Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) Placement Tuteur Etablissement dhébergement des personnes âgées dépendantes (EHPAD) Participation financière Hypothèque Capitaux placés Allocation aux adultes handicapés (AAH) Recours en recupération Succession Commission départementale daide sociale (CDAS) Composition de la formation de jugement Régularité
Dossier no 140434
Mme X…
Séance du 23 septembre 2016
Vu, enregistrée au secrétariat de la commission centrale daide sociale le 29 avril 2014, la requête présentée, pour Mme X…, par lUnion départementale des associations familiales (UDAF) de la Dordogne, agissant en qualité de tuteur de cette dernière, tendant à ce quil plaise à la commission centrale daide sociale annuler la décision en date du 20 mars 2014 par laquelle la commission départementale daide sociale de la Dordogne a rejeté son recours dirigé, dune part, contre la décision du président du conseil général de la Dordogne en date du 2 août 2013 de rejet dadmission à laide sociale de Mme X… pour la période du 6 décembre 2012 au 30 avril 2013 et, dautre part, contre la décision du président du Conseil général de la Dordogne en date du 2 août 2013 par laquelle il a prononcé ladmission à laide sociale de Mme X… du 1er mai 2013 au 31 mars 2017, sous réserve des reversements du 9/10 de ses ressources, y compris les intérêts de ses capitaux placés déduction faite du montant laissé à disposition du conjoint resté à domicile, sans que le minimum du reste à vivre soit inférieur à 30 % du montant mensuel de lallocation aux adultes handicapés (AAH), du reversement de lintégralité de lallocation logement et inscrivant une hypothèque sur les biens du demandeur ; lUDAF de la Dordogne fait valoir, dune part, que le président du Conseil général de la Dordogne ne pouvait, pour refuser dadmettre Mme X… au bénéfice de laide sociale, prendre en compte dans le calcul de ses revenus le montant du capital placé, et, dautre part, que linscription en hypothèque dun bien immobilier de cette dernière ne pouvait être légalement justifiée dans la mesure où Mme X… est bénéficiaire de laide sociale aux personnes handicapées et quaucun recours sur sa succession ne peut être exercé ;
Vu la décision attaquée ;
Vu, enregistré le 5 août 2015, le mémoire en défense présenté par le président du conseil départemental de la Dordogne tendant à ce quil plaise à la commission centrale daide sociale rejeter le recours formé par lUDAF de la Dordogne aux motifs que Mme X… pouvait seule financer cinq mois dhébergement en établissement dhébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) en utilisant les sommes placées sur différents comptes bancaires ; que laide sociale à lhébergement étant subsidiaire, celle-ci ne pouvait intervenir quune fois le capital liquidé ; que lhypothèque est justifiée par la nécessité de se prémunir en cas de recours sur succession et que, même si laide sociale aux personnes handicapées dont est bénéficiaire Mme X… ne peut faire lobjet dun recours sur succession lorsque les héritiers sont les enfants, le mari ou la personne ayant assumé la charge effective et constante, rien nindique que ce sont ces personnes qui hériteront des biens de Mme X… ;
Vu, enregistré le 17 décembre 2015, le mémoire en réplique présenté pour Mme X…, par lUDAF de la Dordogne persistant dans ses premières conclusions par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment larticle 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment larticle 1er, alinéa 3, de son dispositif ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 23 septembre 2016, M. Vianney CAVALIER, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant que la décision attaquée énonce que la commission est composée du président et rapporteur et de la secrétaire en présence du représentant du Conseil général ; que les dispositions de larticle L. 134‑6 du code de laction sociale et des familles, issues de la décision du Conseil constitutionnel du 25 mars 2011 no 2010‑110 QPC, prévoient que la commission est composée du président et du secrétaire, lequel assure les fonctions de rapporteur, auquel « il peut (…) être adjoint un ou plusieurs rapporteurs (…) nommés par le président de la commission parmi les personnes figurant sur une liste établie conjointement par le président du conseil départemental et le préfet » ; que ces dispositions ne permettent pas au président de siéger comme rapporteur dune commission composée de lui-même (avec voix prépondérante) et du secrétaire de la commission ou dun autre rapporteur intervenant dans les conditions sus rappelées ; quil nest du reste pas même allégué que le président se soit nommé lui-même sur la liste des rapporteurs établie sur proposition du président du conseil départemental et du préfet ; quainsi la composition de la commission départementale daide sociale de la Dordogne qui a rendu la décision attaquée était irrégulière, au regard des dispositions de larticle L. 134‑6 du code de laction sociale et des familles, en ce quelle comportait un « président et rapporteur » et une secrétaire non rapporteur ; que cette décision doit, en conséquence, être annulée ;
Considérant quil y a lieu dévoquer et de statuer sur la demande ;
Sur la prise en compte du capital dans le calcul des revenus disponibles ;
Considérant que larticle L. 132‑1 du code de laction sociale et des familles dispose que : « il est tenu compte pour lappréciation des ressources des postulants à laide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire. » ; que larticle R. 132‑1 du même code précise que : « pour lappréciation des ressources des postulants prévue à larticle L. 132‑1, les biens non productifs de revenu, à lexclusion de ceux constituant lhabitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative sil sagit dimmeubles bâtis, à 80 % de cette valeur sil sagit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux » ;
Considérant quil résulte de ces dispositions que les biens non productifs de revenu peuvent bien être retenus pour le calcul des ressources du bénéficiaire de laide sociale, que le montant maximum fixé pour les capitaux non productifs de revenu est fixé à 3 % et que les capitaux productifs de revenus, les capitaux à intérêts, ne sauraient être compris intégralement dans les ressources du bénéficiaire ;
Considérant quen lespèce, le président du Conseil général de la Dordogne a retenu dans les ressources de Mme X… des capitaux productifs de revenus ; quen effet, comme en attestent les pièces présentées par lUDAF de la Dordogne, le livret développement durable de lintéressée a généré un revenu de 7,07 euros pour lannée 2014 et son livret dépargne populaire un revenu de 153,81 euros pour la même année ; que dès lors, les capitaux placés par Mme X… doivent être considérés comme productifs de revenus et ne peuvent être appréciés par le département dans le calcul des ressources de lintéressée ; quainsi, le président du Conseil général de la Dordogne ne pouvait retenir dans le montant des revenus de Mme X… lintégralité des capitaux placés sur deux comptes distincts au Crédit Agricole, mais seulement les intérêts que ces capitaux généraient, quand bien même ces intérêts étaient inférieurs à 3 % du montant desdits capitaux ;
Considérant quil y a lieu dannuler la décision du président du Conseil général de la Dordogne en date du 2 août 2013 refusant ladmission à laide sociale de Mme X… ; que Mme X… sera admise à laide sociale pour la période du 6 décembre 2012 au 30 avril 2013 ;
Sur la prise dune hypothèque sur les biens immobiliers de Mme X… :
Considérant que le code de laction sociale et des familles dispose, dans son article L. 132‑9, que : « pour la garantie des recours prévus à larticle L. 132‑8, les immeubles appartenant aux bénéficiaires de laide sociale sont grevés dune hypothèque légale, dont linscription est requise par le représentant de lEtat ou le président du conseil départemental dans les conditions prévues à larticle 2428 du code civil. » ; que les recours prévus à larticle L. 132‑8 sont « des recours exercés, selon le cas, par lEtat ou le département : 1o Contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ; 2o Contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande daide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande ; 3o Contre le légataire ; 4o A titre subsidiaire, contre le bénéficiaire dun contrat dassurance vie souscrit par le bénéficiaire de laide sociale, à concurrence de la fraction des primes versées après lâge de 70 ans. Quand la récupération concerne plusieurs bénéficiaires, celle-ci seffectue au prorata des sommes versées à chacun de ceux-ci. » ;
Considérant que linscription dune hypothèque sur un bien immobilier détenu par un bénéficiaire de laide sociale ne présage en rien du recours sur succession qui peut être engagé ; que cest donc à tort que lUDAF de la Dordogne demande la levée de linscription hypothécaire sur le seul fondement de ce que Mme X… est bénéficiaire de laide sociale aux personnes handicapées,
Art. 1er.
Art. 2.
Art. 3.
Art. 4.
Art. 5.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 23 septembre 2016 où siégeaient M. Denis RAPONE, président, Mme Audrey THOMAS, assesseure, M. Vianney CAVALIER, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 23 septembre 2016 à 12 heures.
La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le présidentLe rapporteur
Pour ampliation,
La secrétaire générale de la commission centrale daide sociale,
Marie-Christine RIEUBERNET