Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) Hébergement Tuteur Ressources Obligation alimentaire
Dossier no 150269
Mme X…
Séance du 9 octobre 2017
Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 20 février 2015, lunion départementale des associations familiales des Hautes-Alpes (UDAF des Hautes-Alpes), agissant en qualité de tuteur de Mme X…, demande à la commission centrale daide sociale :
1o Dannuler la décision du 20 novembre 2014 de la commission départementale daide sociale de lIsère rejetant sa demande dannulation de la décision du président du conseil général de lIsère du 29 octobre 2013 par laquelle a été refusée la prise en charge au titre de laide sociale à lhébergement de Mme X… à létablissement dhébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) « R… » à compter du 2 août 2012 ;
2o Dannuler la décision du président du conseil départemental de lIsère du 29 juillet 2013 ;
3o De prononcer la prise en charge par le conseil départemental de Mme X… à compter du 2 août 2012 ;
LUDAF des Hautes-Alpes soutient que :
Par un mémoire daté du 25 mars 2015, et un mémoire complémentaire enregistré le 14 septembre 2017, le conseil départemental de lIsère conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informées de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 9 octobre 2017 M. HUMBERT, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant ce qui suit, après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique :
1. Mme X…, placée sous tutelle par jugement du juge des tutelles près le tribunal de grande instance du 24 janvier 2013 avec comme mandataire désigné lUDAF des Hautes-Alpes, a été admise à lEHPAD « R… » à compter du 2 août 2012. Le département de lIsère a refusé sa demande dadmission à laide sociale pour lhébergement par décision du 29 juillet 2013. La commission départementale daide sociale de lIsère a rejeté le recours formé par Mme X… contre ce refus par une décision du 20 novembre 2014 contre laquelle lUDAF des Hautes-Alpes relève appel. LUDAF des Hautes-Alpes, agissant comme tuteur de Mme X…, doit être regardée comme demandant, outre lannulation de la décision du 29 juillet 2013 et la décision du 20 novembre 2014 précitée, son admission à laide sociale à compter du 2 août 2012 ;
2. Dune part, larticle L. 113‑1 du code de laction sociale et des familles prévoit que : « Toute personne âgée de soixante-cinq ans privée de ressources suffisantes peut bénéficier soit dune aide à domicile, soit dun accueil chez des particuliers ou dans un établissement. » Larticle L. 131‑4 du même code dispose que : « Les décisions attribuant une aide sous la forme dune prise en charge de frais dhébergement peuvent prendre effet à compter de la date dentrée dans létablissement à condition que laide ait été demandée dans un délai fixé par voie réglementaire. » Larticle L. 132‑1 du même code dispose que : « Il est tenu compte, pour lappréciation des ressources des postulants à laide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire. » Enfin, larticle R. 132‑1 du même code prévoit que : « Pour lappréciation des ressources des postulants prévue à larticle L. 132‑1, les biens non productifs de revenu (…) sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à (…) à 3 % du montant des capitaux » ;
3. Dautre part, larticle L. 131‑4 du même code dispose : « Les décisions attribuant une aide sous la forme dune prise en charge de frais dhébergement peuvent prendre effet à compter de la date dentrée dans létablissement à condition que laide ait été demandée dans un délai fixé par voie réglementaire ». Larticle R. 131‑2 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : « Sauf dispositions contraires, les demandes tendant à obtenir le bénéfice de laide sociale prévue aux titres III et IV du livre II prennent effet au premier jour de la quinzaine suivant la date à laquelle elles ont été présentées. / Toutefois, pour la prise en charge des frais dhébergement des personnes accueillies dans un établissement social ou médico-social, habilité à recevoir des bénéficiaires de laide sociale ou dans un établissement de santé dispensant des soins de longue durée, la décision dattribution de laide sociale peut prendre effet à compter du jour dentrée dans létablissement si la demande a été déposée dans les deux mois qui suivent ce jour. Ce délai peut être prolongé une fois, dans la limite de deux mois, par le président du conseil général ou le préfet (…) » ;
4. Il résulte de linstruction que le président du conseil départemental a rejeté la demande dadmission à laide sociale de Mme X… à compter du 2 août 2012 au double motif que sa demande a été présentée plus de deux mois à compter de son entrée à lEHPAD « R… » et que ses ressources, évaluées à 2 213,50 euros par mois, sont supérieures au coût de son hébergement ;
Sur le principe de ladmission à laide sociale à lhébergement :
5. Il résulte des dispositions précitées au point 2 quelles doivent être interprétées comme permettant aux personnes placées dans un établissement au titre de laide sociale aux personnes âgées de subvenir aux dépenses mises à leur charge par la loi et exclusives de tout choix de gestion. Pour la détermination des ressources du bénéficiaire de laide sociale devant, en application des dispositions précitées du code de laction sociale et des familles, être affectées, dans la limite de 90 %, au remboursement de ses frais dhébergement, il y a lieu de déduire de lensemble de ses ressources de toute nature les charges qui revêtent pour elle un caractère obligatoire ainsi que celles qui sont indispensables à sa vie dans létablissement, dans la mesure où elles ne sont pas incluses dans les prestations offertes par ce dernier ;
6. Il résulte de linstruction que les revenus mensuels de Mme X… sélevaient en 2013, année de dépôt de sa demande dadmission à laide sociale, à 2 213,50 euros, à quoi sajoute une aide au logement de 50,08 euros. Sagissant des charges obligatoires, le département les a évaluées en retenant la cotisation dassurance responsabilité civile (2,20 euros), la cotisation à la mutuelle (30,95 euros), les frais de gestion de sa tutelle (5,35 euros) et le montant de largent de poche (221,35 euros) à 259,85 euros, ce qui aboutit à des revenus susceptibles dêtre utilisés pour assurer le paiement des frais dhébergement de 1 953,65 euros ;
7. Toutefois, il résulte également de linstruction, et plus précisément du budget prévisionnel produit par lUDAF des Hautes-Alpes à la date du 1er août 2013, que pour 2013, les charges mensuelles comprenaient des frais de copropriété (129,39 euros) et la cotisation à la taxe foncière (9,42 euros) dus pour un bien immeuble détenu par Mme X…, outre les frais de mutuelle (30,95 euros), dassurance responsabilité civile (2,20 euros) et les frais de gestion de la tutelle (96,78 euros). Dès lors que, ainsi que lUDAF des Hautes Alpes le précise, le juge des tutelles devait autoriser la mise en vente de limmeuble précité et même sil na autorisé quen 2014 cette mise en vente, les frais liés à la détention de limmeuble en question doivent être regardés comme exclusifs de tout choix de gestion et par conséquent obligatoires pour Mme X… et pris en compte dans lévaluation des ressources disponibles pour le paiement de ses frais dhébergement et son droit à laide sociale dès 2013. Ainsi, le montant des charges mensuelles obligatoires doit être majoré et porté à 490,09 euros, après ajustement à la hausse des frais liés à la mesure de tutelle qui étaient évalués à un montant inférieur à celui ressortant du budget prévisionnel par le département. Sagissant ensuite du montant des frais dhébergement, que le département a chiffré à 1 762,64 euros, il ressort de deux factures émises en mai et juin 2013 par lEHPAD « R… » que ces frais sélèvent à 1 994,70 et 2 061,19 euros respectivement, soit une moyenne de 2 022 euros par mois en 2013. Ces montants doivent être retenus à la place de celui mentionné par le département en défense, qui se réfère à un prix de journée inférieur à celui facturé par lEHPAD, et par lUDAF des Hautes-Alpes dans le budget prévisionnel au 1er août 2013 qui fait état dun montant, allocation pour lautonomie déduite, de 2 210,93 euros ;
8. Au vu de lensemble de ces éléments, les ressources de Mme X…, diminuées de ses dépenses obligatoires et de largent de poche, soit 1 773,49 euros (2 263,58 euros, avec lallocation logement de 50 euros, moins 490,09 euros), sont insuffisantes pour couvrir les frais dhébergement, le déficit sélevant à 248,51 euros, la circonstance quelle serait à jour de ses paiements dans létablissement lhébergeant étant sans incidence sur cette appréciation. Dans ces conditions, cest à tort que la commission départementale daide sociale de lIsère a rejeté le recours de Mme X… contre le refus du président du conseil départemental de lIsère de ladmettre à laide sociale. Il y a lieu en conséquence dannuler tant la décision du président du conseil départemental que celle de la commission départementale daide sociale et dadmettre Mme X… au bénéfice de laide sociale ;
Sur la date deffet de ladmission à laide sociale :
9. Il résulte des dispositions rappelées au point 3 ci-dessus que la demande daide sociale doit être présentée dans un délai de deux mois à compter de lentrée du demandeur en établissement pour que la prise deffet de ladmission rétroagisse à cette date dentrée. Toutefois, il appartient à lautorité ayant le pouvoir dadmettre à laide sociale de se prononcer au vu de lensemble des circonstances de lespèce et dadmettre, à titre exceptionnel et sous le contrôle du juge de laide sociale, dès lentrée en établissement un demandeur qui aurait fait sa demande au-delà du délai de deux mois prévu par larticle R. 131‑2 du code de laction sociale et des familles lorsque le demandeur nétait pas, pour des raisons indépendantes de sa volonté, en état de faire lui-même cette demande et que celle-ci a été faite par un tiers dans les meilleurs délais possibles ;
10. Il nest pas contesté que la demande dadmission à laide sociale de Mme X… a été faite le 15 mars 2013, soit plus de deux mois à compter de ladmission de celle-ci à lEHPAD « R… ». Toutefois, létat dinsanité mentale de Mme X… est établi depuis le 12 octobre 2012, date du certificat médical ayant servi au juge des tutelles pour prononcer la mesure de protection de Mme X… ; sa fragilité était dailleurs telle quelle na pu prendre aucune mesure de sa propre initiative pour éviter les impayés pour son hébergement qui sont apparus dès son entrée à lEHPAD « R… ». Mme X… na aucun obligé alimentaire. Enfin, la demande dadmission à laide sociale a été faite par lUDAF des Hautes-Alpes moins de deux mois à compter du prononcé de la mesure de tutelle le 24 janvier 2013. Si enfin le département fait valoir en défense que Mme X… est à jour du paiement de ses frais dhébergement en produisant une attestation en ce sens de létablissement laccueillant, cette seule circonstance nétablit pas quelle navait pas droit à laide sociale à compter de son entrée en établissement ;
11. Compte tenu des circonstances de lespèce, notamment de lincapacité de Mme X…, de déposer elle-même une demande daide sociale à lhébergement, cest à tort que la commission daide sociale de lIsère a rejeté la demande dannulation de la décision du président du conseil général de lIsère. Il y a lieu, en conséquence, dadmettre Mme X… à laide sociale dès son entrée à lEHPAD « R… » le 2 août 2012 ;
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme X… doit être admise à laide sociale à lhébergement à compter du 2 août 2012,
Art. 1er.
Art. 2.
Art. 3.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 9 octobre 2017 où siégeaient Mme VESTUR, présidente, M. MATH, assesseur, M. HUMBERT, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 27 novembre 2017.
La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
La présidenteLe rapporteur
Pour ampliation,
La secrétaire générale de la commission centrale daide sociale,
Marie-Christine RIEUBERNET