Le Conseil d’État rejette les recours contre les décrets prononçant la dissolution des associations « L’Œuvre française » et « Jeunesses nationalistes » .
Les associations « L’Œuvre française » et « Jeunesses nationalistes » ont été dissoutes par deux décrets du 25 juillet 2013. Ces décrets ont été pris en application de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure, qui permet la dissolution d’associations qui présentent certaines caractéristiques spécifiques.
Les associations dissoutes et certains de leurs militants ont attaqué ces décrets devant le Conseil d’État. Par deux décisions rendues ce jour, le Conseil d’État a rejeté leurs requêtes.
En ce qui concerne « L’Œuvre française », le Conseil d’État commence par relever, notamment, que l’association a participé à des commémorations de la mort de Philippe Pétain, a choisi des emblèmes rappelant ceux utilisés par le régime de Vichy et a commémoré ou fait référence dans ses publications à des personnalités favorables à la collaboration avec l’ennemi pendant la seconde guerre mondiale. L’association avait donc pour but d’exalter la collaboration avec l’ennemi, ce qui constitue un des cas de dissolution prévu par la loi (5° de l’article L. 212-1). Le Conseil d’État estime ensuite que des articles de presse de membres dirigeants de l’association ou d’anciens dirigeants ayant conservé une forte influence au sein de l’association, ainsi que des communiqués de l’association elle-même diffusés sur son site internet, comportaient soit directement, soit indirectement, des éléments provoquant à la discrimination, à la haine ou à la violence, ce qui constitue également un cas de dissolution prévu par la loi (6° de l’article L. 212-1). Enfin, le Conseil d’État constate que « Jeune Nation », qui organise des « camps de formation », constitue l’émanation de « L’Œuvre française » et qu’ont lieu, lors de ces camps, des exercices d’entrainement à l’action de force. Il en résulte que « L’Œuvre française » peut être considérée comme une milice privée, ce qui constitue un troisième cas de dissolution prévu par la loi (2° de l’article L. 212-1). Le Conseil d’État juge donc que les motifs sur lesquels est fondé le décret de dissolution de « L’Œuvre française » sont légaux.
En ce qui concerne les « Jeunesses nationalistes », le Conseil d’État estime d’abord, contrairement à ce qu’affirme le décret, qu’il ne ressort pas des pièces versées au dossier que l’association aurait, par ses activités ou par celles de ses membres, exalté la collaboration avec l’ennemi au sens du 5° de l’article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure. Mais il juge ensuite, au vu de plusieurs communiqués publiés sur le site internet de l’association, de déclarations de son président et d’actions auxquelles ce dernier et des membres de l’association ont participé, que l’association incite à la haine, à la discrimination et à la violence envers des personnes en raison de leur nationalité étrangère, de leur origine ou de leur confession musulmane ou juive, ce qui constitue un motif de dissolution prévu par la loi (6° de l’article L. 212-1). Le Conseil d’État, estimant que le Gouvernement aurait pris la même décision de dissolution des « Jeunesses nationalistes » s’il n’avait retenu que ce dernier motif, en a déduit que cette dissolution est légale.
Enfin, dans les deux décisions, le Conseil d’État écarte d’autres critiques des requérants. Il souligne notamment que les procédures suivies ont été régulières et estime que la dissolution des associations respecte les règles de la convention européenne des droits de l’homme, la restriction à l’exercice des libertés d’expression et d’association étant justifiée par la gravité des dangers pour l’ordre public et la sécurité publique résultant des activités de l’association.