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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes âgées (ASPA)

Placement en établissement

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Hébergement – Admission à l’aide sociale – Demande – Décès – Hypothèque – Obligation alimentaire – Recours – Procédure – Recevabilité

Dossier no 150658

M. X…

Séance du 18 décembre 2017

Décision lue en séance publique le 14 février 2018

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 17 novembre 2015 et deux mémoires complémentaires enregistrés le 8 janvier 2016 et le 1er décembre 2017, Mme Y… demande à la commission centrale d’aide sociale :

1o D’annuler la décision du 23 octobre 2015 de la commission départementale d’aide sociale du Pas-de-Calais rejetant sa demande d’annulation de la décision du 24 août 2015 par laquelle le président du conseil général du Pas-de-Calais a refusé l’admission au bénéfice de l’aide sociale à l’hébergement de son père M. X… à compter du 18 mars 2014 et jusqu’à son décès le 19 janvier 2015 ;

2o D’annuler la décision du président du conseil départemental du Pas-de-Calais du 24 août 2015 et de prononcer l’admission à l’aide sociale de M. X… ;

3o De prononcer l’hypothèque sur la succession de M. X… en vue du règlement des frais d’hébergement qui lui est réclamé ;

Mme Y… soutient que :

le dossier de demande d’aide sociale à l’hébergement de son père a été finalisé le 6 février 2015, soit postérieurement au décès de son père ; le dossier a été préparé par son frère, sa mère étant dans l’incapacité de le remplir vu son âge ; elle n’a eu connaissance des difficultés dans la constitution du dossier qu’après la décision de la commission départementale d’aide sociale ; elle a rempli le dossier en tant qu’obligée alimentaire dans les délais ; l’agent chargé du dossier (au centre communal d’action sociale ?), Mme D…, n’a pas assuré le suivi du dossier en raison de son absence et il n’a été débloqué qu’à son retour le 6 février 2015 ;

elle ne peut régler le montant des frais d’hébergement réclamé en raison de sa situation de chômage et de la charge de son fils étudiant ; elle sollicite l’admission de son père à titre gracieux à l’aide sociale, qui pourra être récupérée sur la succession de ses parents une fois sa mère décédée ; c’est pourquoi elle sollicite l’hypothèque des biens de la succession de son père ;

Par un mémoire daté du 15 décembre 2015, le conseil départemental du Pas-de-Calais conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

la demande d’admission d’aide sociale déposée pour M. X…, admis en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes le 18 mars 2014, le 23 juillet 2015, a été présentée après le décès de l’intéressé ;

est tenue à une contribution aux charges du mariage l’épouse de M. X…, qui perçoit une pension de retraite de 353 euros par mois ; M. X… a trois obligés alimentaires, qui sont ses trois enfants, dont M. Z…, qui perçoit un revenu de solidarité active de 452,21 euros, Mme T…, qui n’a pas communiqué ses revenus au département ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 18 décembre 2017, M. HUMBERT, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant ce qui suit, après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique :

1. M. X… a été admis à la maison de retraite « R… » du centre hospitalier à compter du 18 mars 2014 et jusqu’à la date de son décès le 19 janvier 2015. Le département du Pas-de-Calais a rejeté sa demande d’admission à l’aide sociale pour l’hébergement par décision du 24 août 2015, au motif qu’elle avait été présentée après le décès de l’intéressé. Mme Y…, fille de M. X…, relève appel de la décision de la commission départementale d’aide sociale du Pas-de-Calais rejetant le recours formé contre cette décision ;

Sur la recevabilité des conclusions tendant au prononcé d’une hypothèque :

2. Mme Y… demande, outre l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale du Pas-de-Calais qui a rejeté la demande d’admission à l’aide sociale à l’hébergement de son père, que la juridiction de céans prononce une hypothèque sur la succession de son père en vue de régler les frais d’hébergement de celui-ci ;

3. Toutefois, la demande tendant au prononcé d’une hypothèque n’a pas été soumise au premier juge. Cette demande tend en réalité à accréditer le refus d’admission à l’aide sociale à l’hébergement de M. X… qui a donné lieu à une dette résultant des frais de son hébergement dont le remboursement est réclamé à la fille par le Trésor public agissant pour le compte de l’établissement où M. X… a été hébergé. Elle a donc le caractère d’une demande nouvelle en cause d’appel et est, par suite, irrecevable. Elle doit donc être rejetée, sans qu’il soit besoin d’examiner les moyens venant à son soutien ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision attaquée :

4. L’article L. 113‑1 du code de l’action sociale et des familles prévoit que : « Toute personne âgée de soixante-cinq ans privée de ressources suffisantes peut bénéficier soit d’une aide à domicile, soit d’un accueil chez des particuliers ou dans un établissement. » L’article L. 131‑4 du même code dispose que : « Les décisions attribuant une aide sous la forme d’une prise en charge de frais d’hébergement peuvent prendre effet à compter de la date d’entrée dans l’établissement à condition que l’aide ait été demandée dans un délai fixé par voie réglementaire. » L’article R. 131‑2 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, dispose : « Sauf dispositions contraires, les demandes tendant à obtenir le bénéfice de l’aide sociale prévue aux titres III et IV du livre II prennent effet au premier jour de la quinzaine suivant la date à laquelle elles ont été présentées. / Toutefois, pour la prise en charge des frais d’hébergement des personnes accueillies dans un établissement social ou médico-social, habilité à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale ou dans un établissement de santé dispensant des soins de longue durée, la décision d’attribution de l’aide sociale peut prendre effet à compter du jour d’entrée dans l’établissement si la demande a été déposée dans les deux mois qui suivent ce jour. Ce délai peut être prolongé une fois, dans la limite de deux mois, par le président du conseil général ou le préfet (…) » ;

5. Il résulte des dispositions rappelées au point 4 ci-dessus qu’en principe, pour qu’une demande d’admission à l’aide sociale à l’hébergement prenne effet à la date d’entrée dans l’établissement d’accueil, cette demande doit être présentée dans un délai de deux mois à compter de l’entrée du demandeur dans cet établissement. Toutefois, il appartient à l’autorité ayant le pouvoir d’admettre à l’aide sociale de se prononcer au vu de l’ensemble des circonstances de l’espèce et d’admettre, à titre exceptionnel et sous le contrôle du juge de l’aide sociale dès l’entrée en établissement un demandeur qui aurait fait sa demande au-delà du délai de deux mois prévu par l’article R. 131‑2 du code de l’action sociale et des familles lorsque le demandeur n’était pas, pour des raisons indépendantes de sa volonté, en état de faire lui-même cette demande et que celle-ci a été faite par un tiers dans les meilleurs délais possibles ;

6. Il résulte de l’instruction que la demande d’aide sociale à l’hébergement présentée pour M. X… a été reçue par le département du Pas-de-Calais le 23 juillet 2015 ;

7. Si Mme Y… soutient qu’elle n’a pas elle-même présenté la demande, que son frère et sa mère n’ont pas été en mesure de la faire correctement, ces circonstances sont sans incidence sur la légalité de la décision de refus d’admission à l’aide sociale, qui aurait dû être présentée par M. X…, dès lors qu’il n’était pas incapable de faire la demande lui-même et qu’il ne bénéficiait au demeurant pas d’une mesure de protection. Si Mme Y… ajoute qu’elle a pour ce qui la concerne, transmis les informations la concernant en tant qu’obligée alimentaire, le département le conteste en tout état de cause. En outre, si elle invoque des retards dans l’instruction du dossier de son père imputables à l’administration, elle n’assortit son allégation d’aucun élément suffisamment précis, en particulier la désignation de l’administration en cause, pour permettre sa prise en compte. Enfin, s’il est constant que M. X… ne pouvait régler par ses seules ressources le montant des frais d’hébergement à sa charge, cette circonstance est en l’espèce sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, le département pouvant comme indiqué légalement refuser la prise en charge sollicitée compte tenu de la date de transmission, très tardive par rapport à l’entrée en établissement, de sa demande ;

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme Y… n’est pas fondée à demander l’annulation de la décision de la commission départementale d’aide sociale du Pas-de-Calais,

Décide

Art. 1er La requête de Mme Y… est rejetée.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à Mme Y…, au président du conseil départemental du Pas-de-Calais. Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 18 décembre 2017 où siégeaient M. BELORGEY, président, M. MATH, assesseur, M. HUMBERT, rapporteur.

Décision lue en séance publique le 14 février 2018.

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLe rapporteur

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET