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Dispositions communes à tous les types d'aide sociale

Recours en récupération

Récupération sur succession

Mots clés : Recours en récupération – Récupération sur succession – Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Jugement – Actif successoral

Dossier no 140182

Mme Y…

Séance du 20 mai 2015

Décision lue en séance publique le 21 mai 2015

Vu le recours formé le 14 avril 2014 par M. X… et son épouse, Mme X…, tendant à annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale de l’Ain du 6 février 2014 ayant rejeté le recours de M. X… et confirmé la décision du président du conseil général de l’Ain du 19 mars 2013 relative à la récupération de 6 325,45 euros de créance d’aide sociale sur la succession de leur tante, Mme Y… ;

Les requérants soutiennent que tout avait été mis en place pour maintenir Mme Y… à son domicile le plus longtemps possible ; que son médecin, sans avertir la famille, a décidé de l’hospitaliser d’office le 9 décembre 2002, ayant engendré une dépression pour Mme Y… et la nécessité d’une aide financière, qui doit être remboursée aujourd’hui ; que son mari, 78 ans et elle-même, 75 ans, sont dans l’impossibilité de rembourser et que cette somme grèverait les petits-enfants âgés de 21 ans, 19 ans et 14 ans de l’aide financière qu’ils apportent pour leurs études ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, enregistré le 24 juin 2014, le mémoire en défense du président du conseil général de l’Ain ; il soutient que Mme Y…, décédée en 2003, a été admise au bénéfice de l’aide sociale à l’hébergement du 27 janvier 2003 au 26 janvier 2008 ; que le 9 juin 2005, un courrier a été envoyé à Mme X… pour l’informer du montant de la créance de 6 325,45 euros du département au titre de l’aide sociale perçue par sa tante et pour qu’elle fasse connaître sa position par rapport à la succession de cette dernière ; qu’une requête a été transmise au procureur de la République le 18 octobre 2012 pour déclarer la succession vacante et qu’une ordonnance du 17 janvier 2013 du tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse déclare la vacance de la succession ; qu’un courrier du 22 janvier 2013 a été transmis par le département au service des domaines avec l’attestation de créance définitive ; que le service des domaines a informé le département qu’il était déchargé de la succession de Mme Y… car la nièce de cette dernière, Mme X… les avait informés qu’elle avait accepté la succession ; que le notaire a transmis le 13 mars 2013 la déclaration de succession signée par les parties concernées ; qu’une notification a été envoyée à Maître MOURACHKO, notaire chargé de régler la succession, ce dernier ayant adressé la notification de récupération à M. et Mme X… ; qu’ils ont répondu par courrier du 12 juin 2013 en retraçant la vie de leur tante et ont formé un recours contre la décision de la commission départementale d’aide sociale en indiquant ne pas pouvoir rembourser cette somme ; que le département est autorisé à exercer un recours en récupération contre la succession du bénéficiaire de l’aide sociale en vertu de l’article L. 132‑8 du code de l’action sociale et des familles ; que l’article R. 132‑11 du même code prévoit notamment que les recours prévus à l’article L. 132‑8 sont exercés, dans tous les cas, dans la limite du montant des prestations allouées au bénéficiaire de l’aide sociale ; que l’article R. 132‑12 du même code prévoit que « le recouvrement sur la succession du bénéficiaire, prévu à l’article L. 132‑8, des sommes versées au titre de l’aide sociale à domicile, de l’aide médicale à domicile, de la prestation spécifique dépendance ou de la prise en charge du forfait journalier prévu à l’article L. 174‑4 du code de la sécurité sociale s’exerce sur la partie de l’actif net successoral qui excède 46 000 euros. Seules les dépenses supérieures à 760 euros, et pour la part excédant ce montant, peuvent donner lieu à ce recouvrement » ; que l’aide sociale à l’hébergement servie par le département est récupérable au premier euro sur la succession du bénéficiaire ; que le délai de prescription de droit commun de cinq ans s’applique dans le cadre du recours en récupération sur la succession du bénéficiaire de l’aide sociale prévu par l’article L. 132‑8 du code de l’action sociale et des familles et ce, depuis le 19 juin 2008 ; que l’article 2224 du code civil prévoit que « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer » ; que l’article 2232 du code civil prévoit que « le report du point de départ, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit […] ; que le conseil départemental a mis en œuvre son droit de recours en récupération sur la succession au mois d’octobre 2012 dans les délais impartis et a réclamé le règlement de sa créance le 19 mars 2013 dans la période limitée de trente ans (pour les actions intentées avant l’entrée en vigueur de la loi de 2008) ; que la somme totale versée à l’établissement s’élève à 11 167,56 euros du 27 janvier 2003 au 15 août 2003 mais que 4 842,11 euros ont été reversés au conseil général ; que M. et Mme X… précisent qu’ils ont dû s’acquitter de la somme de 86 117 euros au titre des droits de succession concernant leur tante ; que la succession de Mme Y… a bien été réglée ; que cependant, le Conseil d’Etat indique, par arrêt du 10 mars 2010, « qu’une succession déjà liquidée n’empêche pas l’exercice d’un recours en récupération, la récupération s’opère alors sur la part successorale recueillie par chaque héritier ; que la commission centrale d’aide sociale indique dans sa décision du 31 décembre 2010, que « la récupération est maintenue auprès de l’héritier du bénéficiaire de l’aide sociale dans le cas où il y a des avoirs bancaires que ce dernier a touché et pas de notaire nommé pour régler la succession » ; que la demande de récupération a donc été adressée aux neveux de Mme Y…, M. et Mme X… ; que le recours en récupération sur succession du département ne revêt pas de caractère obligatoire ; qu’une jurisprudence de la commission centrale d’aide sociale du 4 décembre 2001 précise que « le recours institué par l’article L. 132‑8 du code de l’action sociale et des familles n’a aucun caractère d’automaticité et sa mise en œuvre est appréciée en équité et au cas par cas, en fonction notamment des héritiers concernant leurs devoirs alimentaires ou encore l’impécuniosité des bénéficiaires d’une succession ; que par décision du 11 mai 2004, « il appartient à la commission d’admission à l’aide sociale sous le contrôle du juge de l’aide sociale de modérer le montant de la récupération si l’état d’impécuniosité, la situation sociale ou la santé de l’intéressé le justifie ; que le département de l’Ain demande le remboursement de cette créance à M. et Mme X… ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er alinéa 3 de son dispositif ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 20 mai 2015, Mme GOMERIEL, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’aux termes du 1o de l’article L. 132‑8 du code de l’action sociale et des familles : « Des recours sont exercés, selon le cas, par l’Etat ou le département (…) contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession du bénéficiaire » ; qu’aux termes de l’article R. 132‑11 du même code : « Les recours prévus à l’article L. 132‑8 sont exercés, dans tous les cas, dans la limite du montant des prestations allouées au bénéficiaire de l’aide sociale (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 132‑12 du même code : « Le recouvrement sur la succession du bénéficiaire, prévu à l’article L. 132‑8, des sommes versées au titre de l’aide sociale à domicile, de l’aide médicale à domicile, de la prestation spécifique dépendance ou de la prise en charge du forfait journalier prévu à l’article L. 174‑4 du code de la sécurité sociale s’exerce sur la partie de l’actif net successoral qui excède 46 000 euros. Seules les dépenses supérieures à 760 euros, et pour la part excédant ce montant, peuvent donner lieu à recouvrement » ;

Considérant que Mme Y… a bénéficié de l’aide sociale à l’hébergement pour personnes âgées du 27 janvier 2003 au 15 août 2003, date de son décès, pour la somme de 11 167,56 euros à l’hôpital gériatrique H… (Rhône) ; qu’en 2005, Mme X… a été informée par le département du montant de l’aide sociale perçue par sa tante et pour qu’elle fasse connaître sa position sur la succession de sa tante ; que ce courrier a été renvoyé en recommandé et est resté sans réponse ; que la succession a été déclarée vacante par le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse le 17 janvier 2013, mais que finalement, la succession a été acceptée par Mme X… et réglée par Maître MOURACHKO ; qu’ une notification de récupération de la somme de 6 325,45 euros a été envoyée au notaire ayant réglé la succession, qui l’a transmis à M. et Mme X… ; que la somme de 4 842,11 euros a été reversée au conseil général ; que M. et Mme X… précisent qu’ils ont dû s’acquitter de la somme de 86 117 euros au titre des droits de succession de leur tante ; que la déclaration de succession de Mme Y… a été réglée pour un actif net successoral de 146 527 euros ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble des règles gouvernant l’exercice du recours en récupération sur succession prévu par les dispositions précitées que celui-ci ne peut être effectué que dans la limite de l’actif net successoral ; que la créance d’aide sociale s’élève à 6 325,45 euros ; que M. et Mme X… ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par la décision attaquée, la commission départementale d’aide sociale de Bourg-en-Bresse a rejeté leurs recours,

Décide

Art. 1er Le recours de M. et Mme X… est rejeté.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à M. X…, au président du conseil départemental de l’Ain. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 20 mai 2015 où siégeaient M. SELTENSPERGER, président, Mme GUIGNARD-HAMON, assesseure, Mme GOMERIEL, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 21 mai 2015.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine RIEUBERNET