Dispositions communes à tous les types daide sociale |
2400 |
OBLIGATION ALIMENTAIRE | ||
Mots clés : Aide sociale aux personnes âgées (ASPA) - Hébergement - Frais - Obligation alimentaire - Compétence juridictionnelle |
Dossier no 130179
Mme X...
Séance du 11 février 2014
Décision lue en séance publique le 20 février 2014
Vu la requête, en date du 21 février 2013, présentée par Mme M..., mandataire judiciaire à la protection des majeurs, pour le compte de Mme X..., tendant à lannulation de la décision du 30 janvier 2012 par laquelle la commission départementale daide sociale de la Dordogne a rejeté son recours contre la décision du 3 janvier 2012 par laquelle le président du conseil général de la Dordogne a rejeté sa demande dadmission à laide sociale à compter du 12 septembre 2011 ;
Mme M... soutient que la situation financière de Mme X..., en particulier son épargne, que le département a pris en compte à la date de la constitution du dossier de demande daide sociale à lhébergement en septembre 2011, a évolué ; que léloignement des enfants de Mme X... durant leur enfance doit être pris en compte ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, en date du 26 avril 2013, présenté par le président du conseil général de la Dordogne, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que laide sociale présente un caractère subsidiaire ; que le défaut de recours à lobligation alimentaire ne permet pas de considérer que Mme X... est en situation de besoin ; que Mme X... dispose de capitaux placés et est propriétaire de sa maison ; que létude de la capacité contributive des obligés alimentaires de Mme X... fait ressortir quils sont capables de prendre en charge la somme de 506,91 euros mensuels pour couvrir les frais dhébergement de Mme X... non couverts par ses ressources ;
Vu le mémoire en réplique, en date du 27 septembre 2013, présenté par Mme M..., qui reprend les conclusions de sa requête et conclut en outre à ce que la commission centrale daide sociale prenne en compte le jugement du juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance dAngoulême du 13 septembre 2009, dégageant les obligés alimentaires de Mme X... de leur obligation envers leur mère ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010-110 QPC du 25 mars 2011, notamment larticle 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment larticle 1er, alinéa 3, de son dispositif ;
Vu lacquittement de la contribution pour laide juridique dun montant de 35 euros due par toute personne saisissant la commission centrale daide sociale entre le 1er octobre 2011 et le 31 décembre 2013 en application de larticle 1635 bis Q du code général des impôts ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales, et celles dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informées de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu, à laudience publique du 11 février 2014, Mme ROUSSEL, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant quil résulte de linstruction que Mme X..., née le 7 février 1936, a été placée le 23 mai 1991 sous curatelle de lUDAF Dordogne ; que, par une ordonnance du 12 juillet 2010, le tribunal de grande instance dAngoulême a confié les fonctions de curateur au mandataire judiciaire à la protection des majeurs du centre hospitalier H... ; que le 19 septembre 2011, une demande daide sociale à lhébergement concernant Mme X..., résidant à lEHPAD H..., a été présentée ; que le 3 janvier 2012, le président du conseil général de la Dordogne a rejeté cette demande au motif que la dépense de frais dhébergement de 506,91 euros par mois, non couverte par les ressources de Mme X..., pouvait être assumée, à hauteur de 480 euros par mois, par les quatre obligés alimentaires de Mme X... et, dautre part, par lutilisation des capitaux placés de Mme X... ; que par sa décision du 30 janvier 2013, la commission départementale daide sociale de la Dordogne a confirmé cette décision ;
Considérant, en premier lieu, quaux termes de larticle 205 du code civil : « Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin. » ; quaux termes de larticle 208 du même code : « Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame, et de la fortune de celui qui les doit. » ;
Considérant quaux termes de larticle L. 132-6 du code de laction sociale et des familles : « Les personnes tenues à lobligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à loccasion de toute demande daide sociale, invitées à indiquer laide quelles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais. (...) La proportion de laide consentie par les collectivités publiques est fixée en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à lobligation alimentaire. La décision peut être révisée sur production par le bénéficiaire de laide sociale dune décision judiciaire rejetant sa demande daliments ou limitant lobligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par lorganisme dadmission. (...) » ;
Considérant que sil appartient aux seules juridictions de laide sociale de fixer le montant du concours des collectivités publiques en vue de lhébergement des personnes prises en charge au titre de laide sociale, compte tenu notamment de lévaluation quelles font des ressources des intéressés ainsi que de celles des débiteurs de lobligation alimentaire, il nappartient en revanche quau juge judiciaire, en cas de contestation sur ce point, de fixer le montant des contributions requises au titre de lune ou lautre de ces obligations ;
Considérant quil résulte de linstruction que par un jugement du 13 septembre 2013, le juge aux affaires familiales a déchargé Mmes B..., R..., L... et D... de leur obligation alimentaire à légard de Mme X... ;
Considérant, en second lieu, quaux termes du premier alinéa de larticle L. 132-1 du code de laction sociale et des familles : « Il est tenu compte, pour lappréciation des ressources des postulants à laide sociale, des revenus professionnels et autres et de la valeur en capital des biens non productifs de revenu, qui est évaluée dans les conditions fixées par voie réglementaire » ; quaux termes de larticle L. 132-3 de ce code : « Les ressources de quelque nature quelles soient, à lexception des prestations familiales, dont sont bénéficiaires les personnes placées dans un établissement au titre de laide aux personnes âgées ou de laide aux personnes handicapées, sont affectées au remboursement de leurs frais dhébergement et dentretien dans la limite de 90 %. Toutefois les modalités de calcul de la somme mensuelle minimum laissée à la disposition du bénéficiaire de laide sociale sont déterminées par décret. La retraite du combattant et les pensions attachées aux distinctions honorifiques dont le bénéficiaire de laide sociale peut être titulaire sajoutent à cette somme. » ; quaux termes de larticle R. 132-1 du code : « Pour lappréciation des ressources des postulants prévue à larticle L. 132-1, les biens non productifs de revenu, à lexclusion de ceux constituant lhabitation principale du demandeur, sont considérés comme procurant un revenu annuel égal à 50 % de leur valeur locative sil sagit dimmeubles bâtis, à 80 % de cette valeur sil sagit de terrains non bâtis et à 3 % du montant des capitaux » ; quil résulte de ces dispositions que lensemble des revenus procurés par le placement de capitaux doit être pris en compte pour lappréciation des ressources des postulants à laide sociale ; quen revanche, le montant du capital placé na pas à être pris en compte dans lappréciation des ressources du postulant à laide sociale ; quil résulte par ailleurs de larticle R. 132-1 cité ci-dessus que la valeur locative de la maison, qui est la résidence principale de Mme X..., na pas à être prise en compte dans lappréciation de ses ressources ;
Considérant quil résulte de linstruction que le coût mensuel des frais dhébergement de Mme X... à lEHPAD de lhôpital H... sélève à 1 624,41 euros ; quà la date de sa demande daide sociale, Mme X... justifiait dun revenu mensuel de 1 117,50 euros, composé de différentes retraites, déduction faite des 10 % réglementaires dargent de poche ; que la somme restant mensuellement à couvrir sélève à 506,91 euros ; que si Mme X... disposait également à la date de sa demande daide sociale à lhébergement de capitaux placés pour un montant de 14 101,19 euros, seuls doivent être pris en compte pour lappréciation de ses ressources les revenus de ces placements ; que sil est soutenu en appel que Mme X... ne disposerait plus de ces sommes, aucune précision ni aucun justificatif nest apporté sur ce point ; quil résulte par ailleurs de ce qui a été dit ci-dessus que les obligés alimentaires de Mme X... sont dispensés de toute obligation envers leur mère ; quenfin, la valeur locative de sa résidence principale na pas à être prise en compte dans lappréciation des ressources de Mme X... ; quil en résulte quil y a lieu dadmettre partiellement Mme X... au bénéfice de laide sociale, pour un montant de 506,91 euros par mois, à compter du 12 septembre 2011 et jusquau 1er janvier 2013, date deffet de la nouvelle demande daide sociale à lhébergement présentée par Mme X... ;
Considérant, par suite, que cest à tort que le président du conseil général, par sa décision du 3 janvier 2012, a rejeté la demande daide sociale à lhébergement présentée par Mme X... ; que sa décision doit être annulée ; quainsi quil a été dit, il y a lieu dadmettre partiellement Mme X... au bénéfice de laide sociale pour un montant de 506,91 euros par mois, à compter du 12 septembre 2011 et jusquau 1er janvier 2013, date deffet de la nouvelle demande daide sociale à lhébergement présentée par Mme X... ;
Considérant quil résulte de tout ce qui précède que Mme M..., curateur de Mme X..., est fondée à soutenir que cest à tort que, par la décision attaquée, la commission départementale daide sociale a rejeté son recours,
Décide
Art. 1er. - La décision de la commission départementale daide sociale de la Dordogne du 30 janvier 2012 et la décision du président du conseil général de la Dordogne du 3 janvier 2012 sont annulées.
Art. 2. - Mme X... est admise au bénéfice de laide sociale à lhébergement pour un montant de 506,91 euros par mois à compter du 12 septembre 2011 et jusquau 1er janvier 2013, date deffet de la nouvelle demande daide sociale à lhébergement présentée par Mme X....
Art. 3. - La présente décision sera notifiée à lhôpital H... et au centre dhébergement, au conseil général de la Dordogne, au préfet de la Dordogne. Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 11 février 2014 où siégeaient M. SELTENSPERGER, président, M. CENTLIVRE, assesseur, Mme ROUSSEL, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 20 février 2014.
La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président | La rapporteure |
Pour ampliation
La secrétaire générale
de la commission centrale daide sociale,
M.-C. Rieubernet