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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Revenu minimum d'insertion (RMI)

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) – Indu – Ressources – Déclaration – Fraude – Cumul de prestations

Dossier no 140079

M. X…

Séance du 22 mai 2015

Décision lue en séance publique le 3 juillet 2015

Vu le recours formé le 10 mars 2014 par M. X… à l’encontre de la décision en date du 25 novembre 2013 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Nord a rejeté sa demande d’annulation de la décision de la caisse d’allocations familiales de Roubaix-Tourcoing en date du 12 mars 2009 lui notifiant un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 7 383,88 euros décompté au titre de la période du 1er décembre 2006 au 31 août 2008, au motif qu’il n’a mentionné sur ses déclarations trimestrielles de ressources, ni son activité salariée exercée depuis août 2006, ni les salaires issus de celle-ci, ni les indemnités journalières de chômage perçues depuis mai 2008 ;

M. X… affirme avoir toujours été de bonne foi ; il précise qu’une assistante sociale lui avait indiqué, lors de la période litigieuse, qu’il pouvait prétendre au bénéfice du revenu minimum d’insertion sur le fondement du décret du 27 novembre 1998 pris en application de la loi d’orientation de lutte contre les exclusions et qui aurait autorisé à une personne en reprise d’activité de demander cette allocation de manière complète durant les trois mois suivants cette reprise, puis à hauteur de 50 % durant les neuf mois suivants ; qu’en août 2006, il avait exercé une activité salariée à temps complet ; qu’en mars 2007, il avait également obtenu un contrat à temps plein ; qu’au vu de ses revenus, l’assistante sociale avait monté son dossier de revenu minimum d’insertion sur sa demande ; qu’il a toujours agi sous les conseils de cette dernière qui lui avait alors précisé de n’indiquer ni son activité professionnelle ni les salaires perçus ; qu’il conteste formellement l’indu porté à son débit, et fait valoir, par ailleurs, qu’il lui est financièrement impossible de rembourser la dette mise à sa charge ;

Vu la décision attaquée ;

Vu le mémoire complémentaire de M. X… en date du 27 mars 2014 ;

Vu le mémoire en défense et les pièces du président du conseil général du Nord en date du 10 mars 2015 qui conclut au rejet de la requête ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 22 mai 2015, Mme Fatoumata DIALLO, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant qu’il ressort de l’instruction, d’une part qu’aux termes de l’article L. 115‑1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation de l’économie et de l’emploi, se trouve dans l’incapacité de travailler, a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence. A cet effet, un revenu minimum d’insertion est mis en œuvre (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 262-l du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources (…) n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262‑2, qui est âgée de plus de vingt-cinq ans ou assume la charge d’un ou plusieurs enfants nés ou à naître et qui s’engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article L. 262‑7 du même code : « Si les conditions mentionnées à l’article L. 262‑1 sont remplies, le droit à l’allocation est ouvert à compter de la date du dépôt de la demande » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑39 du même code : « L’allocation est due à compter du premier jour du mois civil au cours duquel la demande dûment remplie et signée a été déposée (…) » ;

Considérant d’autre part qu’aux termes de l’article R. 262‑10 du même code : « Lorsqu’en cours de versement de l’allocation, le bénéficiaire exerce une activité salariée ou non salariée ou suit une formation rémunérée, le revenu minimum d’insertion n’est pas réduit pendant les trois premiers mois d’activité professionnelle du fait des rémunérations ainsi perçues. Du quatrième au douzième mois d’activité professionnelle, le montant de l’allocation est diminué, dans les conditions fixées par l’article R. 262‑9, des revenus d’activités perçus par le bénéficiaire et qui sont pris en compte : 1o A concurrence de 50 % lorsque le bénéficiaire exerce une activité salariée ou suit une formation rémunérée dont la durée contractuelle est inférieure à soixante-dix-huit heures par mois ; 2o En totalité lorsque le bénéficiaire soit exerce une activité non salariée, soit exerce une activité salariée ou suit une formation rémunérée dont la durée contractuelle est au moins égale à soixante-dix-huit heures par mois. Le bénéficiaire perçoit mensuellement la prime forfaitaire mentionnée à l’article L. 262‑11. Le montant de cette prime est de 150 euros si l’intéressé est une personne isolée et de 225 euros s’il est en couple ou avec des personnes à charge (…) » ;

Considérant que M. X… est bénéficiaire du revenu minimum d’insertion depuis le 1er juin 2005 au titre d’une personne isolée, sans enfant à charge, sans activité professionnelle et ne percevant aucun revenu ; qu’un rapport d’enquête de la caisse d’allocations familiales de Roubaix-Tourcoing en date du 30 octobre 2008 a révélé que l’allocataire n’avait mentionné dans ses déclarations trimestrielles de ressources, ni son activité salariée exercée depuis août 2006, ni les salaires y afférents, ni les indemnités de chômage perçues depuis mai 2008 ; que, par une décision en date du 12 mars 2009, le directeur de la caisse d’allocations familiales a assigné au requérant un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant total de 7 383,88 euros au titre de la période du 1er décembre 2006 au 31 août 2008 ; qu’un titre exécutoire concernant cet indu a été émis à l’encontre de l’intéressé le 20 octobre 2011 ; que, par une requête du 12 décembre 2011, M. X… a formé un recours contre ce titre devant la commission départementale d’aide sociale du Nord en contestant formellement le bien-fondé de l’indu ; que, par une décision en date du 25 novembre 2013, la commission saisie a rejeté son recours sur le fondement de l’indu et au motif « que le dossier de M. X… a été présenté au comité d’étude des cas présumés frauduleux des indus RMI du département en date du 7 mai 2009. La qualification frauduleuse a été retenue avec dépôt de plainte auprès du procureur de la République (avis de classement du 11 janvier 2011) » ;

Considérant qu’un dépôt de plainte auprès du procureur de la République pour obtention frauduleuse du revenu minimum d’insertion ne fait pas obstacle à l’examen par la commission départementale d’aide sociale de la requête présentée par l’allocataire du revenu minimum d’insertion ; qu’une telle requête doit être examinée au fond même si le dossier fait apparaître qu’elle doit être rejetée ; qu’en conséquence, la commission départementale d’aide sociale du Nord a méconnu sa compétence ; que sa décision doit, par suite, être annulée ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la requête de M. X… ;

Considérant que, les déclarations trimestrielles de ressources de M. X… indiquent effectivement des revenus nuls au titre de la période litigieuse ; que cependant, les avis d’impôt sur les revenus de 2006 et 2007, un relevé de carrière détaillé ainsi que plusieurs certificats de travail mentionnent que ce dernier a travaillé au cours des années 2006 à 2008 ; qu’un contrat de travail à temps plein à durée indéterminée a même été signé le 1er mars 2007 par l’intéressé pour un salaire mensuel brut de 1 254,31 euros ; que ce contrat indiquait formellement que « l’ancienneté acquise au sein de la société Z… depuis le 2 mai 2006 par M. X… est maintenue » ; qu’il résulte de deux certificats de travail en date du 1er décembre 2007 (société Z…) et du 16 avril 2008 (société W…) que l’activité de l’allocataire s’est poursuivie du 1er mars 2007 au 16 avril 2008 ;

Considérant qu’il résulte clairement du dossier que, M. X… est entré dans un cycle d’intéressement à compter du mois de mai 2006 ; qu’il pouvait prétendre à un cumul intégral de ses revenus et de l’allocation de revenu minimum d’insertion sur le trimestre de droit allant de mai à juillet 2006 ; que son activité ne s’étant jamais interrompue jusqu’en avril 2008, il ne pouvait prétendre à une neutralisation de ses revenus durant cette période et donc à une allocation de revenu minimum d’insertion à taux plein ; qu’en application de l’article R. 262‑10 susvisé alors en vigueur, il ne pouvait pour la période litigieuse, soit du 1er décembre 2006 au 31 août 2008, compte tenu de la continuité de son activité, bénéficier du cumul ; que ses revenus étaient, à compter de septembre 2006, trop élevés pour le rendre éligible au versement de l’allocation de revenu minimum d’insertion ; que même si le requérant conteste l’indu porté à son débit, il reconnaît cependant n’avoir jamais déclaré ni son activité salariée ni aucun revenu au cours de la période litigieuse ; que la plainte pour escroquerie simple déposé par le président du conseil général du Nord, en date du 1er février 2010, à l’encontre de l’allocataire, a donné lieu à un avis de classement en date du 11 janvier 2011 ; que, le parquet s’est contenté de rappeler à l’intéressé ses agissements fautifs, lui expliquant les peines risquées et exigeant que celui-ci s’engage à ne plus les réitérer ;

Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède, que l’indu détecté est fondé en droit et que le recours de M. X… ne peut, par suite, qu’être rejeté ; qu’il lui est, en tout état de cause, loisible de demander un échelonnement du remboursement de la dette auprès des services du payeur départemental,

Décide

Art. 1er La décision de la commission départementale d’aide sociale du Nord en date du 25 novembre 2013 est annulée.

Art. 2.  La requête de M. X… en date du 10 mars 2014 est rejetée.

Art. 3.  La présente décision sera notifiée à M. X…, au président du conseil départemental du Nord. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 22 mai 2015 où siégeaient M. BELORGEY, président, M. CULAUD, assesseur, Mme DIALLO, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 3 juillet 2015.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

Marie-Christine Rieubernet