Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) Aide ménagère Personnes handicapées Recours en récupération Donation Prescription
Dossier no 130559
Mme Z…
Séance du 26 novembre 2014
Vu le recours formé en date du 29 juillet 2013 par Mme X… et M. Y… tendant à lannulation de la décision en date du 11 juin 2013 par laquelle la commission départementale daide sociale de lAude a confirmé la décision du président du conseil général de lAude en date du 6 décembre 2012 décidant dun recours en remboursement des sommes avancées à Mme Z… au titre des services ménagers pour la période du 1er février 2003 au 1er décembre 2012 à lencontre des donataires de cette dernière : M. Y… et Mme X… pour un montant de 7 686,05 euros chacun ;
Les requérants contestent cette décision aux motifs dune part que leur mère est handicapée, quà ce titre, aucun recours en récupération nest possible sagissant de laide sociale aux personnes en situation de handicap conformément aux dispositions du code de laction sociale et des familles et, dautre part, que labsence de justification du montant de la dépense engagée par le conseil général ne lautorise pas à les réclamer, quau surplus laction en récupération se prescrit au vu des nouvelles dispositions légales entrées en vigueur le 17 juin 2008 par un délai de cinq ans ;
Vu le mémoire en défense produit par le président du conseil général en date du 14 septembre 2013 qui conclut au rejet de la requête aux motifs dune part, que les dispositions des articles L. 241‑4 et L. 344‑5 du code de laction sociale et des familles invoqués par les requérants ne sont pas applicables pour les donations effectuées par les bénéficiaires de laide sociale à lhébergement, que le recours exercé à lencontre de la donation consentie par Mme Z… concernant des frais daide à domicile entre donc bien dans le champ dapplication de larticle L. 132‑8 du même code ; dautre part que les fiches détaillées des heures servies et des virements mensuels effectués sur le compte du prestataire ont été envoyées à Mme Z… suite à sa demande ; que laction en récupération a été faite dans les délais de prescription légaux ;
Vu le mémoire en réplique produit par les requérants en date du 13 octobre 2014 dans lequel ils persistent dans les mêmes moyens, précisent que le coût du service de laide-ménagère leur semble trop élevé ; que la notion dhéritier doit être entendu au sens large, cest-à-dire comme les personnes pouvant prétendre à lhéritage ; que leur mère aurait dû bénéficier de laide personnalisée à lautonomie et quelle ne devrait pas se trouver pénalisée par une simple méconnaissance des textes, et demandent que soit réduite la participation réclamée au coût réel et justifié de laide ménagère ;
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment larticle 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment larticle 1er alinéa 3 de son dispositif ;
Vu lacquittement de la contribution pour laide juridique dun montant de 35 euros due par toute personne saisissant la commission centrale daide sociale entre le 1er octobre 2011 et le 31 décembre 2013 en application de larticle 1635 bis Q du code général des impôts ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informées de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 26 novembre 2014, Mme DERVIEU, rapporteur, les requérants M. Y… et Mme X… et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant dans un premier temps que la commission centrale daide sociale nest pas compétente pour juger des prix pratiqués par les services daide ménagère, que le moyen invoqué par les requérants est donc inopérant ;
Considérant dans un deuxième temps que ne peut être invoqué devant la commission centrale daide sociale le moyen selon lequel Mme Z… aurait dû être admise au bénéfice de laide personnalisée à lautonomie (APA) ; quil nest en effet pas possible de reprocher à une instance administrative de ne pas avoir octroyé une aide qui na pas été demandée ;
Considérant dans un troisième temps quaux termes de larticle 2224 du code civil, issu de larticle 1er de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire dun droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de lexercer » ; quen lespèce, le délai de prescription a commencé à courir à compter de la transmission de lacte de donation joint à la demande de renouvellement daide sociale en octobre 2012, que laction en récupération à lencontre des donataires est intervenue en décembre 2012 ; que, dès lors, à la date de la décision de récupération sur donation, la créance du département nétait pas prescrite ; que le moyen selon lequel laction du département était prescrite doit être écarté ;
Considérant dans un quatrième temps quaux termes du 2o de larticle L. 132‑8 du code de laction sociale et des familles : « Des recours sont exercés, selon le cas, par lEtat ou le département (…) contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande daide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande » ; quaux termes de larticle R. 132‑11 du même code : « Les recours prévus à larticle L. 132‑8 sont exercés, dans tous les cas, dans la limite du montant des prestations allouées au bénéficiaire de laide sociale (…) », que la demande daide sociale étant intervenue en 2012 soit sept ans après lacte de donation, le recours en récupération sur donation est donc bien fondé ;
Considérant ensuite que larticle L241‑4 du code de laction sociale et des familles invoqué par les requérant qui dispose quil « ny a pas lieu à lapplication des dispositions relatives au recours en récupération des prestations daide sociale lorsque les héritiers du bénéficiaire sont son conjoint, ses enfants ou la personne qui a assumé, de façon effective et constante, la charge du handicapé » ne peut trouver dapplication dans la présente instance dans la mesure où il sagit dune donation et non dune succession ; que la notion dhéritier doit ici sinterpréter au sens strict comme désignant toute personne qui dispose dun droit dans le cadre dune succession ;
Considérant cependant quil résulte de linstruction du dossier que le conseil général na pas été en mesure dapporter la preuve du dépôt de la demande daide sociale, que pour lapplication des dispositions législatives et réglementaires relatives à laide ménagère, il appartient à ladministration de produire les éléments probants de nature à étayer le bien-fondé de sa décision ; que le conseil général de lAude na pas été en mesure de transmettre le dossier complet de Mme Z…, et notamment la demande initiale daide sociale, que si le recours en récupération est fondé dans son principe, toutefois, le dossier ne permet, ni destimer le montant des sommes réellement attribuées au titre de laide ménagère par Mme Z…, ni de sassurer quelle avait effectivement fait une demande daide sociale ; quil sensuit que les requérants sont fondés à demander lannulation de la décision du président du conseil général de lAude ;
Considérant quil résulte de tout ce qui précède que si laide ménagère est une prestation daide sociale récupérable, eu égard aux circonstances de lespèce, la décision du président du conseil général, de même que la décision de la commission départementale daide sociale sont annulées,
Art. 1er.
Art. 2.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 26 novembre 2014 où siégeaient M. SELTENSPERGER, président, Mme GUIGNARD-HAMON, assesseure, Mme DERVIEU, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 26 novembre 2014.
La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le présidentLa rapporteure
Pour ampliation,
La secrétaire générale de la commission centrale daide sociale,
Marie-Christine RIEUBERNET