Conseil d'État
N° 450600
ECLI:FR:CECHS:2021:450600.20210915
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre
Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson, rapporteur
Mme Marie Sirinelli, rapporteur public
Lecture du mercredi 15 septembre 2021
Vu les procédures suivantes :
M. E... G... et Mme F... D... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler les opérations électorales des 15 mars et 28 juin 2020 en vue de l'élection des conseillers municipaux et communautaires dans la commune de Bondoufle (Essonne) et de prononcer l'inéligibilité de M. C... B..., candidat élu. Par un jugement n° 2004076, 2004089 du 16 février 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé ces opérations électorales et rejeté le surplus des conclusions des protestations.
1° Sous le n° 450600, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 mars et 21 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif en tant qu'il fait droit aux conclusions de la protestation de M. G... tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées les 15 mars et 28 juin 2020 à Bondoufle ;
2°) de rejeter la protestation de M. G... ;
3°) de mettre à la charge de M. G... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 450614, par une requête, enregistrée le 11 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif en tant qu'il fait droit aux conclusions de la protestation de Mme D... tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées les 15 mars et 28 juin 2020 à Bondoufle ;
2°) de rejeter la protestation de Mme D... ;
3°) de mettre à la charge de Mme D... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code électoral ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson, conseillère d'Etat,
- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de Mme D... ;
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue du second tour de l'élection municipale qui s'est déroulée le 28 juin 2020 à Bondoufle, la liste " Bondoufle L'Enjeu " menée par M. C... B... a obtenu 1 220 voix, soit 38,02 % des suffrages exprimés, la liste " Ensemble pour Bondoufle " menée par Mme F... D... 1 174 voix, soit 36,58 % des suffrages exprimés, et la liste " Bondoufle Durablement Ensemble " menée par M. E... G... 815 voix, soit 25,40 % des suffrages exprimés. M. B..., sous les n° 450600 et 450614, relève appel du jugement du 16 février 2021 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a annulé ces opérations électorales sur les protestations, respectivement, de M. G... et de Mme D.... Il y a lieu de joindre ces deux requêtes, qui sont dirigées contre le même jugement, pour statuer par une même décision.
Sur les conclusions de M. G... tendant à ce que M. B... soit déclaré inéligible :
2. Ces conclusions ont été présentées dans un mémoire enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 7 avril 2021, au-delà du délai d'appel d'un mois prévu à l'article R. 123 du code électoral. Par suite, elles sont irrecevables et doivent être rejetées.
Sur les griefs retenus par le tribunal administratif pour annuler les opérations électorales :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 52-1 du code électoral : " Pendant les six mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, l'utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle est interdite ".
4. Il résulte de l'instruction qu'à compter du 6 mars 2020, deux vidéos publiées sur la page du réseau social " Facebook " de la liste " Bondoufle L'Enjeu ", respectivement intitulées " Bondoufle, notre ville, notre passion " et " Le plan local d'urbanisme de Bondoufle ", ont été mises en avant moyennant le paiement d'un prix, permettant notamment d'atteindre des personnes non abonnées à la page de la liste sur ce réseau social. Cette diffusion revêt le caractère d'un procédé de publicité commerciale interdit par le premier alinéa de l'article L. 52-1 du code électoral. Cependant, il résulte de l'instruction que l'emploi de cette fonctionnalité du réseau social a été facturé, pour une des deux vidéos du 5 au 10 mars 2020, et pour l'autre du 9 au 12 mars 2020, soit une période courte et éloignée de plus de trois mois de la date du second tour des élections. Si une capture d'écran montre qu'à la date du 9 septembre 2020, ces deux vidéos avaient respectivement fait l'objet de 7 700 vues et 2 700 vues, des chiffres supérieurs aux autres vidéos publiées sur ce compte, cette capture, prise plus de deux mois après le second tour des élections, ne permet pas de connaître le nombre de vues au jour des élections ni, partant, d'apprécier une influence éventuelle sur le scrutin. Il ne peut ainsi être établi que la publication des vidéos ait atteint, grâce au dispositif utilisé, un nombre significatif d'électeurs. Dans ces conditions, et eu égard au caractère non polémique des vidéos, le procédé mis en oeuvre ne peut être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant altéré la sincérité du scrutin.
5. En deuxième lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral : " Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués ".
6. La seule circonstance que deux vidéos publiées sur la page du réseau social " Facebook " de la liste " Bondoufle L'Enjeu " aient pu être tournées, en méconnaissance de l'article L. 52-8, dans une salle de la mairie, une carte de la commune de Bondoufle étant partiellement visible sur l'une de ces vidéos, ne saurait être regardée comme ayant été susceptible de créer, dans l'esprit des électeurs, une confusion entre l'action de la commune et la propagande électorale des candidats de nature à altérer la sincérité du scrutin.
7. En troisième lieu, le fait qu'une vidéo publiée le 17 juin 2020 sur la page du réseau social " Facebook " de la liste " Bondoufle L'Enjeu ", au demeurant à caractère informatif et dénuée de tout caractère polémique, ait fait l'objet d'un partage sur la page de l'association du comité des fêtes ne constitue pas une méconnaissance de l'article L. 52-8 et est dénué de toute influence sur le scrutin.
8. En dernier lieu, il ne résulte pas davantage de l'instruction que, malgré le faible écart de voix séparant les listes en présence, le cumul de ces irrégularités ait été de nature à avoir altéré la sincérité du scrutin.
9. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur ces griefs pour annuler les opérations électorales qui se sont déroulées à Bondoufle.
10. Il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres griefs soulevés par Mme D... et M. G... à l'appui de leurs protestations électorales.
11. En premier lieu, aux termes de l'article R. 27 du code électoral : " Sont interdites, sur les affiches et circulaires ayant un but ou un caractère électoral, l'utilisation de l'emblème national ainsi que la juxtaposition des trois couleurs : bleu, blanc et rouge dès lors qu'elle est de nature à entretenir la confusion avec l'emblème national, à l'exception de la reproduction de l'emblème d'un parti ou groupement politique. ". Il résulte de l'instruction que si les affiches de campagne de M. B... comportaient, parmi d'autres couleurs, le bleu, le blanc et le rouge, elles n'entretenaient aucune confusion avec l'emblème national.
12. En deuxième lieu, selon l'article L. 48-2 du code électoral : " Il est interdit à tout candidat de porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que ses adversaires n'aient pas la possibilité d'y répondre utilement avant la fin de la campagne électorale ". Mme D... fait valoir que ces dispositions auraient été méconnues en ce que M. B... aurait diffusé tardivement par des tracts durant la campagne des informations mensongères, d'une part sur un projet qu'aurait eu la liste qu'elle conduisait de construire une piscine qui aurait des conséquences importantes sur le budget de la commune et, d'autre part, sur le coût que représenterait l'arrêt projeté par la liste qu'elle conduisait d'une zone d'activité concertée. Il résulte toutefois de l'instruction que ces tracts, qui ne présentaient pas un caractère outrancier ou diffamatoire et portaient sur des thèmes déjà débattus pendant la campagne, ne peuvent être regardés comme ayant porté à la connaissance du public d'éléments nouveaux de polémique électorale auxquels les candidats de la liste de Mme D... auraient été privés de la possibilité de répondre utilement.
13. En troisième lieu, la circonstance que l'équipe de M. B... ait bénéficié d'une attribution de nuance politique " LDIV " (liste divers), tandis que la liste que Mme D... conduisait, qui avait formulé la même demande, s'était vu attribuer la nuance " LDVG " (liste divers gauche) est dénuée d'influence sur le scrutin, cette indication ne figurant ni sur le matériel de vote ni sur les documents de propagande.
14. En quatrième lieu, Mme D... fait valoir que M. B... a disposé des moyens de la commune et entretenu un flou constant entre ses fonctions de maire et sa qualité de candidat, notamment en enregistrant dans les locaux de la commune la vidéo mentionnée au point 6 ci-dessus, en faisant réaliser par l'association du comité des fêtes une distribution d'oeufs de Pâques, en annonçant de nouvelles actions en matière de stationnement lors d'une réunion publique à peine plus d'une semaine avant le second tour du scrutin, en procédant tardivement à la mise en place de la vidéo-protection, en faisant participer des agents municipaux à sa campagne électorale, dont son épouse qui exerce les fonctions de directrice générale des services, en utilisant la communication institutionnelle de la commune entre les deux tours pour faire la promotion des actions menées dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19, en ayant recours à la photothèque de la commune et enfin en laissant diffuser un entretien du président du comité des fêtes le soutenant. Il ne résulte cependant pas de l'instruction, d'une part, que la distribution dans la ville, par des membres du comité des fêtes, d'oeufs de Pâques aux enfants A... la commune ait été liée à la campagne électorale, d'autre part, que la réunion publique du 20 juin 2020 qui portait sur le stationnement et avait été organisée à la suite d'une demande des habitants ait été l'occasion pour M. B... de faire campagne, ni que M. B... aurait illégalement fait participer des agents municipaux à sa campagne électorale ou utilisé la communication institutionnelle de la commune, entre les deux tours, pour faire la promotion des actions menées dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19, ni enfin que les autres manquements invoqués seraient constitués. Il résulte de ce qui précède que ni les dispositions de l'article L. 50 du code électoral en vertu duquel " Il est interdit à tout agent de l'autorité publique ou municipale de distribuer des bulletins de vote, professions de foi et circulaires des candidats " ni celles des articles L. 52-1 et L. 52-8 citées ci-dessus n'ont été méconnues.
15. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 43 du code électoral : " Les bureaux de vote sont présidés par les maire, adjoints et conseillers municipaux dans l'ordre du tableau. A leur défaut, les présidents sont désignés par le maire parmi les électeurs de la commune. / En cas d'absence, le président est remplacé par un suppléant désigné par lui parmi les conseillers municipaux ou les électeurs de la commune, ou, à défaut, par le plus âgé des assesseurs. Le suppléant exerce toutes les attributions du président. Le secrétaire est remplacé en cas d'absence par l'assesseur le plus jeune ". Il ne résulte pas de l'instruction que le fait que les présidents suppléants ont été désignés, non parmi les membres du conseil municipal dans l'ordre du tableau mais parmi les candidats non élus de la liste " Bondoufle l'Enjeu ", en méconnaissance de l'article R. 43 du code électoral, aurait eu, dans les circonstances de l'espèce, le caractère d'une manoeuvre ayant altéré la sincérité du scrutin.
16. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 49 du code électoral : " A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de : (...) 2° Diffuser ou faire diffuser par tout moyen de communication au public par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale (...) ". S'il est admis par M. B... que le samedi 14 mars 2020, veille du premier tour des élections, des membres de son équipe se trouvaient devant un supermarché de Bondoufle, il n'est pas établi par l'instruction, d'une part, que ces personnes auraient installé une table afin de réaliser une permanence et, d'autre part, que des affiches du candidat auraient été collées sur les panneaux d'affichage libres. En tout état de cause, eu égard à la brièveté de cette présence et à l'écart de voix entre les candidats, ces faits ne seraient pas de nature à avoir altéré la sincérité du scrutin.
17. En septième lieu, la circonstance que l'affichage des voeux de début d'année du maire et de l'ensemble des conseillers municipaux n'ait pas été retiré des panneaux électoraux pendant la campagne ne saurait être regardée, à elle seule, comme ayant méconnu l'article L. 52-8 du code électoral.
18. En huitième lieu, les dispositions de l'article L. 97 du code électoral, qui prévoient les peines et amendes dont sont passibles les auteurs de certaines infractions, ne peuvent être utilement invoquées au soutien de conclusions tendant à l'annulation d'opérations électorales.
19. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que M. B..., en distribuant des masques fournis par la région d'Ile-de-France, en assurant des permanences hebdomadaires et en étant présent sur les marchés dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19, n'a pas excédé ses fonctions de maire.
20. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé les opérations électorales qui se sont déroulées les 15 avril et 28 juin 2020 en vue de l'élection des conseillers municipaux et communautaires dans la commune de Bondoufle.
21. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle aux conclusions présentées au titre des mêmes dispositions par M. G... et Mme D....
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'article 1er du jugement du 16 février 2021 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : Les opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars et 28 juin 2020 à Bondoufle sont validées.
Article 3 : Les conclusions de M. G... et de Mme D... tendant à l'annulation des opérations électorales sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de M. G... tendant à l'inéligibilité de M. B... sont rejetées.
Article 5: Les conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. C... B..., à M. E... G... et à M. F... D....
Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.
N° 450600
ECLI:FR:CECHS:2021:450600.20210915
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre
Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson, rapporteur
Mme Marie Sirinelli, rapporteur public
Lecture du mercredi 15 septembre 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu les procédures suivantes :
M. E... G... et Mme F... D... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler les opérations électorales des 15 mars et 28 juin 2020 en vue de l'élection des conseillers municipaux et communautaires dans la commune de Bondoufle (Essonne) et de prononcer l'inéligibilité de M. C... B..., candidat élu. Par un jugement n° 2004076, 2004089 du 16 février 2021, le tribunal administratif de Versailles a annulé ces opérations électorales et rejeté le surplus des conclusions des protestations.
1° Sous le n° 450600, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 11 mars et 21 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif en tant qu'il fait droit aux conclusions de la protestation de M. G... tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées les 15 mars et 28 juin 2020 à Bondoufle ;
2°) de rejeter la protestation de M. G... ;
3°) de mettre à la charge de M. G... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 450614, par une requête, enregistrée le 11 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif en tant qu'il fait droit aux conclusions de la protestation de Mme D... tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées les 15 mars et 28 juin 2020 à Bondoufle ;
2°) de rejeter la protestation de Mme D... ;
3°) de mettre à la charge de Mme D... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code électoral ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Bénédicte Fauvarque-Cosson, conseillère d'Etat,
- les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de Mme D... ;
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue du second tour de l'élection municipale qui s'est déroulée le 28 juin 2020 à Bondoufle, la liste " Bondoufle L'Enjeu " menée par M. C... B... a obtenu 1 220 voix, soit 38,02 % des suffrages exprimés, la liste " Ensemble pour Bondoufle " menée par Mme F... D... 1 174 voix, soit 36,58 % des suffrages exprimés, et la liste " Bondoufle Durablement Ensemble " menée par M. E... G... 815 voix, soit 25,40 % des suffrages exprimés. M. B..., sous les n° 450600 et 450614, relève appel du jugement du 16 février 2021 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a annulé ces opérations électorales sur les protestations, respectivement, de M. G... et de Mme D.... Il y a lieu de joindre ces deux requêtes, qui sont dirigées contre le même jugement, pour statuer par une même décision.
Sur les conclusions de M. G... tendant à ce que M. B... soit déclaré inéligible :
2. Ces conclusions ont été présentées dans un mémoire enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 7 avril 2021, au-delà du délai d'appel d'un mois prévu à l'article R. 123 du code électoral. Par suite, elles sont irrecevables et doivent être rejetées.
Sur les griefs retenus par le tribunal administratif pour annuler les opérations électorales :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 52-1 du code électoral : " Pendant les six mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, l'utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle est interdite ".
4. Il résulte de l'instruction qu'à compter du 6 mars 2020, deux vidéos publiées sur la page du réseau social " Facebook " de la liste " Bondoufle L'Enjeu ", respectivement intitulées " Bondoufle, notre ville, notre passion " et " Le plan local d'urbanisme de Bondoufle ", ont été mises en avant moyennant le paiement d'un prix, permettant notamment d'atteindre des personnes non abonnées à la page de la liste sur ce réseau social. Cette diffusion revêt le caractère d'un procédé de publicité commerciale interdit par le premier alinéa de l'article L. 52-1 du code électoral. Cependant, il résulte de l'instruction que l'emploi de cette fonctionnalité du réseau social a été facturé, pour une des deux vidéos du 5 au 10 mars 2020, et pour l'autre du 9 au 12 mars 2020, soit une période courte et éloignée de plus de trois mois de la date du second tour des élections. Si une capture d'écran montre qu'à la date du 9 septembre 2020, ces deux vidéos avaient respectivement fait l'objet de 7 700 vues et 2 700 vues, des chiffres supérieurs aux autres vidéos publiées sur ce compte, cette capture, prise plus de deux mois après le second tour des élections, ne permet pas de connaître le nombre de vues au jour des élections ni, partant, d'apprécier une influence éventuelle sur le scrutin. Il ne peut ainsi être établi que la publication des vidéos ait atteint, grâce au dispositif utilisé, un nombre significatif d'électeurs. Dans ces conditions, et eu égard au caractère non polémique des vidéos, le procédé mis en oeuvre ne peut être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant altéré la sincérité du scrutin.
5. En deuxième lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral : " Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués ".
6. La seule circonstance que deux vidéos publiées sur la page du réseau social " Facebook " de la liste " Bondoufle L'Enjeu " aient pu être tournées, en méconnaissance de l'article L. 52-8, dans une salle de la mairie, une carte de la commune de Bondoufle étant partiellement visible sur l'une de ces vidéos, ne saurait être regardée comme ayant été susceptible de créer, dans l'esprit des électeurs, une confusion entre l'action de la commune et la propagande électorale des candidats de nature à altérer la sincérité du scrutin.
7. En troisième lieu, le fait qu'une vidéo publiée le 17 juin 2020 sur la page du réseau social " Facebook " de la liste " Bondoufle L'Enjeu ", au demeurant à caractère informatif et dénuée de tout caractère polémique, ait fait l'objet d'un partage sur la page de l'association du comité des fêtes ne constitue pas une méconnaissance de l'article L. 52-8 et est dénué de toute influence sur le scrutin.
8. En dernier lieu, il ne résulte pas davantage de l'instruction que, malgré le faible écart de voix séparant les listes en présence, le cumul de ces irrégularités ait été de nature à avoir altéré la sincérité du scrutin.
9. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles s'est fondé sur ces griefs pour annuler les opérations électorales qui se sont déroulées à Bondoufle.
10. Il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres griefs soulevés par Mme D... et M. G... à l'appui de leurs protestations électorales.
11. En premier lieu, aux termes de l'article R. 27 du code électoral : " Sont interdites, sur les affiches et circulaires ayant un but ou un caractère électoral, l'utilisation de l'emblème national ainsi que la juxtaposition des trois couleurs : bleu, blanc et rouge dès lors qu'elle est de nature à entretenir la confusion avec l'emblème national, à l'exception de la reproduction de l'emblème d'un parti ou groupement politique. ". Il résulte de l'instruction que si les affiches de campagne de M. B... comportaient, parmi d'autres couleurs, le bleu, le blanc et le rouge, elles n'entretenaient aucune confusion avec l'emblème national.
12. En deuxième lieu, selon l'article L. 48-2 du code électoral : " Il est interdit à tout candidat de porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que ses adversaires n'aient pas la possibilité d'y répondre utilement avant la fin de la campagne électorale ". Mme D... fait valoir que ces dispositions auraient été méconnues en ce que M. B... aurait diffusé tardivement par des tracts durant la campagne des informations mensongères, d'une part sur un projet qu'aurait eu la liste qu'elle conduisait de construire une piscine qui aurait des conséquences importantes sur le budget de la commune et, d'autre part, sur le coût que représenterait l'arrêt projeté par la liste qu'elle conduisait d'une zone d'activité concertée. Il résulte toutefois de l'instruction que ces tracts, qui ne présentaient pas un caractère outrancier ou diffamatoire et portaient sur des thèmes déjà débattus pendant la campagne, ne peuvent être regardés comme ayant porté à la connaissance du public d'éléments nouveaux de polémique électorale auxquels les candidats de la liste de Mme D... auraient été privés de la possibilité de répondre utilement.
13. En troisième lieu, la circonstance que l'équipe de M. B... ait bénéficié d'une attribution de nuance politique " LDIV " (liste divers), tandis que la liste que Mme D... conduisait, qui avait formulé la même demande, s'était vu attribuer la nuance " LDVG " (liste divers gauche) est dénuée d'influence sur le scrutin, cette indication ne figurant ni sur le matériel de vote ni sur les documents de propagande.
14. En quatrième lieu, Mme D... fait valoir que M. B... a disposé des moyens de la commune et entretenu un flou constant entre ses fonctions de maire et sa qualité de candidat, notamment en enregistrant dans les locaux de la commune la vidéo mentionnée au point 6 ci-dessus, en faisant réaliser par l'association du comité des fêtes une distribution d'oeufs de Pâques, en annonçant de nouvelles actions en matière de stationnement lors d'une réunion publique à peine plus d'une semaine avant le second tour du scrutin, en procédant tardivement à la mise en place de la vidéo-protection, en faisant participer des agents municipaux à sa campagne électorale, dont son épouse qui exerce les fonctions de directrice générale des services, en utilisant la communication institutionnelle de la commune entre les deux tours pour faire la promotion des actions menées dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19, en ayant recours à la photothèque de la commune et enfin en laissant diffuser un entretien du président du comité des fêtes le soutenant. Il ne résulte cependant pas de l'instruction, d'une part, que la distribution dans la ville, par des membres du comité des fêtes, d'oeufs de Pâques aux enfants A... la commune ait été liée à la campagne électorale, d'autre part, que la réunion publique du 20 juin 2020 qui portait sur le stationnement et avait été organisée à la suite d'une demande des habitants ait été l'occasion pour M. B... de faire campagne, ni que M. B... aurait illégalement fait participer des agents municipaux à sa campagne électorale ou utilisé la communication institutionnelle de la commune, entre les deux tours, pour faire la promotion des actions menées dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19, ni enfin que les autres manquements invoqués seraient constitués. Il résulte de ce qui précède que ni les dispositions de l'article L. 50 du code électoral en vertu duquel " Il est interdit à tout agent de l'autorité publique ou municipale de distribuer des bulletins de vote, professions de foi et circulaires des candidats " ni celles des articles L. 52-1 et L. 52-8 citées ci-dessus n'ont été méconnues.
15. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 43 du code électoral : " Les bureaux de vote sont présidés par les maire, adjoints et conseillers municipaux dans l'ordre du tableau. A leur défaut, les présidents sont désignés par le maire parmi les électeurs de la commune. / En cas d'absence, le président est remplacé par un suppléant désigné par lui parmi les conseillers municipaux ou les électeurs de la commune, ou, à défaut, par le plus âgé des assesseurs. Le suppléant exerce toutes les attributions du président. Le secrétaire est remplacé en cas d'absence par l'assesseur le plus jeune ". Il ne résulte pas de l'instruction que le fait que les présidents suppléants ont été désignés, non parmi les membres du conseil municipal dans l'ordre du tableau mais parmi les candidats non élus de la liste " Bondoufle l'Enjeu ", en méconnaissance de l'article R. 43 du code électoral, aurait eu, dans les circonstances de l'espèce, le caractère d'une manoeuvre ayant altéré la sincérité du scrutin.
16. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 49 du code électoral : " A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de : (...) 2° Diffuser ou faire diffuser par tout moyen de communication au public par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale (...) ". S'il est admis par M. B... que le samedi 14 mars 2020, veille du premier tour des élections, des membres de son équipe se trouvaient devant un supermarché de Bondoufle, il n'est pas établi par l'instruction, d'une part, que ces personnes auraient installé une table afin de réaliser une permanence et, d'autre part, que des affiches du candidat auraient été collées sur les panneaux d'affichage libres. En tout état de cause, eu égard à la brièveté de cette présence et à l'écart de voix entre les candidats, ces faits ne seraient pas de nature à avoir altéré la sincérité du scrutin.
17. En septième lieu, la circonstance que l'affichage des voeux de début d'année du maire et de l'ensemble des conseillers municipaux n'ait pas été retiré des panneaux électoraux pendant la campagne ne saurait être regardée, à elle seule, comme ayant méconnu l'article L. 52-8 du code électoral.
18. En huitième lieu, les dispositions de l'article L. 97 du code électoral, qui prévoient les peines et amendes dont sont passibles les auteurs de certaines infractions, ne peuvent être utilement invoquées au soutien de conclusions tendant à l'annulation d'opérations électorales.
19. En dernier lieu, il résulte de l'instruction que M. B..., en distribuant des masques fournis par la région d'Ile-de-France, en assurant des permanences hebdomadaires et en étant présent sur les marchés dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19, n'a pas excédé ses fonctions de maire.
20. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé les opérations électorales qui se sont déroulées les 15 avril et 28 juin 2020 en vue de l'élection des conseillers municipaux et communautaires dans la commune de Bondoufle.
21. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font obstacle aux conclusions présentées au titre des mêmes dispositions par M. G... et Mme D....
D E C I D E :
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Article 1er : L'article 1er du jugement du 16 février 2021 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : Les opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars et 28 juin 2020 à Bondoufle sont validées.
Article 3 : Les conclusions de M. G... et de Mme D... tendant à l'annulation des opérations électorales sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de M. G... tendant à l'inéligibilité de M. B... sont rejetées.
Article 5: Les conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. C... B..., à M. E... G... et à M. F... D....
Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.