Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Date d’effet - Ressources - Compétence juridictionnelle - Conditions d’octroi
 

Dossier no 120347

M. X...
Séance du 8 novembre 2013

Décision lue en séance publique le 26 novembre 2013

    Vu la requête et le nouveau mémoire enregistrés au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale les 26 mars et 6 juin 2012, présentés par M. X..., qui demande à la commission centrale d’aide sociale :
        1o D’annuler la décision du 16 février 2012 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de l’Indre a rejeté son recours tendant, d’une part, à l’annulation de la décision du 29 avril 2010 par laquelle le président du conseil général de l’Indre a refusé de lui ouvrir les droits au bénéfice du revenu minimum d’insertion à compter de la date de sa demande, le 25 juillet 2008, d’autre part, à ce que les droits au bénéficie du revenu minimum d’insertion lui soient ouverts à compter de cette date ;
        2o D’annuler cette décision du 29 avril 2010 par laquelle le président du conseil général de l’Indre a refusé de lui ouvrir les droits au bénéfice du revenu minimum d’insertion à compter de la date de sa demande, le 25 juillet 2008, et de lui ouvrir les droits au bénéfice du revenu minimum d’insertion à compter de cette date ;
    M. X... soutient que la commission départementale d’aide sociale de l’Indre a estimé à tort qu’il percevait 293 euros mensuels au titre de son activité de gérant minoritaire et non salarié de la SARL Z... alors qu’il n’a perçu aucune ressource à ce titre et que les bénéfices de cette société n’ont pas été distribués ; que la SARL a été dissoute en 2010 et que son chiffre d’affaires de cette année a été nul ; qu’il a été déclaré inapte à travailler en janvier 2012 et ne perçoit plus, depuis cette date, que 120 euros mensuels de retraite ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 décembre 2012, présenté par le président du conseil général de l’Indre, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient qu’il est fondé à tenir compte, sur le fondement de l’article L. 262-22 du code de l’action sociale et des familles, pour apprécier la situation de M. X... au regard du droit au revenu minimum d’insertion, du résultat réalisé par la SARL Z..., dès lors que ce résultat révèle que M. X... aurait pu percevoir une rémunération au titre de ses activités de gérant ; que par sa décision du 17 novembre 2009, qui n’a fait l’objet d’aucun appel et qui est revêtue de l’autorité de la chose jugée, la commission départementale d’aide sociale de l’Indre a jugé que les revenus mensuels perçus par M. X... au titre de son activité de gérant en 2008 devaient être estimés à 293 euros ; qu’en tenant compte de toutes les ressources du foyer de M. X..., revenus perçus par M. X... au titre de son activité de gérant, allocations familiales, forfait relatif aux aides personnalisées au logement et allocations adulte handicapé perçue par Mme X..., les ressources du foyer dépassaient le seuil d’attribution du revenu minimum d’insertion ;
    Vu le mémoire en réplique, enregistré le 7 janvier 2013, présenté pour M. X... par Maître Anne-Marie GORGEON, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre qu’il a certes reconnu qu’il aurait pu bénéficier, en tant que gérant, d’une rémunération de 224 euros mensuels, mais que le versement d’une telle rémunération aurait fragilisé la situation financière de la société et qu’il voulait apurer le passif de la société avant de se verser une rémunération ; que le bénéfice de la société a été modeste en 2008 et nul en 2009 et 2010 ; que la société a été dissoute le 18 janvier 2011 ; que les ressources de son foyer étaient donc inférieures au seuil d’attribution ;
    Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 13 février 2013, présenté par le président du conseil général de l’Indre, qui reprend les conclusions de son précédent mémoire et les mêmes moyens ; il soutient en outre que M. X... disposait réellement du pouvoir de direction de la société dont il était gérant ; que la SARL Z... était viable économiquement lors de l’instruction de la demande de revenu minimum d’insertion ; que les difficultés financières de la société et, pour finir, sa liquidation, sont la conséquence des difficultés de santé de M. X..., à partir de 2009 uniquement ;
    Vu le nouveau mémoire, enregistré le 18 mars 2013, présenté pour M. X... par Maître Anne-Marie GORGEON, qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; il soutient en outre qu’il avait des difficultés de santé dès 2008 ;
    Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2013, présenté par le président du conseil général de l’Indre, qui reprend les conclusions de son précédent mémoire et les mêmes moyens ; il soutient en outre que M. X... n’avait nullement fait part de difficultés de santé dans sa demande de revenu minimum d’insertion ;
    Vu les pièces desquelles il ressort que M. X... s’est vu accordé l’aide juridictionnelle par décision du bureau d’aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Châteauroux en date du 25 mai 2012 ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction applicable au litige ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 8 novembre 2013, M. LABRUNE, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne résidant en France dont les ressources, au sens des articles L. 262-10 et L. 262-12, n’atteignent pas le montant du revenu minimum défini à l’article L. 262-2, qui est âgée de plus de vingt-cinq ans (...) et qui s’engage à participer aux actions ou activités définies avec elle, nécessaires à son insertion sociale ou professionnelle, a droit (...) à un revenu minimum d’insertion » ; qu’aux termes de l’article R. 262-3 du même code : « Les ressources prises en compte pour la détermination du montant de l’allocation de revenu minimum d’insertion comprennent (...) l’ensemble des ressources, de quelque nature qu’elles soient, de toutes les personnes composant le foyer (...), et notamment les avantages en nature, les revenus procurés par des biens mobiliers et immobiliers et par des capitaux » ; qu’aux termes du premier alinéa de l’article R. 262-44 du même code : « Le bénéficiaire de l’allocation de revenu minimum d’insertion est tenu de faire connaître à l’organisme payeur toutes informations relatives à sa résidence, à sa situation de famille, aux activités, aux ressources et aux biens des membres du foyer (...) » ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. X... a déposé une demande de revenu minimum d’insertion le 25 juillet 2008 ; que, par une décision du 8 septembre 2008, le président du conseil général de l’Indre a refusé sa demande au motif que les ressources de son foyer étaient supérieures au seuil d’attribution, dès lors qu’il convenait de prendre en compte les revenus qui auraient dû être perçus par M. X... au titre de son activité de gérant de la SARL Z..., revenus que le président du conseil général estimait, pour l’année 2008, à 719,25 euros mensuels ; que M. X... a contesté cette décision du 8 septembre 2008 devant la commission départementale d’aide sociale de l’Indre ; que celle-ci, par une décision du 17 novembre 2009 qui n’a pas été contestée en appel, a jugé que les revenus mensuels perçus par M. X... en 2008 au titre de son activité de gérant devaient être estimés à 293 euros et a, en conséquence, annulé la décision du 8 septembre 2008 du président du conseil général ; que le président du conseil général a alors réexaminé la demande de M. X... et l’a, de nouveau, rejetée, par une décision du 29 avril 2010, au motif que les revenus mensuels perçus par M. X... au titre de son activité de gérant en 2008 devaient certes être estimés à 293 euros, ainsi que l’avait jugé la commission départementale d’aide sociale, mais qu’il convenait de prendre en compte, pour déterminer les ressources du foyer de M. X..., les sommes perçues par Mme X... au titre de l’allocation adulte handicapé, dès lors que celle-ci s’était vu ouvrir les droits à l’allocation adulte handicapé à compter de janvier 2008, suite à un jugement du 8 juillet 2009 du tribunal des affaires de sécurité sociale de Châteauroux ; que M. X... a contesté cette décision du 29 avril 2010 du président du conseil général de l’Indre devant la commission départementale d’aide sociale de l’Indre qui, par la décision du 16 février 2012 dont M. X... relève appel, a rejeté son recours ;
    Considérant que lorsqu’il statue sur un recours dirigé contre une décision par laquelle l’administration, sans remettre en cause des versements déjà effectués, détermine les droits d’une personne à l’allocation de revenu minimum d’insertion, il appartient au juge administratif, eu égard tant à la finalité de son intervention dans la reconnaissance du droit à cette prestation d’aide sociale qu’à sa qualité de juge de plein contentieux, non de se prononcer sur les éventuels vices propres de la décision attaquée, mais d’examiner les droits de l’intéressé sur lesquels l’administration s’est prononcée, en tenant compte de l’ensemble des circonstances de fait qui résultent de l’instruction ; qu’au vu de ces éléments il appartient au juge administratif d’annuler ou de réformer, s’ il y a lieu, cette décision en fixant alors lui-même les droits de l’intéressé, pour la période en litige, à la date à laquelle il statue ou, s’il ne peut y procéder, de renvoyer l’intéressé devant l’administration afin qu’elle procède à cette fixation sur la base des motifs de son jugement ;
    Considérant que les conclusions de M. X... tendant à ce que lui soient ouverts, à compter de la date de sa demande, le 25 juillet 2008, les droits au bénéfice du revenu minimum d’insertion, doivent être regardées comme tendant, en premier lieu, à ce que lui soient ouverts les droits au revenu minimum d’insertion pour la période du 25 juillet 2008 au 30 mai 2009, et, en second lieu, à ce que lui soient ouverts, à compter du 1er juin 2009, les droits au revenu de solidarité active, dispositif qui a remplacé à compter du 1er juin 2009 le revenu minimum d’insertion ;
        Sur les droits de M. X... au revenu minimum d’insertion pour la période du 25 juillet 2008 au 31 mai 2009 :
    Considérant que, par sa décision du 17 novembre 2009, qui n’a fait l’objet d’aucune contestation en appel, la commission départementale d’aide sociale de l’Indre a jugé que les revenus mensuels perçus par M. X... en 2008 au titre de son activité de gérant de la SARL Z... devaient être estimés à 293 euros et a, en conséquence, annulé la décision du 8 septembre 2008 du président du conseil général ; que l’autorité de la chose jugée s’attache non seulement au dispositif d’un jugement mais également aux motifs qui en constituent le support nécessaire ; que, par suite, l’autorité de chose jugée qui s’attache à la décision du 17 novembre 2009 de la commission départementale d’aide sociale de l’Indre impose, pour examiner les droits au revenu minimum d’insertion de M. X... pour l’année 2008, d’estimer à 293 euros mensuels les revenus mensuels perçus par M. X... au titre de son activité de gérant de la SARL Z... ;
    Considérant qu’il est constant que les autres ressources du foyer de M. X..., résultant des allocations familiales, du forfait relatif aux aides personnalisées au logement et des allocations adulte handicapé perçues par Mme X..., représentaient en 2008 un montant total de 881,45 euros mensuels ;
    Considérant qu’en ajoutant à ce montant les 293 euros mensuels de revenus perçus par M. X... au titre de son activité de gérant de la SARL Z..., le foyer de M. X... disposait en 2008 de ressources supérieures au seuil d’attribution du revenu minimum d’insertion, qui s’élevait à 940,61 euros ; qu’il en résulte que M. X... ne peut se voir ouvrir les droits au revenu minimum d’insertion pour la période du 25 juillet 2008 au 31 décembre 2008 ;
    Considérant, en revanche, qu’il résulte de l’instruction, et n’est d’ailleurs pas sérieusement contesté, que la SARL Z... a cessé toute activité en 2009 ; qu’il s’ensuit que M. X... ne peut avoir perçu aucun revenu au titre de son activité de gérant de cette société durant la période du 1er janvier 2009 au 31 mai 2009 ; qu’il est constant que les autres ressources du foyer de M. X... sont restées, durant cette période, semblables à celles dont il disposait durant l’année 2008 ; que, par suite, le foyer de M. X... disposait, durant cette période, de ressources inférieures au seuil d’attribution du revenu minimum d’insertion ; qu’il en résulte que M. X... doit se voir ouvrir les droits au revenu minimum d’insertion pour la période du 1er janvier 2009 au 31 mai 2009 ; que, toutefois, l’état de l’instruction ne permet pas de déterminer le montant de la somme due à M. X... au titre de l’allocation de revenu minimum d’insertion pour cette période ; qu’il y a lieu, en conséquence, de renvoyer M. X... devant le président du conseil général de l’Indre pour le calcul et le versement de cette somme, conformément aux motifs de la présente décision ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la décision du 16 février 2012 de la commission départementale d’aide sociale de l’Indre doit être annulée en tant qu’elle a rejeté les conclusions de M. X... tendant à ce que lui soit ouverts les droits au revenu minimum d’insertion pour la période du 1er janvier 2009 au 30 mai 2009 ;
        Sur les droits de M. X... au revenu de solidarité active à compter du 1er juin 2009 :
    Considérant qu’il n’appartient qu’à la juridiction administrative de droit commun, en l’espèce le tribunal administratif de Limoges, et non aux juridictions de l’aide sociale, juridictions administratives spécialisées, de connaître des litiges relatifs au revenu de solidarité active ; que, dès lors, il y a lieu d’annuler la décision du 16 février 2012 de la commission départementale d’aide sociale de l’Indre en tant que celle-ci s’est reconnue compétente pour connaître des conclusions de M. X... tendant à ce que lui soient ouverts, à compter du 1er juin 2009, les droits au revenu de solidarité active ; qu’il y a lieu, statuant par voie d’évocation dans la mesure de cette annulation, de transmettre ces conclusions au tribunal administratif de Limoges ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la décision du 29 avril 2010 du président du conseil général de l’Indre doit être réformée en ce qu’elle a de contraire à la présente décision ; que la décision du 16 février 2012 de la commission départementale d’aide sociale de l’Indre doit être annulée en tant qu’elle a rejeté les conclusions de M. X... tendant à l’annulation de cette décision du 29 avril 2010 du président du conseil général de l’Indre,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision du 16 février 2012 de la commission départementale d’aide sociale de l’Indre est annulée, en premier lieu, en tant qu’elle a rejeté les conclusions de M. X... tendant à ce que lui soit ouverts les droits au revenu minimum d’insertion pour la période du 1er janvier 2009 au 30 mai 2009, en deuxième lieu, en tant qu’elle a statué sur les conclusions de M. X... tendant à ce que lui soient ouverts, à compter du 1er juin 2009, les droits au revenu de solidarité active et, en troisième lieu, en tant qu’elle a rejeté les conclusions de M. X... tendant à l’annulation de la décision du 29 avril 2010 du président du conseil général de l’Indre.
    Art. 2.  -  La décision du 29 avril 2010 du président du conseil général de l’Indre est réformée en ce qu’elle a de contraire à la présente décision.
    Art. 3.  -  Les droits au revenu minimum d’insertion sont ouverts à M. X... pour la période du 1er janvier 2009 au 31 mai 2009. M. X... est renvoyé devant le président du conseil général de l’Indre pour le calcul et le versement de la somme qui lui est due à ce titre, conformément aux motifs de la présente décision.
    Art. 4.  -  Les conclusions de M. X... tendant à ce que lui soient ouverts, à compter du 1er juin 2009, les droits au revenu de solidarité active sont transmises au tribunal administratif de Limoges.
    Art. 5.  -  Le surplus des conclusions de M. X... est rejeté.
    Art. 6.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 8 novembre 2013 où siégeaient Mme HACKETT, présidente, M. VIEU, assesseur, M. LABRUNE, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 26 novembre 2013.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

La présidente Le rapporteur

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet