Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Fraude - Compétence juridictionnelle - Précarité
 

Dossier no 120525

M. X...
Séance du 28 janvier 2014

Décision lue en séance publique le 4 juillet 2014

    Vu le recours en date 10 février 2012 formé par M. X... qui demande l’annulation de la décision en date du 8 décembre 2011 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de la Moselle a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision en date du 30 juin 2005 de la caisse d’allocations familiales de la Moselle, agissant par délégation du président du conseil général, qui lui a assigné un indu de 7 697,56 euros, résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion décompté pour la période de juin 2003 à février 2005 ;
    Le requérant soutient qu’il n’a pu se présenter à l’audience de la commission départementale d’aide sociale ; qu’il n’a jamais fraudé pour obtenir la prestation du revenu minimum d’insertion ; qu’il a toujours résidé à Metz et ne s’en est jamais absenté plus d’une semaine durant l’année 2003 et trois mois durant l’année 2004 ; qu’il a été condamné à tort par le Tribunal correctionnel ; qu’il a été privé de ressources pendant deux ans et qu’aujourd’hui, grâce à une formation, il travaille sous contrat à durée indéterminée ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que la requête a été communiquée au président du conseil général de la Moselle qui n’a pas produit d’observations en défense ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que M. X... s’est acquitté de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts entre le 1er octobre 2011 et le 31 décembre 2013 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes aux dossiers ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 28 janvier 2014 M. BENHALLA, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-41, alinéa 1, du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations est récupéré par retenue sur le montant des allocations à échoir ou, si le bénéficiaire opte pour cette solution ou s’il n’est plus éligible au revenu minimum d’insertion, par remboursement de la dette en un ou plusieurs versements » ; qu’aux termes de l’article L. 262-42 du code de l’action sociale et des familles : « Le recours mentionné à l’article L. 262-41 et l’appel contre cette décision devant la commission centrale d’aide sociale ont un caractère suspensif. Ont également un caractère suspensif le dépôt d’une demande de remise ou de réduction de créance et la contestation de la décision prise sur cette demande, devant la commission départementale et la commission centrale d’aide sociale » ;
    Considérant qu’en vertu de l’article L. 262-41 in fine du code de l’action sociale et des familles modifié par la loi no 2004-809 du 13 août 2004 - art. 58 (V) JORF 17 août 2004 en vigueur le 1er janvier 2005 : « En cas de précarité de la situation du débiteur, la créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général » ; qu’aux termes de l’article L. 262-41 in fine du code de l’action sociale et des familles issu de la loi du 23 mars 2006 entrée en vigueur le 25 mars suivant : « La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ;
    Considérant que, comme suite à un contrôle de l’organisme payeur en date du 11 janvier 2005, il a été constaté que M. X..., allocataire du revenu minimum d’insertion, ne résidait plus en Moselle ; que par décision en date du 30 juin 2005, la caisse d’allocations familiales de la Moselle, agissant par délégation du président du conseil général, lui a notifié un indu de 7 697,56 euros à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion indûment perçues pour la période de juin 2003 à février 2005 ; que le président du conseil général a déposé plainte auprès du procureur de la République ; que par jugement en date du 27 mars 2008, le tribunal de grande instance de Metz a déclaré M. X... coupable de fraude au revenu minimum d’insertion ; que comme suite à un appel du jugement, M. X... s’est désisté, ce dont, par un arrêt en date du 3 juin 2009, la cour d’appel de Metz lui a donné acte ;
    Considérant que M. X... a, dès le 1er septembre 2005, formé un recours contre la décision en date du 30 juin 2005 de la caisse d’allocations familiales devant la commission départementale d’aide sociale de la Moselle et a sollicité une remise ; que celle-ci a décidé d’ajourner l’examen du recours à plusieurs reprises dans l’attente d’une décision définitive des juridictions pénales ; que par décision en date du 8 décembre 2011, la commission départementale d’aide sociale de la Moselle a maintenu l’indu mis à la charge de M. X... ;
    Considérant qu’il appartient aux juridictions de l’aide sociale de se prononcer non seulement sur le bien-fondé des décisions mettant un indu à la charge d’un bénéficiaire du revenu minimum d’insertion, mais aussi le cas échéant sur bien-fondé d’une demande de remise gracieuse ; que l’intervention de leur appréciation à cet égard n’est pas, dans le cas où des faits invoqués par l’administration comme motif de sa décision sont par ailleurs susceptibles de recevoir la qualification d’infraction pénale, subordonnée à la décision préalable du juge compétent pour se prononcer sur cette qualification ;
    Considérant d’une part qu’en décidant d’ajourner à plusieurs reprises l’examen du recours de M. X... tendant à l’annulation de la décision du président du conseil général mentionnées plus haut dans l’attente « d’une décision pénale définitive » qui devait résulter d’une plainte déposée par le président du conseil général à l’encontre du requérant du chef notamment d’obtention frauduleuse du revenu minimum d’insertion, la commission départementale d’aide sociale de la Moselle a méconnu sa compétence ;
    Considérant d’autre part que la période litigieuse porte sur la période antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 23 mars 2006 ; qu’ainsi, les dispositions précitées de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles applicables en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration ne font pas, en toute hypothèse obstacle, contrairement à ce suggère la motivation retenue par la commission départementale d’aide sociale de la Moselle, à ce qu’il en soit accordé une remise gracieuse ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède, que la décision en date du 8 décembre 2011 de la commission départementale d’aide sociale de la Moselle doit être annulée ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;
    Considérant que M. X... affirme, sans être contredit, qu’il a été privé de ressources pendant deux ans ; qu’aujourd’hui, grâce à une formation, il travaille et perçoit un salaire d’environ 1 600 euros mensuels ; que les capacités contributives de l’intéressé sont donc limitées et le remboursement de la totalité de l’indu ferait peser de sérieuses menaces de déséquilibre sur son budget ; qu’il sera fait une juste appréciation de la situation de M. X... en limitant l’indu laissé à sa charge à la somme de 4 000 euros,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision en date du 8 décembre 2011 de la commission départementale d’aide sociale de la Moselle, ensemble la décision en date du 30 juin 2005 de la caisse d’allocations familiales de la Moselle agissant par délégation du président du conseil général, sont annulées.
    Art. 2.  -  L’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion laissé à la charge de M. X... est limité à la somme de 4 000 euros.
    Art. 3.  -  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
    Art. 4.  -  La présente décision sera notifiée à M. X..., au président du conseil général de Moselle. copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 28 janvier 2014 où siégeaient M. BELORGEY, président, Mme PEREZ-VIEU, assesseure, M. BENHALLA, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 4 juillet 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet