsi que, en présence de telles conséquences, les actions projetées pour les prévenir et en protéger les travailleurs, de façon à assurer leur sécurité et protéger leur santé physique et mentale.
39. En second lieu, il appartient à l'administration, dans le cadre du contrôle du contenu du document unilatéral lui étant soumis en vue de son homologation, de vérifier, au vu de ces éléments d'identification et d'évaluation des risques, des débats qui se sont déroulés au sein du comité d'entreprise ou désormais du comité social et économique, des échanges d'informations et des observations et injonctions éventuelles formulées lors de l'élaboration du plan de sauvegarde de l'emploi, dès lors qu'ils conduisent à retenir que la réorganisation présente des risques pour la santé ou la sécurité des travailleurs, si l'employeur a arrêté des actions pour y remédier et si celles-ci correspondent à des mesures précises et concrètes, au nombre de celles prévues aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, qui, prises dans leur ensemble, sont, au regard de ces risques, propres à les prévenir et à en protéger les travailleurs.
40. D'une part, si les requérants critiquent la méthode d'évaluation de la charge de travail dans l'organisation cible du projet de réorganisation, l'absence d'évaluation des risques durant la période transitoire, au motif que les documents uniques d'évaluation des risques professionnels n'ont pas été actualisés dès le début du projet de réorganisation, et la présentation tardive, au comité social et économique, des formations liées au projet de réorganisation, de telles circonstances ne sont pas, eu égard à ce qui a été dit au point 39, à elles seules, de nature à entacher d'illégalité la décision attaquée.
41. D'autre part, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 38 de leur jugement, d'écarter le moyen tiré de ce que la décision attaquée est illégale au motif que le document unilatéral homologué ne comportait pas les mesures propres à prévenir les risques pour la santé ou la sécurité des travailleurs présentés par la réorganisation et à en protéger les travailleurs.
42. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 27 juillet 2021, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mars 2021 par laquelle le DIRECCTE d'Ile de France a homologué le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Gazel Energie Génération.
43. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CSE de la société Gazel Energie Génération et autres la somme que demande la société Gazel Energie Génération en cassation et en appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat et de la société Gazel Energie Génération qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes.
D E C I D E :
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Article 1er : Il est donné acte du désistement de Mme AI... BD....
Article 2 : L'arrêt n° 21VE02342 du 20 octobre 2021 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.
Article 3 : La requête présentée par le CSE de la société Gazel Energie Génération et autres devant la cour administrative d'appel de Versailles est rejetée.
Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi du CSE de la société Gazel Energie Génération et autres est rejeté.
Article 5 : Les conclusions présentées en cassation et en appel par la société Gazel Energie Génération et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée au comité social et économique de la société Gazel Energie Génération, représentant désigné, pour l'ensemble des requérants, à la société Gazel Energie Génération et à la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Délibéré à l'issue de la séance du 18 mars 2024 où siégeaient : M. Jacques Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, M. Alban de Nervaux, Mme Célia Verot, M. Jean-Dominique Langlais, conseillers d'Etat ; Mme Catherine Brouard-Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire et Mme Thalia Breton, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 12 avril 2024.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
La rapporteure :
Signé : Mme Thalia Breton
Le secrétaire :
Signé : M. Christophe Bouba
N° 459650
ECLI:FR:CECHR:2024:459650.20240412
Mentionné aux tables du recueil Lebon
4ème - 1ère chambres réunies
M. Jacques-Henri Stahl, président
Mme Thalia Breton, rapporteur
M. Raphaël Chambon, rapporteur public
SCP FOUSSARD, FROGER, avocats
Lecture du vendredi 12 avril 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Le comité social et économique (CSE) de la société Gazel Energie Génération, le syndicat CGT de la centrale de Gardanne, le syndicat CGT des mineurs et énergéticiens du Douaisis et environs, le syndicat CGT Mines énergies de Saône-et-Loire, le syndicat CGT de la centrale Emile Huchet, l'union départementale CGT des Bouches-du-Rhône, la fédération nationale des mines et de l'énergie CGT, la fédération chimie-énergie CFDT, la fédération CFE-CGC Energies, la fédération FO Energie et mines, M. AN... AK..., M. BA... BK..., M. K... AM..., M. Q... AO..., M. AZ... AP..., M. G... O..., M. BA... X..., M. A... Y..., M. BG... P..., M. BO... P..., M. BH... AQ..., M. AB... BL..., M. AY... BR..., M. BB... BM..., M. H... AR..., M. BE... BV..., M. AL... D..., M. E... D..., M. CC..., M. BF... F..., M. AX... AU..., M. Z... BS..., M. S... AV..., M. BQ... AE..., M. Q... AF..., M. N... B..., M. BW... BP..., M. Z... I..., M. AT... C..., M. BQ... AH..., M. AG... T..., M. BT... T..., M. U... BC..., M. CB... AJ..., M. BA... BX..., Mme AI... BD..., M. W... J..., M. E... BE..., M. CA... BY..., M. Q... BU..., M. BN... L..., M. AA... V..., M. AS... M..., M. AD... BI..., M. AC... BZ... et M. R... BJ... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 31 mars 2021 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi de la société Gazel Energie Génération. Par un jugement n° 2106055 du 27 juillet 2021, le tribunal administratif a rejeté leur demande.
Par un arrêt n° 21VE02342 du 20 octobre 2021, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté leur appel contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et cinq autres mémoires, enregistrés les 20 décembre 2021, 21 mars et 1er juin 2022 et 26 mai, 7 juin, 24 novembre et 27 décembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le comité social et économique (CSE) de la société Gazel Energie Génération, le syndicat CGT de la centrale de Gardanne, l'union départementale CGT des Bouches-du-Rhône, la fédération nationale des mines et de l'énergie CGT, M. AN... AK..., M. K... AM..., M. AZ... AP..., M. G... O..., M. BA... X..., M. AB... BL..., M. BB... BM..., M. H... AR..., M. BE... BV..., M. AL... D..., M. E... D..., M. CC..., M. S... AV..., M. BQ... AE..., M. Q... AW... M. BQ... AH..., M. U... BC..., M. CB... AJ..., Mme AI... BD..., M. W... J..., M. CA... BY..., M. Q... BU..., M. BN... L..., M. AS... M..., M. AC... BZ... et M. R... BJ... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;
3°) de mettre solidairement à la charge de l'Etat et de la société Gazel Energie Génération la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'énergie ;
- le code du travail ;
- la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 ;
- l'ordonnance n° 2020-921 du 29 juillet 2020 ;
- le décret n° 2021-297 du 18 mars 2021 ;
- le code de justice administrative ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 20 mars 2024, présentée par le comité social et économique (CSE) de la société Gazel Energie Génération et autres ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Thalia Breton, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat du comité social et économique de la société Gazel Energie Génération et autres et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société Gazel Energie Génération ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 31 mars 2021, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi de la société Gazel Energie Génération, qui a en charge la gestion de centrales de production d'électricité en France (gaz, charbon, énergies renouvelables) et la fourniture de l'électricité, ce plan prévoyant la suppression de 219 postes pouvant conduire à un maximum de 132 licenciements pour motif économique sur plusieurs sites de l'entreprise, dont celui de Gardanne (Bouches-du-Rhône), et 87 départs volontaires sur le site d'Emile Huchet à Saint-Avold (Moselle). Par un jugement du 27 juillet 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté la demande du comité social et économique (CSE), d'organisations syndicales et de salariés de la société Gazel Energie Génération tendant à l'annulation de cette décision. Par un arrêt du 20 octobre 2021, contre lequel le CSE de la société Gazel Energie Génération et autres se pourvoient en cassation, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté leur appel contre ce jugement.
Sur le désistement de Mme AI... BD... :
2. Le désistement de Mme AI... BD... est pur et simple. Rien ne s'oppose à ce qu'il en soit donné acte.
Sur le pourvoi :
3. D'une part, aux termes de l'article L. 1233-5 du code du travail : " Lorsque l'employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l'absence de convention ou accord collectif applicable, il définit les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements, après consultation du comité social et économique. / Ces critères prennent notamment en compte : / 1°Les charges de famille, en particulier celles de parents isolés : 2°/ L'ancienneté de service dans l'établissement ou l'entreprise ; 3°/ La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés ; / 4°/ Les qualités professionnelles appréciées par catégorie. / L'employeur peut privilégier un de ces critères, à condition de tenir compte de l'ensemble des autres critères prévus au présent article. / Le périmètre d'application des critères d'ordres des licenciements peut être fixé par un accord collectif. / En l'absence d'un tel accord, ce périmètre ne peut être inférieur à celui de chaque zone d'emploi dans laquelle sont situés un ou plusieurs établissements de l'entreprise concernés par les suppressions d'emploi. / Les conditions d'application de l'avant-dernier alinéa du présent article sont définies par décret ".
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 1233-24-2 du code du travail : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63. / Il peut également porter sur : / 1° Les modalités d'information et de consultation du comité social économique (...) ; / 2° La pondération et le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements mentionnés à l'article L. 1233-5 ; / 3° Le calendrier des licenciements ; / 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées ; (...) ". L'article 1233-57-3 du même code prévoit qu'en l'absence d'accord collectif, ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 (...) ".
5. En vertu de ces dispositions, en premier lieu, il appartient à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi, de s'assurer, en l'absence d'accord collectif ayant fixé les critères d'ordre des licenciements, que le document unilatéral recourt aux quatre critères mentionnés à l'article L. 1233 5 du code du travail, cité au point 3. A cet égard, tel n'est pas le cas s'il prévoit, pour un ou plusieurs des critères d'ordre légaux, d'affecter la même valeur pour tous les salariés, empêchant ainsi par avance que ce ou ces critères puissent être effectivement pris en compte au stade de la détermination de l'ordre des licenciements.
6. En second lieu, il incombe à l'administration de contrôler que les éléments, déterminés par l'employeur, sur la base desquels ces critères seront mis en oeuvre pour déterminer l'ordre des licenciements, ne sont ni discriminatoires, ni dépourvus de rapport avec l'objet même de ces critères. L'administration prend en compte à cet effet l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment les échanges avec les représentants du personnel au cours de la procédure d'information et de consultation préalable à l'adoption du document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi, ainsi que les justifications objectives et vérifiables fournies par l'employeur.
7. A ce titre, s'agissant du critère d'ordre relatif aux qualités professionnelles, dont les éléments d'appréciation, à la différence de ceux des autres critères d'ordre, peuvent différer selon les catégories professionnelles définies par le plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient en particulier à l'administration de vérifier que les éléments d'appréciation de ce critère, retenus par l'employeur, ne sont pas insusceptibles de permettre de prendre en compte les qualités professionnelles des salariés de la ou des catégories professionnelles afférentes et n'ont pas été définis dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou à leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée. A cet égard, les résultats de l'évaluation professionnelle des salariés, lorsqu'ils existent, sont au nombre des éléments d'appréciation du critère d'ordre relatif aux qualités professionnelles qui peuvent être utilement retenus par l'employeur.
8. Il ressort des pièces de la procédure devant la cour administrative d'appel de Versailles que, dans leur requête d'appel, le CSE de la société Gazel Energie Génération et autres ont soulevé le moyen tiré de ce que la décision attaquée était illégale au motif que les éléments d'appréciation du critère d'ordre relatif aux qualités professionnelles retenus par l'employeur, à savoir, d'une part, la mobilité géographique, d'autre part, la mobilité professionnelle, étaient dépourvus de rapport avec l'objet de ce critère d'ordre. Or, il ressort des termes de l'arrêt attaqué que la cour n'a pas répondu à ce moyen, qui n'était pas inopérant. Son arrêt est, par suite, insuffisamment motivé.
9. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de leur pourvoi, le CSE de la société Gazel Energie Génération et autres sont fondés à demander pour ce motif l'annulation de l'arrêt du 20 octobre 2022 de la cour administrative d'appel de Versailles.
Sur la requête d'appel :
10. Le délai de trois mois imparti à la cour administrative d'appel pour statuer par les dispositions de l'article L. 1235-7-1 du code du travail étant expiré, il y a lieu pour le Conseil d'Etat, en application des mêmes dispositions, de statuer immédiatement sur l'appel formé par le CSE de la société Gazel Energie Génération et autres contre le jugement du 27 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision d'homologation du 31 mars 2021.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'illégalité de la décision attaquée en tant qu'elle a été prise par une autorité incompétente :
11. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 4 de leur jugement, d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée.
En ce qui concerne les moyens tirés de l'illégalité de la décision attaquée en tant qu'elle est relative au contrôle de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique de la société Gazel Energie Génération :
12. D'une part, aux termes de l'article L. 1233-57-3 du code du travail : " En l'absence d'accord collectif (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (...) la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique (...) ".
13. D'autre part, il résulte des dispositions de l'article L. 1233-28 du code du travail que l'employeur qui envisage de procéder à un licenciement collectif pour motif économique d'au moins dix salariés dans une même période de trente jours doit réunir et consulter le comité social et économique. A ce titre, le I de l'article L. 1233-30 du même code dispose, s'agissant des entreprises ou établissements qui emploient habituellement au moins cinquante salariés, que : " (...) l'employeur réunit et consulte le comité social et économique sur : / 1° L'opération projetée et ses modalités d'application, conformément à l'article L. 2323-31 ; / 2° Le projet de licenciement collectif : le nombre de suppressions d'emploi, les catégories professionnelles concernées, les critères d'ordre et le calendrier prévisionnel des licenciements, les mesures sociales d'accompagnement prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi et, le cas échéant, les conséquences des licenciements projetés en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail. (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-31 du même code : " L'employeur adresse aux représentants du personnel, avec la convocation à la première réunion, tous renseignements utiles sur le projet de licenciement collectif. / Il indique : / 1° La ou les raisons économiques, financières ou techniques du projet de licenciement ; / 2° Le nombre de licenciements envisagé ; / 3° Les catégories professionnelles concernées et les critères proposés pour l'ordre des licenciements ; / 4° Le nombre de salariés, permanents ou non, employés dans l'établissement ; / 5° Le calendrier prévisionnel des licenciements ; / 6° Les mesures de nature économique envisagées ; / 7° Le cas échéant, les conséquences de la réorganisation en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail ".
14. Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article L. 1233-34 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, le comité social et économique peut, le cas échéant sur proposition des commissions constituées en son sein, décider, lors de la première réunion prévue à l'article L. 1233-30, de recourir à une expertise pouvant porter sur les domaines économique et comptable ainsi que sur la santé, la sécurité ou les effets potentiels du projet sur les conditions de travail ". Aux termes de l'article L. 1233-35 du même code : " L'expert désigné par le comité social et économique demande à l'employeur, dans les dix jours à compter de sa désignation, toutes les informations qu'il juge nécessaires à la réalisation de sa mission. L'employeur répond à cette demande dans les huit jours. Le cas échéant, l'expert demande, dans les dix jours, des informations complémentaires à l'employeur, qui répond à cette demande dans les huit jours à compter de la date à laquelle la demande de l'expert est formulée ".
15. Il résulte des dispositions citées aux points 12 à 14 que, lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail et fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'administration de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que la procédure d'information et de consultation du comité social et économique a été régulière. Elle ne peut légalement accorder l'homologation demandée que si le comité a été mis à même d'émettre régulièrement un avis, d'une part sur l'opération projetée et ses modalités d'application et, d'autre part, sur le projet de licenciement collectif et le plan de sauvegarde de l'emploi. Il appartient à ce titre à l'administration de s'assurer que l'employeur a adressé au comité social et économique, avec la convocation à sa première réunion, ainsi que, le cas échéant, en réponse à des demandes exprimées par le comité, tous les éléments utiles pour qu'il formule ses deux avis en toute connaissance de cause. En outre, lorsque le comité social et économique a décidé de recourir à l'assistance d'un expert en application des dispositions de l'article L. 1233-34 du code du travail, il appartient à l'administration de s'assurer que l'expert a pu exercer sa mission dans des conditions permettant au comité social et économique de disposer de tous les éléments utiles pour formuler ses deux avis en toute connaissance de cause.
16. En premier lieu, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 10 à 12 de leur jugement, d'écarter le moyen tiré de l'illégalité de la décision attaquée au motif que le CSE n'aurait pas disposé des éléments utiles pour qu'il formule ses avis en toute connaissance de cause.
17. En second lieu, aux termes de l'article L. 1233-33 du code du travail : " L'employeur met à l'étude, dans le délai prévu à l'article L. 1233-30, les suggestions relatives aux mesures sociales envisagées et les propositions alternatives au projet de restructuration mentionné à l'article L. 2323-31 formulées par le comité social et économique. Il leur donne une réponse motivée ". Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail et fixant le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'administration, dans le cadre de son contrôle global de la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique prévu par les dispositions de l'article L. 1233-57-3 citées au point 12, de vérifier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que l'employeur, d'une part, a étudié les suggestions et propositions formulées par le CSE, d'autre part, y a formulé, par tout moyen, une réponse motivée. Il ne lui appartient pas, en revanche, de porter une appréciation sur la pertinence de la réponse donnée par l'employeur à ces suggestions et propositions au regard de la situation de l'entreprise.
18. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que le CSE de la société Gazel Energie Génération a présenté, lors de sa réunion du 27 novembre 2020, des propositions alternatives au projet de restructuration engagée par la société Gazel Energie Génération, d'autre part, qu'en application des dispositions de l'article L. 1233-33 citées au point 17, ces propositions ont été étudiées par l'employeur, qui y a donné une réponse motivée, d'abord lors d'une réunion du CSE du 8 décembre 2020, ensuite par un document intitulé " Analyse des projets industriels alternatifs ", présenté à la réunion du CSE du 14 janvier 2021, indiquant les raisons pour lesquelles ces projets ne sont, selon lui, pas soutenables sur le plan économique, ni opérationnels, et permettant au CSE de disposer de tous les éléments utiles pour formuler ses deux avis en toute connaissance de cause. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la décision qu'ils attaquent, qui, eu égard à ce qui a été dit au point 17, n'avait pas à porter une appréciation sur la pertinence des réponses formulées par la société Gazel Energie Génération aux propositions du CSE, serait illégale au motif que l'employeur a méconnu les dispositions de l'article L. 1233-33 du code du travail.
En ce qui concerne les moyens tirés de l'illégalité de la décision attaquée en tant qu'elle est relative au contrôle de la définition des critères d'ordre des licenciements :
19. En premier lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, citées au point 4, que, lorsqu'elle est saisie par un employeur d'une demande d'homologation d'un document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, il appartient à l'administration de vérifier la conformité du contenu de ce document aux dispositions légales et conventionnelles applicables relatives aux critères d'ordre. Il ne lui revient pas, en revanche, de faire porter son contrôle sur les modalités d'application de ces critères au stade des licenciements individuels, dont il n'appartient qu'au juge du licenciement, le cas échéant ultérieurement saisi, d'apprécier le bien-fondé.
20. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que les requérants ne peuvent utilement soutenir que la décision qu'ils attaquent serait illégale en tant qu'elle porte sur le contrôle de la définition des critères d'ordre des licenciements au motif que l'employeur a entendu contourner l'application des critères d'ordre par la création d'un poste de technicien de gestion des procédés alors qu'il prévoyait la suppression de quatre postes de technicien de laboratoire et par l'embauche, par une autre société du groupe auquel appartient la société Gazel Energie Génération, d'un responsable des ressources humaines.
21. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi prévoit, en son chapitre 4, que les critères d'ordre retenus par l'employeur sont les quatre critères mentionnés par l'article L. 1233-5 du code du travail cité au point 3. S'agissant du critère des qualités professionnelles appréciées par catégorie professionnelle, ce même document prévoit qu'il sera apprécié, d'une part, pour les catégories professionnelles composées exclusivement de cadres, sur la base des évaluations professionnelles des années 2017 à 2019, d'autre part, pour les catégories professionnelles pour lesquelles les évaluations annuelles ne peuvent pas être utilisées, c'est-à-dire les catégories professionnelles composées de non-cadres ou à la fois de salariés cadres et non cadres, " en fonction du nombre de mobilités géographiques et/ou fonctionnelles des salariés " réalisées au sein de l'entreprise. Enfin, ce document prévoit que deux points seront attribués aux salariés relevant de ces dernières catégories professionnelles ayant réalisé au moins une mobilité géographique au cours de leur parcours professionnel dans l'entreprise, qu'un point sera attribué aux salariés ayant réalisé au moins une mobilité professionnelle et qu'un demi-point sera attribué aux salariés n'ayant réalisé aucune de ces mobilités, les points obtenus en cas de cumul d'une mobilité géographique et d'une mobilité fonctionnelle pouvant s'additionner.
22. D'une part, il ne résulte d'aucune règle ni d'aucun principe que le critère d'ordre relatif aux qualités professionnelles doit être apprécié en prenant en compte au moins deux indicateurs distincts. Par suite, les requérants ne peuvent utilement soutenir que la décision qu'ils attaquent serait illégale au motif que le document unilatéral homologué ne prévoirait qu'un seul élément d'appréciation de ce critère d'ordre. Au demeurant, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 21, que ce document prévoit l'appréciation de ce critère au regard de deux indicateurs distincts, la mobilité géographique d'une part, la mobilité professionnelle d'autre part, chacun de ces éléments permettant d'obtenir des points pouvant s'additionner si un salarié a réalisé à la fois au moins une mobilité géographique et au moins une mobilité fonctionnelle au sein de l'entreprise.
23. D'autre part, d'abord, s'agissant de l'argumentation des requérants selon laquelle les éléments d'appréciation du critère d'ordre des qualités professionnelles retenus par l'employeur seraient constitutifs d'une discrimination indirecte, aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail : " (...) aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations (...), en raison (...) de sa situation de famille (...), de ses activités syndicales (...) ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations : " Constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs mentionnés au premier alinéa, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés ".
24. Si les requérants soutiennent que certains salariés, en particulier les salariés titulaires d'un mandat syndical et les salariés ayant des enfants en garde partagée ou qui s'occupent d'un proche âgé dépendant, sont moins en mesure que les autres salariés de réaliser une mobilité géographique ou professionnelle et qu'un tel désavantage particulier serait susceptible de caractériser une discrimination indirecte, soit en raison des activités syndicales, soit en raison de la situation de famille, au sens des dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail citées au point 23, les requérants n'apportent, à l'appui de leur moyen, qui ne fait l'objet que d'une argumentation générale, aucun élément de fait, et, en particulier, aucun élément propre aux salariés de l'entreprise dont le licenciement est envisagé qui permettrait de retenir que certains de ces salariés seraient ou auraient été dans une situation faisant obstacle à la réalisation d'une mobilité.
25. Ensuite, si les requérants soutiennent que les éléments d'appréciation qui ont été retenus pour le critère d'ordre relatif aux qualités professionnelles sont sans rapport avec l'objet de ce critère d'ordre, la prise en compte de l'accomplissement d'une mobilité géographique ou professionnelle n'est, par elle-même, pas insusceptible de rendre compte de qualités professionnelles et, en l'espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'administration ait entaché sa décision d'illégalité en estimant que, pour celles des catégories professionnelles dont la liste a été produite au cours de l'instruction contradictoire par l'employeur et par l'administration, de tels éléments n'étaient pas sans rapport avec l'appréciation des qualités professionnelles des salariés en relevant, notamment s'agissant de leur faculté d'adaptation aux évolutions de l'entreprise.
26. Par suite, le moyen tiré de l'illégalité de la décision attaquée au motif que le plan de sauvegarde de l'emploi aurait méconnu les dispositions de l'article L. 1233-5 du code du travail doit être écarté.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'illégalité de la décision attaquée en tant qu'elle est relative au contrôle de la définition des catégories professionnelles :
27. L'article L. 1233-57-3 du code du travail prévoit qu'en l'absence d'accord collectif, ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 (...) ", le 4° de cet article étant relatif au nombre des suppressions d'emploi et aux catégories professionnelles concernées.
28. En vertu de ces dispositions, il appartient à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document qui fixe les catégories professionnelles mentionnées au 4° de l'article L. 1233-24-2, de s'assurer, au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment des échanges avec le comité social et économique au cours de la procédure d'information et de consultation ainsi que des justifications qu'il appartient à l'employeur de fournir, que ces catégories regroupent, en tenant compte des acquis de l'expérience professionnelle qui excèdent l'obligation d'adaptation qui incombe à l'employeur, l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune. Au terme de cet examen, l'administration refuse l'homologation demandée s'il apparaît que les catégories professionnelles concernées par le licenciement ont été déterminées par l'employeur en se fondant sur des considérations, telles que l'organisation de l'entreprise ou l'ancienneté des intéressés, qui sont étrangères à celles qui permettent de regrouper, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou s'il apparaît qu'une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée.
29. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 23 à 27 de leur jugement, d'écarter le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait illégale au motif que les catégories professionnelles retenues par l'employeur n'ont pas été valablement définies dans le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi.
En ce qui concerne les moyens tirés de la rupture de l'égalité de traitement entre salariés :
30. En premier lieu, les requérants ne peuvent utilement soutenir que la décision d'homologation qu'ils attaquent serait illégale au motif que le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi ne prévoit pas que les salariés des sites d'Hornaing et de Lucy, dont l'activité des " tranches charbon " a cessé en 2013 et en 2014, bénéficient des mesures prévues par l'ordonnance n° 2020-921 du 29 juillet 2020 et du décret n° 2021-297 du 18 mars 2021 pris pour son application, dès lors qu'il résulte des dispositions de l'article 1er de cette ordonnance et du II de l'article L. 311-5-3 du code de l'énergie que ces mesures ne sont applicables qu'aux installations cessant leur activité à compter du 1er janvier 2022.
31. En deuxième lieu, les requérants ne sont, en tout état de cause, pas fondés à soutenir que la décision attaquée serait illégale au motif, d'une part, que le document unilatéral homologué méconnaîtrait le principe d'égalité entre, d'une part, les salariés du site de Saint-Avold, pour lesquels le plan de sauvegarde de l'emploi ne prévoit qu'un plan de départs volontaires, et, d'autre part, les salariés des autres sites de la société Gazel Energie Génération, pour lesquels le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des licenciements au cas où les départs volontaires et les mesures de reclassement interne ne permettraient pas de les éviter, d'autre part, que le plan de sauvegarde de l'emploi ne pouvait valablement, au regard du principe d'égalité, ouvrir le bénéfice de certaines mesures aux seuls salariés volontaires au départ.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'illégalité de la décision attaquée en tant qu'elle porte sur le caractère suffisant du plan de sauvegarde de l'emploi :
32. En premier lieu, s'agissant du plan de sauvegarde de l'emploi devant précéder les licenciements pour motif économique de plus de dix salariés, aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement sur le territoire national des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-62 du même code : " Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des mesures telles que : / 1° Des actions en vue du reclassement interne sur le territoire national, des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; / 1° bis Des actions favorisant la reprise de tout ou partie des activités en vue d'éviter la fermeture d'un ou de plusieurs établissements ; / 2° Des créations d'activités nouvelles par l'entreprise ; / 3° Des actions favorisant le reclassement externe à l'entreprise, notamment par le soutien à la réactivation du bassin d'emploi ; / 4 Des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés ; / 5° Des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externe des salariés sur des emplois équivalents ; / 6 Des mesures de réduction ou d'aménagement du temps de travail ainsi que des mesures de réduction du volume des heures supplémentaires réalisées de manière régulière lorsque ce volume montre que l'organisation du travail de l'entreprise est établie sur la base d'une durée collective manifestement supérieure à trente-cinq heures hebdomadaires ou 1 600 heures par an et que sa réduction pourrait préserver tout ou partie des emplois dont la suppression est envisagée ". En vertu de l'article L. 1233-57-3 du même code, l'autorité administrative homologue le document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi, avoir notamment vérifié " le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1 ".
33. Il résulte de l'ensemble des dispositions citées au point 32 que, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, il appartient à l'administration, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier la conformité de ce document et du plan de sauvegarde de l'emploi dont il fixe le contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles applicables, en s'assurant notamment du respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des dispositions des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du même code. A ce titre, elle doit, au regard de l'importance du projet de licenciement, apprécier si les mesures contenues dans le plan sont précises et concrètes et si, à raison, pour chacune, de sa contribution aux objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés, elles sont, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire à ces objectifs compte tenu, d'une part, des efforts de formation et d'adaptation déjà réalisés par l'employeur et, d'autre part, des moyens dont disposent l'entreprise et, le cas échéant, l'unité économique et sociale et le groupe.
34. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 51 de leur jugement, d'écarter le moyen tiré de ce que la décision attaquée serait illégale au motif que le plan de sauvegarde de l'emploi est insuffisant au regard des moyens du groupe EPH auquel appartient la société Gazel Energie Génération.
En ce qui concerne les moyens tirés de l'illégalité de la décision attaquée en tant qu'elle porte sur le contrôle du respect par l'employeur de ses obligations en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs :
35. D'une part, aux termes de l'article L. 1233-57-3 du code du travail : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié (...) le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / (...) 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1 (...) ".
36. D'autre part, aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. / Ces mesures comprennent : / 1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ; / 2° Des actions d'information et de formation ; / 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. / L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ". En vertu de l'article L. 4121-2 du même code, l'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L. 4121-1 sur le fondement de principes généraux de prévention, au nombre desquels figurent, entre autres, l'évaluation des risques qui ne peuvent pas être évités, la planification de la prévention en y intégrant, notamment, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales, et la prise de mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle.
37. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions qu'il incombe à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'homologation d'un document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi, de vérifier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, le respect, par l'employeur, de ses obligations en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. A ce titre, il lui revient de contrôler tant la régularité de l'information et de la consultation des institutions représentatives du personnel que les mesures auxquelles l'employeur est tenu en application de l'article L. 4121-1 du code du travail au titre des modalités d'application de l'opération projetée, ce contrôle n'étant pas séparable du contrôle auquel elle est tenue en application des articles du même code cités aux points 12 et 32.
38. En premier lieu, il découle de ce qui a été dit au point 37 qu'il incombe à l'administration, dans le cadre de son contrôle global de la régularité de la procédure d'information et de consultation, de vérifier que l'employeur a adressé au comité social et économique, avec la convocation à sa première réunion, ainsi que, le cas échéant, en réponse à des demandes exprimées par le comité ou à des observations ou des injonctions formulées par l'administration, parmi tous les éléments utiles qu'il doit lui transmettre pour qu'il formule ses deux avis en toute connaissance de cause, des éléments relatifs à l'identification et à l'évaluation des conséquences de la réorganisation de l'entreprise sur la santé ou la sécurité des travailleurs, ainsi que, en présence de telles conséquences, les actions projetées pour les prévenir et en protéger les travailleurs, de façon à assurer leur sécurité et protéger leur santé physique et mentale.
39. En second lieu, il appartient à l'administration, dans le cadre du contrôle du contenu du document unilatéral lui étant soumis en vue de son homologation, de vérifier, au vu de ces éléments d'identification et d'évaluation des risques, des débats qui se sont déroulés au sein du comité d'entreprise ou désormais du comité social et économique, des échanges d'informations et des observations et injonctions éventuelles formulées lors de l'élaboration du plan de sauvegarde de l'emploi, dès lors qu'ils conduisent à retenir que la réorganisation présente des risques pour la santé ou la sécurité des travailleurs, si l'employeur a arrêté des actions pour y remédier et si celles-ci correspondent à des mesures précises et concrètes, au nombre de celles prévues aux articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, qui, prises dans leur ensemble, sont, au regard de ces risques, propres à les prévenir et à en protéger les travailleurs.
40. D'une part, si les requérants critiquent la méthode d'évaluation de la charge de travail dans l'organisation cible du projet de réorganisation, l'absence d'évaluation des risques durant la période transitoire, au motif que les documents uniques d'évaluation des risques professionnels n'ont pas été actualisés dès le début du projet de réorganisation, et la présentation tardive, au comité social et économique, des formations liées au projet de réorganisation, de telles circonstances ne sont pas, eu égard à ce qui a été dit au point 39, à elles seules, de nature à entacher d'illégalité la décision attaquée.
41. D'autre part, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 38 de leur jugement, d'écarter le moyen tiré de ce que la décision attaquée est illégale au motif que le document unilatéral homologué ne comportait pas les mesures propres à prévenir les risques pour la santé ou la sécurité des travailleurs présentés par la réorganisation et à en protéger les travailleurs.
42. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 27 juillet 2021, qui est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mars 2021 par laquelle le DIRECCTE d'Ile de France a homologué le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Gazel Energie Génération.
43. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CSE de la société Gazel Energie Génération et autres la somme que demande la société Gazel Energie Génération en cassation et en appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat et de la société Gazel Energie Génération qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes.
D E C I D E :
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Article 1er : Il est donné acte du désistement de Mme AI... BD....
Article 2 : L'arrêt n° 21VE02342 du 20 octobre 2021 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.
Article 3 : La requête présentée par le CSE de la société Gazel Energie Génération et autres devant la cour administrative d'appel de Versailles est rejetée.
Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi du CSE de la société Gazel Energie Génération et autres est rejeté.
Article 5 : Les conclusions présentées en cassation et en appel par la société Gazel Energie Génération et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée au comité social et économique de la société Gazel Energie Génération, représentant désigné, pour l'ensemble des requérants, à la société Gazel Energie Génération et à la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Délibéré à l'issue de la séance du 18 mars 2024 où siégeaient : M. Jacques Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, M. Alban de Nervaux, Mme Célia Verot, M. Jean-Dominique Langlais, conseillers d'Etat ; Mme Catherine Brouard-Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire et Mme Thalia Breton, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 12 avril 2024.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
La rapporteure :
Signé : Mme Thalia Breton
Le secrétaire :
Signé : M. Christophe Bouba