3320

Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Aide sociale aux personnes âgées (ASPA)

Placement en établissement

Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) – Hébergement – Retour à meilleure fortune – Révision de la décision d’admission à l’aide sociale

Dossier no 130592

Mme X…

Séance du 26 novembre 2014

Décision lue en séance publique le 26 novembre 2014

Vu le recours formé par l’organisme A… de la Gironde en date du 16 octobre 2013 tendant à l’annulation de la décision du 20 septembre 2013 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de la Gironde a confirmé la décision du président du conseil général de la Gironde en date du 3 novembre 2011 prononçant la récupération de la créance départementale concernant la prise en charge par l’aide sociale des frais d’hébergement de Mme X… depuis le 1er décembre 2008 ainsi que l’interruption de l’aide sociale à compter du 1er août 2011 ;

La requérante souhaite tout d’abord rappeler que Mme X… n’a pas souhaité contester la décision de récupération pour retour à meilleure fortune alors même que ce recours en récupération aurait pu faire l’objet d’un recours devant la commission départementale d’aide sociale au regard du fait que la simple modification de la structure du patrimoine imputable à la vente d’un immeuble dont le bénéficiaire était déjà propriétaire ne constitue pas un retour à meilleure fortune (cf. arrêt du Conseil d’Etat en date du 12 mars 1999 no 195748 département de l’Allier), ce qui témoigne de la bonne foi de Mme X… et de sa position citoyenne ; la requérante soutient ensuite que pour confirmer l’interruption de l’aide sociale à l’hébergement, la commission départementale de la Gironde s’est fondée sur une appréciation des ressources de Mme X… prenant en compte l’intégralité du capital mobilier de cette dernière alors qu’en vertu de l’article R. 132‑1 du code de l’action sociale et des familles, seul un certain pourcentage du montant des capitaux doit être pris en compte, que les ressources de Mme X… justifiaient donc qu’elle continue à bénéficier de l’aide sociale à l’hébergement ; la requérante soutient enfin que le patrimoine constitué afin de préserver les intérêts de la personne protégée (un contrat d’assurance-vie ainsi qu’un contrat de capitalisation) rentrent tous en succession, sont donc susceptibles de faire l’objet d’un recours sur succession de la part du conseil général de la Gironde et ne sauraient faire obstacle à l’admission de Mme X… au bénéfice de l’aide sociale à l’hébergement ; il est également demandé le remboursement des frais irrépétibles engendrés par la procédure (70 euros) ;

Vu le mémoire en défense produit par le président du conseil général de la Gironde en date du 25 février 2014 par lequel il conclut au rejet de la requête aux motifs que les ressources de la requérante, y compris les intérêts acquis sur divers placements et 3 % du montant de ses biens non productifs de revenu, augmentées de l’aide possible de son obligé alimentaire (son fils) revenu à meilleure fortune lors de la vente du bien immobilier détenu en indivision avec sa mère, lui permettaient de supporter ses frais d’hébergement ; que l’aide sociale est subsidiaire ; que l’UDAF a pour mission de défendre les intérêts de sa protégée, et non de se substituer à un obligé alimentaire qu’elle n’a jamais sollicité et qui n’apporte aucune preuve d’insolvabilité ou décharge d’obligation alimentaire et au profit duquel elle a souscrit des contrats ; qu’aucune nouvelle demande d’aide sociale n’a été déposée, comme précisé sans ambiguïté dans la décision du 9 novembre 2011 et qu’aucune preuve n’a ainsi été apportée concernant un éventuel besoin de Mme X… de bénéficier de l’aide sociale à l’hébergement ;

Vu le mémoire en réplique produit par l’organisme A… en date du 7 avril 2014 par lequel la requérante persiste dans les mêmes conclusions ;

Vu le mémoire en réplique produit par le président du conseil général de la Gironde en date du 15 mai 2014 par lequel il maintient ses précédentes conclusions et précise qu’à la date du 1er août 2011, les conditions d’octroi de l’aide sociale n’étant plus celles remplies lors de la prise en charge des frais d’hébergement accordée à Mme X… à compter du 1er décembre 2008, une révision, donnant lieu à un rejet, pouvait règlementairement être décidée par le président du conseil général, qu’ainsi, à la date du 21 novembre 2011 en tenant compte du bilan patrimonial établi par l’UDAF et d’une participation de l’obligé alimentaire, les ressources de l’intéressée, permettaient le règlement des frais d’hébergement sans aide de la collectivité publique ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er alinéa 3 de son dispositif ;

Vu l’acquittement de la contribution pour l’aide juridique d’un montant de 35 euros due par toute personne saisissant la commission centrale d’aide sociale entre le 1er octobre 2011 et le 31 décembre 2013 en application de l’article 1635 bis Q du code général des impôts ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 26 novembre 2014, Mme DERVIEU, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant en premier lieu que le moyen selon lequel le contrat de capitalisation ainsi que les différents livrets d’épargne seront susceptibles de faire l’objet d’un recours en récupération et ne sauraient faire obstacle à l’admission de cette dernière au bénéfice de l’aide sociale, est inopérant dans la mesure où, en l’espèce, les biens mobiliers ne font l’objet d’aucune sûreté, sachant qu’au demeurant une assurance-vie n’entre pas dans la succession et ne peut faire l’objet d’une éventuelle récupération qu’après requalification par le juge en donation indirecte ;

Considérant ensuite qu’aux termes de l’article R. 131‑3 du code de l’action sociale et des familles « sous réserve des dispositions des articles L. 232‑25, L. 245‑7 et L. 262‑40, les décisions accordant le bénéfice de l’aide sociale peuvent faire l’objet, pour l’avenir, d’une révision lorsque des éléments nouveaux modifient la situation au vu de laquelle ces décisions sont intervenues. Il est procédé à cette révision dans les formes prévues pour l’admission à l’aide sociale » ;

Considérant qu’il résulte de l’instruction qu’en date du 13 novembre 2009, une décision de prise en charge des frais d’hébergement à compter du 1er décembre 2008 au bénéfice de Mme X… a été notifiée sous réserve de la récupération des ressources de l’intéressée dans les limites légales, sans participation de l’obligé alimentaire, et d’une prise d’hypothèque sur les biens immobiliers, que par lettre en date du 03 octobre 2011, l’organisme A… a informé le conseil général de la Gironde de la vente du bien immobilier de Mme X… au cours du mois de juillet 2011, qu’elle a ainsi perçu une somme de 136 136 euros ; qu’en date du 9 novembre 2011, le département a décidé que la créance départementale serait récupérée à compter du 1er décembre 2008 et que la prise en charge par l’aide sociale des frais d’hébergement de Mme X… serait stoppée à compter du 1er août 2011 ; qu’il avait par ailleurs été précisé qu’une nouvelle demande d’aide sociale pourrait être sollicitée dès que l’intéressée ne serait plus en mesure de régler ses frais d’hébergement ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que des éléments nouveaux sont venus modifier la situation financière de Mme X… et de son fils, obligé alimentaire, qu’aux termes des dispositions de l’article R. 131‑3 du code de l’action sociale et des familles précité, la décision accordant le bénéfice de l’aide sociale à Mme X… avait bien lieu d’être révisée ;

Considérant ensuite qu’aux termes de l’article L. 132‑1 du code de l’action et des familles : « Il est tenu compte, pour l’appréciation des ressources des postulants à l’aide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire. » et qu’aux termes de l’article 205 du code civil : « Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin » ; qu’aux termes de l’article L. 132‑6 du code de l’action sociale et des familles : « Les personnes tenues à l’obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l’occasion de toute demande d’aide sociale, invitées à indiquer l’aide qu’elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais. (…) La proportion de l’aide consentie par les collectivités publiques est fixée en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à l’obligation alimentaire. La décision peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l’aide sociale d’une décision judiciaire rejetant sa demande d’aliments ou limitant l’obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l’organisme d’admission. (…) » ;

Considérant d’une part qu’il résulte de l’étude du dossier que le président du conseil général de la Gironde a fait une exacte appréciation de la participation financière de Mme X… compte tenu de ses ressources et n’a pas méconnu les règles applicables au calcul du montant de l’aide sociale ;

Considérant, d’autre part et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens, que l’aide sociale est subsidiaire, que son montant est fixé en tenant compte de la participation des personnes tenues à l’obligation alimentaire, qu’elle intervient donc après l’aide possible apportée par les obligés alimentaires ou en complément de celle-ci ; que si, comme le soutient l’organisme A…, les ressources de Mme X… ne lui permettaient pas d’assurer seule la prise en charge de ses frais d’hébergement, toutefois, ses ressources, augmentées de l’aide potentielle apportée par son obligé alimentaire qui a également bénéficié de la vente du bien qu’ils possédaient tous deux en indivision, auraient pu suffire à couvrir ses frais d’hébergement ; qu’au regard de tous ces éléments et sans production d’une décision judiciaire exonérant l’obligé alimentaire de son obligation de secours, la décision de suspendre Mme X… au bénéfice de l’aide sociale à compter du 1er août 2011  sans préjudice pour cette dernière de procéder à une nouvelle demande d’admission à l’aide sociale dans l’hypothèse d’un état de besoin  était justifiée ; que dès lors la demande d’annulation des décisions attaquées est rejetée ;

Sur les frais exposés non compris dans les dépens :

Considérant que dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de condamner le département de Gironde à procéder au remboursement des frais exposés non compris dans les dépens,

Décide

Art. 1er Le recours présenté par l’organisme A… en sa qualité de tuteur de Mme X… est rejeté.

Art. 2.  La présente décision sera notifiée à l’organisme A…, au président du conseil général de la Gironde. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 26 novembre 2014 où siégeaient M. SELTENSPERGER, président, Mme GUIGNARD-HAMON, assesseure, Mme DERVIEU, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 26 novembre 2014.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine Rieubernet