Mots clés : Revenu minimum dinsertion (RMI) Prescription Ressources Modalités de calcul Forfait Procédure Régularité
Dossier no 130019 bis
M. X…
Séance du 16 mai 2014
Vu la requête, enregistrée au secrétariat de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme le 4 septembre 2012 et transmise au secrétariat de la commission centrale daide sociale le 4 octobre 2012, présentée par M. X… qui demande à la commission centrale daide sociale :
1o Dannuler la décision du 26 juin 2012 par laquelle la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme a rejeté son recours tendant, en premier lieu, à lannulation de la décision du 24 décembre 2010 par laquelle le président du conseil général du Puy-de-Dôme lui a notifié un indu dallocations de revenu minimum dinsertion dun montant de 17 241,16 euros, correspondant à la période daoût 2005 à mai 2009, en second lieu à la décharge de cet indu ;
2o Dannuler la décision du 24 décembre 2010 par laquelle le président du conseil général du Puy-de-Dôme lui a notifié un indu dallocations de revenu minimum dinsertion dun montant de 17 241,16 euros, correspondant à la période daoût 2005 à mai 2009, et de lui accorder la décharge de cet indu ;
M. X… soutient :
Vu la décision attaquée ;
Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été communiquée au président du conseil général du Puy-de-Dôme, qui na pas produit de mémoire en défense ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré au secrétariat de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme le 21 septembre 2012 et transmise au secrétariat de la commission centrale daide sociale le 4 octobre 2012, présenté par M. X…, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre que la présidente de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme nétait ni impartiale ni indépendante dès lors quelle a présidé cette juridiction durant une période où sa composition méconnaissait des exigences constitutionnelles, ainsi que la ultérieurement jugé le Conseil constitutionnel ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 8 avril 2013, présenté par M. X…, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre que six personnes siégeaient aux côtés de la présidente lors de la séance à laquelle la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme a examiné son recours, dont au moins lune était un représentant du conseil général directement impliqué dans le dossier et dont au moins lune a pris la parole durant la séance ; quil na pas pu accéder, avant la séance, au courriel de la direction générale de la cohésion sociale sur lequel sest fondée la commission départementale daide sociale ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 15 juillet 2013 présenté par M. X…, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre que le défaut dimpartialité de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme est établi, au regard tant de larticle 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de lhomme et des libertés fondamentales que du principe constitutionnel de séparation des pouvoirs, du fait que des parlementaires, par ailleurs conseillers généraux, siégeaient au sein de la commission ;
Vu les nouveaux mémoires, enregistrés les 27 mars et 17 avril 2014, présentés par M. X…, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il demande en outre la composition de la formation de jugement de la commission centrale daide sociale qui va statuer sur sa requête, demande à avoir accès aux pièces du dossier, et sinterroge sur les membres de la formation de jugement qui vont statuer sur sa requête ;
Vu les pièces desquelles il ressort que M. X… sest acquitté de la contribution pour laide juridique de 35 euros instituée par larticle 1635 bis Q du code général des impôts depuis le 1er octobre 2011 ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles dans sa rédaction applicable au litige ;
Vu la décision no 2010‑110 QPC du 25 mars 2011 du Conseil constitutionnel ;
Vu la décision no 130019 du 16 mai 2014 de la commission centrale daide sociale rejetant les conclusions à fin de récusation présentées par M. X… ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informées de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 16 mai 2014 M. Nicolas LABRUNE, rapporteur, M. X…, requérant, en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant quil résulte de linstruction que M. X…, bénéficiaire du revenu minimum dinsertion dans les Hauts-de-Seine puis dans le Puy-de-Dôme à partir de septembre 2005 sest vu notifier, par une décision du 24 décembre 2010 du président du conseil général du Puy-de-Dôme et suite à un contrôle de lorganisme payeur, un indu dallocations de revenu minimum dinsertion, dun montant de 17 241,16 euros, correspondant à la période daoût 2005 à mai 2009, au motif quil disposait dun patrimoine lui procurant des ressources quil navait pas déclarées ; que M. X… a contesté cet indu devant la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme qui, par la décision du 26 juin 2012 dont M. X… relève appel, a rejeté son recours ;
Sur la régularité de la procédure juridictionnelle devant la commission centrale daide sociale :
Considérant que, par sa décision susvisée du 16 mai 2014, la commission centrale daide sociale a rejeté les conclusions de M. X… tendant à la récusation de M. Jean-Michel BELORGEY, président de la commission centrale daide sociale ; que si M. X… formule, dans les mémoires quil a produit, des interrogations sur les autres membres de la formation de jugement, ces interrogations ne sauraient être regardées comme des demandes de récusation et, dès lors, nappellent pas de réponse ; que M. X… a eu communication, préalablement à laudience publique, de la composition de la formation de jugement ; quil a été mis en mesure daccéder à toutes les pièces du dossier ; quainsi, la procédure devant la commission centrale daide sociale a été régulièrement suivie et que la formation de jugement est régulièrement constituée ;
Sur la régularité de la décision attaquée de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme :
Considérant que, par sa décision susvisée du 25 mars 2011, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution les deuxième et troisième alinéas de larticle L. 134‑6 du code de laction sociale et des familles, qui prévoyaient que siégeaient dans les commissions départementales daide sociale trois conseillers généraux élus par le conseil général et trois fonctionnaires de lEtat en activité ou à la retraite, désignés par le représentant de lEtat dans le département ; quil a jugé, dans larticle 2 de sa décision, que cette déclaration dinconstitutionnalité prenait effet à compter de la publication de sa décision, dans les conditions fixées par le considérant 9 de cette décision, en vertu duquel à compter de cette date et sans préjudice de modifications ultérieures de cet article, les commissions départementales daide sociale siégeraient dans la composition résultant de la déclaration dinconstitutionnalité, cest-à-dire ne comprenant que le président de la commission et le rapporteur ;
Considérant quil résulte de linstruction, notamment des allégations précises et circonstanciées de M. X…, qui ne sont pas contredites en défense, que, lors de laudience du 26 juin 2012 durant laquelle la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme a examiné son recours, six personnes siégeaient aux côtés de la présidente ; que lune de ces personnes était un représentant du conseil général impliqué dans la gestion du dossier de M. X… ; quil ne ressort pas des pièces du dossier que ces six personnes aient quitté la salle daudience lors du délibéré ; quil suit de là, dans les circonstances particulières de lespèce, que la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme qui a statué sur la demande de M. X… doit être regardée comme sétant réunie, en méconnaissance de la déclaration dinconstitutionnalité mentionnée au paragraphe précédent, dans une formation irrégulière, en dépit du fait que la minute de la décision na été signée que par le rapporteur et la présidente de la commission ; que M. X… est fondé, pour ce motif et sans quil soit besoin dexaminer les autres moyens de la requête tirés de son irrégularité, à demander lannulation de la décision du 26 juin 2012 de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme ;
Considérant quil y a lieu dévoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X… devant la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme ;
Considérant que si M. X… conteste le bien-fondé de lindu mis à sa charge, il ne demande pas que celui-ci lui soit remis au regard de léventuelle précarité de sa situation ;
Sur la prescription :
Considérant quen vertu de larticle L. 262‑40 du code de laction sociale et des familles, laction intentée par un organisme payeur en recouvrement des sommes indûment payées se prescrit par deux ans, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration ; que la notion de fausse déclaration, au sens de cet article, doit sentendre comme visant les inexactitudes ou omissions délibérément commises par lallocataire dans lexercice de son obligation déclarative ;
Considérant que si M. X… a omis de déclarer, durant la période litigieuse, son patrimoine et les revenus quil en tirait, il résulte de linstruction quil na pas volontairement dissimulé ces éléments, quil avait porté à la connaissance des services du conseil général du Puy-de-Dôme dès janvier 2006 ; que, dailleurs, le président du conseil général du Puy-de-Dôme, dans sa décision du 24 décembre 2010, considérait que M. X… navait pas voulu frauder volontairement ; que, par suite, les erreurs et omissions commises par M. X… dans lexercice de ses obligations déclaratives doivent être regardées comme non délibérées ; quil suit de là quil ne saurait lui être reproché ni fraude ni fausse déclaration ; que, dès lors, laction intentée par le conseil général du Puy-de-Dôme en récupération des sommes qui ont été indûment versées à M. X… se prescrit, en application de larticle L. 262‑40 du code de laction sociale et des familles, par deux ans ;
Considérant quil résulte de linstruction, et nest dailleurs pas contesté en défense, quaucun événement nest venu interrompre cette prescription avant la décision du 24 décembre 2010 du président du conseil général du Puy-de-Dôme ; que lindu dallocations de revenu minimum dinsertion que le conseil général du Puy-de-Dôme souhaite récupérer correspond à la période daoût 2005 à mai 2009 ; que laction intentée par le conseil général du Puy-de-Dôme en récupération des sommes qui ont été indument versées à M. X… est prescrite en tant quelle porte sur lindu correspondant à la période antérieure au 24 décembre 2008 ; que M. X… doit, dès lors, être déchargé de lindu porté à son débit au titre de la période daoût 2005 au 24 décembre 2008 ;
Sur les revenus tirés des sommes placées sur le Livret A :
Considérant quaux termes de larticle L. 132‑1 du code de laction sociale et des familles : « Il est tenu compte, pour lappréciation des ressources des postulants à laide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire. (…) » ; quaux termes de larticle L. 262‑10 de ce même code : « Lensemble des ressources des personnes retenues pour la détermination du montant du revenu minimum dinsertion est pris en compte pour le calcul de lallocation (…) » ; quaux termes de larticle R. 132‑1 du même code : « Pour lappréciation des ressources des postulants prévue à larticle L. 132‑1, les biens non productifs de revenu, à lexclusion de ceux constituant lhabitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative sil sagit dimmeubles bâtis, à 80 % de cette valeur sil sagit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux » ; quaux termes de larticle R. 262‑3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de lallocation de revenu minimum dinsertion comprennent (…) lensemble des ressources, de quelque nature quelles soient, de toutes les personnes composant le foyer (…), et notamment les avantages en nature, les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ; quil résulte de ces dispositions que si les capitaux non productifs de revenu sont réputés, pour déterminer les droits dun allocataire au revenu minimum dinsertion, comme procurant un revenu égal à 3 % de leur montant, en revanche, lorsque des capitaux sont productifs de revenus, il convient, pour déterminer les droits dun allocataire au revenu minimum dinsertion, de prendre en compte les revenus effectifs produits par ces capitaux ; quil suit de là que, pour déterminer les droits de M. X… au revenu minimum dinsertion sur la période litigieuse non prescrite, il convient de prendre en compte les revenus que lui a procuré son Livret A en calculant ceux-ci en fonction du taux effectif du Livret A sur la période et non, comme lont fait le conseil général du Puy-de-Dôme et lorganisme payeur, en les calculant sur la base dun taux de 3 % ;
Sur les revenus tirés du plan épargne logement :
Considérant quil résulte des dispositions précitées des articles L. 132‑1, L. 262‑10 et R. 262‑3 du code de laction sociale et des familles que, dès lors que M. X… tire des revenus de sommes quil a placées sur un plan épargne logement, il convient, pour déterminer ses droits au revenu minimum dinsertion sur la période litigieuse non prescrite, de ne prendre en compte que les revenus, procurés par ce plan épargne logement durant cette période, que M. X… a effectivement appréhendés, cest-à-dire le produit des intérêts de la somme placée sur ce plan épargne logement net des contributions sociales prélevées à la source par létablissement payeur ;
Sur les revenus agricoles :
Considérant quaux termes de larticle R. 262‑18 du code de laction sociale et des familles : « Les revenus professionnels relevant de limpôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles sentendent des bénéfices de lavant-dernière année précédant celle au cours de laquelle le droit à lallocation est examiné. / Lorsque les bénéfices nont pas été imposés, les revenus des personnes soumises au régime du forfait sont calculés par lorganisme payeur en appliquant aux productions animales et végétales les éléments retenus pour le calcul des bénéfices agricoles forfaitaires figurant aux tableaux publiés au Journal officiel de la République française. / Toute aide, subvention et indemnité non retenue pour la fixation du bénéfice forfaitaire ainsi que pour le bénéfice mentionné à larticle 76 du code général des impôts est ajoutée aux revenus définis aux alinéas précédents. Un arrêté préfectoral recense celles qui ont été prises en considération pour la fixation du forfait. Le président du conseil général reçoit communication de cet arrêté » ;
Considérant que si M. X… soutient quil lui était impossible de déclarer le montant du forfait agricole quil percevait au titre dune année donnée dès lors quil nen avait connaissance que plusieurs mois après la fin de cette année, il résulte de ces dispositions que cette circonstance nest pas de nature à faire obstacle à ce que les revenus agricoles de M. X… soient pris en compte pour déterminer ses droits au revenu minimum dinsertion sur la période litigieuse non prescrite ;
Considérant quil sera fait une juste appréciation, au vu des pièces figurant au dossier, des sommes indûment versées à M. X… du 25 décembre 2008 au 31 mai 2009, qui ne peuvent être regardées comme supérieures au montant des revenus effectifs tirés du Livret A, des revenus nets tirés du plan épargne logement et du compte épargne logement et des revenus provenant des deux fermages des terrains agricoles dont il est propriétaire, en fixant le montant de celles-ci à 500 euros ;
Considérant quil résulte de tout ce qui précède que M. X… est fondé à demander que la décision du 24 décembre 2010 du président du conseil général du Puy-de-Dôme soit réformée en ce quelle a de contraire à la présente décision ;
Considérant, au surplus, quil est loisible à M. X…, sil sy croit fondé, de demander au président du conseil général du Puy-de-Dôme une remise de sa dette en considération de la précarité de sa situation ; quil lui est également loisible, en tout hypothèse, de solliciter du payeur départemental un échéancier de paiement,
Art. 1er.
Art. 2.
Art. 3.
Art. 4.
Art. 5.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 16 mai 2014 où siégeaient M. BELORGEY, président, M. MONY, assesseur, M. LABRUNE, rapporteur.
Décision lue en séance publique le 4 juillet 2014.
La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le présidentLe rapporteur
Pour ampliation,
La secrétaire générale de la commission centrale daide sociale,
M.-C. Rieubernet