Mots clés : Revenu minimum dinsertion (RMI) Indu Ressources Déclaration Compétence juridictionnelle Modalités de calcul Preuve
Dossier no 150661
Mme X…
Séance du 21 mars 2017
Vu le recours formé le 3 novembre 2015 par Mme X… tendant à lannulation de la décision du 24 mars 2015 par laquelle la commission départementale daide sociale du Val-dOise a rejeté son recours dirigé contre la décision du 6 mai 2009 par laquelle le président du conseil général du Val-dOise a refusé toute remise gracieuse sur un indu dallocations de revenu minimum dinsertion dun montant de 14 123,45 euros mis à sa charge pour la période de mai 2006 à juin 2008 ;
La requérante soutient connaître des difficultés financières, ne pas être en capacité de sacquitter de la somme qui lui est imputée, le couple ayant quatre enfants à charge et un seul salaire ; elle indique que les sommes de 662,05 euros et 1 817,80 euros ont été prélevées sur son compte en date des 29 septembre et 29 octobre 2015 ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire complémentaire présenté par Mme X…, enregistré au secrétariat de la commission centrale daide sociale le 21 janvier 2016, qui soutient que son mari et elle ne travaillaient pas à lépoque des faits, que le contrôle de la caisse dallocations familiales à lorigine de la détection de lindu ne sest pas déroulé dans des conditions équitables, que sa requête devant la commission départementale daide sociale concernait une contestation du fondement de lindu et non une simple demande de remise de dette ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celle dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informée de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 21 mars 2017 Mme BLOSSIER, rapporteure, M. et Mme X… en leurs observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant quaux termes de larticle L. 262‑1 du code de laction sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources, au sens des articles L. 262‑10 et L. 262‑12, natteignent pas le montant du revenu minimum défini à larticle L. 262‑2, qui est âgée de plus de vingt-cinq ans ou assume la charge dun ou plusieurs enfants nés ou à naître et qui sengage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit, dans les conditions prévues par la présente section, à un revenu minimum dinsertion » ; quaux termes de larticle L. 262‑10 du même code : « Lensemble des ressources des personnes retenues pour la détermination du montant du revenu minimum dinsertion est pris en compte pour le calcul de lallocation » ; quaux termes de larticle R. 262‑3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de lallocation de revenu minimum dinsertion comprennent, sous les réserves et selon les modalités figurant à la présente sous-section, lensemble des ressources, de quelque nature quelles soient, de toutes les personnes composant le foyer, tel quil est défini à larticle R. 262‑1, et notamment les avantages en nature, ainsi que les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ;
Considérant quaux termes de larticle R. 262‑44 du code de laction sociale et des familles : « Le bénéficiaire de lallocation de revenu minimum dinsertion est tenu de faire connaître à lorganisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à larticle R. 262‑1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans lun ou lautre de ces éléments (…) » ; quaux termes de larticle L. 262‑39 du même code : « Un recours contentieux contre les décisions relatives à lallocation de revenu minimum et à la prime forfaitaire instituée par larticle L. 262‑11 peut être formé par toute personne qui y a intérêt devant la commission départementale daide sociale, mentionnée à larticle L. 134‑6, dans le ressort de laquelle a été prise la décision. La décision de la commission départementale est susceptible dappel devant la commission centrale daide sociale instituée par larticle L. 134‑2 » ; quaux termes de larticle L. 262‑41 du même code : « Tout paiement indu dallocations ou de la prime forfaitaire instituée par larticle L. 262‑11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale daide sociale dans les conditions définies à larticle L. 262‑39 (…). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; quaux termes de larticle L. 262‑42 du même code : « Le recours mentionné à larticle L. 262‑41 et lappel contre cette décision devant la commission centrale daide sociale ont un caractère suspensif. Ont également un caractère suspensif : le dépôt dune demande de remise ou de réduction de créance ; la contestation de la décision prise sur cette demande, devant la commission départementale et la commission centrale daide sociale » ;
Considérant quil résulte de linstruction que, comme suite à un contrôle en date du 1er août 2008, la caisse dallocations familiales du Val-dOise a mis à la charge de Mme X… un indu dallocations de revenu minimum dinsertion dun montant de 14 123,45 euros pour la période de mai 2006 à juin 2008, en raison de la prise en compte de revenus salariés non mentionnés sur les déclarations trimestrielles de ressources que son mari aurait perçus au cours de cette période ; que, par décision du 6 mai 2009, le président du conseil général du Val-dOise a refusé daccorder toute remise gracieuse ; que le 17 juin 2009, Mme X… a adressé une nouvelle demande au président du conseil général, qui a été transmise à la commission départementale daide sociale du Val-dOise pour constituer un recours contentieux ; que cette dernière, par décision du 24 mars 2015, a confirmé la décision du président du conseil général, retenant que la dette nétait pas contestée ;
Considérant que dans le courrier du 17 juin 2009 adressé au président du conseil général du Val-dOise et transmis à la commission départementale daide sociale, Mme X… indique que ni elle ni son mari ne travaillent et demande la raison pour laquelle les termes de ses lettres ne sont pas pris en considération contrairement aux écrits de lagent de contrôle de la caisse dallocations familiales ; quainsi, en relevant que « la dette na jamais été contestée », la commission départementale daide sociale du Val-dOise, dans sa décision du 24 mars 2015, a méconnu la portée de la demande que Mme X… a formulée devant elle ; quen outre, pour lapplication des dispositions législatives et réglementaires relatives à la procédure de remise gracieuse des dettes résultant dun trop-perçu dallocations de revenu minimum dinsertion, il appartient à la commission départementale daide sociale, en sa qualité de juridiction de plein contentieux, non seulement dapprécier la légalité des décisions prises par le président du conseil général pour accorder ou refuser la remise gracieuse dune dette, mais encore de se prononcer elle-même sur le bien-fondé de la demande de lintéressé daprès lensemble des circonstances de fait dont il est justifié par lune ou lautre partie à la date de sa propre décision ; quen lespèce, la commission départementale daide sociale du Val-dOise ne sest pas interrogée sur la question de savoir si la situation de précarité de lallocataire justifiait quil lui soit accordé une remise de dette ; quil en résulte quelle a méconnu sa compétence et que sa décision doit, par suite, être annulée ;
Considérant quil y a lieu dévoquer et de statuer ;
Considérant que le rapport denquête effectué par la caisse dallocations familiales du Val- dOise en date du 1er août 2008 fait apparaître que M. et Mme X… sont locataires depuis deux mois dun logement dont le loyer mensuel paraît « relativement élevé compte tenu des ressources du foyer » et que « M. X… reconnaît quil exerce une activité salariée non déclarée dans le secteur du bâtiment depuis plus de deux ans, car il na pas de titre de séjour régulier » ; que des revenus mensuels de 850 euros ont alors été retenus pour le calcul du droit au revenu minimum dinsertion ;
Considérant que, lors de laudience devant la commission centrale daide sociale, M. et Mme X…, qui ont une compréhension limitée de la langue française, affirment ne pas avoir compris les suggestions du contrôleur de la caisse dallocations familiales et la portée de lattestation que celui-ci a rédigée et que Mme X… a signée, attestation qui dailleurs na pas été produite par la caisse dallocations familiales, les intéressés nen ayant pas de copie ;
Considérant que si M. X… admet avoir travaillé de façon sporadique et moyennant des salaires très modestes, il conteste fermement avoir perçu pendant deux ans des revenus dune moyenne de 850 euros mensuels que le contrôleur de la caisse dallocations familiales a estimé devoir retenir ;
Considérant que les commissions départementales daide sociale sont des juridictions administratives lorsquelles statuent sur les décisions relatives à lallocation de revenu minimum dinsertion ; quen vertu des règles gouvernant lattribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, sil incombe, en principe, à chaque partie détablir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve quune partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés quà celle-ci ; quil appartient, dès lors, au président du conseil général, pour lapplication des dispositions précitées du code de laction sociale et des familles, de justifier du calcul des sommes dont le remboursement est demandé aux bénéficiaires du revenu minimum dinsertion au motif que des montants dallocations auraient été indûment versés ; quil lui revient, notamment, de fournir les données ayant servi au calcul des allocations effectivement versées, cest-à-dire la composition du foyer, le montant et la nature des ressources prises en compte, ainsi que la période et le mode de calcul de lindu détecté et les déclarations trimestrielles de ressources couvrant la période litigieuse ;
Considérant quen lespèce, les pièces du dossier ne permettent de justifier ni du montant, ni de la période de lindu assigné à Mme X… ; que ledit indu ne peut dès lors être regardé comme fondé en droit ; quil y a lieu den décharger intégralement Mme X…, ce qui emporte remboursement des sommes qui ont été prélevées au mépris des dispositions de larticle L. 262‑42 du code de laction sociale et des familles susvisées,
Art. 1er.
Art. 2.
Art. 3
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 21 mars 2017 où siégeaient Mme DOROY, présidente, M. MONY, assesseur, Mme BLOSSIER, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 5 juillet 2017.
La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
La présidenteLa rapporteure
Pour ampliation,
La secrétaire générale de la commission centrale daide sociale,
Marie-Christine RIEUBERNET