Conseil d'État, 3 juillet 1996, Koné

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Interprétation d’un traité d’extradition conformément à un principe constitutionnel

Les faits

M. Koné avait fait l’objet d’un décret accordant son extradition aux autorités maliennes pour l'exécution d'un mandat d'arrêt délivré par le président de la chambre d'instruction de la cour suprême du Mali dans le cadre de poursuites engagées à son encontre pour les faits de « complicité d'atteinte aux biens publics et enrichissement illicite » relatifs aux fonds transférés hors du Mali provenant de trafics d'hydrocarbures. M. Koné soutenait que la demande d'extradition avait un but politique.

L'accord franco-malien du 9 mars 1962 qui devait être appliqué interdisait l'extradition des personnes réclamées pour des infractions politiques, mais il ne comportait, en revanche, aucune stipulation excluant l'extradition demandée dans un but politique pour des infractions de droit commun.

Le sens et la portée de la décision

Par cette décision, le Conseil d’État juge qu’en vertu d'un principe fondamental reconnu par les lois de la République, l'extradition doit être refusée lorsqu'elle est demandée dans un but politique. Une convention d'extradition qui ne mentionne pas expressément cette condition doit être interprétée conformément à ce principe de valeur constitutionnelle.

Il juge donc que les stipulations de l'accord franco-malien doivent être interprétées conformément à ce principe de valeur constitutionnelle et ne sauraient, par suite, limiter le pouvoir de l'État français de refuser l'extradition au seul cas des infractions politiques. Le Conseil d’État estime cependant, en l’espèce, que le but politique de la demande d’extradition n'est pas établi. A l’inverse, il a jugé (CE, Section, 9 décembre 2016, M. A., n°s 394399, 400238, Rec.), que ce principe faisait obstacle, dans les circonstances de l’affaire, à l’extradition d’un opposant au régime politique du Kazakhstan vers la Russie.

En utilisant ce principe pour interpréter l’accord franco-malien, il a pris une position importante en ce qui concerne les rapports entre la Constitution et les traités. L'interprétation d'une convention internationale à la lumière d'un principe constitutionnel vient en effet tempérer la prééminence dont jouissaient, en pratique, les traités sur la Constitution, du fait du refus du juge administratif ou judiciaire de contrôler une éventuelle méconnaissance des dispositions de l’article 54 de la Constitution par la loi autorisant la ratification d'un traité, qui lui interdit de sanctionner l'éventuelle inconstitutionnalité du traité en cause.

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