Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  REVENU MINIMUM D’INSERTION (RMI)  
 

Mots clés : Revenu minimum d’insertion (RMI) - Insertion - Suspension
 

Dossier no 120339

M. X...
Séance du 4 juillet 2013

Décision lue en séance publique le 3 septembre 2013

    Vu la requête introductive en date du 21 septembre 2010 et le mémoire complémentaire en date du 20 mai 2011 présentés par Maître Delphine GOUIN-POIRIER, conseil de M. X..., qui demande l’annulation de la décision en date du 18 juin 2010 par laquelle la commission départementale d’aide sociale du Finistère a rejeté le recours de M. X... tendant à l’annulation de la décision en date du 26 août 2009 du président du conseil général du même département, confirmant la décision en date du 4 juin 2009 prononçant suspension de son droit au revenu minimum d’insertion devenu revenu de solidarité active à compter du 1er juin 2009 ;
    Maître Delphine GOUIN-POIRIER conteste la décision de la commission départementale d’aide sociale en date du 5 juillet 2009 sur le fondement de l’inconstitutionnalité de sa formation de jugement ;
    Maître Delphine GOUIN-POIRIER demande l’annulation de la mesure de suspension en faisant valoir que :
        M. X... n’a pas reçu la convocation de l’assistance sociale et aucun élément n’a été fourni sur la réception de cette convocation ;
        M. X... s’est excusé devant la commission locale de lutte contre les exclusions puisque sa femme a déposé un courrier au centre départemental d’aide sociale le 13 mai 2009, soit la veille du rendez-vous ; que le conseil général du Finistère a bien confirmé le dépôt de cette lettre ;
    Maître Delphine GOUIN-POIRIER demande le paiement à M. X... de toutes les mensualités dues au titre du revenu minimum d’insertion et de revenu de solidarité active ;
    Maître Delphine GOUIN-POIRIER demande l’application l’alinéa 2 de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique et de condamner le conseil général du Finistère à lui verser la somme de 1 500 euros et qu’elle renoncera à percevoir la part contributive versée par l’Etat au titre de l’aide juridictionnelle ;
    Vu le mémoire en défense en date du 2 janvier 2011 du président du conseil général du Finistère qui conclut au rejet de la requête ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu la décision no 2010-110 QPC du 25 mars 2011 du Conseil constitutionnel ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu la loi no 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d’insertion ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté qui leur était offerte de présenter des observations orales ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 4 juillet 2013 M. BENHALLA, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant que les faits en litige portent sur la suspension des droits de M. X... tels que définis par le droit applicable avant l’entrée en vigueur le 1er juin 2009 de la loi no 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active, confiant le contentieux aux juridictions administratives de droit commun ;
    Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;
    Considérant qu’il est constant qu’a participé à la délibération de la commission départementale d’aide sociale du Finistère en date du 18 juin 2010 un élu du conseil général de ce département et deux fonctionnaires de l’Etat ; que, dans sa décision susvisée du 25 mars 2011, le Conseil constitutionnel a rappelé qu’aux termes de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de constitution » ; que les principes d’indépendance et d’impartialité sont indissociables de l’exercice de fonctions juridictionnelles ; que les commissions départementales d’aide sociale sont des juridictions administratives du premier degré, compétentes pour examiner les recours formés, en matière d’aide sociale, contre les décisions du président du conseil général ou du préfet ; que les deuxième et troisième alinéas de l’article L. 134-6 du code de l’action sociale et des familles prévoient que siègent dans cette juridiction trois conseillers généraux élus par le conseil général et trois fonctionnaires de l’Etat en activité ou à la retraite, désignés par le représentant de l’Etat dans le département ; que, d’une part, ni l’article L. 134-6 ni aucune autre disposition législative applicable à la commission départementale d’aide sociale n’institue les garanties appropriées permettant de satisfaire au principe d’indépendance des fonctionnaires siégeant dans cette juridiction ; que ne sont pas davantage instituées les garanties d’impartialité faisant obstacle à ce que des fonctionnaires puissent siéger lorsque cette juridiction connaît de questions relevant des services à l’activité desquels ils ont participé ; que, d’autre part, méconnaît également le principe d’impartialité la participation de membres de l’assemblée délibérante du département lorsque ce dernier est partie à l’instance ; que le Conseil constitutionnel a dès lors déclaré l’article L. 134-6 du code de l’action sociale et des familles fixant la composition des commissions départementales d’aide sociale contraire à la Constitution ; qu’il suit de là que M. X... est fondé à soutenir que la décision en date du 18 juin 2010 rendue par la commission départementale d’aide sociale du Finistère l’a été en méconnaissance du principe d’impartialité des juridictions ; que cette décision doit, par suite, être annulée ;
    Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer sur la demande présentée par M. X... devant la commission départementale d’aide sociale du Finistère ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-21 du code de l’action sociale et des familles : « Dans le cas où le contrat est arrivé à échéance si, du fait de l’intéressé et sans motif légitime, le contrat n’a pas été renouvelé ou un nouveau contrat n’a pas pu être établi, le versement de l’allocation peut être suspendu par le président du conseil général après avis de la commission locale d’insertion, après que l’intéressé, assisté, le cas échéant, de la personne de son choix, a été mis en mesure de faire connaître ses observations. La suspension ne peut être prononcée lorsque la responsabilité du défaut de communication du contrat est imputable aux services chargés de le conclure avec l’intéressé » ; qu’aux termes de l’article L. 262-23 du même code : « Si le contrat d’insertion (...) n’est pas respecté, il peut être procédé à sa révision à la demande du président du conseil général ou des bénéficiaires du revenu minimum d’insertion ainsi qu’à la demande de la personne mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 262-37. Si "sans motif" légitime le non-respect du contrat incombe au bénéficiaire de la prestation, le versement de l’allocation peut être suspendu. Dans ce cas, le service de la prestation est rétabli lorsqu’un nouveau contrat a pu être conclu. La décision de suspension est prise par le "président du conseil général", sur avis motivé de la commission locale d’insertion, après que l’intéressé, assisté, le cas échéant, de la personne de son choix, a été mis en mesure de faire connaitre ses observations » ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 262-28 du même code : « En cas de suspension de l’allocation au titre des articles L. 262-19, L. 262-21 ou L. 262-23 (...) ou en cas d’interruption du versement de l’allocation, le président du conseil général met fin au droit au revenu minimum d’insertion dans des conditions fixées par voie réglementaire. Lorsque cette décision fait suite à une mesure de suspension prise en application des articles L. 262-19 (...), l’ouverture d’un nouveau droit, dans l’année qui suit la décision de suspension, est subordonnée à la signature d’un contrat d’insertion » ; qu’aux termes de l’article L. 134-1, modifié par la loi no 2008-1249 du 1er décembre 2008, article 10 : « A l’exception des décisions concernant l’attribution des prestations d’aide sociale à l’enfance ainsi que des décisions concernant le revenu de solidarité active, les décisions du président du conseil général et du représentant de l’Etat dans le département prévues à l’article L. 131-2 sont susceptibles de recours devant les commissions départementales d’aide sociale mentionnées à l’article L. 134-6 dans des conditions fixées par voie réglementaire » ;
    Considérant qu’il ressort de l’instruction que M. X... a été admis au bénéfice du droit au revenu minimum d’insertion en octobre 2003 au titre d’un couple ; qu’il ressort de la chronologie produite par le président du conseil général du Finistère que l’intéressé a été convoqué par l’assistante sociale en vue d’établir un contrat d’insertion ; que la commission locale de lutte contre les exclusions par courrier en date du 29 avril 2009 a rappelé à M. X... qu’il ne s’était pas présenté au rendez-vous fixé par l’assistante sociale le 15 avril 2009 et l’a convoqué à nouveau à la date du 29 mai 2009 ; que l’intéressé ne s’étant pas présenté le 20 mai 2009, la commission locale de lutte contre les exclusions a proposé la suspension du versement de l’allocation ; que, par décision en date du 4 juin 2009, le président du conseil général du Finistère a décidé de suspendre le droit au revenu minimum d’insertion de M. X... ; que, par lettre en date du 1er juillet 2009, la commission locale de lutte contre les exclusions a communiqué les éléments du dossier de M. X... au président du conseil général ; que M. X..., par courrier en date du 10 août 2009, a demandé à celui-ci le rétablissement de son droit à l’allocation de revenu minimum d’insertion ; que, par décision en date du 26 août 2009, le président du connseil général a maintenu la suspension ; que M. X... a contesté cette décision devant la commission départementale d’aide sociale du Finistère qui a rejeté son recours par décision en date du 18 juin 2010, dont M. X... relève appel ;
    Considérant que M. X... soutient, sans être contredit, qu’il n’a jamais pris connaissance du courrier en date du 27 mars 2009 de l’assistante sociale lui fixant rendez-vous au 15 avril 2009 ; qu’il a versé au dossier, d’une part, une ordonnance médicale établie le 12 mai 2009 et le courrier en date 13 mai 2009 indiquant que, souffrant « d’importantes difficultés respiratoires », il n’était pas en mesure de se présenter à la réunion de la commission locale de lutte contre les exclusions prévue le 20 mai 2009 ; que ce courrier a été réceptionné le 14 mai 2009 ; que, bien qu’il ait pris connaissance de l’ensemble de la situation de M. X..., le président du conseil général du Finistère a confirmé la suspension de son droit au revenu minimum d’insertion ; qu’il a été, d’autre part, versé au dossier une attestation sur l’honneur établie par M. X... auprès de la caisse d’allocations familiales du Nord Finistère en date du 3 juin 2010 indiquant que son foyer, qui a un bébé, a « vécu » avec les aides du centre communal d’action sociale et des aides familiales ponctuelles ; que les mesures de suspension de l’allocation de revenu minimum d’insertion dont disposent l’administration pour sanctionner les comportements désinvoltes ou dilatoires ne sauraient intervenir, sans motivation très circonstanciée, pour une absence à un rendez-vous due à des raisons médicales dûment établies ; que lesdites mesures n’ont pas pour objet de sceller l’exclusion sociale ; qu’ainsi le président du conseil général du Finistère a méconnu la portée de la législation applicable ; que, par voie de conséquence, ses décisions en date des 4 juin et 26 août 2009 prononçant la suspension de M. X... au droit au revenu minimum d’insertion sont annulées ; qu’il y a lieu de renvoyer M. X... devant le président du conseil général du Finistère pour réexamen de ses droits,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision en date du 18 juin 2010 de la commission départementale d’aide sociale du Finistère, ensemble les décisions en date des 4 juin et 26 août 2009 du président du conseil général sont annulées.
    Art. 2.  -  M. X... est renvoyé devant le président du conseil général du Finistère pour réexamen de ses droits.
    Art. 3.  -  Le surplus des conclusions de la requête portant sur le versement par le conseil général du Finistère à Maître Delphine GOUIN-POIRIER de la somme de 1 500 euros est rejeté.
    Art. 4.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 4 juillet 2013 où siégeaient M. BELORGEY, président, Mme PEREZ-VIEU, assesseure, M. BENHALLA, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 3 septembre 2013.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet