Conseil d'État
N° 413967
ECLI:FR:CECHR:2019:413967.20190619
Mentionné aux tables du recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
Mme Céline Guibé, rapporteur
Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public
Lecture du mercredi 19 juin 2019
Vu la procédure suivante :
M. A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les deux titres de perception émis le 24 juin 2014 à son encontre par le directeur départemental des territoires et de la mer de la Loire-Atlantique au titre de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive, en tant qu'ils mettent à sa charge la totalité des taxes dont un permis de construire délivré le 17 mai 2013 par le maire de Saint-Herblain constitue le fait générateur. Par un jugement n° 1502961 du 4 juillet 2017, le tribunal administratif de Nantes a fait droit à sa demande.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 septembre et 5 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de la cohésion des territoires demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code du patrimoine ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Céline Guibé, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...et M. et Mme B...ont obtenu du maire de Saint-Herblain (Loire-Atlantique), le 17 mai 2013, un permis de construire deux maisons individuelles sur un terrain devant être divisé en propriété ou en jouissance avant l'achèvement de la construction. Le 24 juin 2014, le directeur départemental des territoires et de la mer de Loire-Atlantique a émis à l'encontre de M. A..., en vue du recouvrement de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive, deux titres de perception pour des montants de 3 095 euros et 355 euros respectivement. M. A... a demandé l'annulation de ces deux titres de perception au motif qu'ils mettent à sa charge la totalité des taxes dont le permis du 17 mai 2013 constitue le fait générateur. Par le jugement du 21 mars 2017 contre lequel le ministre de la cohésion des territoires se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Nantes a fait droit à cette demande.
Sur la redevance d'archéologie préventive :
2. Le produit de la redevance d'archéologie préventive était, en vertu de l'article L. 524-11 du code du patrimoine dans sa rédaction applicable à l'imposition en litige, reversé à l'Institut national de recherches archéologiques préventives, établissement public national à caractère administratif ou, après prélèvement d'un pourcentage au profit du Fonds national pour l'archéologie préventive, à la collectivité territoriale ou au groupement de collectivités territoriales concernés dans le cas où ils ont confié à leur propre service archéologique l'ensemble des opérations d'aménagement ou de travaux réalisés sur leur territoire. Compte tenu de ces règles d'affectation, le litige concernant cette redevance ne saurait être regardé comme étant relatif à un impôt local au sens de l'article R. 222-13 du code de justice administrative, auquel renvoie l'article R. 811-1 définissant les matières dans lesquelles les tribunaux administratifs statuent en dernier ressort. Dès lors, le pourvoi du ministre de la cohésion des territoires, en tant qu'il est dirigé contre l'article 2 du jugement attaqué, doit être regardé comme un appel relevant de la compétence de la cour administrative d'appel de Nantes.
Sur la taxe d'aménagement :
3. Aux termes de l'article L. 331-6 du code de l'urbanisme : " Les (...) opérations de construction (...) soumises à un régime d'autorisation en vertu du présent code donnent lieu au paiement d'une taxe d'aménagement, sous réserve des dispositions des articles L. 331-7 à L. 331-9. / Les redevables de la taxe sont les personnes bénéficiaires des autorisations mentionnées au premier alinéa du présent article (...). / Le fait générateur de la taxe est (...) la date de délivrance de l'autorisation de construire (...) ". Aux termes de l'article L. 331-24 du même code : " La taxe d'aménagement et la pénalité dont elle peut être assortie en vertu de l'article L. 331-23 sont recouvrées par les comptables publics compétents comme des créances étrangères à l'impôt et au domaine. / Le recouvrement de la taxe fait l'objet de l'émission de deux titres de perception correspondant à deux fractions égales à la moitié de la somme totale à acquitter, ou de l'émission d'un titre unique lorsque le montant n'excède pas 1 500 euros (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'un permis de construire a été délivré à plusieurs personnes physiques ou morales pour la construction de bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance avant l'achèvement des travaux conformément à l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme, les redevables de la taxe d'aménagement dont ce permis est le fait générateur sont les titulaires de celui-ci, chacun d'entre eux étant redevable de l'intégralité de la taxe due à raison de l'opération de construction autorisée. Dans une telle hypothèse, l'administration compétente peut mettre cette taxe à la charge soit de l'un quelconque des bénéficiaires du permis, soit de chacun de ces bénéficiaires à la condition alors que le montant cumulé correspondant aux différents titres de perception émis n'excède pas celui de la taxe due à raison de la délivrance du permis. Par suite, en jugeant que le service ordonnateur ne pouvait mettre la taxe d'aménagement due à raison de l'opération de construction autorisée par le permis de construire délivré le 17 mai 2013 à la charge du seul M. A... au motif que M. et Mme B...étaient, eux aussi, bénéficiaires du permis et, par suite, redevables de cette taxe, le tribunal a commis une erreur de droit. Le ministre de la cohésion des territoires et de la mer est fondé pour ce motif, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
6. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 ci-dessus que M. A...était, en sa qualité de bénéficiaire du permis de construire délivré le 17 mai 2013, comme M. et MmeB..., redevable de l'intégralité de la taxe d'aménagement due à raison des constructions autorisées par ce permis. Par suite, le directeur départemental des territoires et de la mer de Loire-Atlantique pouvait légalement émettre un titre de perception à son encontre pour obtenir de lui le recouvrement de l'intégralité de cette taxe, sans préjudice de la faculté pour M. A...de réclamer aux autres bénéficiaires du permis de construire le reversement de la part de la taxe correspondant aux constructions dont la propriété leur a été dévolue à la suite de la division du terrain. Il s'ensuit que la demande de M. A...tendant à l'annulation du titre de perception émis le 24 juin 2014 mettant à sa charge la totalité de la taxe due à raison du permis de construire délivré le 17 mai 2013 doit être rejetée.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement des conclusions présentées par le ministre de la cohésion des territoires tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Nantes du 21 mars 2017 est attribué à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 2 : L'article 1er du jugement du tribunal administratif du 4 juillet 2017 est annulé.
Article 3 : Les conclusions de la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Nantes tendant à l'annulation du titre de perception émis le 24 juin 2014 pour le recouvrement de la somme de 3 095 euros au titre de la taxe d'aménagement sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, à M. A... et au président de la cour administrative d'appel de Nantes.
N° 413967
ECLI:FR:CECHR:2019:413967.20190619
Mentionné aux tables du recueil Lebon
9ème - 10ème chambres réunies
Mme Céline Guibé, rapporteur
Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public
Lecture du mercredi 19 juin 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. A...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les deux titres de perception émis le 24 juin 2014 à son encontre par le directeur départemental des territoires et de la mer de la Loire-Atlantique au titre de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive, en tant qu'ils mettent à sa charge la totalité des taxes dont un permis de construire délivré le 17 mai 2013 par le maire de Saint-Herblain constitue le fait générateur. Par un jugement n° 1502961 du 4 juillet 2017, le tribunal administratif de Nantes a fait droit à sa demande.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 septembre et 5 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de la cohésion des territoires demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code du patrimoine ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Céline Guibé, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...et M. et Mme B...ont obtenu du maire de Saint-Herblain (Loire-Atlantique), le 17 mai 2013, un permis de construire deux maisons individuelles sur un terrain devant être divisé en propriété ou en jouissance avant l'achèvement de la construction. Le 24 juin 2014, le directeur départemental des territoires et de la mer de Loire-Atlantique a émis à l'encontre de M. A..., en vue du recouvrement de la taxe d'aménagement et de la redevance d'archéologie préventive, deux titres de perception pour des montants de 3 095 euros et 355 euros respectivement. M. A... a demandé l'annulation de ces deux titres de perception au motif qu'ils mettent à sa charge la totalité des taxes dont le permis du 17 mai 2013 constitue le fait générateur. Par le jugement du 21 mars 2017 contre lequel le ministre de la cohésion des territoires se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Nantes a fait droit à cette demande.
Sur la redevance d'archéologie préventive :
2. Le produit de la redevance d'archéologie préventive était, en vertu de l'article L. 524-11 du code du patrimoine dans sa rédaction applicable à l'imposition en litige, reversé à l'Institut national de recherches archéologiques préventives, établissement public national à caractère administratif ou, après prélèvement d'un pourcentage au profit du Fonds national pour l'archéologie préventive, à la collectivité territoriale ou au groupement de collectivités territoriales concernés dans le cas où ils ont confié à leur propre service archéologique l'ensemble des opérations d'aménagement ou de travaux réalisés sur leur territoire. Compte tenu de ces règles d'affectation, le litige concernant cette redevance ne saurait être regardé comme étant relatif à un impôt local au sens de l'article R. 222-13 du code de justice administrative, auquel renvoie l'article R. 811-1 définissant les matières dans lesquelles les tribunaux administratifs statuent en dernier ressort. Dès lors, le pourvoi du ministre de la cohésion des territoires, en tant qu'il est dirigé contre l'article 2 du jugement attaqué, doit être regardé comme un appel relevant de la compétence de la cour administrative d'appel de Nantes.
Sur la taxe d'aménagement :
3. Aux termes de l'article L. 331-6 du code de l'urbanisme : " Les (...) opérations de construction (...) soumises à un régime d'autorisation en vertu du présent code donnent lieu au paiement d'une taxe d'aménagement, sous réserve des dispositions des articles L. 331-7 à L. 331-9. / Les redevables de la taxe sont les personnes bénéficiaires des autorisations mentionnées au premier alinéa du présent article (...). / Le fait générateur de la taxe est (...) la date de délivrance de l'autorisation de construire (...) ". Aux termes de l'article L. 331-24 du même code : " La taxe d'aménagement et la pénalité dont elle peut être assortie en vertu de l'article L. 331-23 sont recouvrées par les comptables publics compétents comme des créances étrangères à l'impôt et au domaine. / Le recouvrement de la taxe fait l'objet de l'émission de deux titres de perception correspondant à deux fractions égales à la moitié de la somme totale à acquitter, ou de l'émission d'un titre unique lorsque le montant n'excède pas 1 500 euros (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'un permis de construire a été délivré à plusieurs personnes physiques ou morales pour la construction de bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance avant l'achèvement des travaux conformément à l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme, les redevables de la taxe d'aménagement dont ce permis est le fait générateur sont les titulaires de celui-ci, chacun d'entre eux étant redevable de l'intégralité de la taxe due à raison de l'opération de construction autorisée. Dans une telle hypothèse, l'administration compétente peut mettre cette taxe à la charge soit de l'un quelconque des bénéficiaires du permis, soit de chacun de ces bénéficiaires à la condition alors que le montant cumulé correspondant aux différents titres de perception émis n'excède pas celui de la taxe due à raison de la délivrance du permis. Par suite, en jugeant que le service ordonnateur ne pouvait mettre la taxe d'aménagement due à raison de l'opération de construction autorisée par le permis de construire délivré le 17 mai 2013 à la charge du seul M. A... au motif que M. et Mme B...étaient, eux aussi, bénéficiaires du permis et, par suite, redevables de cette taxe, le tribunal a commis une erreur de droit. Le ministre de la cohésion des territoires et de la mer est fondé pour ce motif, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
6. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 ci-dessus que M. A...était, en sa qualité de bénéficiaire du permis de construire délivré le 17 mai 2013, comme M. et MmeB..., redevable de l'intégralité de la taxe d'aménagement due à raison des constructions autorisées par ce permis. Par suite, le directeur départemental des territoires et de la mer de Loire-Atlantique pouvait légalement émettre un titre de perception à son encontre pour obtenir de lui le recouvrement de l'intégralité de cette taxe, sans préjudice de la faculté pour M. A...de réclamer aux autres bénéficiaires du permis de construire le reversement de la part de la taxe correspondant aux constructions dont la propriété leur a été dévolue à la suite de la division du terrain. Il s'ensuit que la demande de M. A...tendant à l'annulation du titre de perception émis le 24 juin 2014 mettant à sa charge la totalité de la taxe due à raison du permis de construire délivré le 17 mai 2013 doit être rejetée.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement des conclusions présentées par le ministre de la cohésion des territoires tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Nantes du 21 mars 2017 est attribué à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 2 : L'article 1er du jugement du tribunal administratif du 4 juillet 2017 est annulé.
Article 3 : Les conclusions de la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Nantes tendant à l'annulation du titre de perception émis le 24 juin 2014 pour le recouvrement de la somme de 3 095 euros au titre de la taxe d'aménagement sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, à M. A... et au président de la cour administrative d'appel de Nantes.