Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) Allocation personnalisée dautonomie (APA) Question prioritaire de constitutionnalité Plan daide Mode Grille AGGIR Evaluation Composition de la formation de jugement Régularité Compétence dattribution Erreur
Dossier no 170170 bis
Mme X…
Séance du 18 décembre 2017
Vu la procédure suivante :
Par une requête en date du 29 mars 2017, le département de la Somme demande à commission centrale daide sociale lannulation de la décision de la commission départementale daide sociale de la Somme du 9 février 2017 en ce que cette décision :
1o La débouté de sa demande tendant à la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 3o de larticle L. 232‑6 du code de laction sociale et des familles dans sa rédaction issue de la loi no 2015‑1776 du 28 décembre 2015 ;
2o A annulé sa décision du 9 septembre 2016 rejetant la demande dallocation personnalisée dautonomie déposée par Mme X… au motif que celle-ci navait pas répondu à la proposition de plan daide pour 8 heures par mois en mode mandataire qui lui a été faite le 5 juin 2016 ;
3o Lui a renvoyé le dossier de Mme X… afin quil soit procédé à une nouvelle évaluation des besoins de celle-ci ;
Le président du conseil départemental de la Somme soutient que :
Par un mémoire en défense enregistré le 15 juin 2017, le préfet de la Somme conclut au rejet de la requête ;
Le préfet soutient que :
Par une décision avant dire droit no 170170 du 26 juin 2017, la commission centrale daide sociale a :
1o Rejeté les conclusions du conseil départemental de la Somme tendant à lannulation de larticle 1er de la décision de la commission départementale daide sociale de la Somme du 9 février 2017 et à la transmission au Conseil dEtat de la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 3o de larticle L. 232‑6 du code de laction sociale et des familles dans sa rédaction issue de la loi no 2015‑1776 du 28 décembre 2015 ;
2o Et a ordonné au conseil départemental de la Somme de produire, dans le délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, lintégralité du dossier dinstruction de la demande dattribution dallocation personnalisée dautonomie faite par Mme X… le 26 mai 2016 ;
Le département de la Somme a transmis par courrier enregistré le 24 août 2017 le dossier dinstruction de la demande de Mme X… ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire de Maître Mathieu HENON, représentant le préfet de la Somme, reçu le 12 décembre 2017 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informées de la date et de lheure de laudience ;
Ont été entendus à laudience publique du 18 décembre 2017 M. HUMBERT, rapporteur, et les observations de :
Considérant ce qui suit, après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique :
1. Mme X… bénéficie depuis juin 2015 de lallocation personnalisée dautonomie fondé sur une évaluation de son niveau de dépendance en GIR 4. A la suite dune visite de léquipe médico-sociale à son domicile en juin 2016, cette équipe a évalué son niveau de dépendance en GIR 4 de nouveau et a proposé une aide de 14 heures par mandataire. Comme le plan daide a été retourné non signé par Mme X… le 18 juillet 2016, le département de la Somme a estimé que Mme X… refusait celui-ci, ce qui a débouché sur une décision explicite de refus dallocation personnalisée dautonomie le 2 août 2016. Le département de la Somme relève appel de la décision de la commission départementale daide sociale de la Somme qui, sur saisine du préfet du département, a annulé cette décision du 2 août 2016 ;
Sur la régularité de la procédure devant le premier juge :
2. En premier lieu, larticle L. 134‑6 du code de laction sociale et des familles dispose : « La commission départementale est présidée par le président du tribunal de grande instance du chef-lieu ou le magistrat désigné par lui pour le remplacer. (…) Un commissaire du Gouvernement désigné par le préfet prononce ses conclusions sur les affaires que lui confie le président. Il na pas voix délibérative. (…) ». Il résulte de ces dispositions que le commissaire du Gouvernement ne doit pas prononcer des conclusions sur toutes les affaires examinées par la commission départementale daide sociale, mais seulement sur celles que le président de cette juridiction lui confie ;
3. Sil ressort des mentions de la décision de la commission départementale daide sociale de la Somme du 9 février 2017 attaquée quelle a été rendue sans quun commissaire du Gouvernement nait prononcé des conclusions au préalable, il nen résulte, contrairement à ce que soutient le département de la Somme, aucune irrégularité de procédure. Par suite, son moyen tiré de lirrégularité de la composition de la commission départementale daide sociale de la Somme ne peut quêtre écarté ;
4. En second lieu, si la commission départementale daide sociale a annulé la décision du conseil départemental et non celle du président du conseil départemental, cette erreur de plume est sans incidence sur la régularité de la décision du premier juge, dont le dispositif permet didentifier clairement la décision annulée ;
Sur la décision attaquée :
5. Pour annuler le refus dallocation personnalisée dautonomie notifié à Mme X… par le département de la Somme, la commission départementale daide sociale a considéré quen retournant sans le signer le plan daide Mme X… manifestait son refus daccepter le mode mandataire qui était proposé par ce plan, mode dintervention que le conseil départemental ne pouvait lui imposer au regard des dispositions de larticle L. 232‑6 du code de laction sociale ;
6. Dautre part, aux termes de larticle L. 113‑1-1 du code de laction sociale et des familles : « Dans les conditions définies au chapitre II du titre III du livre II, la personne âgée en perte dautonomie a droit à des aides adaptées à ses besoins et à ses ressources, dans le respect de son projet de vie, pour répondre aux conséquences de sa perte dautonomie, quels que soient la nature de sa déficience et son mode de vie. » ; quaux termes de larticle L113‑1-2 du même code : « Les personnes âgées et leurs familles bénéficient dun droit à une information sur les formes daccompagnement et de prise en charge adaptées aux besoins et aux souhaits de la personne âgée en perte dautonomie (…) ». Aux termes de larticle L. 232‑3 dudit code : « Lorsque lallocation personnalisée dautonomie est accordée à une personne résidant à domicile, elle est affectée à la couverture des dépenses de toute nature relevant dun plan daide élaboré par une équipe médico-sociale, sur la base de lévaluation multidimensionnelle mentionnée à larticle L. 232‑6 ». Aux termes de larticle L. 232‑6 de ce code : « Léquipe médico-sociale : 1o Apprécie le degré de perte dautonomie du demandeur, qui détermine léligibilité à la prestation, sur la base de la grille nationale mentionnée à larticle L. 232‑2 ; / 2o Evalue la situation et les besoins du demandeur et de ses proches aidants. Cette évaluation est réalisée dans des conditions et sur la base de référentiels définis par arrêté du ministre chargé des personnes âgées ; / 3o Propose le plan daide mentionné à larticle L. 232‑3, informe de lensemble des modalités dintervention existantes et recommande celles qui lui paraissent les plus appropriées compte tenu du besoin daide et de la perte dautonomie du bénéficiaire et des besoins des proches aidants, ainsi que des modalités de prise en charge du bénéficiaire en cas dhospitalisation de ces derniers. Linformation fournie sur les différentes modalités dintervention est garante du libre choix du bénéficiaire et présente de manière exhaustive lensemble des dispositifs daide et de maintien à domicile dans le territoire concerné ; 4o Identifie les autres aides utiles, dont celles déjà mises en place, au soutien à domicile du bénéficiaire, y compris dans un objectif de prévention, ou au soutien de ses proches aidants, non prises en charge au titre de lallocation qui peut lui être attribuée. / Dans les cas de perte dautonomie les plus importants déterminés par voie réglementaire, lorsque le plan daide prévoit lintervention dune tierce personne à domicile, lallocation personnalisée dautonomie est, sauf refus exprès du bénéficiaire, affectée à la rémunération dun service prestataire daide à domicile. / Quel que soit le degré de perte dautonomie du bénéficiaire de lallocation personnalisée dautonomie, le montant de celle-ci est modulé, dans des conditions fixées par voie réglementaire, suivant lexpérience et le niveau de qualification de la tierce personne ou du service daide à domicile auquel il fait appel ». Enfin, aux termes de larticle R. 232‑7 du même code : « I.
7. Il résulte des dispositions précitées du code de laction sociale et des familles que lobligation qui est faite à léquipe médico-sociale de fournir au demandeur de lallocation personnalisée dautonomie des informations exhaustives relatives à lensemble des modalités dintervention existantes pour laide et le maintien à domicile dans le territoire concerné, est destinée à permettre à ce demandeur dapprécier les aides qui lui sont proposées par le plan daide afin, en toute connaissance de cause et compte tenu de son projet de vie, de les accepter, ou de faire des observations et en demander la modification ou encore de les refuser. Ainsi, dune part, si les dispositions du 3o de larticle L. 232‑6 précité qui institue cette obligation font référence à un principe général de « libre choix du bénéficiaire », elles ne peuvent être regardées comme consacrant par elles-mêmes un tel principe, eu égard à la finalité de desdites dispositions et faute, tant de préciser explicitement lobjet et la portée dudit principe, que dorganiser les modalités de sa mise en œuvre ou à tout le moins de renvoyer au pouvoir réglementaire le soin de le faire ; dautre part, ces dispositions nont pas davantage pour effet de priver le conseil départemental de la faculté de proposer au demandeur de lallocation un « mode dintervention » au domicile en tenant compte des impacts financiers pour cette collectivité des différents modes dintervention, dès lors que le mode proposé savère adapté à la situation du demandeur telle quelle ressort des résultats de lévaluation effectuée par léquipe médico-sociale et des recommandations faites par celle-ci et hors les cas de perte dautonomie les plus importants pour lesquels le sixième alinéa de larticle L. 232‑6 impose daffecter lallocation personnalisée dautonomie à la rémunération dun service prestataire daide à domicile, sauf refus exprès du bénéficiaire ;
8. Il résulte de linstruction que par courrier du 15 juillet 2017, versé au dossier après la décision avant-dire droit de la juridiction de céans, Mme X… a informé le département de la Somme quelle refusait le plan daide proposé dans le cadre de la révision de sa demande dallocation personnalisée dautonomie, prévoyant 14 heures mensuelles en mode mandataire au motif quelle ne peut assurer la fonction demployeur en raison de son grand âge, étant âgée de 92 ans. Ainsi, la commission départementale daide sociale na pas commis derreur dappréciation en jugeant que le renvoi du plan daide non signé par Mme X… valait refus de la proposition du mode mandataire ;
9. Sil est vrai que le mode mandataire a été privilégié dans la mesure où il permet de diminuer le reste à charge pour la personne bénéficiaire, tout en permettant à celle-ci de choisir son auxiliaire de vie, notamment parmi les membres de sa famille à lexception du conjoint, concubin ou partenaire de PACS ; si le service mandataire offre un accompagnement à la personne aidée dans ses démarches demployeur de lauxiliaire de vie ; et si, enfin, le mode mandataire permet également une plus grande souplesse dans la gestion de lauxiliaire de vie quen mode prestataire, il ne résulte pas de linstruction que lensemble de ses informations ait été porté à la connaissance de Mme X… Par ailleurs, compte tenu de lâge de Mme X…, il nest pas établi quelle est en capacité dassumer le mode mandataire de son plan daide, même compte tenu de laide susceptible dêtre obtenue auprès du mandataire. Il sensuit quen proposant ce mode mandataire, le département de la Somme a commis une erreur dappréciation ;
10. Le département de la Somme nest donc pas fondé à soutenir que cest à tort que la commission départementale daide sociale de la Somme a annulé sa décision du 9 septembre 2016 rejetant la demande dallocation personnalisée dautonomie déposée par Mme X…,
Art. 1er.
Art. 2.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 18 décembre 2017où siégeaient M. BELORGEY, président, M. MATH, assesseur, M. HUMBERT, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 14 février 2018.
La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le présidentLe rapporteur
Pour ampliation,
La secrétaire générale de la commission centrale daide sociale,
Marie-Christine RIEUBERNET