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Dispositions spécifiques aux différents types d'aide sociale

Revenu minimum d'insertion (RMI)

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) – Indu – Vie maritale – Ressources – Justificatifs – Compétence juridictionnelle – Forclusion

Dossier no 130533

Mme X…

Séance du 6 mars 2015

Décision lue en séance publique le 22 mai 2015

Vu le recours formé le 13 avril 2011 par Mme X… qui demande l’annulation de la décision en date du 17 juin 2009 par laquelle la commission départementale d’aide sociale d’Indre-et-Loire a rejeté sa demande d’annulation d’une décision du président du conseil général d’Indre-et-Loire retenant sa vie maritale avec M. D… pour le calcul de son droit au revenu minimum d’insertion ;

Mme X… affirme être célibataire, ayant un enfant en bas âge à charge ; elle invoque une situation d’extrême précarité ; elle conteste le motif de sa vie maritale et sollicite une remise de dette sur deux indus d’allocations de revenu minimum d’insertion, le premier d’un montant de 525 euros au titre de la période du 1er avril au 31 juillet 2007, le second d’un montant de 766 euros au titre de la période du 1er mai 2007 au 31 janvier 2008, à la suite du versement à tort de la prime forfaitaire puis d’une prise en compte de la vie maritale de la requérante avec M. D… ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les mémoires complémentaires de Mme X… en date des 5 novembre 2013 et 13 octobre 2014 ;

Vu le mémoire en défense du président du conseil général d’Indre-et-Loire en date du 26 juillet 2013 ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de l’action sociale et des familles ;

Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;

Après avoir entendu à l’audience publique du 6 mars 2015 Mme Fatoumata DIALLO, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;

Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article L. 262‑41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262‑11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262‑39 (…). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; que l’article L. 262‑39 du même code dispose que : « Un recours contentieux contre les décisions relatives à l’allocation de revenu minimum et à la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262‑11 peut être formé par toute personne qui y a intérêt devant la commission départementale d’aide sociale, mentionnée à l’article L. 134‑6, dans le ressort de laquelle a été prise la décision. La décision de la commission départementale est susceptible d’appel devant la commission centrale d’aide sociale instituée par l’article L. 134‑2 (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (…) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (…) et notamment les avantages en nature, ainsi que les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262‑1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 262‑1 du même code : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire en application de l’article L. 262‑2 est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l’intéressé ou soient à sa charge » ; qu’aux termes de l’article L. 262‑27 du code de l’action sociale et des familles : « Il est procédé au réexamen périodique du montant de l’allocation. Les décisions déterminant le montant de l’allocation peuvent être révisées à la demande de l’intéressé, du président du conseil général ou de l’organisme payeur dès lors que des éléments nouveaux modifient la situation au vu de laquelle ces décisions sont intervenues » ;

Considérant, d’autre part, qu’il ressort des dispositions de l’article L. 262‑42 du code de l’action sociale et des familles que, dès qu’une demande de remise de dette est déposée et qu’un contentieux se développe, le recours est suspensif et le recouvrement doit être suspendu jusqu’à l’épuisement de la procédure devant les juridictions du fond ; que tout prélèvement pour répétition de l’indu revêt un caractère illégal ;

Considérant qu’il ressort de l’instruction que Mme X… a déposé une demande de revenu minimum d’insertion le 7 février 2005 au titre d’une personne isolée depuis le 5 mars 1978, logée gratuitement, sans enfant à charge, n’exerçant aucune activité professionnelle depuis le 1er octobre 2004 et ne percevant aucun revenu ; que par une déclaration de situation pour les prestations familiales et les aides au logement signée le 5 avril 2007, Mme X… indiquait à la caisse d’allocations familiales qu’elle vivait en couple avec M. D… depuis le 1er avril 2007, qu’elle était salariée depuis le 1er janvier 2007 et que ce dernier était chômeur depuis le 12 décembre 2006 ; qu’une attestation de loyer en date du 1er avril 2007 mentionnait que la requérante a pris, à son nom, un appartement en location d’une surface de 74 mètres carrés, à compter de cette date pour un loyer de 563,08 euros ; qu’un avis à payer du mois d’avril 2007, en date du 26 avril 2007, a été adressé conjointement à Mme X… et M. D…, par le bailleur dudit logement ; que la déclaration de ressources pour 2005, en date du 8 février 2007, et celle concernant 2006, datée du 5 juillet 2007, indiquaient que les intéressés étaient en couple, et que M. D… avait respectivement perçu des salaires annuels de 11 573 et de 19 000 euros ; que par une notification de droits et paiements en date du 6 août 2007, la caisse d’allocations familiales d’Indre-et-Loire a assigné à Mme X… un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 525 euros au titre de la période du 1er avril au 31 juillet 2007, au motif qu’elle a reçu à tort la prime forfaitaire d’intéressement ; que par courrier en date du 27 août 2007 adressé au conseil général d’Indre-et-Loire, la requérante a sollicité une remise de dette pour précarité ; que par une décision en date du 4 septembre 2007, le président du conseil général d’Indre-et-Loire a rejeté le contrat d’insertion de l’allocataire et précisé que, compte tenu des ressources de son couple, elle ne pouvait pas être maintenue dans le dispositif du revenu minimum d’insertion ; que par courrier en date du 2 octobre 2007 adressé à la caisse d’allocations familiales d’Indre-et-Loire, Mme X…, précisant vivre en couple, affirmait que son ami et elle étaient à la recherche d’un emploi, et que les allocations de chômage de son compagnon ne permettaient pas de payer leur loyer et d’autres factures liées à la vie quotidienne ; qu’ainsi, elle sollicitait une révision de ses droits au revenu minimum d’insertion et d’aide au logement ; que par une décision en date du 7 décembre 2007, le conseil général d’Indre-et-Loire a rejeté la demande de remise de l’indu de 525 euros en raison de l’absence de justificatifs des revenus de M. D… ; qu’un titre exécutoire relatif à cet indu a été émis le 29 février 2008 à l’encontre de Mme X… ; que le 17 janvier 2008, cette dernière a déposé une nouvelle demande de revenu minimum d’insertion au titre d’une personne isolée depuis toujours, vivant en colocation, percevant une aide au logement et sans activité professionnelle depuis le 15 décembre 2007 ; que par une décision en date du 29 janvier 2008, le conseil général d’Indre-et-Loire a rejeté cette demande en retenant l’union libre avec M. D… dont les revenus étaient supérieurs au plafond d’octroi du droit au revenu minimum d’insertion ; qu’en conséquence, par une décision en date du 22 février 2008, la caisse d’allocations familiales a recalculé les droits au revenu minimum d’insertion de l’allocataire pour la période du 1er mai 2007 au 31 janvier 2008 ; qu’il suit de-là qu’un nouveau trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 766 euros, au titre de cette période, a été assigné à Mme X… ; que par un courrier en date du 27 février 2008 adressé à la commission départementale d’aide sociale d’Indre-et-Loire, l’intéressée a contesté toute existence de vie maritale avec M. D…, précisant que celui-ci n’avait été que son colocataire durant les périodes litigieuses ; qu’elle reconnaissait avoir effectivement exercé un emploi de commercial à mi-temps en avril 2007, générant l’indu de 525 euros ; qu’elle sollicitait un rétablissement de ses droits au revenu minimum d’insertion et d’aide au logement depuis septembre 2007, ainsi qu’une annulation de ses dettes, tout en se prévalant d’une situation d’extrême précarité ; que par une décision en date du 17 juin 2009, la commission saisie a confirmé la vie maritale de la requérante avec M. D…, et rejeté son recours ;

Considérant que, pour l’application des dispositions législatives et réglementaires relatives à la procédure de remise gracieuse des dettes résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion, il appartient à la commission départementale d’aide sociale, en sa qualité de juridiction de plein contentieux, non seulement d’apprécier la légalité des décisions prises par le président du conseil général pour accorder ou refuser la remise gracieuse d’une dette, mais encore de se prononcer elle-même sur le bien-fondé de la demande de l’intéressé d’après l’ensemble des circonstances de fait dont il est justifié par l’une ou l’autre partie à la date de sa propre décision ; qu’en l’espèce, la commission départementale d’aide sociale d’Indre-et-Loire ne s’est pas interrogée sur la question de savoir si la situation de précarité de Mme X… justifiait qu’il lui soit accordé une remise de dette ; qu’il en résulte qu’elle a méconnu sa compétence et que sa décision doit, par suite, être annulée ;

Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la requête de Mme X… ;

Considérant, d’une part, que le président du conseil général d’Indre-et-Loire invoque la forclusion dans son mémoire en défense en date du 26 juillet 2013 ; que, faute d’une date certaine de notification, celle-ci ne peut être retenue ;

Considérant, d’autre part, qu’il résulte de l’ensemble du dossier que les décisions de la caisse d’allocations familiales, du conseil général et de la commission départementale d’aide sociale d’Indre-et-Loire ont surtout considéré que Mme X… et M. D… vivaient maritalement au motif qu’ils habitaient le même logement durant les périodes litigieuses ; que, s’il est établi que la requérante a fait des déclarations confuses sur la nature de sa vie commune avec M. D…, la seule circonstance que ce dernier et elle soient domiciliés à la même adresse n’est pas de nature à établir une vie maritale stable et continue, dès lors notamment que Mme X… soutient qu’elle a simplement été en colocation avec M. D… ; qu’en tout état de cause, il n’appartenait pas à Mme X… d’établir que M. D… et elle ne partageaient pas une vie maritale, mais bien au conseil général d’Indre-et-Loire d’apporter la preuve de cette vie commune ; que tel n’a pas été le cas ; que cet élément constituait pourtant l’unique motif des décisions du conseil général et de la commission départementale d’aide sociale d’Indre-et-Loire confirmant les indus en cause ; qu’il résulte de ce qui précède que Mme X… est fondée à soutenir que c’est à tort que l’indu en litige de 766 euros a été mis à sa charge, et à demander pour ce motif l’annulation des décisions de la caisse d’allocations familiales, du président du conseil général et de la commission départementale d’aide sociale d’Indre-et-Loire,

Décide

Art. 1er La décision en date du 17 juin 2009 de la commission départementale d’aide sociale d’Indre-et-Loire, ensemble les décisions de la caisse d’allocations familiales et du président du conseil général d’Indre-et-Loire retenant la vie maritale de Mme X… et M. D…, sont annulées.

Art. 2.  Mme X… est intégralement déchargée de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion de 766 euros porté à son débit.

Art. 3.  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Art. 4.  La présente décision sera notifiée à Mme X…, au président du conseil départemental de l’Indre-et-Loire. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 6 mars 2015 où siégeaient M. BELORGEY, président, M. CULAUD, assesseur, Mme DIALLO, rapporteure.

Décision lue en séance publique le 22 mai 2015.

La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le présidentLa rapporteure

Pour ampliation,

La secrétaire générale de la commission centrale d’aide sociale,

M.-C. Rieubernet