Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

3420
 
  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES HANDICAPÉES (ASPH)  
 

Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Service d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) - Impartialité - Aide sociale facultative - Règlement départemental d’aide sociale - Compétence juridictionnelle
Dossier no 130056

Mme X...
Séance du 28 juin 2013

Décision lue en séance publique le 16 juillet 2013

    Vu, enregistrée à la direction départementale de la cohésion sociale du Puy-de-Dôme le 28 juin 2012, la requête présentée par l’UDAF du Puy-de-Dôme tendant à ce qu’il plaise à la commission centrale d’aide sociale annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale du Puy-de-Dôme en date du 24 avril 2012 rejetant sa demande dirigée contre la décision du président du conseil général du Puy-de-Dôme du 24 novembre 2011 de rejet de prise en charge des frais de placement de Mme X... au service d’accompagnement à la vie sociale (SAVS) du Puy-de-Dôme par les moyens que les ressources de leur protégée s’élèvent à 1 382,38 euros par mois, y compris les intérêts du capital détenu par celle-ci ; que ses frais de placement sont de 545,04 euros par mois, alors qu’elle doit également faire face à d’autres dépenses ; qu’il s’ensuit que les revenus mensuels de Mme X... sont inférieurs à ses dépenses mensuelles ; qu’en application de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles, le conseil général peut au décès du bénéficiaire exercer un recours sur la succession et ce au 1er euro quel que soit le montant de la créance d’aide sociale et dans la limite de l’actif net successoral ; qu’il résulte de l’article L. 132-3 du même code et de la jurisprudence constante de la commission centrale d’aide sociale que le droit à l’aide sociale s’apprécie en termes de revenu et non de capital ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 14 janvier 2013, le mémoire en défense du président du conseil général du Puy-de-Dôme tendant au rejet de la requête par les motifs que les ressources mensuelles de l’intéressée s’élèvent à 1 064,70 euros (ressources par le travail : 552,25 euros et AAH : 512,45 euros) ; que la demanderesse dispose également de liquidités d’un montant total de 64 200,71 euros ; que le coût du SAVS est de 17,86 euros par jour, soit 543,24 euros par mois ; que les seules ressources d’un montant de 1 086,70 euros couvrent ses frais de SAVS ; que l’attribution de l’aide sociale est assujettie au principe de subsidiarité de cette aide et que celle-ci n’intervient qu’en cas d’insuffisance de ressources personnelles du demandeur ; que l’intéressée ne se trouve pas en état de besoin ; que les modalités de récupération de la prestation sollicitée ne sont pas celles invoquées par l’association requérante, soit au 1er euro ; qu’aucun recours en récupération en matière de SAVS ne peut être exercé en deçà d’un seuil de 46 000,00 euros, seules les dépenses supérieures à 760,00 euros et pour la part excédant ce montant peuvent donner lieu à recouvrement ; que, par ailleurs, il n’y a pas de récupération de cette prestation sur succession lorsque les héritiers du bénéficiaire décédé sont son conjoint, ses enfants, ses parents ou la personne qui a assumé de façon effective et constante la charge de la personne en situation de handicap ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010-110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er alinéa 3 de son dispositif ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 28 juin 2013, Mme ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant qu’il ressort des pièces versées au dossier soumis à la commission centrale d’aide sociale, en premier lieu, que la décision attaquée a méconnu, tant le principe d’indépendance et d’impartialité des juridictions administratives, que celui du secret du délibéré dans la mesure où d’une part, il apparaît que le rapporteur était un agent du département - service d’aide sociale - d’autre part, que les modalités d’apposition de la signature du président de la juridiction sur le rapport présenté, en mentionnant que la position de la juridiction est « conforme » à celui-ci, n’apparaissent pas conformes au respect de ce secret dans une juridiction composée de deux membres ; qu’il y a donc lieu d’annuler la décision attaquée et d’évoquer la demande ;
    Considérant qu’il ressort des pièces versées au dossier de la commission centrale d’aide sociale que l’assistée est d’une part admise en ESAT et d’autre part accompagnée en SAVS (décision de la CDAPH du 6 février 2010 « orientation vers un SAVS » étant ajouté il est vrai « vers l’un des établissements suivants » mais la suite étant « SAVS du Puy-de-Dôme »... l’instance d’orientation ne fait pas semble-t-il, et comme bien d’autres, la distinction nécessaire entre « établissements » et « services » !...) ;
    Considérant que l’article L. 344-5 du code de l’action sociale et des familles n’a jamais été modifié y compris après l’entrée en vigueur des dispositions de la loi du 2 janvier 2002 délimitant le champ de l’autorisation relatives à l’article L. 313-1 et mentionnant « 7o les établissements et les services (...) qui accueillent des personnes adultes handicapées », et ce également après l’entrée en vigueur des dispositions réglementaires (R. 314-105 VIII 5) prévoyant le financement des SAVS par prix de journée ; que cet article L. 344-5 n’inclut toujours pas les services ; que la présente juridiction s’est en définitive résolue par une jurisprudence dont le Conseil d’Etat n’a sur ce point pas encore eu à connaître expressément (nonobstant la décision du département des Hauts-de-Seine du 15 mai 2013) (1) à considérer qu’en l’absence de modification du texte pertinent relatif à l’aide sociale, le financement des SAVS continuait à relever de l’aide sociale facultative jusqu’à modification de ces dispositions ;
    Considérant, dès lors, alors qu’en toute hypothèse Mme X... n’est, comme il a été dit, pas accueillie parallèlement à l’intervention de l’ESAT et de celle du SAVS dans une structure d’hébergement, qu’il y a lieu d’appliquer la jurisprudence constante et récemment réaffirmée du Conseil d’Etat selon laquelle les litiges relatifs à l’aide sociale facultative, en tout cas celle créée par les dispositions du règlement départemental d’aide sociale et non celle dispensée en complément d’une aide sociale légale, relèvent (sous réserve de certaines exceptions admises par nécessité par la présente juridiction qui n’ont pas lieu de l’être en l’espèce) de la compétence du juge administratif de droit commun ; qu’en l’état d’une jurisprudence récemment confirmée il ne peut qu’appartenir à la juridiction régulatrice d’y revenir en pourvoyant, si elle l’entend, comme l’avait fait pendant plusieurs années la présente juridiction avant de revenir sur cette jurisprudence en l’absence de toute modification année après année des textes applicables, à l’institution d’un bloc de compétence « au profit »... de la juridiction spécialisée de l’aide sociale, mais qu’en l’état, celle-ci est incompétente pour connaître d’un litige relatif exclusivement aux frais d’accompagnement en SAVS de Mme X... ;
    Considérant qu’aucune disposition du code de justice administrative, voire du code de l’action sociale et des familles... !, n’autorise les juridictions administratives spécialisées à saisir le président de la section du contentieux du Conseil d’Etat pour attribution des litiges dont elles s’estiment in compétemment saisies à la juridiction administrative qu’elles estiment compétente ;
    Considérant, par suite, qu’il y a lieu de rejeter la demande présentée devant la commission départementale d’aide sociale du Puy-de-Dôme par l’UDAF du Puy-de-Dôme, pour Mme X..., comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaitre ; qu’il appartiendra à la requérante de saisir, si elle s’y croit fondée, la juridiction administrative de droit commun compétente dans les deux mois de la notification de la présente décision ;
    (1) Il paraît résulter implicitement mais nécessairement de cette décision qu’une structure autorisée comme service donne lieu, néanmoins, pour le traitement du litige concernant l’imputation financière des frais d’accompagnement à application des textes du code de l’action sociale et des familles relatifs à l’imputation des prestations d’aide sociale légale, mais cette solution demeurant implicite il y a lieu pour la commission centrale d’aide sociale de maintenir sa jurisprudence en l’attente, le cas échéant, d’une infirmation explicite. À cet égard il n’est pas inutile de relever que l’autorisation donnée à la structure litigieuse dans l’espèce Paris/Hauts-de-Seine le 23 mars 1994 (date à laquelle elle n’était pas requise pour un service !...) était ainsi rédigée « l’association est autorisée à créer un foyer intégré de 24 places (...) il consiste en un accompagnement socio-éducatif individualisé et quotidien des personnes handicapées vivant en habitat autonome. Ces personnes seront des adultes handicapés mentaux des deux sexes fréquentant dans la journée soit une structure de travail en milieu ordinaire protégé, soit une structure d’accueil de jour (CITL) ». Il résulte des termes « habitat autonome » que celui-ci pouvait être, sauf précisions contraires ressortant de la demande ainsi autorisée qui ne ressortent pas du libellé de l’arrêté d’autorisation, totalement indépendant (logement social ordinaire...) ou non du service « d’accompagnement socio-éducatif individualisé » ; géré ou non par l’organisme gestionnaire dudit service, lequel, comportant des prestations « d’accompagnement individualisé et quotidien » (souligné par la CCAS) intervenait avec une certaine « intensité ». Il n’en demeure pas moins qu’une telle structure n’a pas été considérée comme un « foyer » mais bien, de fait, comme un « service » au vu des pièces soumises au juge de cassation,

Décide

    Art. 1er.  -  La décision de la commission départementale d’aide sociale du Puy-de-Dôme en date du 24 avril 2012 est annulée.
    Art. 2.  -  La demande de Mme X..., formulée devant la commission départementale d’aide sociale du Puy-de-Dôme, est rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître.
    Art. 3.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 28 juin 2013 où siégeaient M. LEVY, président, Mme THOMAS, assesseure, Mme ERDMANN, rapporteure.
    Décision lue en séance publique le 16 juillet 2013.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président La rapporteure

Pour ampliation,
La secrétaire générale
de la commission centrale d’aide sociale,
M.-C. Rieubernet