Projet de loi prorogeant l’application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence

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Le Gouvernement a décidé de rendre public l'avis du Conseil d’État sur le projet de loi prorogeant l’application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence.

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CONSEIL D’ETAT    
Assemblée générale
Séance du jeudi 15 juin 2017
Section de l’intérieur
        
N° 393347
EXTRAIT DU REGISTRE DES DELIBERATIONS
AVIS SUR UN PROJET DE LOI
prorogeant l’application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence
1. Le Conseil d’État a été saisi le 6 juin 2017 d’un projet de loi prorogeant jusqu’au 1er novembre 2017 l’état d’urgence déclaré par les décrets n° 2015-1475 du 14 novembre 2015 et n° 2015-1493 du 18 novembre 2015 et prorogé à cinq reprises, en dernier lieu par la loi n° 2016 1767 du 19 décembre 2016, cette dernière prorogation s'achevant le 15 juillet 2017.
2. Le Conseil d’État estime en premier lieu, pour les raisons indiquées dans son précédent avis, liées à l’évolution de la situation dans les territoires de la zone irako-syrienne et à la présence en France d’individus adhérant aux objectifs de l’organisation terroriste qui contrôle une vaste partie de ces territoires, et au vu des informations les plus récentes fournies par le Gouvernement, que subsiste une menace terroriste persistante d’intensité élevée qui caractérise « un péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public » au sens de l’article 1er de la loi du 3 avril 1955.
En effet et notamment :
 
 - le nombre d’attentats commis en Europe depuis le début de l’année par ou pour le compte de la même organisation terroriste est plus élevé que ceux commis lors des six derniers mois de l’année 2016, plusieurs d’entre eux étant de grande ampleur, ceux de Manchester le 22 mai et de Londres le 3 juin en dernier lieu ;
- en France, outre les attaques commises par des individus se revendiquant de la même organisation terroriste contre des militaires et des policiers, plusieurs tentatives d’attentat ont été déjouées ces derniers mois.
3. En deuxième lieu, dans ces circonstances, le Conseil d’État considère, pour les mêmes raisons que celles énoncées dans son précédent avis, et compte tenu en outre de la décision du Conseil Constitutionnel n° 2017-635 QPC abrogeant la mesure d’interdiction de séjour, que le maintien temporaire des dispositions législatives propres à l’état d’urgence opère une conciliation qui n’est pas déséquilibrée entre la prévention des atteintes à l’ordre public et le respect des droits et libertés reconnus par la Constitution et se trouve justifié par les exigences de la situation présente, dans le respect de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.
En particulier, il estime que le ressort géographique est proportionné et que la prorogation jusqu’au premier novembre n’apparaît pas inappropriée au regard des motifs la justifiant.
4. Enfin, le Conseil d’Etat relève que le Gouvernement souligne dans l’exposé des motifs du projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme examiné le même jour que plusieurs mesures permanentes de ce texte visant à prévenir de manière plus efficace les actes de terrorisme - protection de lieux et d’évènements soumis à un tel risque, fermeture temporaire de lieux de culte, surveillance des personnes, visites et saisies - « permettront une sortie maîtrisée de l’état d’urgence » et qu’il pourra y être mis fin par décret en Conseil des ministres avant le terme de la prorogation si la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme est publiée avant cette date.
Les menaces durables ou permanentes pourront être traitées dans le cadre du droit commun :
- par les instruments juridiques de la lutte contre le terrorisme, significativement renforcés par les lois adoptées ces dernières années dans le domaine du renseignement, de la police administrative et de la procédure pénale, complétés par les mesures mentionnées ci dessus ;
- et, avec l’expérience acquise, par la mobilisation, l’organisation des services et moyens de sécurité de l’État, civils et militaires, l’action de la justice pénale et la conduite des politiques publiques dans les domaines de la sécurité publique, de la défense, de l’éducation, de l’intégration et de la coopération internationale.
Cet avis été délibéré par l’assemblée générale du Conseil d’État dans sa séance du jeudi 15 juin 2017.