Dispositions communes à tous les types daide sociale |
2220 |
DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE | ||
Mots clés : Domicile de secours - Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Service daccompagnement à la vie sociale (SAVS) - Etablissement - Conseil dEtat |
Dossiers no 130483 et no 130484
M. X... et Mme Y...
Séance du 19 juin 2015
Décision lue en séance publique le 19 juin 2015, à 13 h 30
Vu, 1 et 2 enregistrées au secrétariat de la commission centrale daide sociale le 24 juin 2013, sous les numéros 130483 et 130484, les requêtes du président du conseil général de la Nièvre tendant à ce quil plaise à la commission centrale daide sociale fixer respectivement dans les départements de lIndre-et-Loire et du Loiret les domiciles de secours de M. X... et de Mme Y... à compter du 15 mai 2013 et du 16 mai 2013 au titre, sagissant de M. X..., de la prise en charge des frais exposés relatifs au service daccompagnement éducatif et social (SAES) aux résidences « R... » (Nièvre) et, sagissant de Mme Y..., de lallocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) ayant respectivement donné lieu à transmission des dossiers par le président du conseil général de lIndre-et-Loire le 15 avril 2013 et par le président du conseil général du Loiret le 18 avril 2013 par les moyens que M. X... et Mme Y... continuent à séjourner dans un établissement et nont donc pas perdu le domicile de secours quils avaient acquis avant leur entrée aux résidences « R... » en mai 2000 ; que le SAVS est financé sous forme de dotation mensuelle fixée par arrêté du président du conseil général de la Nièvre ; quau regard des objectifs généraux figurant en préambule au contrat de séjour et de larticle 2 dudit contrat, il apparaît clairement que la mise à disposition dun espace privé par létablissement à M. X... et à Mme Y... ne constitue pas une sous-location et permet dassimiler la prise en charge par le SAES à un maintien dans un établissement sanitaire et social ; que le 20 septembre 2012, la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) de la Nièvre a proposé la prestation de compensation en établissement ; que la jurisprudence du Conseil dEtat Paris/Hauts-de-Seine no 348292 ne sapplique pas aux présents cas dans la mesure où un contrat de séjour a été conclu entre M. X... et Mme Y... et la structure daccueil dénommée résidences « R... » ;
Vu les décisions attaquées ;
Vu, enregistré le 16 octobre 2013, le mémoire en défense du président du conseil général de lIndre-et-Loire tendant au rejet de la requête no 130483 par les motifs que la MDPH de la Nièvre sest prononcée favorablement pour une orientation vers un service daccompagnement à la vie sociale (SAVS) ; quau regard de la jurisprudence de la commission centrale daide sociale et de celle précitée du Conseil dEtat relatives à des situations similaires, il considère que des logements accompagnés ne sont pas des « établissements sociaux » au sens de larticle L. 122-3 du code de laction sociale et des familles dans lesquels le séjour est sans effet sur lacquisition du domicile de secours ;
Vu, enregistré le 11 décembre 2013, le mémoire en défense du président du conseil général du Loiret tendant au rejet de la requête no 130484 par les motifs que Mme Y... est suivi par le SAES avec lequel elle a signé un contrat de séjour et non avec létablissement résidences « R... » ; que la convention daccompagnement mettant à disposition un local peut être assimilée à un contrat de « sous-location » compte tenu de sa forme et des conditions posées par lassociation ; que « la nature des séjours au sein du SAES » ( !) est conforme aux dispositions des articles D. 312-162 et D. 312-163 du code de laction sociale et des familles ; que la commission des droits et de lautonomie des personnes handicapées (CDAPH) de la Nièvre a reconnu une orientation SAVS pour la période du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2017 ; quelle sest déclarée compétente pour statuer sur des droits de Mme Y... alors quelle applique les mêmes règles de domiciliation de secours que les conseils généraux (art. L. 122-1 sq.) ; que Mme Y... occupe à compter du 15 février 2013 un logement F... dans la Nièvre et non plus R..., adresse du foyer de vie et du SAES ; que le contrat de séjour établit bien les objectifs généraux dun SAVS ; quil sagit donc dun accompagnement éducatif et social dun service médico-social de type SAVS exercé au domicile de Mme Y... et non dun séjour en établissement ; que sagissant de lapplication de la décision du Conseil dEtat du 15 mai 2013, il résulte quen contrepartie de loccupation dun logement la personne handicapée doit sacquitter dun loyer et supporter toutes ses dépenses à lexclusion des frais dinterventions socio-éducatifs pris en charge par laide sociale à lhébergement et à lentretien ; que les stipulations du contrat de séjour et de la convention daccompagnement laissent dans leur ensemble penser quil sagit en réalité dun contrat de « sous-location » intégrant à la charge de Mme Y... lensemble des dépenses à lexclusion des seuls frais dinterventions socio-éducatifs réalisés par le SAES lui demandant de financer une redevance assimilable à un loyer et organisant une convention de mise à disposition sapparentant à un bail ; que dès lors, la décision du 15 mai 2013 est applicable ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu la décision du Conseil constitutionnel no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment larticle 1er, alinéa 3, de son dispositif ;
Après avoir entendu à laudience publique du 19 juin 2015 Mme ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant quil y a lieu de joindre les deux requêtes susvisées qui présentent à juger les mêmes questions ;
Considérant que M. X... et sa compagne Mme Y... résidaient ensemble au foyer R... (Nièvre) ; quils avaient ce faisant conservé les domiciles de secours antérieurement acquis respectivement dans le département de lIndre-et-Loire et celui du Loiret ; quà compter du 15 février 2013, ils ont occupé en commun un appartement F... ; que concomitamment, ils ont été à compter du 15 février 2013 accompagnés par le SAES implanté dans les locaux du foyer R... et que, dans ces circonstances, les présidents du conseil général de lIndre-et-Loire et du Loiret ont respectivement transmis les dossiers de prise en charge des frais de SAES et dallocation compensatrice de M. X... et de Mme Y... au président du conseil général de la Nièvre qui, considérant que les intéressés continuaient à résider dans un établissement « social », a saisi la commission centrale daide sociale ;
Considérant que pour quune structure, y compris de la nature de celles dites « innovantes », « innovatrices », « expérimentales » (etc.) relève, en ce qui concerne la prise en charge par laide sociale de ses frais de fonctionnement, de la catégorie des « établissements » et non de celle des « services », il faut, en tout état de cause, et quelle que puisse être léventuelle « disqualification » de lautorisation accordée au titre « établissement » ou à celui de « service » pour lapplication de la jurisprudence du 15 mai 2013 Paris/Hauts-de-Seine du Conseil dEtat au regard des modalités concrètes de fonctionnement en cas dintervention dun service concomitamment à la signature dun bail entre lassociation gestionnaire de celui-ci et lassisté, dune part que ladite structure ait été globalement autorisée comme établissement, dautre part que lassisté réside effectivement dans la structure autorisée comme telle ;
Considérant quil résulte des pièces versées aux dossiers et notamment, dune part de lautorisation initiale du SAES en date du 12 mars 1999 accordée alors même quaucune disposition ne prévoyait alors légalement lautorisation des services, fournie par le président du conseil général de la Nièvre en réponse au supplément dinstruction de la commission centrale daide sociale et de larrêté du 15 septembre 2011, postérieur quant à lui à la soumission des services à lautorisation par la loi du 2 janvier 2002 « portant autorisation dextension de la capacité du SAVS du foyer des résidences « R... » (de 12) à 18 places » et visant « plus particulièrement » (!) larrêté précité du 12 mars 1999 « créant un service daccompagnement social pour les personnes accueillies dans les appartements extérieurs au foyer de vie ou (accueillies) en familles daccueil », arrêté opportunément fourni, non par le président du conseil général de la Nièvre, mais par celui du Loiret (!), que le SAES (ultérieurement qualifié de SAVS par le président du conseil général de la Nièvre...), même sil continue à être financé par dotation mensuelle globale, a fait lobjet dautorisations initiale et dextension ne comportant pas une autorisation globale comme établissement du « service » (au sens matériel du terme) et de lappartement occupé en commun par M. X... et Mme Y..., mais bien une autorisation autonome (bien que contenue à un niveau dagrégation prêtant comme à laccoutumée à confusion dans un arrêté dextension « poly-structures ») ; quil en va ainsi notamment des 6 places faisant lobjet de « lextension » dont il résulte de larticle 3 de larrêté du 15 septembre 2011 que « la présente autorisation » (des 6 places faisant lobjet de la demande selon les visas) de « la demande dextension du SAVS par la création de 3 logements en faveur des personnes handicapées moteur (semi dépendantes !...) que « la présente autorisation est liée » (souligné par la CCAS) « à la construction par Nièvre Habitat de 3 logements en faveur de personnes handicapées moteur (semi dépendantes) ; que ces actes administratifs, dont le niveau dagrégation et partant de confusion correspond aux ambiguïtés mêmes du « projet » du promoteur, nen portent pas moins dans leur combinaison sur la création le 12 mars 1999 « dun service daccompagnement social pour les personnes accueillies dans (les) appartements extérieurs au foyer de vie ou en famille daccueil », soit à lépoque, ceux que lassociation) était « autorisée » à « ouvrir à D... pouvant accueillir dans limmédiat 6 résidents, de même quelle était autorisée » (autorisation, en létat, ayant plutôt valeur de déclaration dintention) « à rechercher les familles daccueil, soit à titre ponctuel, soit à titre définitif pour les résidents du foyer de vie R..., sous réserve que les familles aient reçu lagrément ad hoc » ; que malgré, selon la commission centrale daide sociale, le degré de confusion conceptuelle de ces actes juridiques lorsquon essaye de les extraire du « terreau des pratiques », il apparaît que les appartements et singulièrement celui occupé par M. X... et Mme Y... nont pas donné lieu à une autorisation globale desdits appartements et dun service au titre « établissement » (le seul « établissement » est le foyer « traditionnel » R... que M. X... et Mme Y... ont quitté pour occuper les appartements rue F...), mais que le SAES devenu SAVS a bien fait lobjet dune autorisation, fut-elle à lorigine superfétatoire, en labsence de publication du décret dapplication prévu par larticle 3 de la loi du 30 juin 1975 pour les structures de la sorte, comme « service » et quil en va singulièrement ainsi des 6 places dont font parties les 2 dont bénéficient M. X... et Mme Y... ;
Considérant quune telle analyse est corroborée par divers éléments de fait, même si, à eux seuls, ceux-ci ne seraient nullement déterminants ; que dabord, la CDAPH de la Nièvre (dont la position sur la compétence déterminée depuis la « loi Blanc » par le domicile de secours ne simpose nullement en toute hypothèse au juge administratif du domicile de secours - !...) a orienté les assistés vers un « service » ; quensuite, le tarif (dotation mensuelle de la structure) paraît sans rapport quant à son montant avec ceux applicables dans les établissements ; quinversement, la circonstance que léquipe technique de la CDAPH de la Nièvre (dont la décision nest pas au dossier) ait envisagé loctroi de la prestation de compensation du handicap (PCH) (substituée à lACTP ?) au titre « PCH en établissement » au motif que « le SAVS ne prend pas en charge les besoins aide humaine. Les démarches seront réalisées par lusager qui sera accompagné par le personnel SAVS. Au regard de cette particularité les frais relatifs aux besoins quotidiens daide humaine doivent être financés par la PCH selon les modalités définies dans le plan personnalisé de compensation, ce qui explique une instruction en PCH en établissement », dailleurs prêtant à tout le moins... ?, à interrogation sur le plan juridique, demeure en toute hypothèse sans incidence sur la solution juridique à appliquer dans la présente instance relative à la détermination du domicile de secours déterminé par la question de savoir si la « structure » de prise en charge des assistés (appartements + SAES devenu SAVS) constitue ou non un établissement, ce qui nest pas le cas comme il a été précédemment indiqué ;
Considérant que cest en fonction de lensemble des considérations qui précèdent quil y a lieu de statuer sur les moyens des requêtes ;
Considérant en premier lieu, que le président du conseil général de la Nièvre soutient que M. X... et Mme Y... continuent à séjourner dans un établissement, dune part (élément de corroboration... de la position qui vient dêtre rappelée de léquipe technique de la CDAPH) au titre de loctroi de la PCH, moyen qui ne peut être quécarté, dautre part, parce que les objectifs énoncés aux contrats de séjour dans lappartement rue F... et dans la convention daccompagnement, font apparaître « clairement » que « la mise à disposition dun espace privé par « létablissement » à Mme Y... ne constitue pas une sous-location et permet dassimiler la prise en charge par le SAES à un maintien dans un établissement sanitaire et social », le président du conseil général du Loiret faisant valoir quil y a lieu de « requalifier » les conventions de « la mise à disposition de lespace privé » à M. X... et Mme Y... en sous-location (ce qui suppose dailleurs, ce qui est vraisemblable mais non établi par le dossier, que ce soit bien lassociation et non lorganisme dHLM qui soit propriétaire (cf. décision du Conseil dEtat no 355835, département de lOrne) ; quen toute hypothèse et sans quil soit besoin de statuer sur la nature juridique exacte à retenir de la redevance prévue par les contrats de séjour et les conventions daccompagnement et la possibilité juridique même de signer un contrat de séjour, dailleurs assorti dune convention daccompagnement, dans les circonstances de lespèce, il résulte de ce qui précède quil suffit à la commission centrale daide sociale, pour lapplication de sa jurisprudence non modifiée à cet égard depuis lintervention de la décision du 15 mai 2013 du Conseil dEtat, de constater que le SAES (devenu SAVS) a fait lobjet dune autorisation autonome distincte de celle du foyer « traditionnel » « R... » dans les locaux duquel il est implanté pour suivre des assistés, soit résidant en appartements ne faisant pas lobjet quant à eux dune autorisation comme ceux situés à F..., soit accueillis (si cette éventualité sest matérialisée !...) à titre ponctuel ou définitif dans ladite structure de foyer « traditionnel » ; quainsi, contrairement à ce que soutient le président du conseil général de la Nièvre, M. X... et Mme Y... ne peuvent être regardés comme ayant, en lespèce, continué à séjourner à compter du 15 février 2013 dans un « établissement » ;
Considérant que par un second moyen, en réalité difficilement dissociable du précédent, le président du conseil général de la Nièvre soutient que la décision du Conseil dEtat du 15 mai 2013 ne « sapplique pas au présent cas dans la mesure où un contrat de séjour a été conclu » entre M. X... et Mme Y... « et la structure daccueil dénommée résidences « R... » » ; quen premier lieu, le contrat de séjour ne peut avoir été conclu avec les résidences « R... », mais exclusivement avec lassociation, propriétaire ou locataire des appartements rue F... qui ne sont pas autorisés, notamment, au nombre de ceux du foyer traditionnel résidences « R... » ; que dès lors et en tout état de cause, le SAES (devenu SAVS) faisant lobjet, comme il résulte de ce qui précède, dune autorisation spécifique et les logements F... nayant jamais été compris au nombre de ceux faisant lobjet dune autorisation au titre des articles L. 312-1 et L. 313-1 du code de laction sociale et des familles, soit parmi ceux du foyer « traditionnel » résidences « R... », soit autrement, la seule structure autorisée est un service et il nest, par suite, pas nécessaire de rechercher sil y avait lieu de prévoir au titre de « la mise à disposition de lespace privé » constituée par les appartements rue F... une redevance ou un loyer (ou un sous loyer ? !) et un « contrat de séjour » dailleurs assorti dune convention daccompagnement qui ne peut être regardée que comme portant sur le service seul autorisé ou un bail ou un sous bail, puisquen toute hypothèse M. X... et Mme Y..., sils résident effectivement dans lappartement conjointement occupé rue F..., ne résident pas pour autant dans un établissement social autorisé dispensant les prestations daccompagnement social et dès lors, en labsence à compter du 15 février 2013 de prise en charge dans un « établissement », ont acquis au 15 mai 2013, nonobstant lintervention du SAES (devenu SAVS) autorisé dans les conditions ci-dessus rappelées un domicile de secours dans le département de la Nièvre ; quainsi, en toute hypothèse, le moyen tiré de ce que « la jurisprudence du Conseil dEtat ne sapplique pas dans la mesure où un contrat de séjour a été conclu » doit être écarté ; quà supposer même que contrairement à ce que considère la présente commission, il y ait lieu de se situer exclusivement, comme ladmettent les parties, dans le cadre juridique de la décision du 15 mai 2013, il conviendrait dobserver que même en « disqualifiant » le contrat de séjour en contrat de bail (ou sous bail), les clauses du « contrat de séjour » et de la convention daccompagnement, qui en est indissociable, nen comporteraient pour autant aucune permettant dassimiler la « mise à disposition dun espace privé », selon la formulation des parties, cest à dire dun logement autonome, à un hébergement dans un « établissement sanitaire ou social » ;
Considérant quil résulte de ce qui précède et en tout état de cause que les requêtes du président du conseil général de la Nièvre ne peuvent être que rejetées,
Décide
Art. 1er. - Les requêtes susvisées du président du conseil général de la Nièvre sont rejetées.
Art. 2. - La présente décision sera notifiée au président du conseil départemental de la Nièvre, au président du conseil départemental de lIndre-et-Loire, au président du conseil départemental du Loiret. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 19 juin 2015 où siégeaient M. LEVY, président, Mme THOMAS, assesseure, Mme ERDMANN, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 19 juin 2015, à 13 h 30.
La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | La rapporteure |
Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale daide sociale,
M.-C. Rieubernet