Conseil d'État
N° 462404
ECLI:FR:CECHR:2023:462404.20230504
Mentionné aux tables du recueil Lebon
10ème - 9ème chambres réunies
M. Jacques-Henri Stahl, président
M. Philippe Bachschmidt , rapporteur
Mme Esther de Moustier, rapporteur public
SCP DOUMIC-SEILLER, avocats
Lecture du jeudi 4 mai 2023
Vu la procédure suivante :
La société civile immobilière (SCI) Pora Pora et Mme B... A... ont saisi le tribunal administratif de la Polynésie française de la décision implicite par laquelle le président de la Polynésie française a rejeté leur demande du 23 octobre 2018 tendant à la rectification des mentions figurant au cadastre concernant les trois parcelles EX4, EX5 et EX6 situées sur la commune de Tahaa et à ce que la Polynésie française verse à Mme A... la somme de 5 millions de francs CFP au titre de la réparation des préjudices subis du fait de ces mentions et ont demandé au tribunal de condamner la Polynésie française à leur verser cette somme et de lui enjoindre de rectifier les mentions litigieuses. Par un jugement n° 1900056 du 24 septembre 2019, le tribunal a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 19PA03506 du 17 décembre 2021, la cour administrative d'appel de Paris, sur appel de la SCI Pora Pora et de Mme A..., a annulé ce jugement en tant qu'il avait rejeté comme irrecevable la demande en tant qu'elle était présentée par la SCI Pora Pora, mais a rejeté les conclusions de cette société et de Mme A....
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 17 mars et 17 juin 2022 et le 4 avril 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SCI Pora Pora et Mme A... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 2 de cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
- la délibération n° 90-126 AT du 13 décembre 1990 fixant le mode et les formalités d'établissement, de rénovation et de conservation du cadastre sur le territoire de la Polynésie française ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Bachschmidt, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la SCI Pora Pora et de Mme A..., et à la SCP Doumic-Seiller, avocat de la Présidence de la Polynésie française ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 12 avril 2023, présentée par la SCI Pora Pora et Mme A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un courrier du 23 octobre 2018, la SCI Pora Pora et Mme A... ont adressé au président de la Polynésie française une " demande préalable " faisant valoir que les documents cadastraux de la commune de Tahaa mentionneraient à tort que la propriété des parcelles EX4, EX5 et EX6 fait l'objet d'un litige entre des tiers et elles-mêmes, alors qu'elles revendiquent en être les seuls propriétaires, réclamant, en réparation de la faute alléguée, une indemnité de 5 millions de francs CFP ainsi que la rectification de la matrice cadastrale et indiquant leur intention, en cas de refus, de former un " recours de pleine juridiction ". Cette demande étant restée sans réponse, elles ont saisi le tribunal administratif de la Polynésie française qui, par un jugement du 24 septembre 2019, a rejeté leurs conclusions. La SCI Pora Pora et Mme A... se pourvoient en cassation contre l'article 2 de l'arrêt du 17 décembre 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, après avoir annulé le jugement de première instance en tant qu'il avait rejeté comme irrecevable la demande en ce qu'elle était présentée par la SCI Pora Pora, a rejeté le surplus des conclusions dont elle était saisie.
2. En premier lieu, la cour administrative d'appel de Paris ne s'est pas méprise sur la portée des écritures des requérantes, n'a pas commis d'erreur de droit ni entaché son arrêt de contradiction de motifs et n'a pas davantage omis de statuer sur des conclusions dont elle aurait été saisie en retenant, comme l'avait fait le tribunal administratif, que la SCI Pora Pora et Mme A... s'étaient bornées à saisir la juridiction administrative d'une demande indemnitaire tendant à la mise en jeu de la responsabilité de la Polynésie française à raison d'une faute dans l'établissement des indications figurant au cadastre, assortie de conclusions à fin d'injonction en vue de mettre fin au manquement fautif et de rectifier les énonciations cadastrales litigieuses, sans avoir formé de conclusions d'excès de pouvoir contre la décision rejetant leur " demande préalable ". Les moyens soulevés à cet égard à l'appui du pourvoi doivent donc être écartés, tant pour ce qui concerne l'interprétation par la cour des conclusions de la demande que l'appréciation que la cour a portée sur la régularité du jugement de première instance.
3. En second lieu, aux termes de l'article 1er de la délibération du 13 décembre 1990 fixant le mode et les formalités d'établissement, de rénovation et de conservation du cadastre sur le territoire de la Polynésie française : " Le cadastre donne l'inventaire du territoire communal dans tous les détails de son morcellement en parcelles. / La parcelle cadastrale est constituée par toute étendue de terrain appartenant à un même propriétaire ou à une même indivision, dans une même commune ou commune associée, et formant une unité foncière indépendante selon l'agencement donné à la propriété ". En application de l'article 22 de la même délibération : " La date d'ouverture et la date d'achèvement des travaux de rénovation du cadastre sont, dans chaque commune, portées à la connaissance du public par un avis inséré au Journal officiel de la Polynésie française ". En vertu de son article 23 : " A la clôture des opérations, les documents cadastraux sont, sauf pour les parties en litige, réputés conformes à la situation actuelle des propriétés et mis en service ". Selon son article 24 : " En ce qui concerne les parties en litige, les rectifications du cadastre consécutives à des règlements amiables ou judiciaires intervenus postérieurement à la clôture des opérations sont effectuées suivant les dispositions prévues au titre IV pour la conservation cadastrale ".
4. Les énonciations cadastrales, par elles-mêmes et quelle que soit leur ancienneté, ne constituent pas un titre de propriété.
5. Dans le cadre des opérations de rénovation du cadastre qui peuvent être engagées en vertu des dispositions citées au point 3, les énonciations cadastrales peuvent être rectifiées à la diligence de l'administration lorsqu'elles sont entachées d'inexactitude, sans que soit ainsi tranchée une question relative au droit de propriété. Lorsqu'une contestation sérieuse portant sur la propriété d'une parcelle est portée à la connaissance de l'administration dans le cadre de telles opérations, cette dernière peut légalement se borner à faire état du litige et à mentionner les personnes concernées par ce dernier et susceptibles de se voir reconnaître la qualité de propriétaire.
6. En revanche, si l'administration est saisie, postérieurement à l'achèvement des opérations de rénovation du cadastre, d'une demande tendant à la rectification des énonciations portées sur les documents cadastraux relatives à la situation juridique d'une parcelle et qu'un litige s'élève sur le droit de propriété de cette parcelle, elle est tenue de se conformer à la situation de propriété telle qu'elle a été constatée pour l'élaboration des documents cadastraux et ne peut que refuser la rectification demandée tant qu'une décision judiciaire ou un accord entre les intéressés n'est pas intervenu.
7. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué et des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, au cours des opérations de rénovation du cadastre de la commune de Tahaa qui se sont déroulées entre 2010 et 2013, l'administration a été saisie par des tiers d'une contestation portant sur le droit de propriété de la SCI Pora Pora et de Mme A... sur les parcelles EX4, EX5 et EX6. Cette contestation était fondée sur deux procès-verbaux de bornage réalisés en 1948 selon lesquels ces parcelles se trouvaient sur l'îlot " Rototava ", dont ces tiers ont hérité, et non sur l'îlot " Porou ", seul cédé en 2002 à la SCI Pora Pora aux termes d'un acte de vente faisant état d'une superficie correspondant approximativement à celle, cumulée, des deux îlots et sur la base duquel la SCI Pora Pora a par la suite vendu la parcelle EX4 à Mme A.... Pour rejeter les conclusions des requérantes, la cour administrative d'appel, en l'état de l'appréciation qu'elle a souverainement portée sur les faits de l'espèce sans les dénaturer, a nécessairement regardé la contestation élevée par ces tiers comme sérieuse alors même que les requérantes faisaient valoir que la cour d'appel de Papeete avait écarté, par un arrêt du 6 décembre 2012, l'existence d'une contestation sérieuse sur le droit de propriété de Mme A... dans le cadre d'une action en expulsion engagée par cette dernière en référé et que les titres de propriété qu'elles avaient produits étaient plus récents que ceux des tiers. En statuant ainsi, la cour n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce et a pu en déduire sans erreur de droit, par un arrêt suffisamment motivé, que l'administration avait pu légalement se borner, dans le cadre des opérations de rénovation du cadastre, à faire mention, pour les parcelles EX4, EX5 et EX6, du litige opposant ces tiers aux requérantes, en les désignant nominativement, sans prendre parti sur le droit de propriété.
8. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi doit être rejeté, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à ce titre une somme à la charge des requérantes à verser à la Polynésie française.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la SCI Pora Pora et de Mme A... est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par la Polynésie française au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SCI Pora Pora, à Mme B... A... et à la Polynésie française.
Délibéré à l'issue de la séance du 12 avril 2023 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; Mme Nathalie Escaut, M. Alexandre Lallet, M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, M. Didier Ribes, conseillers d'Etat et M. Philippe Bachschmidt, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 4 mai 2023.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
Le rapporteur :
Signé : M. Philippe Bachschmidt
La secrétaire :
Signé : Mme Claudine Ramalahanoharana
N° 462404
ECLI:FR:CECHR:2023:462404.20230504
Mentionné aux tables du recueil Lebon
10ème - 9ème chambres réunies
M. Jacques-Henri Stahl, président
M. Philippe Bachschmidt , rapporteur
Mme Esther de Moustier, rapporteur public
SCP DOUMIC-SEILLER, avocats
Lecture du jeudi 4 mai 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société civile immobilière (SCI) Pora Pora et Mme B... A... ont saisi le tribunal administratif de la Polynésie française de la décision implicite par laquelle le président de la Polynésie française a rejeté leur demande du 23 octobre 2018 tendant à la rectification des mentions figurant au cadastre concernant les trois parcelles EX4, EX5 et EX6 situées sur la commune de Tahaa et à ce que la Polynésie française verse à Mme A... la somme de 5 millions de francs CFP au titre de la réparation des préjudices subis du fait de ces mentions et ont demandé au tribunal de condamner la Polynésie française à leur verser cette somme et de lui enjoindre de rectifier les mentions litigieuses. Par un jugement n° 1900056 du 24 septembre 2019, le tribunal a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 19PA03506 du 17 décembre 2021, la cour administrative d'appel de Paris, sur appel de la SCI Pora Pora et de Mme A..., a annulé ce jugement en tant qu'il avait rejeté comme irrecevable la demande en tant qu'elle était présentée par la SCI Pora Pora, mais a rejeté les conclusions de cette société et de Mme A....
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 17 mars et 17 juin 2022 et le 4 avril 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SCI Pora Pora et Mme A... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 2 de cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;
- la délibération n° 90-126 AT du 13 décembre 1990 fixant le mode et les formalités d'établissement, de rénovation et de conservation du cadastre sur le territoire de la Polynésie française ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Philippe Bachschmidt, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la SCI Pora Pora et de Mme A..., et à la SCP Doumic-Seiller, avocat de la Présidence de la Polynésie française ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 12 avril 2023, présentée par la SCI Pora Pora et Mme A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un courrier du 23 octobre 2018, la SCI Pora Pora et Mme A... ont adressé au président de la Polynésie française une " demande préalable " faisant valoir que les documents cadastraux de la commune de Tahaa mentionneraient à tort que la propriété des parcelles EX4, EX5 et EX6 fait l'objet d'un litige entre des tiers et elles-mêmes, alors qu'elles revendiquent en être les seuls propriétaires, réclamant, en réparation de la faute alléguée, une indemnité de 5 millions de francs CFP ainsi que la rectification de la matrice cadastrale et indiquant leur intention, en cas de refus, de former un " recours de pleine juridiction ". Cette demande étant restée sans réponse, elles ont saisi le tribunal administratif de la Polynésie française qui, par un jugement du 24 septembre 2019, a rejeté leurs conclusions. La SCI Pora Pora et Mme A... se pourvoient en cassation contre l'article 2 de l'arrêt du 17 décembre 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Paris, après avoir annulé le jugement de première instance en tant qu'il avait rejeté comme irrecevable la demande en ce qu'elle était présentée par la SCI Pora Pora, a rejeté le surplus des conclusions dont elle était saisie.
2. En premier lieu, la cour administrative d'appel de Paris ne s'est pas méprise sur la portée des écritures des requérantes, n'a pas commis d'erreur de droit ni entaché son arrêt de contradiction de motifs et n'a pas davantage omis de statuer sur des conclusions dont elle aurait été saisie en retenant, comme l'avait fait le tribunal administratif, que la SCI Pora Pora et Mme A... s'étaient bornées à saisir la juridiction administrative d'une demande indemnitaire tendant à la mise en jeu de la responsabilité de la Polynésie française à raison d'une faute dans l'établissement des indications figurant au cadastre, assortie de conclusions à fin d'injonction en vue de mettre fin au manquement fautif et de rectifier les énonciations cadastrales litigieuses, sans avoir formé de conclusions d'excès de pouvoir contre la décision rejetant leur " demande préalable ". Les moyens soulevés à cet égard à l'appui du pourvoi doivent donc être écartés, tant pour ce qui concerne l'interprétation par la cour des conclusions de la demande que l'appréciation que la cour a portée sur la régularité du jugement de première instance.
3. En second lieu, aux termes de l'article 1er de la délibération du 13 décembre 1990 fixant le mode et les formalités d'établissement, de rénovation et de conservation du cadastre sur le territoire de la Polynésie française : " Le cadastre donne l'inventaire du territoire communal dans tous les détails de son morcellement en parcelles. / La parcelle cadastrale est constituée par toute étendue de terrain appartenant à un même propriétaire ou à une même indivision, dans une même commune ou commune associée, et formant une unité foncière indépendante selon l'agencement donné à la propriété ". En application de l'article 22 de la même délibération : " La date d'ouverture et la date d'achèvement des travaux de rénovation du cadastre sont, dans chaque commune, portées à la connaissance du public par un avis inséré au Journal officiel de la Polynésie française ". En vertu de son article 23 : " A la clôture des opérations, les documents cadastraux sont, sauf pour les parties en litige, réputés conformes à la situation actuelle des propriétés et mis en service ". Selon son article 24 : " En ce qui concerne les parties en litige, les rectifications du cadastre consécutives à des règlements amiables ou judiciaires intervenus postérieurement à la clôture des opérations sont effectuées suivant les dispositions prévues au titre IV pour la conservation cadastrale ".
4. Les énonciations cadastrales, par elles-mêmes et quelle que soit leur ancienneté, ne constituent pas un titre de propriété.
5. Dans le cadre des opérations de rénovation du cadastre qui peuvent être engagées en vertu des dispositions citées au point 3, les énonciations cadastrales peuvent être rectifiées à la diligence de l'administration lorsqu'elles sont entachées d'inexactitude, sans que soit ainsi tranchée une question relative au droit de propriété. Lorsqu'une contestation sérieuse portant sur la propriété d'une parcelle est portée à la connaissance de l'administration dans le cadre de telles opérations, cette dernière peut légalement se borner à faire état du litige et à mentionner les personnes concernées par ce dernier et susceptibles de se voir reconnaître la qualité de propriétaire.
6. En revanche, si l'administration est saisie, postérieurement à l'achèvement des opérations de rénovation du cadastre, d'une demande tendant à la rectification des énonciations portées sur les documents cadastraux relatives à la situation juridique d'une parcelle et qu'un litige s'élève sur le droit de propriété de cette parcelle, elle est tenue de se conformer à la situation de propriété telle qu'elle a été constatée pour l'élaboration des documents cadastraux et ne peut que refuser la rectification demandée tant qu'une décision judiciaire ou un accord entre les intéressés n'est pas intervenu.
7. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué et des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, au cours des opérations de rénovation du cadastre de la commune de Tahaa qui se sont déroulées entre 2010 et 2013, l'administration a été saisie par des tiers d'une contestation portant sur le droit de propriété de la SCI Pora Pora et de Mme A... sur les parcelles EX4, EX5 et EX6. Cette contestation était fondée sur deux procès-verbaux de bornage réalisés en 1948 selon lesquels ces parcelles se trouvaient sur l'îlot " Rototava ", dont ces tiers ont hérité, et non sur l'îlot " Porou ", seul cédé en 2002 à la SCI Pora Pora aux termes d'un acte de vente faisant état d'une superficie correspondant approximativement à celle, cumulée, des deux îlots et sur la base duquel la SCI Pora Pora a par la suite vendu la parcelle EX4 à Mme A.... Pour rejeter les conclusions des requérantes, la cour administrative d'appel, en l'état de l'appréciation qu'elle a souverainement portée sur les faits de l'espèce sans les dénaturer, a nécessairement regardé la contestation élevée par ces tiers comme sérieuse alors même que les requérantes faisaient valoir que la cour d'appel de Papeete avait écarté, par un arrêt du 6 décembre 2012, l'existence d'une contestation sérieuse sur le droit de propriété de Mme A... dans le cadre d'une action en expulsion engagée par cette dernière en référé et que les titres de propriété qu'elles avaient produits étaient plus récents que ceux des tiers. En statuant ainsi, la cour n'a pas inexactement qualifié les faits de l'espèce et a pu en déduire sans erreur de droit, par un arrêt suffisamment motivé, que l'administration avait pu légalement se borner, dans le cadre des opérations de rénovation du cadastre, à faire mention, pour les parcelles EX4, EX5 et EX6, du litige opposant ces tiers aux requérantes, en les désignant nominativement, sans prendre parti sur le droit de propriété.
8. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi doit être rejeté, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à ce titre une somme à la charge des requérantes à verser à la Polynésie française.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la SCI Pora Pora et de Mme A... est rejeté.
Article 2 : Les conclusions présentées par la Polynésie française au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SCI Pora Pora, à Mme B... A... et à la Polynésie française.
Délibéré à l'issue de la séance du 12 avril 2023 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; Mme Nathalie Escaut, M. Alexandre Lallet, M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, M. Didier Ribes, conseillers d'Etat et M. Philippe Bachschmidt, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 4 mai 2023.
Le président :
Signé : M. Jacques-Henri Stahl
Le rapporteur :
Signé : M. Philippe Bachschmidt
La secrétaire :
Signé : Mme Claudine Ramalahanoharana