Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Ressources - Vie maritale - Déclaration - Recours - Moyen de légalité - compétence juridictionnelle - Autorité de la chose jugée - Prescription - Prélèvement pour répétition de l’indu - Légalité
Dossier no 120930

M. X...
Séance du 14 mai 2014

Décision lue en séance publique le 17 juin 2014

    A été assigné à M. X... un indu d’un montant de 31 139,83 euros à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui ont été indûment servies au motif qu’il n’a pas déclaré ses revenus salariés et sa vie maritale avec Mme Y... pour la période de décembre 1999 à janvier 2007. Par décision en date du 27 juin 2007, le président du conseil général du Finistère a refusé d’accorder à M. X... toute remise gracieuse de l’indu qui lui a été assigné. Saisie, la commission départementale d’aide sociale du Finistère, par décision en date du 27 novembre 2007 a elle aussi refusé de faire droit à sa demande de remise de dette. M. X..., par courrier en date du 27 février 2008, complété le 30 janvier 2013, a demandé à la commission centrale d’aide sociale de le décharger de l’indu porté à son débit.
    Le requérant conteste le bien-fondé d’une partie de l’indu et les modalités de remboursement du montant restant à sa charge. Il affirme que le tribunal de grande instance de Bobigny s’est prononcé sur le litige qui l’oppose au conseil général du Finistère. Il fait valoir qu’il en a informé par courrier les services fiscaux et le conseil général du Finistère. Il soutient qu’un courrier lui a été adressé par ce dernier l’informant qu’il demeure tenu d’apurer la dette qui lui a été assignée ainsi que les dettes auxquelles il a été condamné par le tribunal de grande instance de Bobigny. Il affirme qu’il a demandé par courrier au conseil général du Finistère de lui indiquer les dispositions juridiques sur lesquels il se fonde pour affirmer qu’il est tenu d’apurer l’indu qui lui a été assigné. Il fait valoir qu’il a demandé au trésorier payeur départemental un échelonnement du paiement des dettes auxquelles il a été condamné et qu’il rembourse à ce titre un montant de 110 euros mensuels. Il soutient qu’il a demandé un renouvellement de cet échéancier. Il rappelle les termes des articles 496 et 505 du code de procédure pénale dont il découle, selon lui, qu’il n’y a pas lieu de se prononcer sur le litige pour la commission centrale d’aide sociale.
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 14 mai 2014, Mme Hortense GAUTIER, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire (...). La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262-1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer » ; qu’aux termes de l’article L. 262-40 du même code : « L’action du bénéficiaire pour le paiement de l’allocation se prescrit par deux ans. Cette prescription est également applicable, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, à l’action intentée par un organisme payeur en recouvrement des sommes indûment payées » ;
    Considérant qu’il ressort de l’instruction que la caisse d’allocations familiales du Finistère a diligenté un contrôle au domicile de M. X... en date du 15 mars 2007, et que le rapport subséquent révèle que M. X... a reconnu avoir multiplié les fausses déclarations pour conserver le bénéfice de l’allocation de revenu minimum d’insertion, et entretenu une vie maritale avec Mme Y..., salariée d’un cabinet comptable, depuis novembre 1999 ; que le requérant, par une attestation sur l’honneur en date du 15 mars 2006 transmise à la caisse d’allocations familiales, a reconnu avoir bénéficié à tort de l’allocation de revenu minimum d’insertion, ne pas avoir déclaré ses revenus salariés car ils étaient irréguliers, pas plus que sa vie maritale car il ignorait qu’il en avait l’obligation ; que, par suite, été assigné à M. X... un indu d’un montant de 31 139,83 euros à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui ont été indûment versées pour la période de novembre 1999 à janvier 2007 ; que le président du conseil général du Finistère, par décision en date du 27 juin 2007, a refusé de lui accorder toute remise gracieuse ; que, saisie, la commission départementale d’aide sociale du Finistère, par décision en date du 27 novembre 2007 dont M. X... relève appel, a confirmé la décision du président du conseil général ;
    Considérant qu’en se bornant à énoncer, sans qualifier sa nature, que « l’indu résulte de la non déclaration par M. X... à la caisse d’allocations familiales du Nord-Finistère, de ses salaires et de sa vie maritale avec Mlle Y... », la commission départementale d’aide sociale du Finistère n’a pas répondu au moyen d’absence de fraude et de fausse déclaration soulevé devant elle par M. X... ; qu’il y a lieu, par suite, d’annuler sa décision ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;
    Considérant qu’à la suite de la constitution de partie civile du président du conseil général du Finistère, par décision en date du 30 juin 2009, le tribunal de grande instance de Bobigny a décidé de relaxer M. X... des fins de poursuite pour les faits qualifiés d’obtention frauduleuse d’une allocation de revenu minimum d’insertion pour la période du 1er novembre 1999 au 31 mars 2005, et de le reconnaître coupable pour les faits qualifiés d’obtention frauduleuse d’une allocation de revenu minimum d’insertion pour la période du 1er avril 2005 au 1er janvier 2007 ; que le tribunal de grande instance de Bobigny a décidé de le condamner à ce titre à payer au conseil général du Finistère la somme de 8 322,54 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par le département, et à la somme de 598 euros au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale ;
    Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des articles L. 262-39 et L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles qu’il appartient aux présidents de conseils généraux puis, le cas échéant, aux commissions départementales d’aide sociale et à la commission centrale d’aide sociale, d’apprécier si le paiement indu de l’allocation de revenu minimum d’insertion trouve son origine dans une manœuvre frauduleuse ou une fausse déclaration et, si ce n’est pas le cas, d’apprécier si le requérant se trouve dans une situation de précarité justifiant qu’une remise de l’indu lui soit accordée ; que ces compétences appartiennent au juge de l’aide sociale indépendamment des recours portés devant le juge pénal et des décisions statuant sur ce recours ; qu’il suit de là que M. X... n’est pas fondé à soutenir que la commission centrale d’aide sociale n’est pas compétente pour se prononcer sur le présent litige ;
    Considérant toutefois, que le juge de l’aide sociale est tenu par la qualification juridique des faits retenue par le tribunal de grande de grande instance de Bobigny dans son jugement du 30 juin 2009, sauf à méconnaître la portée de celui-ci, qui a acquis l’autorité et la force de la chose jugée dès lors qu’il n’a pas été frappé d’appel ; que la juridiction précitée a décidé de relaxer M. X... des faits qualifiés d’obtention frauduleuse de l’allocation de revenu minimum d’insertion pour la période du 1er novembre 1999 au 31 mars 2005 ; qu’il suit de là que la créance d’allocations de revenu minimum d’insertion imputée à M. X... au titre de cette période est prescrite, en application de l’article L. 262-40 du code susvisé ;
    Considérant que le tribunal de grande instance de Bobigny a également, dans sa décision du 30 juin 2009, décidé de reconnaître M. X... coupable des faits qualifiés d’obtention frauduleuse de l’allocation de revenu minimum d’insertion pour la période du 1er avril 2005 au 1er janvier 2007, et l’a condamné à payer au conseil général du Finistère la somme de 8 322,54 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par le département ; que nonobstant la qualification de dommages-intérêts de la somme de 8 322,54 euros, il y a lieu de constater que ce montant correspond à l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion détecté pour la période du 1er avril 2005 au 1er janvier 2007 ; que dès lors, cette décision remplit le conseil général du Finistère de ses droits à recouvrement de la somme précitée ;
    Considérant enfin, que conseil général du Finistère, par courrier en date du 14 avril 2008, a indiqué à M. X... que l’engagement d’un recours devant la commission centrale d’aide sociale n’avait nullement d’effet suspensif ; que la commission centrale d’aide sociale rappelle avec la plus grande fermeté, qu’il ressort de l’article L. 262-42 du code de l’action sociale et des familles que, dès qu’une demande de remise de dette est déposée et qu’un contentieux se développe, le recours est suspensif et la procédure de recouvrement doit être suspendue jusqu’à l’épuisement de la procédure devant les juridictions du fond ; que tout prélèvement pour répétition de l’indu revêt un caractère illégal,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision en date du 27 novembre 2007 de la commission départementale d’aide sociale du Finistère, ensemble la décision du président du conseil général du 27 juin 2007, sont annulées.
    Art. 2.  -  La créance d’allocations de revenu minimum d’insertion assignée à M. X... pour la période du 1er novembre 1999 au 31 mars 2005 est prescrite.
    Art. 3.  -  L’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion porté au débit de M. X... est limité à somme de 8 322,54 euros, couvrant la période du 1er avril 2005 au 1er janvier 2007.
    Art. 4.  -  Le surplus des conclusions de la requête de M. X... est rejeté.
    Ar. 5.  -  La présente décision sera notifiée à M. X..., au président du conseil général du Finistère. copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 14 mai 2014 où siégeaient Mme DOROY, présidente, M. MONY, assesseur, Mme GAUTIER, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 17 juin 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidente La rapporteure

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet