Dispositions spécifiques aux différents types daide sociale |
3420 |
AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH) | ||
Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Hébergement - Capitaux fonciers - Subsidiarité - Date deffet |
Dossier no 140152
M. X...
Séance du 19 juin 2015
Décision lue en séance publique le 19 juin 2015, à 19 heures
Vu, enregistré au secrétariat de la commission centrale daide sociale, le 4 avril 2014, la requête présentée pour M. X..., par lassociation A...) tendant à ce quil plaise à la commission centrale daide sociale annuler la décision de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme en date du 26 novembre 2013 rejetant sa demande dirigée contre la décision du président du conseil général du Puy-de-Dôme du 16 avril 2013 de refus de prise en charge par laide sociale des frais dhébergement et dentretien en foyer pour adultes handicapés de M. X... à compter du 1er décembre 2012 par les moyens que le président du conseil général du Puy-de-Dôme a rejeté la demande de prise en charge des frais dhébergement au motif que le capital mobilier détenu par lintéressé lui permet de couvrir ses frais dhébergement, alors que larticle L. 114-1-1 du code de laction sociale et des familles prévoit que « La personne handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap quels que soient lorigine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie. Cette compensation consiste à répondre à ses besoins, quil sagisse de laccueil de la petite enfance, de la scolarité, de lenseignement, de léducation, de linsertion professionnelle, des aménagements du domicile ou du cadre de travail nécessaires au plein exercice de sa citoyenneté et de sa capacité dautonomie, du développement ou de laménagement de loffre de service, permettant notamment à lentourage de la personne handicapée de bénéficier de temps de répit, du développement de groupes dentraide mutuelle ou de places en établissements spécialisés, des aides de toute nature à la personne ou aux institutions pour vivre en milieu ordinaire ou adapté, ou encore en matière daccès aux procédures et aux institutions spécifiques au handicap ou aux moyens et prestations accompagnant la mise en uvre de la protection juridique régie par le titre XI du livre Ier du code civil. Ces réponses adaptées prennent en compte laccueil et laccompagnement nécessaires aux personnes handicapées qui ne peuvent exprimer seules leurs besoins (...) » ; que larticle L. 132-1 du code de laction sociale et des familles pose le principe que : « Il est tenu compte, pour lappréciation des ressources des postulants à laide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire » ; que larticle R. 132-1 du même code précise : « Pour lappréciation des ressources des postulants prévue à larticle L. 132-1, les biens non productifs de revenu, à lexclusion de ceux constituant lhabitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative sil sagit dimmeubles bâtis, à 80 % de cette valeur sil sagit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux » ; que dès lors, la valeur des biens et capitaux non productifs de revenus ne peut pas être intégrée dans les ressources prises en compte ; que la jurisprudence de la commission centrale daide est claire et constante à ce sujet et une décision du 9 avril 2002 a, par exemple, considéré abusive lobligation faite dutiliser les capitaux de lintéressé pour payer ses frais de placement ; que de même la décision du 29 mai 2000 a annulé la décision de la commission départementale daide sociale de lAveyron indiquant quelle est entachée dune erreur de droit pour avoir pris en compte en méconnaissance de larticle L. 141 du code de la famille et de laide sociale et du décret no 54-883 du 2 septembre 1954, non les revenus du capital placé de lintéressé, mais lexistence de ce capital lui-même ; qua aussi été jugé illégal le refus daccorder le bénéfice de laide sociale au motif que la personne pourrait présenter une demande une fois quelle aura épuisé son capital (CCAS du 27 mars 2000) ; quainsi seuls les revenus du capital mobilier de M. X... peuvent être pris en compte pour son admission à laide sociale ; quen lespèce, le président du conseil général du Puy-de-Dôme a donc fait une interprétation erronée des textes en vigueur ; que larticle L. 344-5 précise en outre, concernant les personnes adultes handicapées « Les frais dhébergement et dentretien des personnes handicapées accueillies, quel que soit leur âge, dans les établissements mentionnés au b du 5o et au 7o du I de larticle L. 312-1, à lexception de celles accueillies dans les établissements relevant de larticle L. 344-1, sont à la charge : 1o A titre principal, de lintéressé lui-même sans toutefois que la contribution qui lui est réclamée puisse faire descendre ses ressources au-dessous dun minimum fixé par décret et par référence à lallocation aux handicapés adultes, différent selon quil travaille ou non. Ce minimum est majoré, le cas échéant, du montant des rentes viagères mentionnées à larticle 199 septies du code général des impôts ainsi que des intérêts capitalisés produits par les fonds placés sur les contrats visés au 2o du I de larticle 199 septies du même code » ; que larticle D. 344-35 du code de laction sociale et des familles ajoute : « Lorsque létablissement assure un hébergement et un entretien complet, y compris la totalité des repas, le pensionnaire doit pouvoir disposer librement chaque mois : (...) 2o Sil travaille, sil bénéficie dune aide aux travailleurs privés demploi, sil effectue un stage de formation professionnelle ou de rééducation professionnelle, du tiers des ressources garanties résultant de sa situation ainsi que de 10 % de ses autres ressources, sans que ce minimum puisse être inférieur à 50 % du montant mensuel de lallocation aux adultes handicapés » ; que larticle D. 344-36 du même code prévoit également que « Lorsque le pensionnaire prend régulièrement à lextérieur de létablissement au moins cinq des principaux repas au cours dune semaine, 20 % du montant mensuel de lallocation aux adultes handicapés sajoutent aux pourcentages mentionnés aux 1o et 2o de larticle D. 344-35. La même majoration est accordée lorsque létablissement fonctionne comme internat de semaine. » ; que M. X... perçoit comme seuls revenus mensuels un salaire de 590,75 euros, une allocation aux adultes handicapés dun montant de 530,67 euros, une allocation logement de 271,75 euros et 275,02 euros des produits des capitaux, soit un total de 1 668,37 euros ; que le coût de lhébergement sélève à 2 701,96 euros par mois ; que M. X... doit bénéficier du tiers des ressources garanties résultant de sa situation cest-à-dire le tiers de son salaire, soit 196,91 euros ainsi que de 10 % de ses autres ressources et donc de son AAH, ce qui correspond à un montant de 53,07 euros, soit une somme globale de 249,98 euros par mois ; que la moitié du montant de lAAH sélevant à 388,29 euros, il convient de prendre ce montant en considération ; quen vertu de larticle D. 344-36 du code de laction sociale et des familles, M. X... dispose en plus de 20 % du montant de lAAH, soit 155,31 euros ; que les ressources à prendre en considération ne sélèvent donc plus quà la somme de 1 124,77 euros avec un déficit mensuel de 1 577,19 euros ; quelle sollicite lannulation de la décision de la commission départementale daide sociale et ladmission de M. X... à laide sociale à lhébergement à compter du 1er décembre 2012 ;
Vu la décision attaquée ;
Vu, enregistré le 4 avril 2014, le mémoire en défense du président du conseil général du Puy-de-Dôme tendant au rejet de la requête par les motifs quà la demande de renouvellement de laide sociale et au vu des éléments transmis par lassociation tutélaire A... M. X... dispose dun capital mobilier de 91 516 euros, composé de 636,15 euros sur le compte courant Société Générale, de 12 238,04 euros sur LEP Société Générale, de 63 124,54 euros de portefeuilles titres à la même banque et de 15 518,03 euros sur un livret A Caisse dépargne ; que lattribution de laide sociale est soumise au principe de subsidiarité de cette aide et intervient quen cas dinsuffisance de ressources personnelles du demandeur ; quau regard de la situation financière de M. X..., celui-ci ne se trouve pas en état de besoin ; que laide sociale est attribuée à M. X... au titre de son placement depuis le 14 décembre 1992 ; que la créance daide sociale est à ce jour de 221 950,20 euros mais quactuellement sa situation financière lui permet de payer temporairement le coût de son placement ; que louverture du droit à laide sociale en matière de placement est soumise à lappréciation des facultés contributives des demandeurs daide sociale ; que le département est soumis au principe du bon usage des deniers publics, principe que le Conseil constitutionnel a érigé en « exigence constitutionnelle » (CC no 2010-624 DC du 20 janvier 2011 Loi portant réforme de la représentation devant les cours dappel) ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010-110 QPC du 25 mars 2011, notamment larticle 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment larticle 1er, alinéa 3, de son dispositif ;
Après avoir entendu à laudience publique du 19 juin 2015, Mme ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant que la décision attaquée du président du conseil général du Puy-de-Dôme de refus de laide sociale à lhébergement des adultes handicapés à M. X... en date du 16 avril 2013 a été prise au motif que « le capital mobilier détenu par lintéressé lui permet de couvrir ses frais dhébergement » ; que par la décision attaquée du 26 novembre 2013, la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme a confirmé cette décision pour le même motif et en outre pour le motif que « le principe du bon usage des deniers publics, auquel le département est soumis, avait été érigé en « exigence constitutionnelle » par le conseil constitutionnel (CC no 2010-624 DC du 20 janvier 2011, loi portant réforme de la représentation devant les cours dappel) » ;
Considérant que selon les dispositions combinées des articles L. 132-1 à 3 du code de laction sociale et des familles et des dispositions réglementaires prises pour leur application, seuls les revenus produits par les capitaux placés peuvent être pris en compte ; que ces dispositions ouvrent droit à laide sociale indépendamment du montant des capitaux possédés par le demandeur daide ; que cest par suite à tort que le premier juge sest fondé sur la détention du capital et le principe de subsidiarité de laide sociale qui ne joue que pour autant que les dispositions applicables telles quinterprétées par la jurisprudence du conseil dEtat ny font pas obstacle, pour refuser ladmission de M. X... à laide sociale au placement des personnes handicapées ;
Considérant que le principe invoqué par le premier juge et le défendeur en appel du « bon usage des deniers publics » érigé en exigence constitutionnelle par la décision précitée, est inopérant dans la présente instance concernant les dispositions législatives différentes précitées, en labsence, en toute hypothèse, de soumission au juge dune question prioritaire de constitutionalité relative à ces dispositions présentée par mémoire distinct ;
Considérant quil résulte de linstruction et nest pas contesté que, pour lapplication des dispositions combinées du 2o de larticle D. 344-55 et du 1er alinéa de larticle D. 344-36 du code de laction sociale et des familles, M. X... devait bénéficier, compte tenu de sa situation et de ses revenus à la date deffet le 1er décembre 2012 de la décision à intervenir sur sa demande de renouvellement de laide sociale pour la prise en charge de ses frais dhébergement et dentretien au foyer F... (63), dun minimum de revenu laissé à sa disposition de 70 % du montant mensuel de lallocation aux adultes handicapés (AAH) et que, compte tenu du tarif de létablissement applicable à cette date du 1er décembre 2012, la participation de laide sociale devait être fixée par déduction du montant du tarif des revenus de M. X... correspondant au minimum quil devait conserver ; quil y a lieu de renvoyer le requérant devant le président du conseil départemental du Puy-de-Dôme pour liquidation de la participation de laide sociale au titre de décembre 2012 sur les bases ainsi déterminées ; quen létat du dossier, il nest pas contesté que pour les mois compris dans la période courant du 1er janvier 2013 à la date de la présente décision, le même minimum de revenu soit garanti à M. X... et que la liquidation de la participation de laide sociale doit bien intervenir sur les mêmes bases ; que toutefois, dans lhypothèse où depuis lintroduction de la requête, la production du mémoire en défense enregistré le 4 avril 2014 se bornant à soutenir que les ressources en capital pouvaient, contrairement à ce qui vient dêtre jugé, être prises en compte, des modifications de la situation du requérant au regard de sa situation professionnelle ou de la détermination, compte tenu des revenus de chaque mois de la période en cause du montant du minimum devant lui être laissé, seraient intervenues, il appartiendrait à ladministration de fixer, pour chaque période où la situation de M. X... se serait ainsi modifiée, la participation de laide sociale sous le contrôle en tant que de besoin du juge de laide sociale, rien au dossier ne permettant à la commission centrale daide sociale de présumer en létat dune telle modification en la contraignant ainsi à un supplément dinstruction complémentaire pour la faire apparaitre, le cas échéant, à la date de la présente décision... ; quil y a donc lieu de renvoyer M. X..., par son tuteur lassociation A..., devant le président du conseil départemental du Puy-de-Dôme pour quil soit procédé à la fixation de la participation de laide sociale aux dépenses dhébergement et dentretien de lassisté au foyer de Cunlhat, conformément aux motifs qui précédent,
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme en date du 26 novembre 2013, ensemble la décision du président du conseil général du Puy-de-Dôme du 16 avril 2013 sont annulées.
Art. 2. - M. X... est admis à laide sociale au placement des personnes handicapées à compter du 1er décembre 2012.
Art. 3. - M. X... est renvoyé devant le président du conseil départemental du Puy-de-Dôme, afin que la participation de laide sociale à ses frais dhébergement et dentretien au foyer F... soit fixée, conformément aux motifs de la présente décision.
Art. 4. - La présente décision sera notifiée à lassociation A..., au président du conseil départemental du Puy-de-Dôme. Copie en sera adressée au secrétariat de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme et à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 19 juin 2015 où siégeaient M. LEVY, président, Mme THOMAS, assesseure, Mme ERDMANN, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 19 juin 2015 à 19 heures.
La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | La rapporteure |
Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale daide sociale,
M.-C. Rieubernet