Conseil d'État
N° 459339
ECLI:FR:CECHR:2023:459339.20231218
Mentionné aux tables du recueil Lebon
6ème - 5ème chambres réunies
M. Pierre Collin, président
M. Cédric Fraisseix, rapporteur
M. Nicolas Agnoux, rapporteur public
SCP GURY & MAITRE, avocats
Lecture du lundi 18 décembre 2023
Vu les procédures suivantes :
La société Centrale éolienne Vexin a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2015 par lequel le préfet de l'Eure a refusé de l'autoriser à exploiter un parc de six éoliennes et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Puchay (Eure). Par un jugement n° 1504115 du 30 mars 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 17DA01091 du 9 mai 2019, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel de la société Centrale éolienne Vexin, d'une part, annulé le jugement du tribunal administratif du 30 mars 2017 et l'arrêté du préfet de l'Eure du 21 octobre 2015 et, d'autre part, enjoint au préfet de procéder au réexamen de la demande d'autorisation d'exploitation dans un délai de deux mois.
Par un arrêté du 29 juillet 2019, le préfet de l'Eure, après avoir réexaminé la demande en exécution de l'arrêt de la cour administrative d'appel du 9 mai 2019, a refusé l'autorisation d'exploiter les six éoliennes et le poste de livraison. La société Centrale éolienne Vexin a demandé à la cour administrative d'appel de Douai d'annuler ce refus, et de lui accorder l'autorisation assortie de prescriptions ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de lui délivrer cette autorisation.
Par un arrêt n° 19DA02392 du 26 octobre 2021, la cour administrative d'appel de Douai a, après avoir admis l'intervention de l'association pour la défense des habitants du Vexin normand (ALIANSE), annulé l'arrêté préfectoral du 29 juillet 2019, accordé à la société Centrale éolienne Vexin l'autorisation demandée et enjoint au préfet de l'Eure d'assortir cette dernière, dans un délai de six mois, de toutes les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement.
1° Sous le n° 459339, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 décembre 2021 et 21 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association pour la défense des habitants du Vexin normand (ALIANSE) demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 26 octobre 2021 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de la société Centrale éolienne Vexin ;
3°) de mettre à la charge de la société Centrale éolienne Vexin la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 460192, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 6 janvier et 7 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre de la transition écologique demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt de la cour administrative d'appel du 26 octobre 2021.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ;
- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;
- le décret n° 2017-81 du 26 janvier 2017 ;
- le décret n° 2017-82 du 26 janvier 2017 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de l'association pour la défense des habitants du Vexin normand et à la SCP Gury et Maître, avocat de la sociétés Centrale éolienne Vexin ;
Vu, sous le n° 459339, la note en délibéré, enregistrée le 22 novembre 2023, présentée par l'association ALIANSE ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Centrale éolienne Vexin a déposé, le 22 octobre 2013, trois demandes de permis de construire portant respectivement sur la construction de cinq éoliennes E1 à E5, d'une éolienne E6 et d'un poste de livraison, sur le territoire de la commune de Puchay (Eure). Cette société a également déposé, le 23 octobre 2013, une demande d'autorisation d'exploiter au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement portant sur le parc éolien composé des six éoliennes et du poste de livraison. Par un arrêté du 21 octobre 2015, le préfet de l'Eure a rejeté la demande d'autorisation d'exploiter au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement. Par un arrêt du 9 mai 2019, rendu sur l'appel formé par la société Centrale éolienne Vexin, la cour administrative d'appel de Douai a, d'une part, annulé le jugement du 30 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen avait rejeté la demande de cette société tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 21 octobre 2015 et annulé cet arrêté et, d'autre part, enjoint au préfet de réexaminer la demande de cette société. L'association pour la défense des habitants du Vexin normand (ALIANSE) et la ministre de la transition écologique se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 26 octobre 2021 par lequel la cour administrative de Douai a, d'une part, annulé l'arrêté du 29 juillet 2019 du préfet de l'Eure refusant, après avoir réexaminé la demande en exécution de l'arrêt du 9 mai 2019, de délivrer l'autorisation d'exploiter sollicitée et, d'autre part, délivré cette autorisation, en enjoignant au préfet de l'assortir de toutes les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts visés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement.
2. En premier lieu, d'une part, selon l'article L. 512-1 du code de l'environnement, figurant au chapitre II du titre Ier du livre V de ce code, dans sa rédaction applicable à la date à laquelle la demande en litige a été déposée : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. / L'autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral (...) ".
3. D'autre part, selon l'article L. 181-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale : " L'autorisation environnementale (...) est applicable aux activités, installations, ouvrages et travaux suivants, lorsqu'ils ne présentent pas un caractère temporaire : / (...) 2° Installations classées pour la protection de l'environnement mentionnées à l'article L. 512-1 (...) ". Aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 précitée : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre (...) du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance, ou au titre de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 (...), avant le 1er mars 2017, (...) sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessité ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état ; / 2° Les demandes d'autorisation au titre (...) du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, ou de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 (...) régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 18 de l'ordonnance du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement : " I. - Le demandeur qui a déposé une demande de permis, d'autorisation (...) mentionnée aux articles 2 et 10, pour laquelle l'autorité administrative compétente n'a pas rendu de décision avant l'entrée en vigueur de la présente ordonnance, peut déposer une demande d'autorisation unique, sous réserve du retrait de cette demande initiale (...) ".
4. Il résulte des dispositions citées au point 3 que le législateur a entendu organiser une transition entre le régime de l'autorisation d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement, le régime de l'autorisation unique prévu par l'ordonnance du 20 mars 2014 précitée et celui de l'autorisation environnementale institué par l'ordonnance du 26 janvier 2017, en prévoyant que les demandes d'autorisation au titre de la police des installations classées pour la protection de l'environnement régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires antérieures à l'entrée en vigueur de cette ordonnance, et qu'après la délivrance de ces autorisations, ces dernières sont considérées comme des autorisations environnementales auxquelles les dispositions du chapitre unique du titre VIII du livre Ier du code de l'environnement sont applicables, notamment lorsque ces autorisations sont modifiées ou contestées.
5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la demande d'autorisation à l'origine de l'arrêté du 29 juillet 2019 du préfet de l'Eure contesté devant la cour administrative d'appel a été déposée par la société Centrale éolienne Vexin le 23 octobre 2013, soit avant l'entrée en vigueur des ordonnances des 20 mars 2014 et 26 janvier 2017 précitées. Dès lors, en jugeant qu'elle était saisie d'un litige relatif au refus d'une autorisation régie par la législation antérieure à ces deux ordonnances, la cour administrative d'appel n'a entaché son arrêt ni de contradiction de motifs, ni d'erreur de droit, la circonstance qu'elle ait qualifié l'autorisation refusée d'autorisation environnementale étant sans incidence sur ce point.
6. En deuxième lieu, d'une part, aux termes du premier alinéa de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme : " Les constructions, même ne comportant pas de fondations, doivent être précédées de la délivrance d'un permis de construire ". En vertu de l'article L. 421-6 du même code : " Le permis de construire (...) ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords (...) ". Selon l'article L. 151-9 du même code, inclus dans une sous-section 1 intitulée " Affectation des sols et destination des constructions " : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 151-33 du même code, figurant dans une sous-section 3 intitulée " Destination des constructions, usages des sols et natures d'activité " : " Le règlement peut, en fonction des situations locales, soumettre à conditions particulières : / 1° Les types d'activités qu'il définit ; / 2° Les constructions ayant certaines destinations ou sous-destinations ".
7. D'autre part, en vertu du premier alinéa de l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme, devenu son article L. 152-1, le règlement et les documents graphiques du plan local d'urbanisme sont opposables à l'ouverture des installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan. En vertu du deuxième alinéa du I de l'article L. 514-6 du code de l'environnement, la compatibilité d'une installation classée avec les dispositions d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un plan d'occupation des sols ou d'une carte communale est appréciée à la date de l'autorisation, de l'enregistrement ou de la déclaration.
8. Enfin, aux termes de l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme : " Un décret en Conseil d'Etat arrête la liste des constructions, aménagements, installations et travaux qui, par dérogation aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4, sont dispensés de toute formalité au titre du présent code en raison : / (...) / d) Du fait que leur contrôle est exclusivement assuré par une autre autorisation ou une autre législation ; (...) ". Aux termes de l'article L. 421-8 du même code : " A l'exception des constructions mentionnées aux b et e de l'article L. 421-5, les constructions, aménagements, installations et travaux dispensés de toute formalité au titre du présent code doivent être conformes aux dispositions mentionnées à l'article L. 421-6. ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 425-29-2 du code de l'urbanisme, issu du décret du 26 janvier 2017 relatif à l'autorisation environnementale : " Lorsqu'un projet d'installation d'éoliennes terrestres est soumis à autorisation environnementale en application du chapitre unique du titre VIII du livre Ier du code de l'environnement, cette autorisation dispense du permis de construire ". Enfin, selon l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement, issu d'un autre décret du 26 janvier 2017 relatif à l'autorisation environnementale : " Lorsque l'autorisation environnementale concerne un projet relevant du 2° de l'article L. 181-1, le dossier de demande est complété dans les conditions suivantes. / I. - Le dossier est complété des pièces et éléments suivants : (...) / 12° Pour les installations terrestres de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent : / a) Sauf dans le cas prévu au 13°, un document établi par le pétitionnaire justifiant que le projet est conforme, selon le cas, au règlement national d'urbanisme, au plan local d'urbanisme ou au document en tenant lieu ou à la carte communale en vigueur au moment de l'instruction (...) ".
9. Il résulte des dispositions citées au point 8 que les projets d'installation d'éoliennes terrestres soumis, depuis le 1er mars 2017, à autorisation environnementale sont dispensés de l'obtention d'un permis de construire ce qui n'a, toutefois, ni pour objet ni pour effet de dispenser de tels projets du respect des règles d'urbanisme qui leurs sont applicables, les dispositions citées au point 8 mettant à la charge de l'autorité administrative, à l'occasion de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, l'examen de la conformité des projets d'installation d'éoliennes aux documents d'urbanisme applicables. Ces dispositions assurent ainsi le respect, par les projets d'installation d'éoliennes terrestres, des prescriptions du plan local d'urbanisme, notamment celles relatives à la hauteur des constructions et installations.
10. En revanche, pour les projets qui, comme celui en litige, ont fait l'objet d'une demande régulièrement déposée avant le 1er mars 2017 et qui sont soumis à la fois à l'exigence d'un permis de construire et d'une autorisation d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement, il résulte de la combinaison des dispositions citées aux points 6 et 7 que si le plan local d'urbanisme est opposable à l'autorisation d'exploiter, en vertu de l'article L. 514-6 du code de l'environnement, qui reprend le principe qui avait été exprimé à l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme, devenu son article L. 152-1, seules les prescriptions du plan local d'urbanisme qui déterminent les conditions d'utilisation et d'occupation des sols et les natures d'activités interdites ou limitées s'imposent à cette autorisation. Les règles relatives à la hauteur des constructions et installations, dont le respect est assuré, à l'occasion de la délivrance du permis de construire, en vertu des articles L. 421-1 et L. 421-6 du code de l'urbanisme, ne sont pas opposables à l'autorisation d'exploiter, peu important à cet égard la circonstance qu'elles figurent dans une partie du règlement du plan local d'urbanisme relative à la nature de l'occupation et de l'utilisation des sols. Par suite, en se fondant, pour annuler le refus d'autorisation d'exploiter qui était fondé sur la méconnaissance par le projet des règles de hauteur prévues par le plan local d'urbanisme, sur ce que les règles de ce plan relatives à la hauteur des constructions et installations n'étaient pas opposables à l'autorisation d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement, la cour administrative d'appel n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit.
11. En troisième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, applicables aux autorisations d'exploiter une installation classée délivrées sur la base d'une demande déposée avant le 1er mars 2017, que, lorsque ces autorisations sont contestées, elles sont soumises à un contentieux de pleine juridiction. Lorsqu'il statue en vertu de cet article L. 181-17, le juge administratif a le pouvoir d'autoriser la création et le fonctionnement d'une installation classée en l'assortissant des conditions qu'il juge indispensables à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement. Il a, en particulier, le pouvoir d'annuler la décision par laquelle l'autorité administrative a refusé l'autorisation sollicitée et, après avoir, si nécessaire, régularisé ou complété la procédure, d'accorder lui-même cette autorisation aux conditions qu'il fixe ou, le cas échéant, en renvoyant le bénéficiaire devant le préfet pour la fixation de ces conditions.
12. En l'espèce, pour accorder l'autorisation sollicitée par la société Centrale éolienne Vexin, la cour administrative d'appel a fait usage de ses pouvoirs de juge de pleine juridiction et s'est prononcée eu égard aux motifs retenus pour annuler l'arrêté du 29 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Eure avait refusé de délivrer cette autorisation. En statuant ainsi, en l'absence de tout autre motif invoqué pour justifier la décision de refus, notamment un motif tiré de l'incompatibilité du projet avec les prescriptions du plan local d'urbanisme opposables aux autorisations d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement, la cour n'a pas entaché son arrêt d'insuffisance de motivation.
13. En quatrième lieu, il résulte des dispositions du 2° de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 cité au point 3 que les demandes d'autorisation d'exploiter déposées au titre du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement avant le 1er mars 2017, ainsi que les demandes d'autorisation unique déposées sur le fondement de l'ordonnance du 20 mars 2014 précitée déposées avant cette même date, sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires antérieures à l'entrée en vigueur du régime de l'autorisation environnementale. Dès lors, ainsi qu'il a été dit aux points 9 et 10, les dispositions du 12° du I de l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement citées au point 8, relatives aux autorisations environnementales, n'étaient pas applicables à la délivrance de l'autorisation d'exploiter en litige dont la demande avait été déposée le 23 octobre 2013. Par suite, en jugeant qu'il y avait lieu d'accorder l'autorisation d'exploiter, la cour administrative d'appel, qui n'avait pas à s'assurer de la conformité du projet avec la réglementation d'urbanisme en faisant application des dispositions de l'article D. 181-15-2 de l'environnement puisque ces dispositions n'étaient pas applicables, n'a entaché son arrêt ni d'erreur de droit, ni d'insuffisance de motivation.
14. Il résulte de tout ce qui précède que les pourvois de l'association ALIANSE et de la ministre de la transition écologique doivent être rejetés. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de la société Centrale éolienne Vexin qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association ALIANSE et de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser chacun à la société Centrale éolienne Vexin au titre de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
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Article 1er : Les pourvois de l'association pour la défense des habitants du Vexin normand (ALIANSE) et de la ministre de la transition écologique sont rejetés.
Article 2 : L'association pour la défense des habitants du Vexin normand (ALIANSE) et l'Etat verseront chacun à la société Centrale éolienne Vexin une somme de 1 500 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association pour la défense des habitants du Vexin normand (ALIANSE), au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société Centrale éolienne Vexin.
Copie en sera adressée à la Commune de Puchay.
Délibéré à l'issue de la séance du 22 novembre 2023 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Stéphane Hoynck, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 18 décembre 2023.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
Le rapporteur :
Signé : M. Cédric Fraisseix
La secrétaire :
Signé : Mme Marie-Adeline Allain
N° 459339
ECLI:FR:CECHR:2023:459339.20231218
Mentionné aux tables du recueil Lebon
6ème - 5ème chambres réunies
M. Pierre Collin, président
M. Cédric Fraisseix, rapporteur
M. Nicolas Agnoux, rapporteur public
SCP GURY & MAITRE, avocats
Lecture du lundi 18 décembre 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu les procédures suivantes :
La société Centrale éolienne Vexin a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 21 octobre 2015 par lequel le préfet de l'Eure a refusé de l'autoriser à exploiter un parc de six éoliennes et un poste de livraison sur le territoire de la commune de Puchay (Eure). Par un jugement n° 1504115 du 30 mars 2017, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 17DA01091 du 9 mai 2019, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel de la société Centrale éolienne Vexin, d'une part, annulé le jugement du tribunal administratif du 30 mars 2017 et l'arrêté du préfet de l'Eure du 21 octobre 2015 et, d'autre part, enjoint au préfet de procéder au réexamen de la demande d'autorisation d'exploitation dans un délai de deux mois.
Par un arrêté du 29 juillet 2019, le préfet de l'Eure, après avoir réexaminé la demande en exécution de l'arrêt de la cour administrative d'appel du 9 mai 2019, a refusé l'autorisation d'exploiter les six éoliennes et le poste de livraison. La société Centrale éolienne Vexin a demandé à la cour administrative d'appel de Douai d'annuler ce refus, et de lui accorder l'autorisation assortie de prescriptions ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de lui délivrer cette autorisation.
Par un arrêt n° 19DA02392 du 26 octobre 2021, la cour administrative d'appel de Douai a, après avoir admis l'intervention de l'association pour la défense des habitants du Vexin normand (ALIANSE), annulé l'arrêté préfectoral du 29 juillet 2019, accordé à la société Centrale éolienne Vexin l'autorisation demandée et enjoint au préfet de l'Eure d'assortir cette dernière, dans un délai de six mois, de toutes les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement.
1° Sous le n° 459339, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 décembre 2021 et 21 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association pour la défense des habitants du Vexin normand (ALIANSE) demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 26 octobre 2021 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la requête de la société Centrale éolienne Vexin ;
3°) de mettre à la charge de la société Centrale éolienne Vexin la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 460192, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 6 janvier et 7 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre de la transition écologique demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt de la cour administrative d'appel du 26 octobre 2021.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ;
- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;
- le décret n° 2017-81 du 26 janvier 2017 ;
- le décret n° 2017-82 du 26 janvier 2017 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Nicolas Agnoux, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de l'association pour la défense des habitants du Vexin normand et à la SCP Gury et Maître, avocat de la sociétés Centrale éolienne Vexin ;
Vu, sous le n° 459339, la note en délibéré, enregistrée le 22 novembre 2023, présentée par l'association ALIANSE ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Centrale éolienne Vexin a déposé, le 22 octobre 2013, trois demandes de permis de construire portant respectivement sur la construction de cinq éoliennes E1 à E5, d'une éolienne E6 et d'un poste de livraison, sur le territoire de la commune de Puchay (Eure). Cette société a également déposé, le 23 octobre 2013, une demande d'autorisation d'exploiter au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement portant sur le parc éolien composé des six éoliennes et du poste de livraison. Par un arrêté du 21 octobre 2015, le préfet de l'Eure a rejeté la demande d'autorisation d'exploiter au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement. Par un arrêt du 9 mai 2019, rendu sur l'appel formé par la société Centrale éolienne Vexin, la cour administrative d'appel de Douai a, d'une part, annulé le jugement du 30 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Rouen avait rejeté la demande de cette société tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 21 octobre 2015 et annulé cet arrêté et, d'autre part, enjoint au préfet de réexaminer la demande de cette société. L'association pour la défense des habitants du Vexin normand (ALIANSE) et la ministre de la transition écologique se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 26 octobre 2021 par lequel la cour administrative de Douai a, d'une part, annulé l'arrêté du 29 juillet 2019 du préfet de l'Eure refusant, après avoir réexaminé la demande en exécution de l'arrêt du 9 mai 2019, de délivrer l'autorisation d'exploiter sollicitée et, d'autre part, délivré cette autorisation, en enjoignant au préfet de l'assortir de toutes les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts visés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement.
2. En premier lieu, d'une part, selon l'article L. 512-1 du code de l'environnement, figurant au chapitre II du titre Ier du livre V de ce code, dans sa rédaction applicable à la date à laquelle la demande en litige a été déposée : " Sont soumises à autorisation préfectorale les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts visés à l'article L. 511-1. / L'autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral (...) ".
3. D'autre part, selon l'article L. 181-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale : " L'autorisation environnementale (...) est applicable aux activités, installations, ouvrages et travaux suivants, lorsqu'ils ne présentent pas un caractère temporaire : / (...) 2° Installations classées pour la protection de l'environnement mentionnées à l'article L. 512-1 (...) ". Aux termes de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 précitée : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre (...) du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance, ou au titre de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 (...), avant le 1er mars 2017, (...) sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessité ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état ; / 2° Les demandes d'autorisation au titre (...) du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, ou de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 (...) régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article 18 de l'ordonnance du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement : " I. - Le demandeur qui a déposé une demande de permis, d'autorisation (...) mentionnée aux articles 2 et 10, pour laquelle l'autorité administrative compétente n'a pas rendu de décision avant l'entrée en vigueur de la présente ordonnance, peut déposer une demande d'autorisation unique, sous réserve du retrait de cette demande initiale (...) ".
4. Il résulte des dispositions citées au point 3 que le législateur a entendu organiser une transition entre le régime de l'autorisation d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement, le régime de l'autorisation unique prévu par l'ordonnance du 20 mars 2014 précitée et celui de l'autorisation environnementale institué par l'ordonnance du 26 janvier 2017, en prévoyant que les demandes d'autorisation au titre de la police des installations classées pour la protection de l'environnement régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires antérieures à l'entrée en vigueur de cette ordonnance, et qu'après la délivrance de ces autorisations, ces dernières sont considérées comme des autorisations environnementales auxquelles les dispositions du chapitre unique du titre VIII du livre Ier du code de l'environnement sont applicables, notamment lorsque ces autorisations sont modifiées ou contestées.
5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la demande d'autorisation à l'origine de l'arrêté du 29 juillet 2019 du préfet de l'Eure contesté devant la cour administrative d'appel a été déposée par la société Centrale éolienne Vexin le 23 octobre 2013, soit avant l'entrée en vigueur des ordonnances des 20 mars 2014 et 26 janvier 2017 précitées. Dès lors, en jugeant qu'elle était saisie d'un litige relatif au refus d'une autorisation régie par la législation antérieure à ces deux ordonnances, la cour administrative d'appel n'a entaché son arrêt ni de contradiction de motifs, ni d'erreur de droit, la circonstance qu'elle ait qualifié l'autorisation refusée d'autorisation environnementale étant sans incidence sur ce point.
6. En deuxième lieu, d'une part, aux termes du premier alinéa de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme : " Les constructions, même ne comportant pas de fondations, doivent être précédées de la délivrance d'un permis de construire ". En vertu de l'article L. 421-6 du même code : " Le permis de construire (...) ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords (...) ". Selon l'article L. 151-9 du même code, inclus dans une sous-section 1 intitulée " Affectation des sols et destination des constructions " : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées ". Aux termes de l'article R. 151-33 du même code, figurant dans une sous-section 3 intitulée " Destination des constructions, usages des sols et natures d'activité " : " Le règlement peut, en fonction des situations locales, soumettre à conditions particulières : / 1° Les types d'activités qu'il définit ; / 2° Les constructions ayant certaines destinations ou sous-destinations ".
7. D'autre part, en vertu du premier alinéa de l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme, devenu son article L. 152-1, le règlement et les documents graphiques du plan local d'urbanisme sont opposables à l'ouverture des installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan. En vertu du deuxième alinéa du I de l'article L. 514-6 du code de l'environnement, la compatibilité d'une installation classée avec les dispositions d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'un plan d'occupation des sols ou d'une carte communale est appréciée à la date de l'autorisation, de l'enregistrement ou de la déclaration.
8. Enfin, aux termes de l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme : " Un décret en Conseil d'Etat arrête la liste des constructions, aménagements, installations et travaux qui, par dérogation aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4, sont dispensés de toute formalité au titre du présent code en raison : / (...) / d) Du fait que leur contrôle est exclusivement assuré par une autre autorisation ou une autre législation ; (...) ". Aux termes de l'article L. 421-8 du même code : " A l'exception des constructions mentionnées aux b et e de l'article L. 421-5, les constructions, aménagements, installations et travaux dispensés de toute formalité au titre du présent code doivent être conformes aux dispositions mentionnées à l'article L. 421-6. ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 425-29-2 du code de l'urbanisme, issu du décret du 26 janvier 2017 relatif à l'autorisation environnementale : " Lorsqu'un projet d'installation d'éoliennes terrestres est soumis à autorisation environnementale en application du chapitre unique du titre VIII du livre Ier du code de l'environnement, cette autorisation dispense du permis de construire ". Enfin, selon l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement, issu d'un autre décret du 26 janvier 2017 relatif à l'autorisation environnementale : " Lorsque l'autorisation environnementale concerne un projet relevant du 2° de l'article L. 181-1, le dossier de demande est complété dans les conditions suivantes. / I. - Le dossier est complété des pièces et éléments suivants : (...) / 12° Pour les installations terrestres de production d'électricité à partir de l'énergie mécanique du vent : / a) Sauf dans le cas prévu au 13°, un document établi par le pétitionnaire justifiant que le projet est conforme, selon le cas, au règlement national d'urbanisme, au plan local d'urbanisme ou au document en tenant lieu ou à la carte communale en vigueur au moment de l'instruction (...) ".
9. Il résulte des dispositions citées au point 8 que les projets d'installation d'éoliennes terrestres soumis, depuis le 1er mars 2017, à autorisation environnementale sont dispensés de l'obtention d'un permis de construire ce qui n'a, toutefois, ni pour objet ni pour effet de dispenser de tels projets du respect des règles d'urbanisme qui leurs sont applicables, les dispositions citées au point 8 mettant à la charge de l'autorité administrative, à l'occasion de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, l'examen de la conformité des projets d'installation d'éoliennes aux documents d'urbanisme applicables. Ces dispositions assurent ainsi le respect, par les projets d'installation d'éoliennes terrestres, des prescriptions du plan local d'urbanisme, notamment celles relatives à la hauteur des constructions et installations.
10. En revanche, pour les projets qui, comme celui en litige, ont fait l'objet d'une demande régulièrement déposée avant le 1er mars 2017 et qui sont soumis à la fois à l'exigence d'un permis de construire et d'une autorisation d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement, il résulte de la combinaison des dispositions citées aux points 6 et 7 que si le plan local d'urbanisme est opposable à l'autorisation d'exploiter, en vertu de l'article L. 514-6 du code de l'environnement, qui reprend le principe qui avait été exprimé à l'article L. 123-5 du code de l'urbanisme, devenu son article L. 152-1, seules les prescriptions du plan local d'urbanisme qui déterminent les conditions d'utilisation et d'occupation des sols et les natures d'activités interdites ou limitées s'imposent à cette autorisation. Les règles relatives à la hauteur des constructions et installations, dont le respect est assuré, à l'occasion de la délivrance du permis de construire, en vertu des articles L. 421-1 et L. 421-6 du code de l'urbanisme, ne sont pas opposables à l'autorisation d'exploiter, peu important à cet égard la circonstance qu'elles figurent dans une partie du règlement du plan local d'urbanisme relative à la nature de l'occupation et de l'utilisation des sols. Par suite, en se fondant, pour annuler le refus d'autorisation d'exploiter qui était fondé sur la méconnaissance par le projet des règles de hauteur prévues par le plan local d'urbanisme, sur ce que les règles de ce plan relatives à la hauteur des constructions et installations n'étaient pas opposables à l'autorisation d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement, la cour administrative d'appel n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit.
11. En troisième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, applicables aux autorisations d'exploiter une installation classée délivrées sur la base d'une demande déposée avant le 1er mars 2017, que, lorsque ces autorisations sont contestées, elles sont soumises à un contentieux de pleine juridiction. Lorsqu'il statue en vertu de cet article L. 181-17, le juge administratif a le pouvoir d'autoriser la création et le fonctionnement d'une installation classée en l'assortissant des conditions qu'il juge indispensables à la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement. Il a, en particulier, le pouvoir d'annuler la décision par laquelle l'autorité administrative a refusé l'autorisation sollicitée et, après avoir, si nécessaire, régularisé ou complété la procédure, d'accorder lui-même cette autorisation aux conditions qu'il fixe ou, le cas échéant, en renvoyant le bénéficiaire devant le préfet pour la fixation de ces conditions.
12. En l'espèce, pour accorder l'autorisation sollicitée par la société Centrale éolienne Vexin, la cour administrative d'appel a fait usage de ses pouvoirs de juge de pleine juridiction et s'est prononcée eu égard aux motifs retenus pour annuler l'arrêté du 29 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Eure avait refusé de délivrer cette autorisation. En statuant ainsi, en l'absence de tout autre motif invoqué pour justifier la décision de refus, notamment un motif tiré de l'incompatibilité du projet avec les prescriptions du plan local d'urbanisme opposables aux autorisations d'exploiter une installation classée pour la protection de l'environnement, la cour n'a pas entaché son arrêt d'insuffisance de motivation.
13. En quatrième lieu, il résulte des dispositions du 2° de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 cité au point 3 que les demandes d'autorisation d'exploiter déposées au titre du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement avant le 1er mars 2017, ainsi que les demandes d'autorisation unique déposées sur le fondement de l'ordonnance du 20 mars 2014 précitée déposées avant cette même date, sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires antérieures à l'entrée en vigueur du régime de l'autorisation environnementale. Dès lors, ainsi qu'il a été dit aux points 9 et 10, les dispositions du 12° du I de l'article D. 181-15-2 du code de l'environnement citées au point 8, relatives aux autorisations environnementales, n'étaient pas applicables à la délivrance de l'autorisation d'exploiter en litige dont la demande avait été déposée le 23 octobre 2013. Par suite, en jugeant qu'il y avait lieu d'accorder l'autorisation d'exploiter, la cour administrative d'appel, qui n'avait pas à s'assurer de la conformité du projet avec la réglementation d'urbanisme en faisant application des dispositions de l'article D. 181-15-2 de l'environnement puisque ces dispositions n'étaient pas applicables, n'a entaché son arrêt ni d'erreur de droit, ni d'insuffisance de motivation.
14. Il résulte de tout ce qui précède que les pourvois de l'association ALIANSE et de la ministre de la transition écologique doivent être rejetés. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de la société Centrale éolienne Vexin qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association ALIANSE et de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser chacun à la société Centrale éolienne Vexin au titre de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
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Article 1er : Les pourvois de l'association pour la défense des habitants du Vexin normand (ALIANSE) et de la ministre de la transition écologique sont rejetés.
Article 2 : L'association pour la défense des habitants du Vexin normand (ALIANSE) et l'Etat verseront chacun à la société Centrale éolienne Vexin une somme de 1 500 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association pour la défense des habitants du Vexin normand (ALIANSE), au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société Centrale éolienne Vexin.
Copie en sera adressée à la Commune de Puchay.
Délibéré à l'issue de la séance du 22 novembre 2023 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, M. Jean-Philippe Mochon, présidents de chambre ; Mme Fabienne Lambolez, M. Olivier Yeznikian, M. Cyril Roger-Lacan, M. Stéphane Hoynck, M. Laurent Cabrera, conseillers d'Etat et M. Cédric Fraisseix, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 18 décembre 2023.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
Le rapporteur :
Signé : M. Cédric Fraisseix
La secrétaire :
Signé : Mme Marie-Adeline Allain