Rapport public 1998

PUBLICATION Rapport annuel
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Rapport public 1998

L'activité juridictionnelle

Au cours de l'année 1998, l'activité contentieuse du Conseil d'Etat a été marquée par un accroissement sensible du nombre des affaires enregistrées : 10232, contre 8314 en 1997. Ces chiffres bruts doivent être nuancés pour mesurer l'activité contentieuse réelle : si l'on enlève les "séries" et affaires réglées par ordonnance du Président de la Section du contentieux, notamment pour régler les questions de compétence à l'intérieur de la juridiction administrative, il reste 5520 affaires enregistrées en 1998 contre 4471 en 1997. Les "sorties" restent plus nombreuses que les "entrées", mais, cependant plus faibles qu'en 1997 (en chiffres bruts : 10481, au lieu de 11173 en 1987). Le stock se résorbe donc moins vite que nous l'avions espéré.

Devant les tribunaux administratifs, le nombre des recours enregistrés continue sa progression : 123 834, en données nettes, contre 101 597 en 1997. Cette forte progression est due en particulier au contentieux des étrangers (plus de 20 000 dossiers) et, vraisemblablement, liée en grande partie à l'opération de régularisation des immigrés clandestins décidée par le Gouvernement. Le nombre des affaires jugées a augmenté de 8,60 % d'une année sur l'autre, passant de 96 367 à 104.615. De 1991 à 1998, il a augmenté de près de 60%. L'effort a été considérable, mais il ne permet encore de juger dans l'année que 84,5% des affaires enregistrées.

Enfin, l'engorgement des Cours administratives d'appel continue à être préoccupant. Le nombre d'affaires enregistrées a encore augmenté : 14 330, en données nettes, contre 12 477 en 1997, soit une augmentation de 14,85 %. Le nombre d'affaires réglées, soit 9199, est en hausse de 23,3 % par rapport à l'an dernier, mais le volume des stocks s'est alourdi, et le délai moyen de jugement atteint aujourd'hui 3 ans, 2 mois et 7 jours.

Certes, la nouvelle Cour administrative d'appel de Marseille n'a atteint qu'en fin d'année 1998 sa pleine capacité de jugement, et la Cour administrative d'appel de Douai sera créée en 1999. Mais un effort important reste nécessaire pour donner aux Cours les moyens de faire face à leur mission.

L'activité consultative

L'activité consultative du Conseil d'Etat a connu, en 1998, un rythme comparable à celui de l'année précédente. L'Assemblée générale s'est consacrée, en particulier, à l'examen de projets de loi importants, tels que, par exemple, quatre projets de loi constitutionnelle concernant respectivement le Conseil supérieur de la magistrature, l'égalité entre les femmes et les hommes, la ratification du Traité d'Amsterdam et la Nouvelle-Calédonie. Les sections administratives ont également examiné des projets de décret posant d'importantes questions de droit.

Le Conseil d'Etat, à l'examen de ces textes, a noté quelques évolutions préoccupantes. Il observe en premier lieu que l'administration prend de plus en plus de libertés avec la délimitation du domaine de la loi et du règlement telle qu'elle résulte des articles 34 et 37 de la Constitution. Les projets de loi qui lui sont soumis, en dehors-même des dispositions dépourvues de portée normative que le Conseil d'Etat a déjà souvent dénoncées, comportent tantôt des dispositions de nature réglementaire, tantôt des délégations législatives au pouvoir réglementaire insuffisamment encadrées ou précisées. Il n'est pas rare que des consultations obligatoires n'aient pas été effectuées, et que soient méconnus les textes relatifs à la déconcentration et au partage des compétences entre l'Etat et les territoires d'Outre-mer.

Enfin, et ceci est nouveau, le Gouvernement saisit le Conseil d'Etat, souvent en urgence, de projet de lois qui, ensuite, ne sont pas déposés devant le Parlement, ou, s'ils sont déposés, ne viennent jamais en discussion. C'est ainsi que tout le travail de codification est actuellement paralysé. De même, des projets de décret ne sont publiés au Journal officiel qu'après un délai qui peut excéder six mois à compter de la date de leur examen par le Conseil d'Etat.

Il est dommage que ces dysfonctionnements viennent rendre plus difficile une activité consultative par ailleurs très riche, pour laquelle le gouvernement fait volontiers appel à l'expertise du Conseil d'Etat. En 1998, la section du rapport et des études a mené à bien une étude, demandée par le Premier ministre sur "Internet et les réseaux numériques", avec le concours de près de 200 spécialistes de l'administration, de l'université, des associations et des entreprises concernées. Unique en son genre par la multiplicité des questions abordées, cette étude a déjà été largement utilisée par l'administration, notamment pour les négociations internationales en cours. Le Premier ministre a d'ailleurs demandé de continuer à bénéficier du concours des rapporteurs de l'étude pour assurer la mise en oeuvre des propositions qui y sont formulées.

D'autres études importantes ont été demandées en fin d'année 1998 (sur l'utilité publique, sur l'intégration du droit international dans le droit français) et sont en cours de réalisation.

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