Maison d’arrêt de Nîmes

Décision de justice
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Le juge des référés du Conseil d’État ordonne certaines améliorations des conditions de détention à la maison d’arrêt de Nîmes.

> Lire la décision n° 392043, 392044

L’essentiel
- Le juge des référés du Conseil d’État était saisi de demandes portant sur la sur-occupation de la maison d’arrêt de Nîmes et les atteintes aux libertés fondamentales des personnes qui y sont détenues.

- Il ordonne à l’administration pénitentiaire de prendre au plus vite différentes mesures dans cette maison d’arrêt :

  • engager certains travaux de prévention des risques d’incendies ;

  • améliorer, dans l’attente d’une solution pérenne, les conditions d’installation des détenus durant la nuit, pour que ceux-ci ne dorment plus sur des matelas posés à même le sol ;

  • améliorer l’accès des détenus aux produits d’entretien des cellules et à des draps et couvertures propres.

- Il rejette en revanche les autres demandes dont il était saisi, notamment compte tenu de son office, qui limite son intervention à la prescription de mesures susceptibles d’être ordonnées à très bref délai.

Les faits et la procédure
La Section française de l’Observatoire international des prisons (SF-OIP) et l’Ordre des avocats près la cour d’appel de Nîmes avaient saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes, dans le cadre de la procédure de « référé liberté », de demandes portant sur la sur-occupation de la maison d’arrêt de Nîmes et les atteintes aux libertés fondamentales des personnes qui y sont détenues.

Cette procédure de « référé liberté » (article L. 521-2 du code de justice administrative) permet au juge administratif des référés d’ordonner, en cas d’urgence, toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une autorité administrative aurait porté, dans l’exercice de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale.

Par une ordonnance du 17 juillet 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes avait rejeté les demandes des requérants.

Ceux-ci ont alors fait appel devant le juge des référés du Conseil d’État.

L’ordonnance du juge des référés du Conseil d’État
Le juge des référés du Conseil d’État rappelle tout d’abord le cadre juridique : les exigences qui découlent notamment de la loi pénitentiaire et de la convention européenne des droits de l’homme imposent à l’administration pénitentiaire de prendre les mesures propres à protéger la vie des détenus, à leur éviter tout traitement inhumain ou dégradant et à leur garantir, dans une mesure compatible avec les contraintes inhérentes à la détention, le droit au respect de leur vie privée et familiale.

Le juge des référés du Conseil d’État précise ensuite son rôle lorsqu’il est saisi dans le cadre de la procédure de  «référé-liberté ». En cas d’urgence, il peut prendre les mesures nécessaires pour faire disparaître une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales des détenus. Mais il demeure un juge de l’urgence, ce qui entraine une certaine limitation de ses pouvoirs : les mesures qu’il ordonne doivent en principe être provisoires et il ne peut intervenir que s’il est possible de prendre utilement et à très bref délai des mesures de sauvegarde.

Le juge des référés du Conseil d’État examine ensuite les différentes demandes des requérants.

En premier lieu, ceux-ci demandaient au juge d’ordonner au ministre de la justice de prescrire des travaux de réfection de la maison d’arrêt, d’allouer aux services judiciaires et pénitentiaires de Nîmes des moyens supplémentaires et de réorganiser ses services pour remédier à divers dysfonctionnements. Mais ces mesures ne sont pas de celles que le juge du « référé-liberté » a le pouvoir d’ordonner, compte tenu de sa mission, qui est de se prononcer dans un délai très bref. Le juge des référés du Conseil d’État rejette donc, dans cette mesure, les demandes des requérants.

Était en cause, en deuxième lieu, la prévention des risques d’incendies dans l’établissement. Le juge des référés du Conseil d’État relève que des travaux ont déjà été réalisés en 2014 et que, sur les sept prescriptions formulées par la « sous-commission départementale pour la sécurité contre les risques d’incendie et de panique », quatre ont été réalisées ou sont en cours de réalisation. En revanche, trois de ces prescriptions n’ont pas encore été suivies par l’administration, ce dont résulte un risque. Le juge des référés ordonne donc à l’administration d’engager la mise en œuvre des travaux correspondants.

En troisième lieu, le juge des référés se prononce sur les conditions de détention en cellule. Il souligne que la maison d’arrêt, qui est sous-dimensionnée, est confrontée à  un taux de sur occupation particulièrement élevé. De ce fait, les personnes hébergées au-delà de la capacité d’accueil normale des cellules sont contraintes de dormir sur un matelas posé à même le sol. Le juge des référés estime que de telles conditions de détention, aggravées par la promiscuité et le manque d’intimité, constituent un traitement inhumain ou dégradant. Mais il tient compte des moyens dont dispose l’administration pénitentiaire, et observe en particulier qu’elle est tenue d’accueillir en maison d’arrêt toutes les personnes que l’autorité judiciaire décide de mettre sous écrou. Il constate, enfin, que la situation de la maison d’arrêt de Nîmes, bien que  gravement préoccupante, est en voie d’amélioration. Dans ces conditions, le juge des référés ordonne seulement à l’administration pénitentiaire de prendre, dans les meilleurs délais, des mesures pour améliorer, dans l’attente d’une solution pérenne, les conditions d’installation des détenus durant la nuit.

En quatrième lieu, les critiques des requérants portaient sur les conditions d’intimité et d’hygiène des détenus. Le juge des référés estime à cet égard que le dispositif de cloisonnement partiel des toilettes des cellules permet de préserver suffisamment l’intimité des détenus et ne porte donc pas d’atteinte grave et manifestement illégale à la dignité humaine. En revanche, il relève qu’il n’est pas établi que les produits d’entretien des cellules soient distribués suffisamment fréquemment et que, de même, les draps et les couvertures soient nettoyés suffisamment souvent. En conséquence, il ordonne à l’administration d’améliorer au plus vite l’accès aux produits d’entretien des cellules et à des draps et couvertures propres.