Dispositions communes à tous les types daide sociale |
2310 |
RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) - Recours en récupération - Récupération sur succession - Actif successoral - Liquidation - Conditions - Légalité |
Dossier no 130212
M. X...
Séance du 26 juin 2014
Décision lue en séance publique le 26 juin 2014, à 19 heures
Vu, enregistrée au secrétariat de la direction départementale de la cohésion sociale des Côtes-dArmor le 8 février 2013, la requête présentée pour Mme Y..., demeurant en Ille-et-Vilaine, par Maître GOSSELIN, avocat, tendant à ce quil plaise à la commission centrale daide sociale annuler la décision de la commission départementale daide sociale des Côtes-dArmor en date du 23 novembre 2012 rejetant sa « requête en opposition à commandement de payer », enregistrée au tribunal administratif de Rennes le 1er décembre 2011 et transmise par le président de ce tribunal le 8 décembre 2011 à la commission départementale daide sociale, tendant à lannulation du commandement de payer et de lopposition à tiers détenteur notifiés les 4 octobre 2011 et 19 octobre 2011 et à titre subsidiaire à ce que soit constaté labsence de bases de liquidation du titre de perception rendu exécutoire émis par le payeur départemental pour le compte du département des Côtes-dArmor servant de base au commandement de payer et à lopposition à tiers détenteur ; en conséquence la décharger de lobligation de payer la somme de 21 750,56 euros ; condamner le département des Côtes-dArmor à lui payer 3 000 euros sur le fondement de larticle L. 761-1 du code de justice administrative ainsi quaux entiers dépens comprenant les frais de timbres exposés tant devant la commission départementale daide sociale des Côtes-dArmor que devant la commission centrale daide sociale, par les moyens que « les actes de poursuites » constitués par lopposition à tiers détenteur et le commandement de payer contestés sont des actes contestables ; quoutre les dispositions de larticle R. 134-10 du code de laction sociale et des familles sappliquent celles de larticle L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ce pourquoi dailleurs la notification du commandement et de lavis à tiers détenteur comporte les mentions obligatoires relatives aux conditions de contestation de ces actes ; que cest donc par erreur que le premier juge a affirmé que « la notification de la décision de récupération de laide sociale » pouvait seule « faire lobjet dune contestation » devant lui ; que son recours na jamais eu pour objet la contestation de la décision de récupération du 3 novembre 2009 mais la contestation du commandement de payer et de lopposition à tiers détenteur émis en octobre 2011 ; que le recours enregistré au tribunal administratif de Rennes le 1er décembre 2011 portant uniquement sur ces deux actes de poursuites a été introduit dans les délais pour les contester, la question nétant pas celle de la forclusion de laction mais de la possibilité de contestation ; que la commission départementale daide sociale ne sest pas prononcée sur largument du département selon lequel les actes de poursuites ne pouvaient faire lobjet « dopposabilité si le titre exécutoire lui-même na pas été contesté » ; que larticle L. 1617-5 prévoit pourtant que si le débiteur na reçu aucun titre exécutoire, le délai court « à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification dun acte de poursuite » ; quen lespèce, la créance de 21 750,56 euros sollicitée par le commandement de payer ne correspond pas à la décision de récupération sur succession du 3 novembre 2009 à hauteur de 31 524,24 euros, laquelle a dailleurs fait lobjet de deux titres exécutoires du 29 janvier 2010 à lexécution desquels le conseil général a renoncé à la suite de la nouvelle décision prise par son président le 29 juin 2010 (ramenant la créance à 21 750,56 euros) ; quainsi la créance contestée ne peut en aucune manière être considérée comme fondée sur la décision qui lui a été notifiée le 16 novembre 2009, qui ne peut dailleurs pas être considérée en elle-même comme un titre exécutoire ; que le seul document ultérieurement reçu comportant une récupération sur succession des 21 750,56 euros sollicités par le commandement de payer est la lettre du président du conseil général du 29 juin 2010, laquelle nest pas un titre exécutoire et moins encore un acte procédant dun tel titre à partir duquel aurait couru un délai de contestation ; quainsi lhypothèse de lespèce est celle où la somme recherchée na jamais fait lobjet dun titre exécutoire et quainsi le délai court à compter de la notification du premier acte de poursuites, soit le commandement de payer reçu le 4 octobre 2011 ; que cest donc par une autre erreur que la commission départementale daide sociale a considéré que son recours était entaché de forclusion au regard de larticle R. 134-10 du code de laction sociale et des familles ; quelle a obtenu du défenseur des droits, auquel elle a fait appel, des pièces dont elle navait jamais reçu copie précédemment et dont elle a pris connaissance en octobre 2011, ces pièces seules lui permettant de contester le bien-fondé de la créance et fondant son recours à lencontre du commandement de payer et de lopposition à tiers détenteur ; que la contestation de ces deux actes peut porter, tant sur le bien-fondé de la créance liquidée par la collectivité, que sur la régularité formelle de lacte de poursuites ; quaprès annulation de la décision attaquée, il y aura lieu de statuer sur ses moyens fondant sa demande dannulation du commandement et « des oppositions » à tiers détenteur ; que selon larticle L. 1617-5 et les articles 22, 23 et 25 du décret modifié du 29 décembre 1962, lémission dun titre de recette ayant force exécutoire par une collectivité publique est réservée au recouvrement des créances publiques liquides et exigibles ; quà titre principal, la créance nest pas exigible ; que le droit prévu à larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles ne peut être invoqué que dans la mesure où laide, objet de la récupération, a été accordée conformément aux règles applicables et notamment en parfaite connaissance de cause de la part de lintéressé ; que tel nest pas le cas sagissant de M. X... qui na pas signé la première demande daide et, en signant les dossiers « dactualisation », a uniquement attesté de la véracité des informations déclarées ; que les décisions dadmission nont pas été retrouvées dans les papiers administratifs conservés par sa mère ; que, dailleurs, la sur de la requérante a reçu du département différents volets de notification, y compris ceux qui auraient dû être destinés à lintéressé, qui laissent apparaître la signature de la directrice de létablissement pour la demande de renouvellement de décembre 1995 et labsence de signature de M. X... pour la demande de novembre 1997 ; que M. X..., et par conséquent ses héritières, nont ainsi jamais été informés de ce quune aide avait été versée à son bénéfice par le département, ni quune telle aide entraînait droit à récupération sur succession ; quainsi, lesdites décisions ne lui sont pas opposables, ni à Mme Y... en qualité dhéritière ; quà titre subsidiaire est invoquée labsence de créance liquide en application des dispositions de larticle 23 du décret de 1962 précité ; que la créance, objet du commandement de payer, na manifestement pas été liquidée ; que le commandement reçu nétait accompagné daucune annexe justifiant les modalités de la créance ; que les pièces ultérieurement sollicitées et transmises ne justifient pas du montant total des sommes versées, ni même du fait quelles devraient dans leur entier faire lobjet dune récupération ; quainsi ces sommes qui ne peuvent être récupérées en totalité ne peuvent être liquidées à hauteur des montants indiqués dans les factures, qui plus est, communiquées partiellement ; quen tout état de cause, elle ne peut vérifier la justesse des sommes réclamées et notamment la pertinence dune récupération à hauteur de la totalité de lactif net successoral de M. X... ; quà titre infiniment subsidiaire, est évoquée labsence de bases de liquidation contrairement à larticle 81 alinéa 1 du décret du 29 décembre 1962, selon lequel « tout ordre de recette doit indiquer les bases de la liquidation », ce qui signifie que létat exécutoire doit notamment mentionner les modalités de calcul de la dette et les différents éléments de celle-ci afin « de permettre au débiteur supposé de vérifier lui-même le montant indiqué et donc le bien-fondé de la créance réclamée », ce qui nétait pas possible, en lespèce, les factures communiquées ne permettant pas ce calcul ; que, sur les documents adressés par la CPAM, il est fait état de ce que des « frais de séjour » étaient « réglés directement à létablissement », alors quil sagit de sommes versées au foyer au titre des frais de séjour en rapport avec un prix de journée, dont il nest pas possible de vérifier si elles ont été déduites du montant brut exposé au département ou nauraient pas dû lêtre ; que, sagissant des arguments présentés par le président du conseil général en première instance, aucun élément de réponse ou justificatif, autre que ceux quelle verse elle-même aux débats sagissant du défaut dexigibilité, nest apporté ; que cest sans preuve quil est affirmé que le montant de la créance aurait été établi « au vu des factures et documents fournis par le foyer » ; que la décision daccepter lhébergement au foyer aurait été différente si la famille avait été mise au courant des tarifs et de la récupérabilité dune autre aide versée par lassurance maladie à son décès ; que le prix de journée invoqué par le département correspond à une somme denviron 116 euros qui paraît très élevée pour un prix dhébergement au 1er décembre 1998 ; que cest à tort que le département met en cause la CPAM et le notaire chargé de la liquidation de la succession de M. X..., la CPAM ayant, quant à elle, parfaitement informé les intéressés de la récupérabilité de laide, fonds spécial dinvalidité (FSI) et le département ne justifiant pas le fondement juridique de lobligation quaurait eu le notaire de le solliciter avant de liquider la succession ;
Vu la décision attaquée ;
Vu enregistré le 22 mars 2013, le mémoire en défense du président du conseil général des Côtes-dArmor tendant au rejet de la requête par les motifs quil était fondé à récupérer lavance consentie par laide sociale ; que la décision de récupération du 3 novembre 2009 na pas été contestée dans le délai légal de deux mois devant la commission départementale daide sociale ; que le montant de la créance était établi au vu des factures et documents fournis par le foyer daccueil médicalisé en Ille-et-Vilaine ; que le titre exécutoire émis le 29 janvier 2010 na pas été contesté devant la juridiction administrative compétente dans le délai de deux mois ; que le commandement de payer et lopposition à tiers détenteur « ne sont que la suite des actions dont disposent le comptable public pour recouvrer les créances » ; quils ne peuvent donc faire lobjet dopposabilité si le titre exécutoire lui-même na pas été contesté ;
Vu enregistré le 9 septembre 2013, le mémoire en réplique présenté pour Mme Y... persistant dans les conclusions de la requête par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu le décret du 29 décembre 1962 modifié ;
Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010-110 QPC du 25 mars 2011, notamment larticle 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment larticle 1er alinéa 3 de son dispositif ;
Après avoir entendu à laudience publique du 26 juin 2014, Mme ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant que, par décision du 3 novembre 2009, le président du conseil général des Côtes-dArmor a décidé la récupération à hauteur de la totalité de lactif net successoral à lencontre de Mesdames Y... et Z..., héritières de M. X..., leur frère bénéficiaire de son vivant de prestations daide sociale pour la prise en charge de ses frais dhébergement et dentretien à lexclusion des frais de soins au foyer médicalisé de Pluc-sur-Lié, à hauteur pour chacune dentre elles de la moitié dudit actif, soit 31.524,24 euros ; que cette décision, dont le caractère définitif nest pas contesté, na pas été contestée devant la commission départementale daide sociale ; que, par titre de perception rendu exécutoire en date du 29 janvier 2010, le président du conseil général a recherché le paiement des sommes dont sagit ; que ce titre a été contesté devant le tribunal administratif de Rennes par requête enregistrée le 16 mars 2010 ; que, par ordonnance en date du 9 avril 2010, le président de la 2e chambre de ce tribunal a, sur le fondement dailleurs de larticle R. 222-1 du code de justice administrative concernant le rejet des requêtes qui « ne relèvent manifestement pas de la compétence des juridictions administratives » ( ! !), rejeté comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître la requête formulée (alors) par Mesdames Y... et Z..., sa sur, tout en motivant ce rejet pour incompétence par la compétence de la juridiction administrative spécialisée de laide sociale, alors quil lui appartenait en application de larticle R. 435-3 du code précité de « transmettre sans délai le dossier » à la commission départementale daide sociale ; que cette ordonnance qui na pas été contestée en appel est définitive ; que, par décision du 29 juin 2010, le président du conseil général a, pour tenir compte de paiement par les héritières des prestations non contributives avancées par lassurance maladie, ramené la créance à récupérer à 43 501,13 euros, soit pour chacune la somme de 21 750,56 euros ; que, par commandement de payer et opposition à tiers détenteur notifiés le 4 et le 19 octobre 2011, le comptable a pourvu aux poursuites procédant du seul montant des sommes ainsi, en définitive, réclamées par lordonnateur, sans que le titre de perception rendu exécutoire ait été préalablement modifié ; que le commandement de payer se bornant à prévoir que « la contestation des créances de nature administrative devait être portée devant le juge administratif » (sans même distinguer régularité des poursuites et obligation de payer) et lopposition à tiers détenteur se bornant à renvoyer à larticle L. 1617-5 CGCT, la requérante (agissant dorénavant seule) a, « par requête en opposition à commandement de payer » enregistrée le 1er décembre 2011 au tribunal administratif de Rennes et transmise par le président de ce tribunal le 8 décembre 2011 à la commission départementale daide sociale des Côtes-dArmor, au « vu les dispositions des article L. 1617-1 et suivants de CGCT, les dispositions du décret du 29 décembre 1962, les dispositions du code de laction sociale et des familles et ses textes dapplication », demandé au tribunal de « constater le caractère infondé et le défaut de caractère exécutoire et liquide de la créance sur laquelle porte le titre émis par la paierie pour le compte du département des Côtes-dArmor servant de base au commandement de payer et à lopposition à tiers détenteur contestés ; en conséquence annuler purement et simplement le commandement de payer et les oppositions à tiers détenteurs contestés ; à titre subsidiaire, constater labsence de liquidation de ce titre de recette dépourvu dès lors de tout fondement et justification ; en conséquence, décharger Mme Y... de lobligation qui lui est faite de régler la somme de 21 750,56 euros » ; que, par la décision attaquée du 23 novembre 2012, la commission départementale daide sociale des Côtes-dArmor a rejeté la demande de Mme Y... comme « irrecevable pour cause de forclusion » ; que, par la requête dappel, la requérante demande en premier lieu dannuler la décision de la commission départementale daide sociale et en second lieu de statuer sur les conclusions de sa demande de première instance quelle reprend explicitement dans les termes précités ;
Sur les conclusions tendant à lannulation de la décision de la commission départementale daide sociale des Côtes-dArmor ;
Considérant que, comme il a été exposé ci-avant, la requête de Mme Y... présentée devant le tribunal administratif de Rennes et transmise à la commission départementale daide sociale des Côtes-dArmor était dirigée contre le commandement de payer et contre lopposition à tiers détenteur ; que, selon la présente juridiction, dont lanalyse est en ceci différente de celle de lordonnance de renvoi du président du tribunal administratif de Rennes du 8 décembre 2011, elle ne comportait aucune conclusion aux fins dannulation dun titre de perception rendu exécutoire, alors quau demeurant ce président fait état dun « titre exécutoire émis le 4 octobre 2011 par le comptable du Trésor » ( ! !) ; quau demeurant la requête précédemment formulée contre ledit titre exécutoire avait été rejetée par lordonnance susrappelée du président de la 2e chambre du tribunal administratif de Rennes devenue définitive qui sétait mépris sur létendue de ses compétences et dailleurs sur la nature de juridiction administrative ou judiciaire dune commission départementale daide sociale selon la formulation même de lordonnance ; que, toutefois, ladite ordonnance étant devenue définitive pour navoir pas été soumise au juge dappel, non plus quà la commission départementale daide sociale postérieurement à son édiction, Mme Y... naurait pu, ce quelle na du reste pas fait, à la réception du commandement de payer et de lopposition à tiers détenteur, formuler des conclusions tendant à lannulation du titre de perception rendu exécutoire, alors même que le titre émis se bornait à mentionner que la somme recouvrée pouvait être contestée « en saisissant directement le tribunal judiciaire ou le tribunal administratif compétent, selon la nature de la créance, et quen tant quil relevait de la compétence du juge administratif, le recours devait être formé devant la commission départementale daide sociale », dès lors que lordonnance du 9 avril 2010 na pas été contestée tant en appel que dailleurs dans les deux mois courant du 16 mars 2010, comme au demeurant, en toute hypothèse, du 9 avril 2010 ; que, par contre, la question se posera ci-après de savoir si, compte tenu de la rédaction de sa demande et de sa requête, Mme Y... entendait et entend contester ledit titre de perception par la voie de lexception dillégalité ; mais quà ce stade, cette question est sans emport puisque Mme Y... ne formulait aucune conclusion à lencontre de la décision de récupération du 3 novembre 2009 dont elle ne contestait en aucune manière le caractère définitif ; que labsence de contestation dune décision de récupération nempêche nullement son destinataire de contester le titre de perception rendu exécutoire émis par lordonnateur à sa suite ; que labsence de contestation, ou de contestation recevable, du titre de perception rendu exécutoire nempêche pas davantage la personne recherchée de contester les actes de poursuite pris, non plus par lordonnateur, mais par le comptable, ce que Mme Y... a fait très clairement, en lespèce, compte tenu des termes ci-dessus cités de sa « requête en opposition à commandement » (et opposition à tiers détenteur) ; que ces contestations ont été soumises au tribunal administratif qui les a renvoyées à la commission départementale daide sociale dans le délai de recours contentieux ; que les actes de poursuite dont sagit ne sont pas des « suites comptables » de la décision de récupération qui « ne pouvaient pas à ce titre ouvrir droit une seconde fois à un recours contre la décision de récupération » mais des actes de poursuites du comptable susceptibles de recours contentieux, alors même que la décision de récupération est définitive et ne pourrait, en ce qui concerne sa légalité et son bien-fondé, être utilement critiquée dans le cadre de lopposition aux poursuites diligentées par le comptable devant le juge administratif, juge de lobligation de payer ; quainsi la commission départementale daide sociale qui sest méprise sur les conclusions dont elle était saisie a dénaturé celles-ci qui délimitaient le cadre de sa saisine et a, en conséquence, entaché sa décision dune erreur de droit en se fondant, pour rejeter lesdites conclusions, sur ce que « le recours est irrecevable pour cause de forclusion » comme entrepris postérieurement au délai de deux mois prévu à larticle L. 134-10 du code de laction sociale et des familles pour critiquer les décisions du président du conseil général relatives notamment aux récupérations ; quil y a lieu dannuler la décision attaquée et dévoquer la demande ;
Considérant quil échait de rappeler que le juge de laide sociale est compétent pour connaitre de lensemble des contestations relatives au recouvrement des sommes demandées, notamment aux héritiers dun bénéficiaire de laide sociale ; que, sagissant des actes de poursuites émis par le comptable, et notamment du commandement de payer et de lopposition à tiers détenteur, cette compétence sexerce toutefois dans le respect de la compétence de lautorité judiciaire, seule compétente pour connaitre des contestations relatives à la régularité en la forme des actes de poursuites et pour prononcer lannulation de ces actes (à cet égard se poserait la question de la requalification en conclusions tendant à la décharge de lobligation de payer des conclusions de la requérante en ce quelles tendent de manière quelque peu contradictoire avec celles présentées à titre subsidiaire fondées sur la seule absence de bases de liquidation... à « lannulation (...) des actes de poursuites ») ; que si, sagissant de la contestation des titres de perception rendus exécutoires, actes de lordonnateur, le juge administratif de laide sociale est compétent pour connaitre tant des moyens de légalité externe que des moyens de légalité interne, ce juge nest compétent, sagissant des actes de poursuites, que pour statuer sur des conclusions mettant en cause lobligation de payer par des moyens relatifs à lexistence, lexigibilité et la quotité de la créance faisant lobjet du commandement ; que cest dans ce cadre, sommairement rappelé, quil y a lieu pour la commission centrale daide sociale, dans un litige au sujet duquel dailleurs le département, qui a, ainsi que le dossier létablit, traité ledit dossier comme « sensible » sur le plan de la gestion administrative et politique, mais sabstient toutefois de toute analyse juridique de nature à léclairer, dannuler la décision attaquée et de statuer par la voie de lévocation ;
Sur le moyen tiré de ce que la contestation pourrait porter sur « le bien-fondé » de la créance litigieuse ;
Considérant quen faisant valoir en substance que ni lassisté, ni dailleurs la requérante, son héritière, nont jamais été informés antérieurement à lintroduction de la première demande daide sociale, comme dailleurs des demandes de renouvellement, de manière explicite de la prise en charge par laide sociale et de léventualité de la récupération prévue par les dispositions de larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles, la requérante soulève des moyens relatifs au « bien-fondé » et, au demeurant, à la légalité de la récupération ; que ces moyens ne peuvent être utilement soulevés à lappui dune opposition à commandement portant sur lexistence, lexigibilité et la quotité de la créance recouvrée par le comptable ; quen toute hypothèse, ainsi quil a été dit, le titre de perception rendu exécutoire nest pas contesté par des conclusions tendant à son annulation et ne pourrait du reste lêtre ; que pour faire reste de droit, labsence dinformations données à lassisté ou à sa famille, lors de lintroduction de la demande, sur léventualité dune récupération de la créance avancée par la collectivité daide sociale, dont M. X... et sa mère, qui suivait ses affaires, ne pouvaient au demeurant, au vu des pièces du dossier soumis à la commission centrale daide sociale, raisonnablement ignorer lintervention financière, compte tenu du coût du placement et des propres ressources de M. X..., nétant même pas allégué que, faute de règlement des factures adressées, le foyer aurait conservé la charge de la dépense, demeure sans incidence sur la légalité et le bien-fondé de la récupération des sommes avancées par laide sociale, mais que le moyen tiré du défaut dinformation invoqué nest pas rejeté sur le fond du droit mais comme insusceptible dêtre utilement soulevé à lappui des conclusions dirigées contre le commandement de payer et lopposition à tiers détenteur, ledit moyen nétant pas expressément soulevé par la voie de lexception à lencontre du titre de perception rendu exécutoire ;
Considérant quaucun autre moyen relatif au « bien-fondé » de la créance nest explicitement soulevé ; quen toute hypothèse et pour les raisons ci-dessus énoncées, il le serait de manière inopérante à lencontre des actes critiqués ;
Sur le moyen tiré de labsence de créance exigible à raison de labsence dinformation de M. X... et, en conséquence de la requérante, lors de la demande daide sociale en ce qui concerne ladmission à cette aide et léventualité dune récupération ;
Considérant que lexigibilité de la créance est subordonnée à la violation de dispositions législatives et réglementaires ; quaucune disposition législative ou réglementaire ne dispose ni nimplique linformation du demandeur ou du bénéficiaire de laide sociale sur léventualité dune récupération de la créance de laide sociale ; quainsi, et en tout état de cause, le moyen qui ne met en cause la violation daucune disposition législative ou réglementaire et notamment celles de larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles, tiré de labsence dinformation de M. X... et de ses héritiers sur les conséquences de ladmission à laide sociale « en termes de récupération ultérieure des fonds » ne peut être davantage accueilli en ce qui concerne lexigibilité de la somme réclamée par les actes de poursuites contestés quen ce qui concerne le « bien-fondé » de la créance de laide sociale ;
Sur le moyen tiré de labsence de créance liquide ;
Considérant que pour justifier ce moyen, Mme Y... soutient dabord que « le commandement reçu » par elle « nétait accompagné daucune annexe justifiant les modalités de liquidation de la créance » ; que dans cette mesure elle met en cause la régularité de lacte de poursuite et sa contestation, en admettant quelle entende effectivement, compte tenu de la rédaction de ses développements, la soulever comme telle, échapperait à la compétence du juge administratif en charge de statuer sur les questions autres que celles relatives à la régularité du commandement ;
Considérant que dans la mesure où Mme Y... se prévaut de la méconnaissance des dispositions de larticle 23 du décret du 29 décembre 1962 modifié selon lequel « les recettes sont liquidées avant dêtre recouvrées. La liquidation a pour objet de déterminer le montant de la dette des redevables. Toute créance liquidée fait lobjet dun ordre de recette », cette contestation concerne les obligations de lordonnateur préalablement à lémission du titre de perception rendu exécutoire lequel nest pas contesté par voie daction directe et, comme il a été dit, ne pourrait lêtre, compte tenu de labsence de contestation de lordonnance du président de la 2e chambre du tribunal administratif de Rennes en date du 9 avril 2010 devenue définitive ; quen tant que par les développements, à lappui de ce moyen, Mme Y... entendrait contester le montant de la créance faisant lobjet du commandement pour être déchargée de lobligation de payer intimée par celui-ci et mise en uvre par lopposition à tiers détenteur, dune part, et en tout état de cause, il appartenait au comptable de prendre en compte le montant demeurant seul recherché par le président du conseil général, nonobstant labsence de modification du titre de perception rendu exécutoire, dautre part, dailleurs, le montant demeurant seul recherché par ledit commandement est suffisamment justifié, nonobstant le caractère parcellaire et lacunaire des documents produits et les erreurs de rédaction des factures adressées par le foyer aux services de laide sociale à hauteur de la somme demeurant revendiquée de 22.403,56 euros pour Mme Y... ; quil résulte en effet de linstruction que les services de laide sociale ont durant lensemble de la période litigieuse assumé une dépense supérieure au montant de celle recherchée par le commandement de payer et à charge de Mme Y... ; que dans ces conditions, dune part le moyen tiré de labsence de créance liquide au fondement de larticle 23 précité du décret modifié du 29 décembre 1962 ne peut être utilement formulé à lencontre du commandement, dautre part, le montant de la somme recherchée par celui-ci était, en toute hypothèse dailleurs, suffisamment justifié, la branche du moyen tirée, en outre, de labsence de justification de la créance totale initialement réclamée, étant inopérante ;
Sur le moyen tiré de labsence de bases de liquidation ;
Considérant que la requérante se prévaut de ce que le titre de perception rendu exécutoire ne comportait pas, contrairement au principe général applicable également aux collectivités territoriales dont sinspire larticle 81 alinéa 1 du décret du 29 décembre 1962 modifié, lindication des bases de la liquidation ; quà nouveau en tant que ce moyen serait soulevé à lencontre du commandement et de lopposition à tiers détenteur contestés il relèverait de la régularité en la forme ce qui échapperait à la compétence du juge administratif de laide sociale ; quen tant quil entendrait contester par la voie de lexception et par un moyen de légalité interne la légalité du titre de perception rendu exécutoire, une telle exception ne serait pas recevable à lencontre des actes de poursuite contestés, sagissant dun titre de perception rendu exécutoire, comme il a été dit, définitif ;
Considérant, enfin, quil nappartient pas au juge de laide sociale de connaitre des relations entre le département et la Caisse primaire dassurance maladie dont les sommes avancées par elle au titre de linvalidité ont été payées par le notaire et portées au passif de la succession et des relations entre le département et ledit notaire ; quainsi le moyen (ou la réponse à moyen...) tiré de ce que le notaire sest acquitté de lensemble des diligences auxquelles il lui appartenait légalement de pourvoir est inopérant dans la présente instance ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de larticle « L. 761-1 du code de justice administrative » et sur celles tendant au remboursement des droits de timbres acquittés en première instance et en appel ;
Considérant que Mme Y... ne saurait être regardée comme partie gagnante et le département des Côtes-dArmor comme partie perdante dans la présente instance ; quainsi les dispositions de larticle 75-I de la loi 10 juillet 1991 font obstacle à ce que ce département soit condamné à payer à la requérante les sommes quelle réclame au titre des frais exposés non compris dans les dépens et quil ny a lieu de faire droit à ses conclusions tendant au remboursement des droits de timbre quelle a acquittés en première instance et en appel ;
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission départementale daide sociale des Côtes-dArmor en date du 23 novembre 2012 est annulée.
Art. 2. - La demande présentée devant la commission départementale daide sociale des Côtes-dArmor par Mme Y..., ensemble les conclusions de cette dernière tendant au paiement des frais exposés non compris dans les dépens et au remboursement des droits de timbres acquittés en première instance et en appel sont rejetées.
Art. 3. - La présente décision sera notifiée à Mme Y..., à Maître GOSSELIN, pour information, et au président du conseil général des Côtes-dArmor. Copie en sera adressée au secrétariat de la commission départementale daide sociale des Côtes-dArmor et à la ministre des affaires sociales et de la santé.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 26 juin 2014 où siégeaient M. LEVY, président, Mme LE MEUR, assesseure, Mme ERDMANN, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 26 juin 2014, à 19 heures.
La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | La rapporteure |
Pour ampliation
La secrétaire générale
de la commission centrale daide sociale,
M.-C. Rieubernet