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Ariane Web: Conseil d'État 366492, lecture du 24 juin 2013, ECLI:FR:CESSR:2013:366492.20130624

Décision n° 366492
24 juin 2013
Conseil d'État

N° 366492
ECLI:FR:CESSR:2013:366492.20130624
Inédit au recueil Lebon
9ème et 10ème sous-sections réunies
M. Jean-Luc Matt, rapporteur
Mme Claire Legras, rapporteur public
SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET, avocats


Lecture du lundi 24 juin 2013
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu le pourvoi, enregistré le 1er mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour la société France Télécom, dont le siège est 6, place d'Alleray à Paris (75015), représentée par son président-directeur général ; la société France Télécom demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 12PA01562 du 21 décembre 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 1017143 du 6 février 2012 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande en restitution de l'imposition forfaitaire annuelle (IFA) à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2010 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 ;
Vu le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Matt, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de la société France Telecom ;



1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'État fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux " ;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'État (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

3. Considérant que la société France Télécom soutient que, faute de préciser le fait générateur de l'imposition forfaitaire annuelle, l'article 223 septies du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 14 de la loi de finances pour 2009, est entaché d'une incompétence négative qui porte atteinte au droit de propriété garanti par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ; que, toutefois, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat statuant au contentieux par une jurisprudence constante depuis sa décision n° 03373 du 6 juillet 1977, l'imposition forfaitaire annuelle est, en application de l'article 223 septies du code général des impôts, due par les sociétés passibles de l'impôt sur les sociétés qui existent au 1er janvier de l'année d'imposition ; que, d'ailleurs, le 3 de l'article 223 nonies A du code général des impôts précise que les entreprises qui cessent de remplir une condition pour être exonérées, en application de son 1, de l'imposition forfaitaire annuelle prévue à l'article 223 septies sont redevables de cette imposition " le 1er janvier " de l'année suivant celle au cours de laquelle elles cessent de remplir les conditions pour être exonérées ; qu'ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, le législateur n'a pas omis de définir le fait générateur de cette imposition ; que par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que l'article 223 septies du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 14 de la loi de finances pour 2009, porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être regardé comme non sérieux ;

Sur les autres moyens :

5. Considérant que, pour demander l'annulation de l'arrêt attaqué, la société France Télécom soutient en outre que la cour l'a insuffisamment motivé en se bornant à affirmer que le fait générateur de l'IFA est constitué par l'existence de la société au 1er janvier ; qu'elle a commis une erreur de droit en jugeant que l'article 223 septies du code général des impôts était suffisamment précis pour être applicable directement ;

6. Considérant qu'aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi ;


D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société France Télécom.
Article 2 : Le pourvoi de la société France Télécom n'est pas admis.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société France Télécom et au ministre de l'économie et des finances.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.