Le "dernier kilomètre" des politiques publiques, nouveau cycle annuel de conférence du Conseil d'État et sujet de l'étude annuelle 2023

Événement
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Le Conseil d’État a décidé de consacrer son étude annuelle 2023 au « dernier kilomètre des politiques publiques ». A travers ce sujet d’étude, le Conseil d’Etat entend placer les usagers et la satisfaction de leurs attentes au cœur de sa réflexion. Les Français ont parfois le sentiment d’un décalage entre les annonces de réforme et leur mise en œuvre. Qu’est-ce qui explique ce décalage ? L’étude s’attachera à rechercher dans quelle mesure les politiques publiques atteignent effectivement les publics qu’elles visent et dans quelle mesure les usagers accèdent effectivement aux services publics. Elle s’efforcera de faire des propositions afin d’améliorer, de leurs points de vue, l’efficacité des politiques publiques et l’accès aux services publics, en s’inspirant de ce qui a pu être fait notamment en termes de simplification des procédures, en particulier lors de la crise sanitaire.

Le cycle de conférences organisé dans le cadre de cette étude annuelle tentera d’apporter des réponses à plusieurs questions soulevées par ce thème :
-    L’accès aux biens et services publics, aux politiques publiques
Le dernier kilomètre concerne a priori tous les usagers du service public, qu’il s’agisse de personnes physiques (citoyens français, ressortissants étrangers) ou morales (entreprises, associations), et interroge potentiellement toutes les politiques publiques. Le dernier kilomètre pose d’abord par définition la question de la proximité, de la couverture du territoire. L’étude analysera la façon dont l’Etat, les collectivités territoriales et leurs partenaires (opérateurs, associations, etc.) s’organisent pour assurer la mise en œuvre des politiques publiques sur le terrain. Les formes revêtues peuvent être variées ; les organisations diverses. A travers la question de l’accès aux biens et services publics, l’étude annuelle examinera la portée et les effets paradoxaux de la dématérialisation des démarches administratives pour les usagers, ainsi que les dispositifs mis en place pour les accompagner. Elle questionnera également le coût du dernier kilomètre dans un contexte où les besoins et attentes des usagers évoluent rapidement. 

-    L’adaptation des politiques publiques à leurs destinataires
L’étude appréciera la façon dont le principe d’égalité conditionne, pour le meilleur et parfois pour le moins bien, la mise en œuvre des politiques publiques, et dont il peut brider la capacité de l’administration à différencier les politiques publiques selon les publics et les territoires. Réussir le dernier kilomètre, c’est également se mettre à la place des bénéficiaires des politiques publiques et se demander comment simplifier les procédures pour les rendre plus efficaces et mieux adaptées. 

-    La gestion des politiques publiques dans un souci d’efficacité
L’étude s’attachera à questionner la façon dont l’Etat décide et les marges de manœuvres qui sont ou non laissées aux administrations « de terrain » (préfets, services déconcentrés). Nous analyserons également dans ce cadre la façon dont le développement des expérimentations a pu contribuer, à la suite notamment de notre étude de 2019, à la réussite du dernier kilomètre. L’étude réfléchira aussi aux moyens les plus adéquats pour mobiliser au mieux les agents publics en vue de réussir le dernier kilomètre. Ce faisant, l’étude analysera, y compris à l’aune d’approches comparées, la place faite au dernier kilomètre dans un management public aujourd’hui très guidé par une culture de la performance, jusqu’à s’interroger sur la nécessité d’un éventuel changement de culture. 

-    La place faite à l’usager dans le fonctionnement de l’administration
L’étude appréciera la façon dont les administrations pensent dès l’amont aux questions de faisabilité et de mise en œuvre des politiques publiques. Penser le dernier kilomètre, cela suppose aussi de comprendre comment l’administration mesure la satisfaction des usagers et comment les attentes des usagers sont prises en compte, y compris par les agents publics. L’étude dressera un bilan des outils et interlocuteurs à leur disposition pour exprimer leurs attentes voire leurs doléances et comment les administrations en tirent des conséquences concrètes. Elle s’efforcera d’identifier les meilleures pratiques pour détecter les difficultés rencontrées par les usagers (rôle joué par les corps intermédiaires, enquêtes, « panels d’usagers », etc.) et pour en tenir compte afin de rendre les politiques publiques plus efficaces. 


Le cycle de conférences :

Le dernier kilomètre des politiques publiques doit d’abord être apprécié du point de vue des citoyens, des utilisateurs, des usagers des services ou actions publics (soins, éducation, transports, emploi et formation, protection sociale mais aussi sécurité, aides économiques, etc.). Quelles sont les attentes des usagers et des bénéficiaires des politiques publiques : comment les identifier ? Quelles sont les réussites en la matière et les échecs ? 

Les politiques et les services publics sont mis en œuvre par les services déconcentrés de l’Etat, par les collectivités territoriales, les établissements publics, mais aussi les associations, voire, dans certains cas, par des acteurs privés (bureaux de tabac, garages automobiles, etc.). Au-delà du traditionnel débat sur le « millefeuille administratif » et sur l’enchevêtrement des compétences, l’enjeu de cette conférence sera d’apprécier comment, dans le cadre de leurs compétences respectives, les différents acteurs publics s’organisent pour atteindre les publics concernés jusqu’au dernier kilomètre, y compris en recourant à des solutions originales et pragmatiques (contractualisation, travail en mode projet, etc.). Comment peut-on constituer des « équipes » localement efficaces ? Des « guichets uniques » ? Des interlocuteurs capables d’aller au plus proche du terrain pour atteindre les publics les plus éloignés ? Par ailleurs, comment rapprocher les politiques publiques des usagers à travers notamment la communication ou le marketing territorial ? 

La question de l’adaptation des politiques publiques aux publics visés conditionne souvent leur efficacité. Comment l’administration établit-elle et calibre-t-elle, au bon niveau de précision, les critères pour « atteindre sa cible », c’est-à-dire le « bon public », et comment les ajuste-t-elle, le cas échéant au fil de l’eau ? Comment l’administration prend-elle en compte les particularités de certains publics et territoires spécifiques (outre-mer, quartiers politiques de la ville, ruralité) ? Derrière ces questions, se pose celle du maniement du principe d’égalité. L’adaptation des politiques à leurs destinataires pose aussi la question de la façon dont l’administration s’efforce de simplifier les procédures. A cet égard, il sera intéressant d’analyser le retour d’expérience sur les simplifications mises en œuvre durant la crise sanitaire.

Notre fonctionnement administratif demeure très centralisé et organisé dans une logique de mesure de la performance. 
Ces logiques de performance suffisent-elles à résoudre les problèmes et à prendre en compte l’impact des politiques publiques sur les citoyens et les entreprises ? Comment adapter notre culture managériale à l’enjeu du dernier kilomètre ?
Comment s’assurer, dans un souci d’efficacité, que les décisions soient prises au plus près du terrain et comment (re-)donner des marges de manœuvre aux acteurs de terrain, y compris grâce à des expérimentations ?

Comment s’assurer d’une élaboration d’emblée pertinente des politiques publiques en intégrant la problématique du « dernier kilomètre » dès le premier ? Comment renforcer la prise en compte des questions de faisabilité et d’exécution des politiques publiques dès le stade de leur élaboration ?
Comment les services publics mesurent-ils la satisfaction de leurs usagers et quelles conséquences en tirent-ils ? Comment recueillent-ils et traitent-ils leurs attentes ? Quels outils et interlocuteurs l’administration met-elle à la disposition des usagers pour qu’ils expriment leurs attentes voire leurs doléances (courriers, panels d’usagers, enquêtes, saisine des médiateurs de services au public, Défenseure des droits, etc.) ? Comment les administrations mobilisent-elles leurs agents, notamment ceux travaillant « en bout de chaîne », au contact direct des usagers, pour identifier d’éventuelles difficultés dans le déploiement d’une réforme ou dans la mise en œuvre d’une procédure et comment en tiennent-elles compte ? Comment donnent-elles suite aux demandes exprimées par les usagers, éventuellement relayées par leurs représentants (parlementaires, collectifs d’usagers, syndicats de la fonction publique, etc.) ?