CAA de TOULOUSE
N° 23TL02829
1ère chambre
M. Rey-Bèthbéder, président
M. Nicolas Lafon, rapporteur
Mme Restino, rapporteure publique
Lecture du jeudi 10 octobre 2024
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée unipersonnelle Econotre a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler le rapport d'observations définitives, qui lui a été adressé le 14 février 2022, de la chambre régionale des comptes Occitanie concernant le contrôle de ses comptes et de sa gestion pour les exercices 2014 à 2020 en sa qualité de délégataire du service public de traitement et de valorisation des déchets relevant du syndicat mixte de déchetteries, collectes sélectives, traitement, dit " B... ".
Par un jugement n° 2200907 du 3 octobre 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 1er décembre 2023, la société Econotre, représentée par Me Aguila et Me Hebert, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler en tout ou partie le rapport d'observations définitives qui lui a été adressé le 14 février 2022 ;
3°) d'enjoindre à la chambre régionale des comptes Occitanie de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner suite à l'annulation du rapport d'observations définitives, notamment en publiant le présent arrêt sur son site internet, en retirant ce rapport de son site internet, en supprimant de ce rapport les mentions annulées, en adressant à toute personne ayant reçu communication de ce rapport un courrier l'informant du présent arrêt, subsidiairement, en joignant ce dernier au rapport pour qu'il puisse être consultable en ligne et adressé à toute personne qui en demanderait communication ;
4°) de transmettre une demande d'avis au Conseil d'État en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative ;
5°) de mettre à la charge de la chambre régionale des comptes Occitanie une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement, qui ne précise pas les raisons pour lesquelles les premiers juges ont estimé que le rapport contesté n'était pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, est insuffisamment motivé ;
- il a retenu à tort que sa demande était irrecevable, dès lors que les observations contenues dans le rapport contesté procèdent d'un contrôle des comptes d'un délégataire de service public et qu'elles doivent être qualifiées d'actes de droit souple susceptibles de recours.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 février 2024, la chambre régionale des comptes Occitanie conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par la société appelante sont inopérants ou ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 24 juillet 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 août 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des juridictions financières ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lafon,
- les conclusions de Mme Restino, rapporteure publique,
- les observations de Me Hebert pour la société Econotre,
- et les observations de Mme A... pour la chambre régionale des comptes Occitanie.
Une note en délibéré, présentée pour la société Econotre, a été enregistrée le 28 septembre 2024.
Considérant ce qui suit :
1. La société Econotre fait appel du jugement du 3 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation du rapport d'observations définitives, qui lui a été adressé le 14 février 2022, de la chambre régionale des comptes Occitanie concernant le contrôle de ses comptes et de sa gestion pour les exercices 2014 à 2020 en sa qualité de délégataire du service public de traitement et de valorisation des déchets relevant du syndicat mixte B....
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". En se bornant, pour rejeter la demande présentée devant lui par la société Econotre tendant à l'annulation du rapport d'observations de la chambre régionale des comptes Occitanie, à indiquer que de telles observations, bien que formulées à titre définitif, ne présentent pas le caractère de décisions susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, le tribunal administratif de Montpellier a suffisamment motivé son jugement, alors même qu'il était soutenu que cette demande était recevable compte tenu de la nature, des effets et de l'influence des actes de droit souple contre lesquels elle était dirigée. Par suite, la société Econotre n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité sur ce point.
3. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-3 du code des juridictions financières : " Par ses contrôles, la chambre régionale des comptes contrôle les comptes et procède à un examen de la gestion. / Elle vérifie sur pièces et sur place la régularité des recettes et dépenses décrites dans les comptabilités des organismes relevant de sa compétence. Elle s'assure de l'emploi régulier des crédits, fonds et valeurs. / L'examen de la gestion porte sur la régularité des actes de gestion, sur l'économie des moyens mis en oeuvre et sur l'évaluation des résultats atteints par rapport aux objectifs fixés par l'assemblée délibérante ou par l'organe délibérant. L'opportunité de ces objectifs ne peut faire l'objet d'observations (...) ". L'article L. 211-4 du même code dispose que : " La chambre régionale des comptes contrôle les collectivités territoriales et les établissements publics locaux ". Aux termes de l'article L. 211-10 du même code : " La chambre régionale des comptes peut contrôler les comptes que les délégataires de service public ont produits aux autorités délégantes ". Aux termes enfin de l'article L. 243-4 du même code : " Les chambres régionales des comptes arrêtent leurs observations définitives et leurs recommandations sous la forme d'un rapport d'observations (...) ".
4. La société Econotre conteste en particulier les mentions du rapport d'observations définitives de la chambre régionale des comptes Occitanie selon lesquelles le montage contractuel retenu dans le cadre de la délégation de service public qui lui a été confiée le 31 juillet 1996 était déséquilibré, compte tenu d'un mode d'intéressement défavorable au syndicat mixte B..., alors qu'en sa qualité de délégataire n'ayant été exposée à aucun risque, elle enregistrait un résultat fortement excédentaire et un taux de profitabilité 2,5 fois supérieur à la moyenne des entreprises du secteur. Elle critique également les mentions relevant qu'elle n'avait pas communiqué au délégant les éléments exigibles et nécessaires à un contrôle opérant de la délégation, ainsi que les deux recommandations formulées dans le rapport, tendant à ce qu'elle transmette annuellement au syndicat mixte certaines informations sur l'évolution de la délégation de service public. Toutefois, les rapports d'observations définitives des chambres régionales des comptes s'inscrivent dans le cadre de l'examen de la gestion d'une collectivité territoriale, d'un établissement public local ou d'un des établissements, sociétés, groupements et organismes mentionnés aux articles L. 211-4 à L. 211-6 et L. 211-8 du code des juridictions financières, procèdent de la mise en oeuvre de garanties procédurales particulières et peuvent faire l'objet d'une demande de rectification, en vertu des articles L. 243-10 et R. 243-21 du code précité. Ainsi, ils ne sont pas susceptibles d'un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif, eu égard notamment à l'office de ce dernier, alors même qu'ils seraient susceptibles de produire des effets notables ou d'influer de manière significative sur les comportements de quelque personne que ce soit. Par suite, les premiers juges ont pu rejeter comme irrecevables les conclusions en annulation présentées par la société Econotre sans entacher leur jugement d'irrégularité.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de transmettre une demande d'avis au Conseil d'État en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, qui constitue en outre un pouvoir propre du juge, que la société Econotre n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle, en tout état de cause, à ce que soit mis à la charge de la chambre régionale des comptes Occitanie, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit sur leur fondement.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société Econotre est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée unipersonnelle Econotre, et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie en sera adressée à la chambre régionale des comptes Occitanie.
Délibéré après l'audience du 26 septembre 2024, où siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Lafon, président-assesseur,
Mme Fougères, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 octobre 2024.
Le rapporteur,
N. Lafon
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23TL02829
N° 23TL02829
1ère chambre
M. Rey-Bèthbéder, président
M. Nicolas Lafon, rapporteur
Mme Restino, rapporteure publique
Lecture du jeudi 10 octobre 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée unipersonnelle Econotre a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler le rapport d'observations définitives, qui lui a été adressé le 14 février 2022, de la chambre régionale des comptes Occitanie concernant le contrôle de ses comptes et de sa gestion pour les exercices 2014 à 2020 en sa qualité de délégataire du service public de traitement et de valorisation des déchets relevant du syndicat mixte de déchetteries, collectes sélectives, traitement, dit " B... ".
Par un jugement n° 2200907 du 3 octobre 2023, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 1er décembre 2023, la société Econotre, représentée par Me Aguila et Me Hebert, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler en tout ou partie le rapport d'observations définitives qui lui a été adressé le 14 février 2022 ;
3°) d'enjoindre à la chambre régionale des comptes Occitanie de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner suite à l'annulation du rapport d'observations définitives, notamment en publiant le présent arrêt sur son site internet, en retirant ce rapport de son site internet, en supprimant de ce rapport les mentions annulées, en adressant à toute personne ayant reçu communication de ce rapport un courrier l'informant du présent arrêt, subsidiairement, en joignant ce dernier au rapport pour qu'il puisse être consultable en ligne et adressé à toute personne qui en demanderait communication ;
4°) de transmettre une demande d'avis au Conseil d'État en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative ;
5°) de mettre à la charge de la chambre régionale des comptes Occitanie une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement, qui ne précise pas les raisons pour lesquelles les premiers juges ont estimé que le rapport contesté n'était pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, est insuffisamment motivé ;
- il a retenu à tort que sa demande était irrecevable, dès lors que les observations contenues dans le rapport contesté procèdent d'un contrôle des comptes d'un délégataire de service public et qu'elles doivent être qualifiées d'actes de droit souple susceptibles de recours.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 février 2024, la chambre régionale des comptes Occitanie conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par la société appelante sont inopérants ou ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 24 juillet 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 août 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des juridictions financières ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lafon,
- les conclusions de Mme Restino, rapporteure publique,
- les observations de Me Hebert pour la société Econotre,
- et les observations de Mme A... pour la chambre régionale des comptes Occitanie.
Une note en délibéré, présentée pour la société Econotre, a été enregistrée le 28 septembre 2024.
Considérant ce qui suit :
1. La société Econotre fait appel du jugement du 3 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation du rapport d'observations définitives, qui lui a été adressé le 14 février 2022, de la chambre régionale des comptes Occitanie concernant le contrôle de ses comptes et de sa gestion pour les exercices 2014 à 2020 en sa qualité de délégataire du service public de traitement et de valorisation des déchets relevant du syndicat mixte B....
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". En se bornant, pour rejeter la demande présentée devant lui par la société Econotre tendant à l'annulation du rapport d'observations de la chambre régionale des comptes Occitanie, à indiquer que de telles observations, bien que formulées à titre définitif, ne présentent pas le caractère de décisions susceptibles de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, le tribunal administratif de Montpellier a suffisamment motivé son jugement, alors même qu'il était soutenu que cette demande était recevable compte tenu de la nature, des effets et de l'influence des actes de droit souple contre lesquels elle était dirigée. Par suite, la société Econotre n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité sur ce point.
3. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-3 du code des juridictions financières : " Par ses contrôles, la chambre régionale des comptes contrôle les comptes et procède à un examen de la gestion. / Elle vérifie sur pièces et sur place la régularité des recettes et dépenses décrites dans les comptabilités des organismes relevant de sa compétence. Elle s'assure de l'emploi régulier des crédits, fonds et valeurs. / L'examen de la gestion porte sur la régularité des actes de gestion, sur l'économie des moyens mis en oeuvre et sur l'évaluation des résultats atteints par rapport aux objectifs fixés par l'assemblée délibérante ou par l'organe délibérant. L'opportunité de ces objectifs ne peut faire l'objet d'observations (...) ". L'article L. 211-4 du même code dispose que : " La chambre régionale des comptes contrôle les collectivités territoriales et les établissements publics locaux ". Aux termes de l'article L. 211-10 du même code : " La chambre régionale des comptes peut contrôler les comptes que les délégataires de service public ont produits aux autorités délégantes ". Aux termes enfin de l'article L. 243-4 du même code : " Les chambres régionales des comptes arrêtent leurs observations définitives et leurs recommandations sous la forme d'un rapport d'observations (...) ".
4. La société Econotre conteste en particulier les mentions du rapport d'observations définitives de la chambre régionale des comptes Occitanie selon lesquelles le montage contractuel retenu dans le cadre de la délégation de service public qui lui a été confiée le 31 juillet 1996 était déséquilibré, compte tenu d'un mode d'intéressement défavorable au syndicat mixte B..., alors qu'en sa qualité de délégataire n'ayant été exposée à aucun risque, elle enregistrait un résultat fortement excédentaire et un taux de profitabilité 2,5 fois supérieur à la moyenne des entreprises du secteur. Elle critique également les mentions relevant qu'elle n'avait pas communiqué au délégant les éléments exigibles et nécessaires à un contrôle opérant de la délégation, ainsi que les deux recommandations formulées dans le rapport, tendant à ce qu'elle transmette annuellement au syndicat mixte certaines informations sur l'évolution de la délégation de service public. Toutefois, les rapports d'observations définitives des chambres régionales des comptes s'inscrivent dans le cadre de l'examen de la gestion d'une collectivité territoriale, d'un établissement public local ou d'un des établissements, sociétés, groupements et organismes mentionnés aux articles L. 211-4 à L. 211-6 et L. 211-8 du code des juridictions financières, procèdent de la mise en oeuvre de garanties procédurales particulières et peuvent faire l'objet d'une demande de rectification, en vertu des articles L. 243-10 et R. 243-21 du code précité. Ainsi, ils ne sont pas susceptibles d'un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif, eu égard notamment à l'office de ce dernier, alors même qu'ils seraient susceptibles de produire des effets notables ou d'influer de manière significative sur les comportements de quelque personne que ce soit. Par suite, les premiers juges ont pu rejeter comme irrecevables les conclusions en annulation présentées par la société Econotre sans entacher leur jugement d'irrégularité.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de transmettre une demande d'avis au Conseil d'État en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, qui constitue en outre un pouvoir propre du juge, que la société Econotre n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle, en tout état de cause, à ce que soit mis à la charge de la chambre régionale des comptes Occitanie, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit sur leur fondement.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société Econotre est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée unipersonnelle Econotre, et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie en sera adressée à la chambre régionale des comptes Occitanie.
Délibéré après l'audience du 26 septembre 2024, où siégeaient :
M. Rey-Bèthbéder, président,
M. Lafon, président-assesseur,
Mme Fougères, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 octobre 2024.
Le rapporteur,
N. Lafon
Le président,
É. Rey-Bèthbéder
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23TL02829