Dispositions communes à tous les types daide sociale |
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RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) - Recours en récupération - Récupération sur donation - Assurance-vie - Justificatifs - Requalification - Erreur - Précarité
Dossier no 130572
M. X...
Séance du 25 novembre 2014
Décision lue en séance publique le 26 novembre 2014
Vu le recours formé le 22 avril 2013 par lunion départementale des associations familiales du Puy-de-Dôme, curateur représentant M. Y..., contre la décision de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme en date du 5 mars 2013 relative à M. X..., père du requérant et bénéficiaire de 42 427,06 euros daide sociale, confirmant la décision du président du conseil général du Puy-de-Dôme du 2 juin 2012 ayant décidé la récupération de lassurance-vie dans la limite du capital versé à M. Y... au décès de M. X... intervenu le 26 octobre 2009 ;
La requérante soutient que le défunt avait souscrit une assurance-vie au profit de ses deux enfants, M. Y... et Mme Z..., pour un montant total de 4 892,20 euros ; que M. Y... na été bénéficiaire que de la somme de 1 710,02 euros et non de 4 892,20 euros comme la signifié le président du conseil général ; que M. Y... a engagé avec cette somme une dépense dun montant de 1 568 euros correspondant à lachat dun scooter de remplacement pour assurer ses déplacements professionnels ; quil est sans activité professionnelle et na aucune capacité de remboursement ; que la décision de récupération de 4 892,20 euros doit être réformée ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2013, du président du conseil général du Puy-de-Dôme tendant au rejet de la requête aux motifs que la jurisprudence du Conseil dEtat, notamment par sa décision du 19 novembre 2004, qui assimile un contrat dassurance-vie à une donation de fait et, par conséquence, récupérable dans les conditions prévues par les articles L. 132-8 et R. 132-11 du code de laction sociale et des familles ; que le moyen soulevé par lunion départementale des associations familiales selon lequel M. Y... na bénéficié que dun seul contrat dassurance-vie nest pas fondé puisque les justificatifs transmis par ladministration fiscale font état de deux contrats dassurance-vie dont lunion départementale des associations familiales a eu connaissance dès la notification de la décision de récupération du président du conseil général et nest pas invoqué dans sa lettre de recours en commission départementale daide sociale ; quen constatant labsence de communication de la facture acquittée du scooter tant devant la première juridiction que devant la commission centrale daide sociale, largument invoqué par lunion départementale des associations familiales ne peut être retenu ; quaucune modération ou exonération à légard du donataire ne peut être accordée ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010-110 QPC du 25 mars 2011, notamment larticle 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment larticle 1er, alinéa 3, de son dispositif ;
Vu lacquittement de la contribution pour laide juridique dun montant de 35 euros due par toute personne saisissant la commission centrale daide sociale depuis le 1er octobre 2011 jusquau 31 décembre 2013 en application de larticle 1635 bis Q du code général des impôts ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informées de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 25 novembre 2014, Mme GOMERIEL, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant, dune part, quaux termes du 2o de larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles : « Des recours sont exercés, selon le cas, par lEtat ou le département (...) contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande daide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande » ; quaux termes de larticle R. 132-11 du même code : « Les recours prévus à larticle L. 132-8 sont exercés, dans tous les cas, dans la limite du montant des prestations allouées au bénéficiaire de laide sociale (...) » ; quaux termes de larticle 894 du code civil : « La donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui laccepte » ; quun contrat dassurance-vie soumis aux dispositions des articles L. 132-1 et suivants du code des assurances, par lequel il est stipulé quun capital ou une rente sera versé au souscripteur en cas de vie à léchéance prévue par le contrat, et à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés en cas de décès du souscripteur avant cette date, na pas en lui-même le caractère dune donation, au sens de larticle 894 du code civil ;
Considérant toutefois que ladministration de laide sociale est en droit de rétablir la nature exacte des actes pouvant justifier lengagement dune action en récupération ; que le même pouvoir appartient aux juridictions de laide sociale, sous réserve, en cas de difficulté sérieuse, dune éventuelle question préjudicielle devant les juridictions de lordre judiciaire ; quà ce titre, un contrat dassurance-vie peut être requalifié en donation si, compte tenu des circonstances dans lesquelles ce contrat a été souscrit, il révèle, pour lessentiel, une intention libérale de la part du souscripteur vis-à-vis du bénéficiaire et après que ce dernier a donné son acceptation ; que lintention libérale doit être regardée comme établie lorsque le souscripteur du contrat, eu égard à son espérance de vie et à limportance des primes versées par rapport à son patrimoine, sy dépouille au profit du bénéficiaire de manière à la fois actuelle et non aléatoire en raison de la naissance dun droit de créance sur lassureur ; que, dans ce cas, lacceptation du bénéficiaire, alors même quelle ninterviendrait quau moment du versement de la prestation assurée après le décès du souscripteur, a pour effet de permettre à ladministration de laide sociale de le regarder comme un donataire, pour lapplication des dispositions relatives à la récupération des créances daide sociale ;
Considérant que M. X..., né le 29 août 1932, a bénéficié de laide sociale aux personnes âgées pour la prise en charge de ses frais dhébergement à lEHPAD du 1er novembre 2005 au 26 octobre 2009, date de son décès ; que les sommes avancées à ce titre par le département du Puy-de-Dôme se sont élevées à 42 427,06 euros ; que, par une décision du 26 février 2010, le président du conseil général du Puy-de-Dôme a requalifié en donation le contrat dassurance-vie souscrit par M. X... et prononcé la récupération à lencontre des deux donataires du montant de 5 719,54 euros perçu à la suite de la liquidation du contrat en avril 2010, soit 827,34 euros pour Mme Z..., sa fille, et 4 892,20 euros pour M. Y... ; que ce dernier a formé un recours contre cette décision devant la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme ; que par une décision prise lors de sa séance du 5 mars 2013, la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme a rejeté le recours et a maintenu la récupération de la prime perçue par M. Y... en sa qualité de donataire, soit 4 892,20 euros ;
Considérant quil ressort de linstruction des éléments du dossier quune erreur manifeste apparaît sur le montant du capital libéré au décès de M. X... ; que le premier contrat no 1145212 souscrit le 1er novembre 1998 disposait dun capital de 3 404,04 euros et que le second contrat no 1218864 souscrit le 1er juin 2003 disposait dun capital de 4 064,86 euros, soit un capital total libéré au décès de M. X... de 4 064,86 euros ; que sur le premier contrat, Mme Z... a perçu un capital de 1 702,02 euros et non 827,34 euros et que M. Y... a également perçu 1 702,02 euros ; que sur le second contrat, Mme Z... était la seule bénéficiaire pour un montant de 4 064,86 euros, ayant ainsi perçu au total la somme de 5 766,88 euros ; quenfin, M. Y... a bien investi la somme de 1 702,02 euros dans lachat dun scooter dun montant de 1 568 euros TTC pour ces déplacements professionnels en tant que peintre façadier, remplaçant celui devenu hors dusage acheté en 2008 avant le décès de son père ;
Considérant quil résulte de ce qui précède que M. Y... na bénéficié que du premier contrat dassurance-vie pour un montant de 1 702,02 euros et non dun montant de 4 892,20 euros ; que laction en récupération engagée par le département aurait dû se faire sur le montant de 1 702,02 euros ; que néanmoins, compte tenu quil est juridiquement sous curatelle jusquen octobre 2015 et au vu de sa situation professionnelle défaillante, laction en récupération est réduite à la somme de 900 euros, M. Y... pouvant se rapprocher du Trésor public pour un échelonnement de sa dette,
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission départementale daide sociale du Puy-de-Dôme du 5 mars 2013, rejetant le recours de lunion départementale des associations familiales du Puy-de-Dôme en qualité de curateur de M. Y..., est annulée.
Art. 2. - La décision du président du conseil général du Puy-de-Dôme du 2 juin 2012, requalifiant en donation le contrat dassurance-vie souscrit par M. X... et prononçant la récupération à lencontre de M. Y... du montant de 4 892,20 euros perçu à la suite de la liquidation du contrat, est annulée.
Art. 3. - Le montant de laction en récupération engagée par le département est ramené à 900 euros.
Art. 4. - La présente décision sera notifiée à M. Y..., à lUnion départementale des associations familiales du Puy-de-Dôme, au président du conseil général du Puy-de-Dôme. Copie en sera adressée au ministre en charge de laide sociale.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 25 novembre 2014 où siégeaient M. SELTENSPERGER, président, Mme GUIGNARD-HAMON, assesseure, Mme GOMERIEL, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 26 novembre 2014.
La République mande et ordonne au ministre en charge de laide sociale, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | La rapporteure |
Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale daide sociale,
M.-C. Rieubernet