Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Décision - Notification - Preuve - Délai - Précarité
 

Dossier no 120907

Mme X...
Séance du 4 avril 2014

Décision lue en séance publique le 23 mai 2014

    Vu le recours formé le 21 septembre 2012 par Mme X... à l’encontre de la décision du 29 mai 2012 par laquelle la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône a rejeté, pour forclusion, sa demande d’annulation des décisions du président du conseil général des Bouches-du-Rhône en date du 28 juillet 2009 refusant de lui accorder une remise de dette sur deux trop-perçus d’allocations de revenu minimum d’insertion, le premier d’un montant initial de 7 362,36 euros décompté pour la période du 1er septembre 2006 au 31 mars 2008, le second d’un montant de 1 970,80 euros détecté pour une période qui n’a pas été précisée dans le dossier ;
    Mme X... affirme que sa famille se trouve dans une situation précaire, étant elle-même enceinte de six mois, avec deux enfants à charge ; que son mari est sans emploi suite à un accident ; elle sollicite une exonération de l’indu de 7 362,36 euros ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que Mme X... s’est acquittée de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts depuis le 1er octobre 2011 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 4 avril 2014, Mme Fatoumata DIALLO, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant d’une part, qu’aux termes de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir ou, par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire. Toutefois, le bénéficiaire peut contester le caractère indu de la récupération devant la commission départementale d’aide sociale dans les conditions définies à l’article L. 262-39 [...]. Les retenues ne peuvent dépasser un pourcentage déterminé par voie réglementaire. La créance peut être remise ou réduite par le Président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration. » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent [...] l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer [...] et notamment les avantages en nature, ainsi que les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux. » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262-1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments [...] » ; qu’aux termes de l’article R. 262-1 du même code : « Le montant du revenu minimum d’insertion fixé pour un allocataire en application de l’article L. 262-2 est majoré de 50 % lorsque le foyer se compose de deux personnes et de 30 % pour chaque personne supplémentaire présente au foyer à condition que ces personnes soient le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin de l’intéressé ou soient à sa charge » ;
    Considérant d’autre part, qu’il ressort des dispositions de l’article L. 262-42 du code de l’action sociale et des familles que, dès qu’une demande de remise de dette est déposée et qu’un contentieux se développe, le recours est suspensif et le recouvrement doit être suspendu jusqu’à l’épuisement de la procédure devant les juridictions du fond ; que tout prélèvement pour répétition de l’indu revêt un caractère illégal ;
    Considérant que le dossier ne fait pas apparaître à quelle date Mme X... est entrée dans le dispositif du revenu minimum d’insertion ; que comme suite à un contrôle d’activité et de ressources de l’intéressée révélant que celle-ci ne déclarait pas son activité salariée depuis le 1er décembre 2003, deux titres exécutoires ont été émis à son encontre concernant un trop-perçu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant de 7 362,36 euros pour la période du 1er septembre 2006 au 31 mars 2008, et un autre d’un montant de 1 970,80 euros pour une période inconnue au dossier ; que par deux décisions en date du 28 juillet 2009, le président du conseil général des Bouches-du-Rhône a rejeté deux demandes de remise de dette de Mme X... concernant les indus susmentionnés ; que par un courrier en date du 25 octobre 2010 adressé à la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône, la requérante a demandé une exonération de dette affirmant vivre seule avec un bébé à charge, être enceinte de six mois, ne percevant que des revenus d’un montant mensuel de 642 euros depuis son changement de situation en septembre 2010 avec plusieurs factures dont EDF à payer ; qu’elle précisait rembourser sa dette de 1 970,80 euros à hauteur de 100 euros par mois depuis plus d’un an et ne plus pouvoir continuer ; que par une décision en date du 29 mai 2012, la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône a jugé que le recours de Mme X... était forclos au motif qu’il a été formulé le 25 octobre 2010, le délai de deux mois étant dépassé ;
    Considérant d’une part que, faute de preuve de la notification à Mme X... des décisions du président du conseil général, la forclusion ne saurait être retenue même en tant qu’elle serait opposée à la seule contestation du bien-fondé de l’indu ; d’autre part qu’il ressort de l’article L. 262-39 du code de l’action sociale et des familles, que dans le cadre de la répétition d’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion, les demandes de remise gracieuse pour précarité ne sont subordonnées à aucun délai et peuvent intervenir à tout moment ; qu’ainsi, la motivation retenue par la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône pour refuser de se prononcer sur le recours dont elle était saisie ne répond en aucun de ces aspects aux impératifs minimum auxquels doit satisfaire une décision de justice ; que sa décision, par suite, doit être annulée ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la requête de Mme X... ;
    Considérant que la commission centrale d’aide sociale a demandé au préfet des Bouches-du-Rhône, par lettre en date du 8 janvier 2013, de lui transmettre le dossier complet de l’intéressée, les justificatifs, le mode de calcul de l’indu détecté de 7 362,36 euros pour la période du 1er septembre 2006 au 31 mars 2008, ainsi que les déclarations trimestrielles de ressources signées par l’allocataire durant toute la période litigieuse ; qu’il n’a pas été donné suite à cette demande ; que dans ces conditions, le bien-fondé de l’indu ne peut être regardé comme établi que dans la mesure où il n’est pas formellement contesté par Mme X... ;
    Considérant que Mme X... ne conteste pas formellement le calcul du trop-perçu litigieux ; que dès lors, l’indu peut être regardé comme fondé dans son principe ; que la portée du litige se limite à savoir si l’intéressée peut ou non bénéficier d’une remise de dette ; que la mauvaise foi de Mme X... n’a pas été établie ni d’ailleurs soulevée ; que l’intéressée fait valoir qu’elle fait face à de lourdes difficultés financières qui font obstacle au remboursement intégral de sa dette ; qu’elle vit maritalement avec deux enfants à charge nés en 2009 et 2011, étant enceinte, ayant des ressources mensuelles à hauteur de 642 euros pour son foyer ; que son mari est sans emploi ; que des charges diverses pèsent sur son foyer et qu’elle a notamment déjà versé 100 euros par mois de puis plus d’un an à la paierie départementale au titre du remboursement de son indu d’un montant de 1 970,80 euros ; qu’il suit de là que le remboursement intégral de la dette laissée à la charge de Mme X... ferait obstacle à la satisfaction des besoins élémentaires de son foyer ; qu’en conséquence, il convient de limiter l’indu mis à sa charge à la somme de 2 000 euros ; qu’il appartiendra à celle-ci, si elle estime que sa situation le justifie, de demander au payeur départemental l’échelonnement du remboursement du reliquat de sa dette ;
    Considérant en outre, qu’il résulte du dossier que nonobstant le caractère suspensif conformément aux dispositions de l’article L. 262-42 du code de l’action sociale et des familles sus-rappelé, du recours formé par Mme X..., il aurait été procédé sur ses prestations sociales à des prélèvements en vue du remboursement de l’indu ; que par suite, les sommes illégalement récupérées viendront en déduction du reliquat de 2 000 euros dont Mme X... est finalement redevable ;

Décide

    Art. 1er.  -  La décision du 29 mai 2012 de la commission départementale d’aide sociale des Bouches-du-Rhône, ensemble la décision du président du conseil général des Bouches-du-Rhône en date du 28 juillet 2009, sont annulées.
    Art. 2.  -  La répétition de l’indu d’allocations de revenu minimum d’insertion d’un montant initial de 7 362,36 euros est limitée à 2 000 euros.
    Art. 3.  -  Les sommes illégalement récupérées viendront en déduction du reliquat de 2 000 euros dont Mme X... est finalement redevable.
    Art. 4.  -  Le surplus des conclusions de Mme X... est rejeté.
    Art. 5.  -  La présente décision sera notifiée à Mme X..., au président du conseil général des Bouches-du-Rhône. copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 4 avril 2014 où siégeaient M. BELORGEY, président, M. CULAUD, assesseur, Mme DIALLO, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 23 mai 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président La rapporteure

Pour ampliation
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C.  Rieubernet