Mots clés : Recours en récupération Récupération sur succession Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) Hébergement Personnes handicapées Exonération
Dossier no 140125
Mme Y…
Séance du 21 mai 2015
Vu le recours formé par Maître Nathalie CHAUPRADE en sa qualité de conseil de M. X…, en date du 5 février 2014 tendant à lannulation de la décision en date du 11 octobre 2013 par laquelle la commission départementale daide sociale de la Haute-Vienne a confirmé la décision du président du conseil général de la Haute-Vienne en date du 16 janvier 2013 réclamant lexercice dun recours en récupération sur succession à lencontre de M. X… conformément aux dispositions des articles L. 132‑8 et R. 132‑11 du code de laction sociale en récupération de laide départementale versée pour la prise en charge partielle au titre de laide sociale des frais dhébergement à lEHPAD « E… » de Mme Y…, épouse du requérant, décédée le 28 octobre 2011 pour un montant de 38 560,77 euros, lactif net successoral étant de 96 094,30 euros ;
Maître CHAUPRADE soutient, à titre principal, que Mme Y…, née en 1933, était reconnue adulte handicapée depuis le mois davril 1969 avec un taux dincapacité fixé à 100 %, que lensemble des documents nécessaires dont les éléments concernant le statut de personne handicapée et son taux dinvalidité reconnu depuis 1969 ont été communiqués au conseil général de la Haute-Vienne pour linstruction de la demande initiale daide sociale et des demandes de renouvellement, que la commission départementale daide sociale a commis une erreur de droit en se fondant sur larrêt du Conseil dEtat en date du 25 avril 2001, quen effet, la loi no 2005‑102 du 11 février 2005 pour légalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, a mis un terme à la règle aux termes de laquelle le régime daide sociale applicable aux personnes handicapées ne dépendait pas de leur qualité mais de létablissement qui les accueillait, quainsi les dispositions des articles L. 344‑5 et L. 344‑5-1 du code de laction sociale et des familles spécifiques aux personnes en situation de handicap doivent trouver lieu à sappliquer dans la présente instance et que les règles de récupération sur succession prises en compte doivent être celles spécifiques aux personnes handicapées mentionnées à larticle L. 344‑5 2o du code précité, qui précise que pour les personnes handicapées il ne peut y avoir « application des dispositions relatives aux recours en récupération des prestations daide sociale lorsque les héritiers du bénéficiaire décédé sont son conjoint, ses enfants (…) », que par suite il ny a pas lieu de procéder à récupération sur succession ; la requérante réclame à titre subsidiaire, si la commission centrale daide sociale venait à maintenir les décisions contestées, que le montant de la somme à récupérer sur la succession de Mme Y… soit diminué et que la récupération sur succession exercée soit différée soit à la vente de lappartement objet de la succession et quil occupe soit au plus tard à son décès ;
Vu le mémoire en défense produit par le président du conseil général de la Haute-Vienne en date du 16 mai 2014 qui conclut au rejet du recours aux motifs que les éléments concernant le taux dincapacité à 100 % de Mme Y… et le bénéfice de lallocation adulte handicapée nétaient pas en possession des services du conseil général, que cest ainsi que Mme Y… a été admise à laide sociale aux personnes âgées, que lors du renouvellement à laide sociale de Mme Y… rien dans le dossier de cette dernière ne mentionnait lexistence dun handicap dun taux supérieur à 80 % reconnu avant lâge de 65 ans, que cette décision de renouvellement na pas fait lobjet dun recours, que le département est ainsi en droit de procéder à la récupération de la créance quil possède à lencontre de la succession ;
Vu la décision attaquée ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011, notamment larticle 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012‑250 QPC du 8 juin 2012, notamment larticle 1er alinéa 3 de son dispositif ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informées de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 21 mai 2015, Laurène DERVIEU, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant dans un premier temps que le moyen avancé par le président du conseil général de la Haute-Vienne selon lequel le présent recours ne serait pas fondé du fait que les décisions dadmission et de renouvellement à laide sociale prises par le président du conseil général nont fait lobjet daucun recours sur le fondement que Mme Y… a été admise à laide sociale au titre des personnes âgées et non au titre des personnes handicapées, est inopérant dès lors quil nest pas nécessaire davoir formé de tels recours pour contester une demande de recours en récupération sur succession et quil sagit de décisions bien distinctes ;
Considérant quaux termes des dispositions de larticle L. 344‑5-1 du code de laction sociale et des familles « Toute personne handicapée qui a été accueillie dans un des établissements ou services mentionnés au 7o du I de larticle L. 312‑1 bénéficie des dispositions de larticle L. 344‑5 lorsquelle est hébergée dans un des établissements et services mentionnés au 6o du I de larticle L. 312‑1 du présent code et dans les établissements de santé autorisés à dispenser des soins de longue durée. Larticle L. 344‑5 du présent code sapplique également à toute personne handicapée accueillie dans un établissement ou service mentionné au 6o du I de larticle L. 312‑1 ou dans un établissement autorisé à dispenser des soins de longue durée, et dont lincapacité, reconnue à la demande de lintéressé avant lâge mentionné au premier alinéa de larticle L. 113‑1, est au moins égale à un pourcentage fixé par décret » ;
Considérant quil résulte ainsi de la combinaison des articles L. 241‑1, L. 344‑5, et L. 344‑5-1 du code de laction sociale et des familles que toute personne hébergée dans un établissement de santé autorisé à dispenser des soins de longue durée qui a un taux dincapacité de 80 % reconnu avant 65 ans est soumise aux règles applicables en matière de participation aux frais dhébergement et dentretien aux personnes handicapées dans les conditions prévues par le code de laction sociale et des familles ;
Considérant quil ressort de linstruction du dossier et nest pas contesté que Mme Y… née le 28 juin 1933, a été reconnue adulte handicapée avec un taux dincapacité fixé à 100 % pour la première fois en juillet 1969, soit à lâge de 37 ans et donc bien avant 65 ans ; quaprès 1969, ledit taux lui a été constamment reconnu par diverses décisions de la COTOREP produites au dossier, que la circonstance selon laquelle le conseil général naurait pas été au courant de lexistence de ces documents est inopérante dans la présente instance, quil appartient en effet au conseil général lors de toute demande daide sociale de déterminer à quel titre la personne peut être ou non admise à laide sociale, quil y a donc lieu dappliquer les dispositions prévues à larticle L. 344‑5-1 spécifiques aux personnes handicapées qui prévoient notamment lexonération du conjoint de tout recours en récupération sur succession ;
Considérant que les dispositions du 2e alinéa de larticle L. 344‑5-1 issues de larticle 18 de la loi du 11 février 2005 sont bien applicables dès lors que le fait générateur de la récupération, à savoir le décès de Mme Y… en date du 28 octobre 2011, est postérieur à lentrée en vigueur de la loi ;
Considérant quil résulte de tout ce qui précède que le recours en récupération sur la succession de Mme Y… exercé par le président du conseil général nest pas fondé,
Art. 1er.
Art. 2.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 21 mai 2015 où siégeaient M. SELTENSPERGER, président, Mme GUIGNARD-HAMON, assesseure, Mme DERVIEU, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 21 mai 2015.
La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le présidentLa rapporteure
Pour ampliation,
La secrétaire générale de la commission centrale daide sociale,
Marie-Christine Rieubernet