Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

3200
 
  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Personne isolée - Fraude - Autorité de la chose jugée - Titre - Procédure - Ressources - Déclaration
 

Dossier no 120352

M. X...
Séance du 28 janvier 2014

Décision lue en séance publique le 4 juillet 2014

    Vu le recours en date du 24 février 2012 formé par le président du conseil général de la Haute-Marne qui demande l’annulation de la décision en date du 29 novembre 2011 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du même département a annulé l’opposition à tiers détenteur du 4 août 2010, et déchargé M. X... de l’indu de 7 359,36 euros résultant d’un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion décompté pour la période de septembre 2003 à avril 2005 ;
    Le président du conseil général de la Haute-Marne conteste la décision en faisant valoir :
        -  que l’indu est justifié même s’il n’a pas été caractérisé comme frauduleux par le tribunal correctionnel de Chaumont dans sa décision en date du 29 mai 2007 ;
        -  que les faits reprochés à M. X... par l’administration justifient l’indu :
            -  il avait bien une activité de travailleur indépendant depuis cinq ans ;
            -  il n’avait pas son domicile effectif dans la Haute-Marne, puisqu’il vivait avec Mme Y... dans le département de la Côte-d’Or ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que la requête a été communiquée à M. X... qui n’a pas produit d’observations en défense ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que le président du conseil général de la Haute-Marne s’est acquitté de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts entre le 1er octobre 2011 et le 31 décembre 2013 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celle d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informée de la date et de l’heure de l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 28 janvier 2014, M. BENHALLA, rapporteur, les représentantes du président du conseil général de la Haute-Marne en leurs observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction applicable à la période en litige : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39 (...). Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262-1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (...) » ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. X... a été admis au bénéfice du revenu minimum d’insertion en septembre 2003 au titre d’une personne isolée ; que comme suite à une rencontre avec le contrôleur de l’organisme payeur après quatre tentatives infructueuses pour le renconter, M. X... a déclaré être sans activité ; que le contrôleur a ultérieurement constaté que l’intéressé louait un emplacement dans une galerie d’un hypermarché dans le département de la Côte-d’Or, et était domicilié chez Mme Y... ; que par décision en date du 13 mai 2005, la caisse d’allocations familiales lui a alors notifié un indu de 7 359,36 euros, à raison d’allocations de revenu minimum d’insertion qui auraient été indûment servies pour la période de septembre 2003 avril 2005 ; que le président du conseil général a engagé une action pénale pour fraude le 6 juin 2005 ; que le tribunal correctionnel de Chaumont, par jugement en date du 29 mai 2007, a prononcé la relaxe de M. X... des faits qui lui étaient reprochés ;
    Considérant que la paierie départementale a émis un titre exécutoire le 23 décembre 2005 suivi d’un rappel le 2 mai 2006 ; que, par la suite, deux commandements à payer ont été adressés à M. X... le 1er juin 2006 et le 30 janvier 2009 ; que, faute de paiement, la paierie départementale a décidé le 4 août 2010 de recourir à la procédure de l’opposition à tiers détenteur ; que M. X... a saisi le tribunal d’instance, qui s’est déclaré incompétent pour juger le litige ; qu’il a alors saisi le Tribunal administratif de Chalons-en Champagne qui, par ordonnance en date du 12 janvier 2012, a renvoyé le dossier devant la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Marne ;
    Considérant que, dans sa décision en date du 29 novembre 2011, la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Marne a relevé que le titre de recette avait été émis suite à l’imputation d’obtention frauduleuse du revenu minimum d’insertion, alors même que le jugement pénal en date du 29 mai 2007 n’avait pas retenu l’infraction de fraude et avait acquis l’autorité de la chose jugée ; que dès lors, elle a annulé l’opposition à tiers détenteur ;
    Considérant, de fait, que le jugement en date du 29 mai 2007 du Tribunal correctionnel de Chaumont n’a pas été frappé d’appel et a donc acquis l’autorité de la chose jugée ; qu’eu égard à l’autorité qui s’attache aux constatations du juge pénal, il a lieu de considérer que M. X... n’a pas bénéficié frauduleusement du revenu minimum d’insertion ; que toutefois, le bien fondé d’un indu n’est pas subordonné à la circonstance qu’il aurait été constitué par des procédés frauduleux ; qu’il y a lieu, pour ce motif, d’annuler la décision attaquée ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer ;
    Considérant en premier lieu, que la vie commune de M. X... avec Mme Y... dans le département de la Côte-d’Or n’est établie qu’à compter de février 2005 ;
    Considérant en second lieu, que les éléments retenus par le contrôleur de l’organisme payeur pour établir la qualité de travailleur indépendant de M. X..., qui n’est pas répertorié comme cotisant à l’URSSAF, à savoir quelques factures s’étalant sur deux ans et cinq mois ne concernent qu’une journée et les deux autres quelques jours de location d’un espace pour l’emplacement d’un stand, ne présentent pas de caractère déterminant pour établir que M. X... a exercé une activité de travailleur indépendant dans le département de la Côte-d’Or ; qu’en revanche, les pièces versées au dossier permettent de tenir pour établi que M. X... a exercé de façon intermittente sur les marchés de la Côte-d’Or une activité de vente de vêtements en cuir ; que les revenus issus de cette activité n’ont pas été déclarés ; qu’ainsi, l’indu assigné à M. X... est, pour partie, fondé en droit ; que toutefois, les éléments versés au dossier ne permettent pas de déterminer son montant exact ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de le limiter à la somme de 1 000 euros,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision en date du 29 novembre 2011 de la commission départementale d’aide sociale de la Haute-Marne, ensemble l’opposition à tiers détenteur du 4 août 2010, sont annulées.
    Art. 2.  -  L’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion mis à la charge de M. X... est limité à la somme de 1 000 euros.
    Art. 3.  -  Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
    Art. 4.  -  La présente décision sera notifiée au président du conseil général de la Haute-Marne, à M. X.... copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 28 janvier 2014 où siégeaient M. BELORGEY, président, Mme PEREZ-VIEU, assesseure, et M. BENHALLA, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 4 juillet 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet