Dispositions spécifiques aux différents types daide sociale |
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AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH) | ||
Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Prestation de compensation du handicap (PCH) - Recours - Conseil dEtat - Evaluation - Besoins - Compétence juridictionnelle
Conseil dEtat statuant au contentieux
Dossier no 371490
Mme X...
Lecture du 1er juin 2015
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme X... a demandé à la commission départementale daide sociale des Pyrénées-Atlantiques, dune part, dannuler la décision du président du conseil général de ce département du 26 juillet 2011 lui réclamant la somme de 10 684,40 euros à titre dindu de prestation de compensation du handicap et, dautre part, denjoindre au département des Pyrénées-Atlantiques de lui reverser la somme de 2 000,26 euros quelle estimait avoir remboursée à tort ;
Par décision du 26 janvier 2012, la commission départementale a annulé la décision du président du conseil général en tant quelle mettait à la charge de Mme X... un indu de 10 684,40 euros et a exonéré celle-ci de lobligation de rembourser cette somme ;
Par une décision no 120455 du 24 mai 2013, la commission centrale daide sociale, à la demande du département des Pyrénées-Atlantiques, a annulé la décision de la commission départementale daide sociale des Pyrénées-Atlantiques et rejeté la demande présentée à cette commission par Mme X...
Procédure devant le Conseil dEtat
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 21 août 2013, 21 novembre 2013 et 20 juin 2014 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil dEtat, Mme X... demande au Conseil dEtat :
1o Dannuler cette décision no 120455 de la commission centrale daide sociale du 15 mars 2013 ;
2o De rejeter lappel du département des Pyrénées-Atlantiques et de condamner celui-ci à lui verser une somme de 2 000,26 euros, assortie des intérêts légaux capitalisés ;
3o De mettre à la charge du département des Pyrénées-Atlantiques la somme de 3 500 euros au titre de larticle L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de laction sociale et des familles ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Marie Grosset, maître des requêtes en service extraordinaire ;
- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Masse-Dessen, Thouvenin, Coudray, avocat de Mme X... et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat du département des Pyrénées-Atlantiques ;
1. Considérant quil résulte des articles L. 245-1 et L. 245-2 du code de laction sociale et des familles que les personnes handicapées remplissant certaines conditions ont « droit à une prestation de compensation qui a le caractère dune prestation en nature qui peut être versée, selon le choix du bénéficiaire, en nature ou en espèces » ; que le montant de cette prestation de compensation, servie par le département où le demandeur a son domicile de secours, est fixé après une évaluation des besoins de compensation du demandeur et létablissement dun plan personnalisé de compensation réalisés par une équipe pluridisciplinaire ; quaux termes des articles D. 245-57 et D. 245-58 du même code : « Le président du conseil général organise le contrôle de lutilisation de la prestation à la compensation des charges pour lesquelles elle a été attribuée au bénéficiaire » et « peut à tout moment procéder ou faire procéder à un contrôle sur place ou sur pièces en vue de vérifier (...) si le bénéficiaire de cette prestation a consacré cette prestation à la compensation des charges pour lesquelles elle lui a été attribuée » ;
2. Considérant quaux termes de larticle L. 245-5 du même code : « Le service de la prestation de compensation peut être suspendu ou interrompu lorsquil est établi, au regard du plan personnalisé de compensation et dans des conditions fixées par décret, que son bénéficiaire na pas consacré cette prestation à la compensation des charges pour lesquelles elle lui a été attribuée. Il appartient, le cas échéant, au débiteur de la prestation dintenter une action en recouvrement des sommes indûment utilisées » ; que larticle R. 245-72 du même code dispose que : « Tout paiement indu est récupéré en priorité par retenue sur les versements ultérieurs de la prestation de compensation. A défaut, le recouvrement de cet indu est poursuivi comme en matière de contributions directes (...) » ;
3. Considérant que la circonstance que le versement de la prestation de compensation fasse lobjet de retenues, en application de larticle R. 245-72 du code de laction sociale et des familles, pour recouvrer un indu au titre dune période antérieure, ne dispense pas le bénéficiaire de la prestation de son obligation de lutiliser à la compensation des charges pour lesquelles elle lui a été attribuée ; que, par suite, la commission centrale daide sociale na pas commis derreur de droit en jugeant quen labsence dune telle utilisation, le département était fondé à constater un paiement indu ;
4. Mais considérant quil appartient au juge de laide sociale, eu égard tant à la finalité de son intervention quà sa qualité de juge de plein contentieux, non seulement dapprécier la légalité de la décision ordonnant la récupération dun indu mais de se prononcer lui-même sur la décision rejetant explicitement ou implicitement la demande du bénéficiaire de la prestation tendant à la remise ou à la modération, à titre gracieux, de la somme ainsi mise à sa charge, en recherchant si, au regard de lensemble des circonstances de fait dont il est justifié par lune et lautre partie à la date de sa propre décision, la situation de précarité de lintéressé et sa bonne foi justifient une telle mesure ;
5. Considérant quil ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme X..., dont la demande de remise gracieuse avait été rejetée par le département, a non seulement contesté la légalité de la décision de récupération prise à son encontre mais a également demandé devant la commission départementale daide sociale à être dispensée de restituer le solde de lindu et fait valoir tant sa bonne foi, compte tenu de linsuffisante information dont elle avait bénéficié, du caractère itératif de lindu réclamé et des remboursements déjà effectués, que son faible niveau de ressources et limpossibilité pour sa famille de lui accorder une aide plus élevée que celle déjà consentie ; quainsi, par des moyens dont la commission centrale daide sociale était saisie par leffet dévolutif de lappel, Mme X... avait contesté le rejet par le département des Pyrénées-Atlantiques de sa demande de remise de lindu réclamé ; quen jugeant que seule lautorité administrative compétente aurait pu faire usage de ses pouvoirs de remise ou de modération de lindu et quelle même ne pouvait que rejeter la demande de Mme X..., alors quelle avait la faculté, en fonction des circonstances particulières de lespèce, de lui accorder une remise de lindu ou den réduire le montant, la commission centrale daide sociale a méconnu létendue de ses pouvoirs ;
6. Considérant quil résulte de ce qui précède, sans quil soit besoin dexaminer les autres moyens du pourvoi, que Mme X... est fondée à demander lannulation de la décision de la commission centrale daide sociale du 24 mai 2013 ;
7. Considérant quil y a lieu, dans les circonstances de lespèce, de mettre à la charge du département des Pyrénées-Atlantiques une somme de 3 000 euros au titre de larticle L. 761-1 du code de justice administrative,
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission centrale daide sociale du 24 mai 2013 est annulée.
Art. 2. - Laffaire est renvoyée à la commission centrale daide sociale.
Art. 3. - Le département des Pyrénées-Atlantiques versera à Mme X... une somme de 3 000 euros au titre de larticle L. 761-1 du code de justice administrative.
Art. 4. - La présente décision sera notifiée à Mme X... et au département des Pyrénées-Atlantiques.