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Décision n° 446715
8 décembre 2020
Conseil d'État

N° 446715
ECLI:FR:CEORD:2020:446715.20201208
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés


Lecture du mardi 8 décembre 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 novembre et 1er décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (UMIH), l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie Nouvelle Aquitaine (UMIH NA) et l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie de la Gironde (UMIH 33) demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de l'article 40 du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire interdisant toute activité aux restaurants traditionnels et aux débits de boissons ;

2°) d'ordonner la communication de toutes informations et documents de nature à fonder les mesures de police administrative litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :
- elles justifient d'un intérêt à agir ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors, d'une part, que les répercussions des mesures contestées sur la situation financière des entreprises de la restauration, des bars et des cafés sont particulièrement graves et, d'autre part, qu'a été annoncée la prolongation de ces mesures ;
- il existe, pour les raisons qui suivent, un doute sérieux quant à la légalité des dispositions contestées ;
- les dispositions contestées créent une différence de traitement entre, d'une part, la restauration traditionnelle et, d'autre part, la restauration collective et la restauration au bénéfice exclusif des professionnels du transport routier, qui n'est justifiée par aucune différence de situation au regard du risque sanitaire ;
- cette différence de traitement a été prise en méconnaissance de l'article L. 3131-15 du code de santé publique, dès lors qu'elle n'est pas justifiée par un motif d'intérêt général lié à l'objectif de protection de la santé publique en ce que, en premier lieu, aucun élément scientifique ne permet de démontrer que la restauration traditionnelle est plus à risque que la restauration collective ou celle au bénéfice des professionnels du transport routier, en deuxième lieu, cette différence n'avait pas été opérée par le décret du 23 mars 2020, en troisième lieu, la fermeture des restaurants traditionnels a pour conséquence une augmentation de la pression sanitaire sur la restauration collective, en quatrième lieu, la restauration au bénéfice des professionnels du transport routier réunit des personnes qui réalisent des transports de longue distance et peuvent être ainsi plus à risque de propager le virus covid-19 et, en dernier lieu, à supposer que le maintien de l'ouverture de la restauration collective puisse être justifié par la continuité de l'activité économique générale, le gouvernement devait autoriser l'ouverture de certains restaurants traditionnels ou cafés, sous condition d'accueillir des salariés d'entreprises ;
- cette différence de traitement est injustifiée au regard du caractère de première nécessité de l'ensemble des services de restauration ;
- cette interdiction générale est disproportionnée dès lors, en premier lieu, que le degré de propagation de la pandémie varie selon les territoires, en deuxième lieu, que le risque sanitaire lié à la propagation du virus dans les bars, restaurants et cafés n'est pas suffisamment significatif pour justifier l'intensité de ces mesures, en troisième lieu, qu'aucun élément ne démontre que les protocoles sanitaires mis en place au sein du secteur de la restauration avant les mesures contestées étaient insuffisants ou non respectés, en quatrième lieu, que d'autres mesures moins attentatoires aux droits et libertés, comme un " couvre-feu " ou une différenciation entre les établissements selon leur capacité à appliquer des mesures propres à limiter la propagation et la circulation du virus, auraient pu être prises et, en dernier lieu, que les mesures de compensation financière s'avèrent insuffisantes pour assurer la viabilité économique du secteur de la restauration ;
- les mesures contestées portent une atteinte grave à la liberté de commerce et d'industrie, à la liberté d'entreprendre et au droit de la concurrence.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er décembre 2020, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la disposition contestée.

La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre de l'économie, des finances et de la relance, qui n'ont pas produit d'observations.



Après avoir convoqué à une audience publique l'UMIH, l'UMIH NA, l'UMIH 33, le Premier ministre, le ministre de l'économie, des finances et de la relance et le ministre des solidarités et de la santé ;

Ont été entendus lors de l'audience publique du 2 décembre 2020, à 9h30 :

- les représentants de l'Union des métiers et industries de l'hôtellerie et autres ;

- les représentants du ministre des solidarités et de la santé ;

à l'issue de laquelle le juge des référés a différé la clôture de l'instruction au 4 décembre 2020 à 15 heures.

Vu les observations et les pièces, enregistrées le 3 décembre 2020, produites par le ministre des solidarités et de la santé ;

Vu les observations, enregistrées le 4 décembre 2020, produites par l'Union des métiers et industries de l'hôtellerie et autres ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la Constitution, et notamment son préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de la santé publique ;
- le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020, modifié par le décret n° 2020-1358 du 6 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative ;


Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".
Sur le cadre du litige :

2. Aux termes de l'article L. 3131-12 du code de la santé publique, issu de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 : " L'état d'urgence sanitaire peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ainsi que du territoire des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ". L'article L. 3131-13 du même code précise que " L'état d'urgence sanitaire est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. Ce décret motivé détermine la ou les circonscriptions territoriales à l'intérieur desquelles il entre en vigueur et reçoit application. Les données scientifiques disponibles sur la situation sanitaire qui ont motivé la décision sont rendues publiques. / (...) / La prorogation de l'état d'urgence sanitaire au-delà d'un mois ne peut être autorisée que par la loi, après avis du comité de scientifiques prévu à l'article L. 3131-19 ". Aux termes de l'article L. 3131-15 du même code : " Dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique : / (...) 5° Ordonner la fermeture provisoire et réglementer l'ouverture, y compris les conditions d'accès et de présence, d'une ou plusieurs catégories d'établissements recevant du public. " Ces mesures doivent être " strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires. "
3. L'émergence d'un nouveau coronavirus, responsable de la maladie à coronavirus 2019 ou Covid-19 et particulièrement contagieux, a été qualifiée d'urgence de santé publique de portée internationale par l'Organisation mondiale de la santé le 30 janvier 2020, puis de pandémie le 11 mars 2020. La propagation du virus sur le territoire français a conduit le ministre chargé de la santé puis le Premier ministre à prendre, à compter du 4 mars 2020, des mesures de plus en plus strictes destinées à réduire les risques de contagion. Pour faire face à l'aggravation de l'épidémie, la loi du 23 mars 2020 a créé un régime d'état d'urgence sanitaire, défini aux articles L. 3131-12 à L. 3131-20 du code de la santé publique, et a déclaré l'état d'urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter du 24 mars 2020. La loi du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ces dispositions a prorogé cet état d'urgence sanitaire jusqu'au 10 juillet 2020. L'évolution de la situation sanitaire a conduit à un assouplissement des mesures prises et la loi du 9 juillet 2020 a organisé un régime de sortie de cet état d'urgence.

4. Une nouvelle progression de l'épidémie au cours des mois de septembre et d'octobre, dont le rythme n'a cessé de s'accélérer au cours de cette période, a conduit le Président de la République à prendre le 14 octobre dernier, sur le fondement des articles L. 3131-12 et L. 3131-13 du code de la santé publique, un décret déclarant l'état d'urgence sanitaire à compter du 17 octobre sur l'ensemble du territoire national. Le 29 octobre 2020, le Premier ministre a pris, sur le fondement de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, le décret dont la suspension de l'exécution de l'article 40 est demandée, prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire. L'article 1er de la loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire a prorogé l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 16 février 2021 inclus.

Sur la base légale de la fermeture des bars et restaurants :

5. Il résulte de l'instruction, y compris des déclarations faites lors de l'audience publique, que, pour faire face à la situation d'urgence sanitaire, le gouvernement, en prenant les mesures détaillées par le décret du 29 octobre 2020, a fait le choix d'une politique qui cherche à casser la dynamique actuelle de progression du virus par la stricte limitation des déplacements de personnes hors de leur domicile. A cette fin, il a, à l'article 4 du décret, interdit tout déplacement des personnes hors de leur lieu de résidence et fixé une liste limitative des exceptions à cette interdiction. A la même fin, le gouvernement a interdit l'accès à certains établissements relevant des types d'établissements définis par le règlement pris en application de l'article R. 123-12 du code de la construction et de l'habitation et où l'accueil du public. Il a en outre fortement encadré les conditions d'accès aux établissements dont l'accès n'était pas interdit. Ainsi, aux termes de l'article 40 du décret du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, dans sa version applicable, issue du décret du 6 novembre susvisé : " I. - Les établissements relevant des catégories mentionnées par le règlement pris en application de l'article R. 123-12 du code de la construction et de l'habitation figurant ci-après ne peuvent accueillir du public : / 1° Etablissements de type N : Restaurants et débits de boisson ; / (...). / Par dérogation, les établissements mentionnés au présent I peuvent continuer à accueillir du public pour : / - leurs activités de livraison et de vente à emporter ; / (...) - la restauration collective en régie et sous contrat ; / - la restauration assurée au bénéfice exclusif des professionnels du transport routier dans le cadre de l'exercice de leur activité professionnelle, entre 18 heures et 10 heures du matin ; le représentant de l'Etat dans le département arrête la liste des établissements qui, eu égard à leur proximité des axes routiers et à leur fréquentation habituelle par les professionnels du transport routier, sont autorisés à accueillir du public en application du présent alinéa. / II. - Pour la restauration collective en régie ou sous contrat, ainsi que la restauration assurée au bénéfice exclusif des professionnels du transport routier, les gérants des établissements mentionnés au I organisent l'accueil du public dans les conditions suivantes : / 1° Les personnes accueillies ont une place assise ; / 2° Une même table ne peut regrouper que des personnes venant ensemble ou ayant réservé ensemble, dans la limite de six personnes ; / 3° Une distance minimale d'un mètre est garantie entre les chaises occupées par chaque personne, sauf si une paroi fixe ou amovible assure une séparation physique. Cette règle de distance ne s'applique pas aux groupes, dans la limite de six personnes, venant ensemble ou ayant réservé ensemble ; / 4° La capacité maximale d'accueil de l'établissement est affichée et visible depuis la voie publique lorsqu'il est accessible depuis celle-ci. / III. - Portent un masque de protection : / 1° Le personnel des établissements ; / 2° Les personnes accueillies de onze ans ou plus lors de leurs déplacements au sein de l'établissement. " L'Union des métiers et industries de l'hôtellerie et autres demandent la suspension, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de l'article 40 du décret du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, tel que modifié par le décret du 6 novembre susvisé. Ils en demandent par ailleurs, sous le n° 446732, l'annulation.

Sur la nécessité et la proportionnalité de la fermeture nationale des bars et restaurants :

En ce qui concerne la situation sanitaire générale et le risque afférent à l'ouverture des bars et restaurants :

6. Il résulte de l'instruction qu'à la date du 6 novembre 2020, 1 661 853 cas ont été confirmés positifs au virus en France, soit 60 486 de plus en 24h. Le taux de positivité des tests était situé à 20,64 %. 39 865 décès étaient à déplorer, soit 398 de plus en 24h à l'hôpital. Le taux d'incidence était alors de 464,68 pour 100 000 habitants et le taux de reproduction effectif du virus de 1,14. Le taux d'occupation des lits en réanimation par des patients atteints de la Covid-19 par rapport à la capacité initiale des établissements restait à un niveau élevé, avec un taux de 85,4 % en moyenne nationale (134 % en Auvergne Rhône-Alpes, 109 % en Haut-de-France, 90 % en Ile-de-France ou 101 % en région PACA).

7. Il résulte de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas contesté que la contamination à la Covid-19 s'opère principalement par gouttelettes respiratoire, par contact et par voie aéroportée et qu'une distance d'un mètre ne suffit pas à elle seule à limiter la contagion en espace clos. Il est également possible d'être contaminé par le biais des surfaces sur lesquelles le virus s'est déposé. Le Haut conseil pour la santé publique, dans son avis du 17 septembre 2020, ainsi que le comité de scientifiques, dans sa note d'alerte du 22 septembre 2020, ont tous deux souligné que les expositions et transmissions ont lieu principalement, d'une part, au sein de la famille et, d'autre part, en cas de regroupements sociaux avec forte densité de personne. La durée de présence dans un même espace clos avec plusieurs personnes aggrave par ailleurs le risque de contamination. Il résulte en outre de l'instruction, et notamment de l'étude Mobility network models of COVID-19 explain inequities and inform reopening, réalisée à partir des données de géolocalisation de 98 millions d'habitants des 10 plus importantes aires urbaines des Etats-Unis et publiée le 10 novembre 2020 dans la revue Nature, que les restaurants, bars et hôtels, présentent, avec les salles de sport, un risque significativement plus élevé de transmission du virus que les autres lieux de brassage de population, y compris les commerces. Si les requérants font valoir que la situation française est différente, de par l'existence de protocoles sanitaires comme d'habitudes de consommation et de déplacements différentes de celles des consommateurs américains, il ne résulte pas de l'instruction que les conclusions de cette étude, fondée sur l'étude du taux de fréquentation et du temps passé dans chaque lieu de brassage de population, et eu égard à l'ampleur de l'échantillon concerné, ne puissent pas être valablement prises en compte par les pouvoirs publics pour apprécier le risque. Tout en relevant que les contaminations intrafamiliales sont une autre source majeure de contamination, les autres études produites par le ministre des solidarités et de la santé aboutissent, par des méthodologies différentes et que les requérantes ne critiquent pas utilement, à des conclusions identiques, en ce qui concerne les risques afférents à la fréquentation des restaurants et des bars.

En ce qui concerne la possibilité de mesures moins contraignantes que la fermeture des bars et restaurants sur l'ensemble du territoire :

8. Les requérantes font valoir que les différences existant dans la situation sanitaire des régions et des villes françaises justifient une appréciation géographiquement différenciée des mesures à prendre. Toutefois, la situation sanitaire, telle que décrite au point 6 ci-dessus, a mis sous tension l'ensemble du système de santé et a rendu nécessaire, sur l'ensemble du territoire, des transferts de patients entre régions et avec des pays voisins ainsi que des déprogrammations d'hospitalisations non urgentes. Il ne résulte pas de l'instruction, eu égard au risque afférent à la fréquentation des restaurants, mentionnés au point précédent, qu'une approche différenciée selon les territoires eut été de nature à permettre de casser la dynamique actuelle de progression du virus.

9. Les requérantes estiment en outre que des mesures moins drastiques que la fermeture - comme un couvre-feu ou une réduction significative de la jauge des restaurants - étaient susceptibles d'aboutir à un résultat sanitaire satisfaisant et que la mesure de fermeture est, par suite, disproportionnée. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction que ces mesures seraient susceptibles d'aboutir à un effet sanitaire comparable à celui attendu de la fermeture. C'est l'échec de la mesure de couvre-feu mise en oeuvre à compter du 17 octobre dernier qui a justifié, selon le gouvernement, l'adoption de mesures plus contraignantes. Enfin, le moyen tiré de ce qu'une différenciation entre les établissements serait possible, en fonction de leur capacité à appliquer des mesures propres à limiter la propagation et la circulation du virus, n'est pas assorti en l'état de l'instruction des précisions permettant d'en apprécier l'impact tant sanitaire qu'économique. Ainsi, alors même que ni le maintien de l'autorisation de vente à distance et de vente à emporter ni l'élargissement et le renforcement des mesures de soutien aux entreprises, mis en oeuvre par le gouvernement, ne sont de nature à compenser les pertes de revenus subies par les restaurateurs, l'atteinte portée à la liberté du commerce et de l'industrie, aussi significative soit-elle, n'est pas excessive eu égard aux risques sanitaires encourus, pour la population générale, du fait du brassage de population dans les salles de consommation sur place de ces établissements.

Sur l'atteinte au principe d'égalité :

10. Il ne résulte ni de l'instruction ni des échanges tenus à l'audience que la restauration collective et la restauration au bénéfice exclusif des professionnels du transport routier présenteraient, au regard du seul risque sanitaire, une situation différente de celle de la restauration traditionnelle. Comme il a été rappelé au point 5, le gouvernement a fait le choix, au vu de la situation sanitaire décrite au point 6, d'interdire aux personnes de se déplacer hors de leur lieu de résidence, sauf exceptions limitativement énumérées, au nombre desquelles figure, lorsque le télétravail est impossible, les déplacements à motif professionnel. Le gouvernement a en outre choisi, au nom de l'intérêt de l'enfant, de maintenir les établissements scolaires ouverts. En autorisant la restauration collective, qui a un objet différent de la restauration ordinaire et est placée dans une situation différente au regard des nécessités liées à la poursuite de la vie du pays, l'article 40 du décret du 29 octobre 2020 n'a porté atteinte ni au principe d'égalité, ni à celui de libre concurrence. Pour les mêmes motifs, il en va de même de l'accueil le soir et la nuit des seuls transporteurs routiers par certains restaurants spécifiquement désignés.
11. Il résulte de ce qui précède qu'aucun des moyens soulevés n'est, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée. Il suit de là, sans qu'il soit besoin d'examiner la condition d'urgence, que la requête de l'Union des métiers et industries de l'hôtellerie et autres doit être rejetée, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.


O R D O N N E :
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Article 1er : La requête présentée par l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie, l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie Nouvelle Aquitaine et l'Union des métiers et des industries de la Gironde est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie, premier requérant dénommé, au Premier ministre, au ministre de l'économie, des finances et de la relance et au ministre des solidarités et de la santé.