Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Indu - Remise - Conditions - Délai - Compétence juridictionnelle - Motivation - Nulité - Précarité
 

Dossier no 120916

Mme X...
Séance du 1er avril 2014

Décision lue en séance publique le 14 mai 2014

    Ont été assignés à Mme X... un indu d’un montant de 90,72 euros pour la période du 1er juillet 2005 au 31 mars 2006 et un indu d’un montant de 620,15 euros pour la période du 1er octobre 2006 au 31 janvier 2008 en raison d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui ont été indûment servies au motif qu’elle percevait des revenus salariés et des allocations chômage qu’elle n’a pas déclarés. Par décisions en date du 14 septembre 2009, le président du conseil général du Calvados lui a accordé une remise gracieuse de 50 % du montant de ces indus. La commission départementale d’aide sociale du Calvados, par décision en date du 23 août 2012, a rejeté sa demande de remise totale de dette. Mme X..., par courrier en date du 15 octobre 2012, puis Maître Fazimah BUCKSUN, conseil de la requérante, par mémoire du 26 novembre 2013, ont demandé à la commission centrale d’aide sociale de lui accorder une remise totale de l’indu qui a été mis à sa charge ;
    La requérante ne conteste pas le bien-fondé de l’indu mais en demande la remise totale. Elle soutient que son recours est recevable. Elle fait valoir que la décision de la commission départementale d’aide sociale du Calvados est entachée d’un défaut de motivation et doit être annulée. Elle affirme en outre que cette décision doit être annulée au motif qu’il n’est pas démontré que les signataires des actes avaient une délégation de signature valable. Elle soutient que sa situation de précarité est avérée car ses ressources se limitent à des prestations sociales, dont l’allocation de revenu de solidarité active, et elle a un enfant à charge né en 2012. Elle fait valoir que la commission départementale d’aide sociale a commis une erreur manifeste d’appréciation en ne reconnaissant pas cette situation de précarité. Elle affirme qu’une prétendue négligence de sa part ne saurait suffire à justifier le rejet d’une demande de remise gracieuse de l’indu et qu’il appartient à la caisse d’allocations familiales d’instruire le dossier de l’allocataire en se fondant sur des éléments objectifs qui ne sont pas produits en l’espèce. Elle soutient qu’à aucun moment, des éléments émanant de l’administration fiscale n’ont été produits, ni par la caisse d’allocations familiales ni la par commission départementale d’aide sociale, et que la décision de cette dernière est par conséquent entachée d’une erreur de fait. Elle fait valoir que la commission centrale d’aide sociale doit ordonner à la commission départementale d’aide sociale du Calvados le réexamen de sa demande de remise gracieuse, condamner le conseil général du Calvados à verser, en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, à son avocat la somme de 2 000 euros, dont le règlement vaudra renonciation pour ce dernier à l’indemnité d’aide juridictionnelle, et à dire qu’en application des articles L. 4 et R. 522-13, alinéa 2 du code de justice administrative, la décision à venir sera exécutoire aussitôt qu’elle aura été rendue ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que Mme X... bénéficie de l’aide juridictionnelle par décision du bureau d’aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Paris du 25 juillet 2013, la dispensant ainsi de s’acquitter de la contribution pour l’aide juridique de 35 euros instituée par l’article 1635 bis Q du code général des impôts depuis le 1er octobre 2011 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celle d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informée de la date et de l’heure de l’audience ;
    Après avoir entendu, à l’audience publique du 1er avril 2014, Mme Hortense GAUTIER, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-41 du code de l’action sociale et des familles : « Tout paiement indu d’allocations ou de la prime forfaitaire instituée par l’article L. 262-11 est récupéré par retenue sur le montant des allocations ou de cette prime à échoir, ou par remboursement de la dette selon des modalités fixées par voie réglementaire (...). La créance peut être remise ou réduite par le président du conseil général en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manœuvre frauduleuse ou de fausse déclaration » ; qu’aux termes de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux ressources et aux biens des membres du foyer tel que défini à l’article R. 262-1 ; il doit faire connaître à cet organisme tout changement intervenu dans l’un ou l’autre de ces éléments (...) » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...) » ; qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation » ; qu’aux termes de l’article 37 de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique : « Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l’aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre. Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l’aide juridictionnelle, à payer à l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle, partielle ou totale, une somme qu’il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l’Etat, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. Si l’avocat du bénéficiaire de l’aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l’Etat. S’il n’en recouvre qu’une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l’Etat. Si, à l’issue du délai de douze mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée, l’avocat n’a pas demandé le versement de tout ou partie de la part contributive de l’Etat, il est réputé avoir renoncé à celle-ci » ;
    Considérant qu’il ressort de l’instruction du dossier qu’ont été assignés à Mme X... un indu d’un montant de 90,72 euros pour la période du 1er juillet 2005 au 31 mars 2006 et un indu d’un montant de 620,15 euros pour la période du 1er octobre 2006 au 31 janvier 2008 en raison d’allocations de revenu minimum d’insertion qui lui ont été indûment servies au motif qu’elle percevait des revenus salariés et des allocations chômage qu’elle n’a pas déclarés ; que par décision en date du 8 juillet 2009, le président du conseil général du Calvados a refusé de lui accorder une remise gracieuse de ces indus, au motif que la requérante n’a pas retourné dans le délai le questionnaire permettant de connaître ses ressources et d’étudier sa demande ; que toutefois et par la suite, le président du conseil général a accordé à la requérante, au motif qu’elle était dans une situation de précarité, une remise gracieuse de 50 % des indus qui lui ont été assignés, par décision en date du 14 septembre 2009 ; que saisie, la commission départementale d’aide sociale du Calvados, par décision en date du 23 août 2012, a rejeté son recours tendant à obtenir une remise totale de dette et a confirmé la décision du président du conseil général ; que Mme X..., par courrier en date du 15 octobre 2012, puis Maître Fazimah BUCKSUN, conseil de la requérante, par mémoire du 26 novembre 2013, ont demandé à la commission centrale d’aide sociale de lui accorder une remise totale du montant initial de l’indu mis à sa charge ;
    Considérant, sur la conclusion tendant à ce que la commission centrale d’aide sociale ordonne à la commission départementale d’aide sociale du Calvados le réexamen de la demande de remise de Mme X..., qu’il appartient à la commission centrale d’aide sociale en sa qualité de juridiction de plein contentieux, non seulement d’apprécier la légalité des décisions prises par la commission départementale d’aide sociale mais encore de se prononcer elle-même sur le bien-fondé de la demande de l’intéressée d’après l’ensemble des circonstances de fait dont il est justifié par l’une ou l’autre partie à la date de sa propre décision ; que la requérante n’est donc pas fondée à demander que soit ordonné le réexamen du litige par la commission départementale d’aide sociale du Calvados ;
    Considérant, sur le moyen tiré de ce que la décision de la commission départementale d’aide sociale du Calvados serait entachée de défaut de motivation, que la commission départementale d’aide sociale motive sa décision par l’absence de fraude de la part de Mme X..., la négligence dont elle a fait preuve, la non-déclaration de la totalité de ses ressources et confirme l’analyse de la situation de précarité de Mme X... faite par le président du conseil général, de sorte que sa décision n’est pas entachée de défaut de motivation ;
    Considérant, sur le moyen tiré de ce que la décision de la commission départementale d’aide sociale du Calvados serait entachée de nullité au motif qu’il n’est pas établi qu’un acte ait valablement donné une délégation de signature au président de la formation de jugement, que Mme Y..., vice-présidente du tribunal de grande instance de Caen, a pu, sur délégation du président du même tribunal, signer la décision de la commission départementale d’aide sociale en tant que président de la formation de jugement sans l’entacher de nullité ;
    Considérant, sur la régularité au fond de la décision de la commission départementale d’aide sociale du Calvados, qu’aucune des pièces versées au dossier n’établit que Mme X... se serait livrée à des manœuvres frauduleuses ; que Mme X... fait valoir, sans être contredite, qu’elle est dans l’incapacité d’apurer les dettes qui lui ont été assignées ; qu’elle est bénéficiaire de l’allocation de revenu de solidarité active complément d’activité dont le montant était, en août 2013, de 106,33 euros ; qu’elle soutient qu’elle a un enfant à charge né en 2012 ; que ces éléments révèlent une réelle précarité ; que les capacités contributives de l’intéressée sont limitées et le remboursement de la totalité du reliquat ferait peser de graves menaces de déséquilibre sur son budget ; qu’il sera fait une juste appréciation de la situation en accordant une remise totale du montant initial des deux indus mis à sa charge, y compris si cela emporte remboursement des sommes indûment prélevées par le trésorier payeur départemental ou payées par Mme X... ;
    Considérant enfin, que Mme X... ayant obtenu le bénéfice de l’aide juridictionnelle, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, et sous réserve que Maître Fazimah BUCKSUN, avocat de Mme X..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat, de mettre à la charge du conseil général du Calvados le versement à Maître Fazimah BUCKSUN de la somme de 1 200 euros ;

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Calvados en date du 23 août 2012, ensemble les décisions du président du conseil général du même département du 14 septembre 2009, sont annulées.
    Art. 2.  -  Il est accordé à Mme X... une remise totale du montant initial des deux indus qui lui ont été assignés, y compris si cela emporte remboursement des sommes indûment prélevées par le trésorier payeur départemental ou payées par la requérante.
    Art. 3.  -  Le conseil général du Calvados versera à Maître Fazimah BUCKSUN, avocat de Mme X..., la somme de 1 200 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Maître Fazimah BUCKSUN renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat.
    Art. 4.  -  La présente décision sera notifiée à Mme X..., à Maître Fazimah BUCKSUN, au président du conseil général du Calvados, au préfet du Calvados. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 1er avril 2014 où siégeaient Mme DOROY, présidente, M. MONY, assesseur, Mme GAUTIER, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 14 mai 2014.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidente La rapporteure

Pour ampliation
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C.  Rieubernet