Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) Hébergement Maison de retraite Ressources Obligation alimentaire Compétence Erreur
Dossier no 140397
M. W…
Séance du 21 juin 2016
Vu le recours formé par lassociation tutélaire de protection « » au nom et pour le compte de M. W… sur lequel elle exerce une mesure de tutelle, en date du 20 juin 2014, tendant à lannulation de la décision en date du 19 mars 2014 par laquelle la commission départementale daide sociale des Bouches-du-Rhône a confirmé la décision du président du Conseil général des Bouches-du-Rhône en date du 12 décembre 2013 prononçant le rejet de prise en charge des frais de placement à compter du 1er mai 2012 au sein de la maison de retraite « R… » de M. W… compte tenu des ressources de la requérante augmentées de la possibilité contributive des obligés alimentaires ;
La requérante soutient que les revenus de M. W… sont insuffisants pour régler ses frais en maison de retraire, quen effet, ce dernier possède une habitation secondaire dont lentretien entraîne des dépenses incompressibles qui viennent amputer son budget mensuel et lempêche de sacquitter de ses frais en maison de retraite dans leur intégralité ;
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment larticle 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment larticle 1er, alinéa 3, de son dispositif ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informées de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 21 juin 2016, Mme DERVIEU, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant quaux termes de larticle L. 113‑1 du code de laction sociale et des familles « Toute personne âgée de soixante-cinq ans privée de ressources suffisantes peut bénéficier soit dune aide à domicile, soit dun placement chez des particuliers ou dans un établissement », quà cette fin, aux termes de larticle L. 132‑1 du code de laction et des familles : « Il est tenu compte, pour lappréciation des ressources des postulants à laide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire. » ; quà ceux de larticle R. 132‑1 du même code pris pour lapplication du précédent, « Pour lappréciation des ressources des postulants prévue à larticle L. 132‑1, les biens non productifs de revenu, à lexclusion de ceux constituant lhabitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative sil sagit dimmeubles bâtis, à 80 % de cette valeur sil sagit de terrains non bâtis et 3 % du montant des capitaux. »
Considérant quaux termes de larticle 205 du code civil : « Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin. » ; quaux termes de larticle 208 du même code : « Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit. » ;
Considérant quaux termes de larticle L. 132‑6 du code de laction sociale et des familles : « Les personnes tenues à lobligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à loccasion de toute demande daide sociale, invitées à indiquer laide quelles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais. (…) La proportion de laide consentie par les collectivités publiques est fixée en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à lobligation alimentaire. La décision peut être révisée sur production par le bénéficiaire de laide sociale dune décision judiciaire rejetant sa demande daliments ou limitant lobligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par lorganisme dadmission. (…) » ;
Considérant que par sa décision no 286891 du 14 décembre 2007, le Conseil dEtat est venu préciser « Il résulte des dispositions des articles L. 132‑3 et R. 231‑6 du code de laction sociale et des familles que les personnes âgées hébergées en établissement au titre de laide sociale doivent pouvoir disposer librement de 10 % de leurs ressources et que la somme ainsi laissée à leur disposition ne peut être inférieure à 1 % du minimum vieillesse. Ces dispositions doivent être interprétées comme devant permettre à ces personnes de subvenir aux dépenses qui sont mises à leur charge par la loi et sont exclusives de tout choix de gestion, telles que les sommes dont elles seraient redevables au titre de limpôt sur le revenu. Il suit de là que la contribution de 90 % prévue à larticle L. 132‑3 du code de laction sociale et des familles doit être appliquée sur une assiette de ressources diminuée de ces dépenses. (…) ».
Considérant que pour estimer le montant des ressources de M. W…, le président du Conseil général des Bouches-du-Rhône sest contenté de prendre en compte les revenus issus des retraites et retraites complémentaires sans déduire de ce montant les charges revêtant un caractère obligatoire et exclusives de tout choix de gestion, que sont entre autres les sommes dont les personnes sont redevables au titre de limpôt sur le revenu, la taxe foncière, les sommes nécessaires à lacquisition dune couverture maladie complémentaire, les frais de gestion tutélaire qui simpose à la personne en vertu dune obligation législative, les frais de cotisation mutuelle santé ; que ce faisant le président du Conseil général des Bouches-du-Rhône a méconnu les textes et la jurisprudence susvisés ;
Considérant quil résulte de ce qui précède que tant le président du Conseil général des Bouches-du Rhône que la commission départementale daide sociale des Bouches-du-Rhône ont fait une mauvaise appréciation de la situation, que leurs décisions respectives nétaient donc pas fondées, quil y a lieu dannuler ensemble la décision en date du 12 décembre 2013 du président du Conseil général des Bouches-du-Rhône et la décision en date du 19 mars 2014 de la commission départementale daide sociale des Bouches-du-Rhône et de statuer sur le fond du litige en vertu de leffet dévolutif de lappel ;
Considérant quil procède de linstruction du dossier que les revenus de M. W… sélèvent à 2 408,48 euros mensuels, que le montant de ses charges à prendre en compte comme décrites ci-dessus sélève à 713,01 euros par mois, quaprès déduction du minimum de ressources à conserver, ses ressources disponibles sélèvent à 1 525,92 euros par mois, que les frais de placement sélèvent à 2 575 euros par mois (inclus le tarif dépendance), soit un reste à couvrir de 1049,08 euros mensuels, que les ressources de M. W… ne lui permettent donc pas de supporter lintégralité de ses frais dhébergement au sein de la maison de retraite « R… » à compter du 1er mai 2012 ;
Considérant que la commission centrale daide sociale est compétente pour évaluer la participation globale des personnes tenues à lobligation alimentaire, quil résulte de linstruction que lappréciation globale des ressources des trois obligés alimentaires permet détablir quils ne sont pas en mesure de contribuer aux frais dhébergement de M. W… ;
Considérant quil résulte de tout ce qui précède quil y a lieu dadmettre M. W… au bénéfice de laide sociale à lhébergement pour son accueil au sein de la maison de retraite « R… » à Marignane à compter du 1er mai 2012,
Art. 1er.
Art. 2.
Art. 3.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 21 juin 2016 où siégeaient M. JOURDIN, président, Mme GUIGNARD-HAMON, assesseure, Mme DERVIEU, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 26 septembre 2016.
La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le présidentLa rapporteure
Pour ampliation,
La secrétaire générale de la commission centrale daide sociale,
Marie-Christine RIEUBERNET