Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) Hébergement Décision Motivation Décès Procédure
Dossier no 150265
Mme X…
Séance du 9 octobre 2017
Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 23 mars 2015, lassociation tutélaire du Pas-de-Calais, agissant pour le compte de Mme X… demande à la commission centrale daide sociale :
1o Dannuler la décision du 12 décembre 2014 de la commission départementale daide sociale du Pas-de-Calais rejetant sa demande dannulation de la décision du président du conseil général du Pas-de-Calais du 19 septembre 2014 par laquelle a été refusée la prise en charge au titre de laide sociale à lhébergement de Mme X… à létablissement dhébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) « R… » à compter du 25 novembre 2013 et jusquau 31 mai 2014 ;
2o Dannuler la décision du président du conseil départemental du Pas-de-Calais du 19 septembre 2014 ;
3o De prononcer la prise en charge par le conseil départemental de Mme X… à compter du 25 novembre 2013 ;
Lassociation tutélaire du Pas-de-Calais soutient que :
Par un mémoire du 24 juillet 2015, le département du Pas-de-Calais conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
Par courrier du 4 août 2017, lassociation tutélaire du Pas-de-Calais a informé la commission centrale daide sociale du décès de Mme X… le 22 février 2016.
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment larticle 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment larticle 1er, alinéa 3, de son dispositif ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informées de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 9 octobre 2017 M. HUMBERT, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant ce qui suit, après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique :
1. Mme X…, placée sous mesure de curatelle renforcée par jugement du 20 avril 2013 du juge des tutelles de Lens, avec comme curateur lassociation tutélaire du Pas-de-Calais, a été admise au sein de lEHPAD « R… » à compter du 25 novembre 2013. Sollicité au titre de laide sociale, le département du Pas-de-Calais a, par décision du 19 septembre 2014, refusé sa prise en charge pour la période du 25 novembre 2013 au 31 mai 2014 et la admise, par décision distincte, à compter du 1er juin 2014, au titre de laide sociale à lhébergement moyennant une participation des obligés alimentaires. Lassociation tutélaire du Pas-de-Calais demande lannulation du refus de prise en charge à compter du 23 novembre 2013 ; elle doit également être regardée comme demandant que soit prononcée cette prise en charge pour un montant de 11 251,83 euros. Le décès de Mme X… le 22 février 2016 a été porté à la connaissance de la juridiction par un courrier enregistré au greffe le 4 août 2017 ; à cette date, laffaire était en état dêtre jugée, compte tenu de ce que les parties avaient échangé plusieurs mémoires devant le tribunal. Dans ces conditions, même labsence de reprise dinstance par les ayants droit de Mme X…, il y a lieu statuer sur la requête ;
Sur la décision attaquée :
2. La loi no 79‑587 du 11 juillet 1979, alors applicable, prévoit à son article 1er que « Les personnes physiques ou morales ont le droit dêtre informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. (…) » ; elle prévoit à son article 3 : « La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter lénoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. » Les décisions refusant ou différant une prise en charge au titre de laide sociale, en tant que décisions qui « refusent un avantage dont lattribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour lobtenir », sont soumises à lobligation prévue par larticle 3 précitée. Or, il ressort de la décision du 19 septembre 2014 du président du conseil départemental que celle-ci ne comporte aucune considération de droit ; par suite, elle nest pas suffisamment motivée et doit être annulée ;
3. Il appartient dès lors à la commission centrale daide sociale, en tant que juge de plein contentieux, de se prononcer sur ladmission à laide sociale à lhébergement au titre de la période en litige ;
Sur ladmission à laide sociale à lhébergement :
4. Larticle L. 113‑1 du code de laction sociale et des familles prévoit que : « Toute personne âgée de soixante-cinq ans privée de ressources suffisantes peut bénéficier soit dune aide à domicile, soit dun accueil chez des particuliers ou dans un établissement. » Larticle L. 131‑4 du même code dispose que : « Les décisions attribuant une aide sous la forme dune prise en charge de frais dhébergement peuvent prendre effet à compter de la date dentrée dans létablissement à condition que laide ait été demandée dans un délai fixé par voie réglementaire. » Larticle L. 132‑1 du même code dispose que : « Il est tenu compte, pour lappréciation des ressources des postulants à laide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire. » Enfin, larticle R. 132‑1 prévoit que : « Pour lappréciation des ressources des postulants prévue à larticle L. 132‑1, les biens non productifs de revenu (…) sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à (…) à 3 % du montant des capitaux » ;
5. Il résulte de linstruction que Mme X… a demandé le 9 janvier 2014 à bénéficier de laide sociale à lhébergement à compter du 25 novembre 2013, date de son entrée à lEHPAD « R… ». Lors de lexamen des ressources de Mme X…, le département du Pas-de-Calais a relevé que celle-ci avait des revenus mensuels sélevant à 1 422,75 euros par mois en 2012 (après prise en compte de sa pension versée par la Carsat, celle versée par lEtat et celles versées par lIRNEO et lIRCANTEC). Une fois déduit le montant devant rester disponible pour lhébergé, soit 10 % de ses ressources, le département a estimé le besoin de financement à couvrir à 879,57 euros par mois et la participation de la fille de lhébergée, Mme S…, au titre dobligée alimentaire, à 285 euros par mois ;
6. Pour fonder sa décision de nadmettre Mme X… au bénéfice de laide sociale quà compter du 1er juin 2014, le département a retenu la circonstance que des retraits cumulés dun montant de 4 825 euros avaient été effectués sur le compte bancaire de celle-ci sur la période de janvier à septembre 2013 par sa fille, Mme S…, qui avait procuration sur le compte de sa mère jusquen mai 2014, ainsi quun virement de 300 euros au bénéfice de M. M… Il a en conséquence différé la prise en charge pour une durée correspondant à un financement du département équivalent aux sommes quil a estimé être indûment soustraites des ressources de Mme X… Mais, dune part, les sommes disponibles sur un compte bancaire ne peuvent être retenues en tant que telles pour lappréciation des ressources dun demandeur daide sociale. Elles ne peuvent être prises en compte pour déterminer le montant de laide sociale accordée pour lhébergement que conformément à la règle des 3 % posée par larticle R. 132‑1 précité, étant réputées ne pas produire dintérêts jusquà preuve du contraire et relevant donc de la catégorie des « biens non productifs de revenus ». Dautre part, et en tout état de cause, le département ne pouvait légalement prendre en compte les sommes retirées du compte de Mme X… avant son admission en établissement le 25 novembre 2013, puisquelle nen disposait plus ;
7. Dans ces conditions, dès lors quil est établi que Mme X… ne disposait pas des ressources suffisantes pour assurer les frais de son hébergement à compter de la date dentrée à lEHPAD « R… », le président du conseil départemental du Pas-de-Calais ne pouvait légalement différer la prise en charge au titre de laide sociale de Mme X… au 1er juin 2014. Il y a lieu, en conséquence, de fixer la date de cette prise en charge au 25 novembre 2013, à concurrence du même montant que pour la période commençant le 1er juin 2014 ;
8. Il résulte de tout ce qui précède que lassociation tutélaire du Pas-de-Calais est fondée à soutenir que cest à tort que la commission départementale daide sociale du Pas-de-Calais a rejeté sa demande dadmission de Mme X… au titre de laide sociale à lhébergement à compter du 25 novembre 2013 et jusquà la date de son décès,
Art. 1er.
Art. 2.
Art. 3.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 9 octobre 2017 où siégeaient Mme VESTUR, présidente, M. MATH, assesseur, M. HUMBERT, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 27 novembre 2017.
La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
La présidenteLe rapporteur
Pour ampliation,
La secrétaire générale de la commission centrale daide sociale,
Marie-Christine RIEUBERNET