Mots clés : Revenu minimum dinsertion (RMI) Indu Prescription Etrangers Titre de séjour Aide régulière Compétence juridictionnelle
Dossier no 160487
Mme Y…
Séance du 13 décembre 2017
Vu le recours en date du 5 août 2016 formé par M. X… pour le compte de sa mère Mme Y…, qui demande lannulation de la décision en date du 28 juin 2016 par laquelle la commission départementale daide sociale de lEssonne a rejeté son recours tendant à lannulation de la décision en date du 27 mars 2006 du président du conseil général qui a refusé toute remise gracieuse sur un indu de 9 108,46 euros, résultant dun trop-perçu dallocations de revenu minimum dinsertion détecté pour la période du 1er octobre 2001 au 31 octobre 2003 ;
La requérante conteste lindu et en demande une remise ; elle soutient que laction en recouvrement du département de lEssonne est prescrite car lindu réclamé a été détecté en janvier 2004 et notifié selon elle, que le 10 avril 2006, soit plus de deux ans après la découverte de celui-ci ; elle fait valoir quelle a mal été informée par lassistante sociale qui la induite en erreur sur ses droits ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense du président du conseil départemental de lEssonne en date du 26 octobre 2016 qui conclut au rejet de la requête ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celle dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informée de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 13 décembre 2017, Mme Camille GUEDJ, rapporteure, M. X…, fils de Mme Y…, en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant quaux termes des dispositions de larticle L. 262 40 du code de laction sociale et des familles : « Laction du bénéficiaire pour le paiement de lallocation ou de la prime forfaitaire instituée par larticle L. 262‑11 se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, à laction intentée par un organisme payeur en recouvrement des sommes indûment payées » ; quaux termes de larticle L. 262‑41 du même code dans sa rédaction applicable à la période en litige : « Tout paiement indu dallocations ou de la prime forfaitaire instituée par larticle L. 262‑11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir, ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale daide sociale dans les conditions définies à larticle L. 262‑39. Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général » ; quaux termes de larticle R. 262‑44 du même code : « Le bénéficiaire de lallocation de revenu minimum dinsertion est tenu de faire connaître à lorganisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à larticle R. 262‑1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans lun ou lautre de ces éléments (…) » ;
Considérant quaux termes de larticle L. 262‑9 du code de laction sociale et des familles : « Les étrangers titulaires de la carte de résident ou du titre de séjour prévu au cinquième alinéa de larticle 12 de lordonnance no 45‑2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions dentrée et de séjour des étrangers en France, ou encore dun titre de même durée que ce dernier et conférant des droits équivalents, sous réserve davoir satisfait sous ce régime aux conditions prévues au premier alinéa de larticle 14 de ladite ordonnance, ainsi que les étrangers titulaires dun titre de séjour prévu par les traités ou accords internationaux et conférant des droits équivalents à ceux de la carte de résident, peuvent prétendre au revenu minimum dinsertion » ; quil résulte de ces dispositions que, dans les cas où la délivrance dun titre de séjour pour un étranger est subordonnée à lengagement dun descendant de nationalité française de prendre en charge son entretien, notamment en application de larticle 15‑2 de lordonnance no 452658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions dentrée et de séjour des étrangers en France, quoiquun tel engagement ne puisse être absolu et définitif, cet étranger est réputé disposer des moyens convenables dexistence au sens de larticle L. 262‑1 du code de laction sociale et des familles et ne peut ouvrir droit au bénéfice du revenu minimum dinsertion ; que, toutefois, lorsque la situation économique du foyer de lenfant français de lascendant à charge a été profondément bouleversée depuis le moment de la demande du titre de séjour et de lengagement à ladite prise en charge, une demande de la part de lascendant pour bénéficier du revenu minimum dinsertion pourra être, au cas par cas, jugée recevable et, le cas échéant, favorablement examinée ;
Considérant quil résulte de linstruction que Mme Y…, ressortissante marocaine titulaire dun titre de séjour dune durée de validité de dix ans, a été admise au bénéfice du revenu minimum dinsertion le 1er août 1998 au titre dune personne isolée, hébergée à titre gratuit chez son fils de nationalité française, M. X… ; que, comme suite à un contrôle diligenté par la caisse dallocations familiales de lEssonne en janvier 2004, il sest avéré que le titre de séjour de la requérante lui avait été délivré conformément à lengagement de M. X… en date du 27 avril 1998 de subvenir aux besoins de sa mère, Mme Y…, durant toute la durée de son séjour, sans avoir recours aux aides publiques ; quil sensuit que le remboursement de la somme de 9 108,46 euros a été mis à la charge de Mme Y…, à raison dallocations de revenu minimum dinsertion indûment perçues pour la période du 1er octobre 2001 au 31 octobre 2003 ; que cet indu, qui procède des conditions de délivrance de son titre de séjour, est fondé en droit ;
Considérant que Mme Y… a formulé une demande de remise gracieuse auprès du président du conseil général qui, par décision en date du 27 mars 2006, la rejetée ; que saisie dun recours contre cette décision, la commission départementale daide sociale de lEssonne, par décision en date du 28 juin 2016, la également rejeté au motif que lindu était fondé en droit ;
Considérant quil résulte des dispositions combinées des articles L. 262‑40 et L. 262‑41 du code de laction sociale et des familles, quil appartient aux organismes payeurs dintenter une action en recouvrement dans un délai de deux ans à compter de la détection de lindu ; quil ressort des pièces versées au dossier que la paierie départementale de lEssonne a adressé à Mme Y… un avis des sommes à payer le 14 décembre 2004 ; que la caisse dallocations familiales de lEssonne a notifié à Mme Y… un refus de remise de dette en date du 27 mars 2006, répondant ainsi à un recours de la requérante en date du 31 janvier 2005 ; que lavis des sommes à payer, la demande de remise de dette et la réponse de rejet, ainsi que lensemble des demandes suivantes constituent des actes suspensifs de prescription ; que, dès lors, laction en recouvrement du département de lEssonne, qui a commencé bien avant lexpiration du délai de deux ans à compter du constat de lexistence de lindu, nest pas prescrite ;
Considérant que la commission départementale daide sociale de lEssonne a rejeté le recours de Mme Y… au motif que, lindu étant fondé en droit, cette dernière restait redevable de la totalité de sa dette ; quen statuant ainsi, sans examiner si la situation de Mme Y… lui ouvrait droit à une remise pour précarité, la commission départementale daide sociale de lEssonne a méconnu sa compétence, et que sa décision du 28 juin 2016 encourt, par suite, lannulation ;
Considérant quil y a lieu dévoquer et de statuer ;
Considérant que Mme Y… a attesté devant le consul du Maroc à Nanterre, le 2 février 1998, quelle : « ne possède aucune rentrée dargent ni au Maroc ni en France », et quaucun élément du dossier natteste quelle ait pu revenir à meilleure fortune ; quainsi, Mme Y… doit être regardée comme ne disposant daucune ressource ; quil suit de là que le remboursement de la totalité de lindu ferait obstacle à la satisfaction de ses besoins élémentaires ; quil sera fait une juste appréciation de cette situation de précarité en accordant à Mme Y… une remise totale de lindu de 9 108,46 euros qui lui a été assigné,
Art. 1er.
Art. 2.
Art. 3.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 13 décembre 2017 où siégeaient Mme DOROY, présidente, M. MONY, assesseur, Mme GUEDJ, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 23 janvier 2018.
La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
La présidenteLa rapporteure
Pour ampliation,
La secrétaire générale de la commission centrale daide sociale,
Marie-Christine RIEUBERNET