Dispositions spécifiques aux différents types d’aide sociale  

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  AIDE SOCIALE AUX PERSONNES ÂGÉES (ASPA)  
 

Mots clés : Allocation personnalisée d’autonomie (APA) - Délai - Contrôle - Effectivité de l’aide
 

Dossier no 110026

Mme X...
Séance du 17 mai 2013

Décision lue en séance publique le 31 mai 2013

    Vu, enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 21 décembre 2010, l’appel par lequel le président du conseil général du Nord saisit la juridiction de céans en vue d’annuler la décision du 31 mars 2010 de la commission départementale d’aide sociale du Nord ayant annulé celle du 4 janvier 2008 par laquelle le président du conseil général du Nord a rejeté la demande de remise gracieuse présentée par Mme X... d’une somme de 11 372,20 euros mise en recouvrement au titre de la répétition d’un indu de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) pour la période du 12 juillet 2002 au 31 mars 2004 par l’émission d’un titre de perception rendu exécutoire le 17 avril 2007, et ce par les moyens que :
    1o L’action en recouvrement n’était pas prescrite contrairement à ce que soutiennent les premiers juges dans la mesure où Mme X... doit être regardée comme ayant renoncé à invoquer la prescription conformément à l’article 2221 du code civil ;
    2o Aucune disposition législative ou réglementaire ne contraint la collectivité débitrice de l’APA forfaitaire d’effectuer un contrôle de l’effectivité de l’aide ;
    3o La décision d’accorder une demande de remise gracieuse d’une dette née du versement à tort d’une prestation d’aide sociale doit être conforme à la délibération du 2 avril 2007 par laquelle le conseil général du Nord a fixé les conditions que doit réunir le débiteur à cette fin ;
    4o La décision du 4 janvier 2008, annulée en première instance, était conforme aux termes de cette décision ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu l’absence de mémoire en défense de Mme X... ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010-110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 17 mai 2013 M. GOUSSOT, rapporteur, Mmes Y... et Z..., pour le département du Nord, en leurs observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de l’appel ;
    Considérant qu’aux termes de l’article L. 232-14 du code de l’action sociale et des familles : « Le président du conseil général dispose d’un délai de deux mois à compter de la date du dépôt du dossier de demande complet pour notifier au bénéficiaire sa décision relative à l’allocation personnalisée d’autonomie. Au terme de ce délai, à défaut d’une notification, l’allocation personnalisée est réputée acquise pour un montant forfaitaire fixé par décret à compter » initialement de la date de dépôt du dossier complet depuis l’entrée en vigueur de la loi du 31 mars 2003 « à compter de la date d’ouverture des droits (...) jusqu’à ce que la décision expresse le concernant soit notifiée à l’intéressé. » ; qu’à ceux de l’article L. 232-25 du même code, la prescription biennale de l’action en demande de paiement de l’allocation personnalisée d’autonomie engagée par le bénéficiaire contre la collectivité débitrice de l’aide sociale « est également applicable, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, à l’action intentée par le président du conseil général » ; qu’en application de l’article 2221 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, « la renonciation à la prescription est expresse ou tacite ; la renonciation tacite résulte d’un fait qui suppose l’abandon du droit acquis. » ;
    Considérant que Mme X... a sollicité le bénéfice de l’allocation personnalisée d’autonomie en 2002 ; qu’antérieurement à l’expiration du délai de deux mois par lettre du 27 août 2002, le président du conseil général a pris une décision expresse prévoyant le montant de l’allocation pour le montant forfaitaire prévu par les dispositions précitées « en attente de la fixation définitive des droits prévisibles par l’équipe médico-sociale et réalisation du plan d’aide » ; que le 9 décembre 2002, il a pris une décision de rejet en raison du classement en GIR-6 du Mme X..., après instruction par l’équipe médico-sociale ; que, toutefois, les arrérages ont continué à être versés à l’intéressée jusqu’au 11 mars 2004 ; que le 17 avril 2007 la répétition de l’indu a été demandée et à la même date un titre de perception rendu exécutoire a été émis pour le recouvrement des arrérages dont s’agit ; que, toutefois, il n’est pas établi que tant la décision du 9 décembre 2002 que celle du 17 avril 2007, ainsi que le titre de perception rendu exécutoire de la même date aient été notifiés à Mme X..., antérieurement à la date du 4 septembre 2007 dont elle fait état dans son « recours gracieux » du 20 septembre 2007 ;
    Considérant que dans ce « recours gracieux » Mme X... indiquait « suite à l’appel téléphonique de l’assistante sociale de secteur le 20 septembre 2007 celle-ci a été informée qu’une évaluation a été faite en octobre 2002 mettant en avant le refus de l’APA et le placement en groupe iso-ressources 5-6. Malgré cette décision dont je n’ai pas eu connaissance le montant APA a toujours été versé. » ; qu’une telle argumentation présentait le caractère d’une argumentation « contentieuse », alors même que Mme X... ajoutait « à ce jour on me réclame la somme de 11 000 euros, somme que je ne peux rembourser compte tenu de mes modestes ressources, soit 694 euros par mois » ; que l’administration a néanmoins instruit sur le plan gracieux cette demande considérée comme une demande de « remise gracieuse » et que ce n’est qu’à l’issue de l’instruction qu’elle a, par décision du 4 janvier 2008, notifié à la requérante le rejet d’une demande de « remise gracieuse » au motif que les critères établis par la délibération du 2 avril 2007 du conseil général n’étaient pas satisfaits ; que par requête du 28 février 2008 Mme X... a déféré cette décision de rejet à la commission départementale d’aide sociale en se prévalant, non seulement de sa situation financière au regard du montant de l’indu recouvré, mais en ajoutant qu’elle « tient également à porter à votre connaissance mon incompréhension devant cet indu car en aucun cas il ne m’a été précisé les modalités liées à cette allocation. D’autant que cette demande a été faite en une rencontre sans d’autres interpellations ou suivis ultérieurs. Cela me surprend d’autant plus que la décision de refus concernant cette allocation aurait été donnée en octobre 2002 mais ne m’a été communiquée qu’en 2007. » ; qu’alors même qu’elle « réitérait sa demande de remise gracieuse totale ou au moins partielle de l’indu », ce nonobstant la demande au premier juge présentait d’ores et déjà par les énonciations de la requérante juridiquement autodidacte, dans la dernière phrase citée, un caractère contentieux comme le présentait le « recours gracieux » adressé à l’administration et traité par celle-ci comme une demande de « remise gracieuse » ; qu’au demeurant dans son mémoire enregistré le 17 avril 2008 la requérante a précisé sa contestation en faisant valoir, après qu’elle ait confirmé que sa situation financière ne lui permettait pas d’assumer l’indu dont s’agit, qu’elle « tient à porter à votre connaissance mon étonnement sachant qu’une décision de refus concernant cette allocation aurait été donnée en octobre 2002 mais ne m’a été communiqué qu’en 2007 » (rédaction identique à celle de la dernière phrase de sa demande précitée) en précisant qu’elle contestait donc (souligné par la commission centrale d’aide sociale) « la décision de rejet qui m’a été rendu et sollicite que ma demande puisse être prise en compte dans le cadre de la prescription comme stipulé dans le code de l’action sociale et des familles » ; qu’en conséquence elle « sollicitait un "recours contentieux" relatif à cet indu d’APA datant de 2002 » ; qu’en définitive, il résulte de la combinaison du « recours gracieux » adressé à l’administration, de la demande et du mémoire complémentaire adressés à la commission départementale d’aide sociale, que dès l’origine de son recours administratif, puis de sa demande contentieuse, Mme X... ne se bornait pas à contester la décision de répétition de l’indu dont la notification n’est pas établie, non plus que celle du titre de perception rendu exécutoire, antérieurement au 20 septembre 2007 dans le cadre d’une remise gracieuse, mais entendait bien d’abord par un recours administratif préalable, puis par un recours contentieux fondés notamment dès l’origine sur des moyens contentieux, contester la légalité de la répétition ; qu’ainsi c’est à tort que l’administration a considéré que Mme X... ne formulait à l’égard de la décision de répétition de l’indu qu’une demande de « remise gracieuse » et qu’il y a lieu d’examiner sur le plan contentieux la légalité de la décision de répétition de l’indu dès l’origine contestée ;
    Considérant en premier lieu et en toute hypothèse, qu’il résulte des dispositions précitées de l’article L. 232-14 du code de l’action sociale et des familles que lorsque le président du conseil général n’a pas, à l’issue du délai de deux mois qu’elles prévoient, pris une décision statuant sur la demande d’APA à la date, s’agissant des dispositions applicables dans la présente instance, de constitution du dossier complet, les arrérages d’allocation personnalisée d’autonomie versés pour le montant forfaitaire ne sont pas, ainsi que le précise d’ailleurs la note d’information sur l’allocation personnalisée d’autonomie tenant lieu de circulaire d’application établie par la direction générale de l’action sociale lors de l’entrée en vigueur de la loi du 28 juillet 2001, « récupérables » c’est-à-dire répétibles, y compris dans le cas où la décision définitive intervenue sur la demande est une décision de rejet motivée notamment par le degré de perte d’autonomie insuffisant du demandeur ; qu’ainsi les arrérages versés en fonction du montant forfaitaire sont définitivement acquis à l’intéressé non seulement jusqu’à « l’intervention » de la décision explicite de rejet, mais encore ainsi que le précisait expressément le 6e alinéa de l’article L. 232-14 « jusqu’à ce que la décision expresse le concernant soit notifiée à l’intéressé » ; que, comme il a été dit ci-dessus, il n’est pas justifié que tant la décision expresse de rejet en raison du classement en GIR-6 de Mme X..., que d’ailleurs le titre de perception rendu exécutoire émis pour avoir recouvrement des arrérages versés aient été notifiés à l’intéressée avant le 20 septembre 2007 ; qu’ainsi le juge de l’aide sociale statuant sur les droits de l’assistée est fondé en l’espèce à soulever ce moyen ;
    Considérant d’ailleurs, et en toute hypothèse, qu’à supposer même qu’il n’eût pas été en situation de le soulever et que la décision à intervenir doive être rendue en fonction des seuls moyens des parties en première instance et de ceux du président du conseil général du Nord dans son appel, la décision de répétition de l’indu n’a, en toute hypothèse, été prise que le 17 avril 2007, alors qu’il n’est pas établi que la décision de rejet de la demande ait été antérieurement notifiée à Mme X... en 2002 et que les arrérages ont été versés jusqu’en avril 2004 ; qu’ainsi, en l’absence de toute fraude ou de fausse déclaration de Mme X..., ni établies ni même alléguées, la prescription de l’ensemble des arrérages versés du 12 juillet 2002 au 17 avril 2004 était acquise, lorsque le 20 septembre 2007 l’indu litigieux a été réclamé en application de l’article L. 232-25 du code précité ; qu’ainsi les premiers juges ont, en toute hypothèse, comme il l’ont fait, pu motiver leur décision infirmant la décision de répétition de l’administration au motif que la prescription biennale prévue à l’article L. 232-25 était acquise ;
    Considérant que si le président du conseil général du Nord soutient que le recours administratif préalable de Mme X..., qui aurait sollicité ainsi qu’il l’a estimé une « remise gracieuse », manifeste la renonciation de celle-ci à contester la période de l’indu, il résulte de l’analyse du recours administratif préalable en réalité constitué par la lettre du 20 septembre 2007 demandant l’infirmation de la décision du 17 avril 2007 que celui-ci ne comportait pas une renonciation sans équivoque de Mme X... à faire valoir ses droits sur le plan légal et contentieux en renonçant ainsi de façon non équivoque, en reconnaissant sa dette, à se prévaloir de la prescription acquise ; que la circonstance que le titre de perception rendu exécutoire, dont la date de notification à l’intimée n’est en toute hypothèse, comme il a été dit, pas établie, comportât des informations sur le délai de prescription applicable, demeure en toute hypothèse, compte tenu de l’absence de justification de sa notification, sans incidence ;
    Considérant que ces seuls motifs suffisent à fonder légalement la décision attaquée ; qu’ainsi, et sans qu’il soit besoin de statuer sur les moyens dirigés contre les autres motifs en toute hypothèse surabondants de la décision par le président du conseil général du Nord, celui-ci n’est pas fondé à demander l’annulation de cette décision,

Décide

    Art. 1er.  -  La requête du président du conseil général du Nord est rejetée.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 17 mai 2013 où siégeaient M. LEVY, président, Mme LE MEUR, assesseure, M. GOUSSOT, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 31 mai 2013.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général, par intérim,
de la commission centrale d’aide sociale,
G. Janvier