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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Revenu minimum d'insertion (RMI)

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) – Indu – Vie maritale – Ressources – Déclaration – Fraude – Prescription

Dossier no 140061 bis

Mme X…

Séance du 28 juin 2016

Décision lue en séance publique le 21 novembre 2016

Vu le recours formé le 5 mars 2014 par Mme X… tendant à l’annulation de la décision du 23 janvier 2014 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Calvados a rejeté son recours dirigé contre la décision du président du conseil général du 20 novembre 2008, refusant de lui accorder une remise gracieuse de l’indu de 55 725,93 euros qui lui a été assigné, à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion indûment servies pour la période de janvier 1998 à décembre 2006 ;

La requérante conteste l’indu résultant de l’existence d’une communauté d’intérêts entre elle et M. Y… ; elle affirme avoir toujours vécu seule avec trois enfants à charge ; qu’elle a eu, en 1984, un enfant avec M. Y… ; que lorsque ce dernier a en 2004 acheté un terrain pour y construire une maison il a demandé à Mme X… d’être son co-emprunteur afin d’obtenir un crédit ; qu’elle n’a jamais rien payé en sa qualité de co-emprunteur ; qu’elle se trouve dans une situation de précarité, l’ayant conduite à vivre chez son fils, lui-même domicilié sous le toit de son père, M. Y… ; qu’elle reconnaît ne pas avoir déclaré des revenus salariés et des allocations chômage ; qu’elle rembourse actuellement 100 euros par mois à la caisse d’allocations familiales ;

Vu la décision attaquée ;

Vu le mémoire en défense du président du conseil général du Calvados en date du 2 juin 2014 qui conclut au rejet de la requête ;

Vu la décision avant dire droit rendue par la commission centrale d’aide sociale en date du 4 septembre 2015, qui enjoint au président du conseil départemental du Calvados de faire parvenir le rapport original du service de contrôle sur lequel s’appuie la répétition d’indu, le décompte précis de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion assigné à Mme X…, ainsi que le dépôt de plainte déposée devant le juge pénal contre Mme X…, et à cette dernière d’indiquer précisément, de 1998 à 2008, les périodes au cours desquelles elle aurait résidé, avec ou sans vie maritale, sous le même toit que M. Y… et de communiquer ses déclarations fiscales de revenus au titre des années 1998 à 2008 ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 28 juin 2016 Mme N’HARI, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes de l’article L. 262‑2 du code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction alors en vigueur : « Le revenu minimum d’insertion varie (…) selon la composition du foyer et le nombre de personnes à charge » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑1 du même code : « Le montant du revenu minimum d’insertion (…) est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte de solidarité ou le concubin de l’intéressé ou soient à sa charge (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (…) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer, tel qu’il est défini à l’article R. 262‑1 (…) » ; que, pour l’application de ces dispositions, le concubin est la personne qui mène avec l’allocataire une vie de couple stable et continue ;

Considérant qu’aux termes de l’article R. 262‑44 du code de l’action sociale et des familles : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262‑1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 262‑10 du même code : « L’ensemble des ressources des personnes retenues pour la détermination du montant du revenu minimum d’insertion est pris en compte pour le calcul de l’allocation » ; qu’aux termes de l’article L. 262‑41 du même code : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262‑11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262‑39 (…). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article L. 262‑40 du code de l’action sociale et des familles : « L’action de l’allocataire pour le paiement de l’allocation (…) se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, à l’action intentée par un organisme payeur en recouvrement des sommes indûment payées » ;

Considérant qu’il ressort de l’instruction que, à la suite d’une enquête, la caisse d’allocations familiales du Calvados a estimé que Mme X… n’aurait pas déclaré « une reprise d’activité depuis 2003, les revenus salariés perçus par M. Y… avec lequel elle entretient une vie maritale, ainsi que des allocations chômage et son statut de propriétaire » ; qu’il a en conséquence été proposé, d’une part, la réintégration dans les bases de calcul du revenu minimum d’insertion servi à Mme X… depuis 1998, des salaires et des indemnités ASSEDIC non déclarés depuis 2003 et, d’autre part, de retenir entre elle et M. Y… dont l’intéressée a eu un enfant en 1984 une reprise de vie maritale depuis 2002 ; qu’il a, à ce double titre, été assigné à l’intéressée un indu de 55 725,93 euros pour la seule période 1998‑2006 ; que Mme X… a reconnu des insuffisances des déclarations pour les salaires et allocations perçus, mais soutenu qu’elle n’avait jamais mené de vie maritale avec M. Y… et qu’elle s’était seulement prêtée, sur sa sollicitation, à un certain nombre d’opérations immobilières ; que, saisi d’une demande de remise gracieuse, le président du conseil général du Calvados l’a, malgré l’avis des services sociaux, rejetée par décision du 20 novembre 2008 ; que, saisie d’un recours contre cette décision, la commission départementale d’aide sociale du Calvados l’a également rejeté ;

Considérant que la commission centrale d’aide sociale, par décision du 4 septembre 2015, a annulé la décision de la commission départementale d’aide sociale du Calvados du 23 janvier 2014 au motif qu’elle révèle une totale confusion entre les différents chefs de litige, et qu’elle ne s’interroge pas sur l’applicabilité des dispositions légales relatives à la prescription, mais a également estimé que l’affaire n’était pas en état d’être jugée ; qu’en réponse à sa sollicitation, par correspondance du 21 décembre 2015, le président du conseil départemental du Calvados a fourni copie d’une plainte déposée le 6 août 2009 contre Mme X… auprès du tribunal de grande instance de Caen pour fraude ; que ce dépôt de plainte a fait l’objet, en novembre 2010, d’un classement sans suite ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il n’est, à l’appui des allégations de fraude à l’encontre de Mme X… de la caisse d’allocations familiales de Caen, apporté aucun élément de preuve ; qu’en effet, le Parquet, en classant l’affaire sans suite, a reconnu que Mme X… ne s’était rendue coupable d’aucune manœuvre frauduleuse ; qu’ainsi, la prescription biennale prévue par l’article L. 262‑40 du code susvisé n’avait pas lieu d’être levée ;

Considérant qu’en l’état du dossier, le principe de l’indu ne peut être regardé comme établi qu’au motif que Mme X… ne le conteste pas formellement ;

Considérant que Mme X… soutient ne pas entretenir de vie maritale avec M. Y… ; qu’elle fait valoir la précarité de sa situation financière ; qu’elle a trois enfants à charge ; qu’elle est hébergée chez son fils ; qu’il s’ensuit que le remboursement de la dette ferait peser de graves menaces de déséquilibre sur son budget ; qu’il sera fait une juste appréciation de la situation en limitant l’indu laissé à sa charge à la somme de 5 000 euros,

Décide

Art. 1er L’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion laissé à la charge de Mme X… est limité à la somme de 5 000 euros.

Art. 2.  La décision en date du 20 novembre 2008 du président du conseil général du Calvados est annulée.

Art. 3.  La présente décision sera notifiée à Mme X…, au président du conseil départemental du Calvados. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 28 juin 2016 où siégeaient M. BELORGEY, président, M. CULAUD, assesseur, Mme N’HARI, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 21 novembre 2016.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET