Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RÉPÉTITION DE L’INDU  
 

Mots clés : Allocation personnalisée d’autonomie (APA) - Répétition de l’indu - Délai
 

Dossier no 110020

Mme X...
Séance du 14 décembre 2012

Décision lue en séance publique le 17 janvier 2013

    Vu enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 15 décembre 2010, l’appel par lequel le président du conseil général du Nord demande à la juridiction de céans d’annuler la décision de la commission départementale d’aide sociale du Nord en date du 31 mars 2010 de faire remise totale de la dette contractée par Mme X... à l’égard de la collectivité débitrice de l’aide sociale, soit une somme de 8 336,27 euros mise en recouvrement par titre de perception rendu exécutoire du 8 mars 2007, pour avoir bénéficié à tort, du 18 mars au 31 mai 2003, de l’allocation personnalisée d’autonomie alors que l’équipe médico-sociale avait classé l’intéressée, le 14 novembre 2002, dans le groupe isoressources 5-6, réservé aux personne n’ayant pas perdu leur autonomie pour effectuer les actes de la vie courante et que le président du conseil général lui avait par suite refusé l’aide, le 28 janvier 2003, et ce par les moyens que :
        1o La prescription de l’action en recouvrement invoquée par les premiers juges n’interdisait pas au département de tenter de récupérer le montant litigieux ;
        2o Cette prescription n’était pas opposable au département dès lors que la débitrice avait tacitement renoncé à s’en prévaloir par le seul fait d’avoir saisi la commission départementale d’aide sociale ;
        3o Aucune disposition législative ou réglementaire n’impose au département d’accorder une remise gracieuse de dette à un créancier ayant à tort bénéficié de l’allocation personnalisée d’autonomie ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles, notamment les articles L. 134-2 et L. 134-6 ;
    Vu les décisions du Conseil constitutionnel no 2010-110 QPC du 25 mars 2011, notamment l’article 1er de son dispositif et ses considérants 7 et 10, et no 2012-250 QPC du 8 juin 2012, notamment l’article 1er, alinéa 3, de son dispositif ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 14 décembre 2012, M. GOUSSOT, rapporteur, M. Y..., pour le département du Nord, en ses observations, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article L. 232-1 du code de l’action sociale et des familles : « Toute personne âgée résidant en France qui se trouve dans l’incapacité d’assumer les conséquences du manque ou de la perte d’autonomie liés à son état physique ou mental a droit à une allocation personnalisée d’autonomie permettant une prise en charge adaptée à ses besoins. » ; qu’à ceux de l’article L. 232-2 du même code, l’attribution de l’aide est subordonnée à des « conditions d’âge et de perte d’autonomie, évaluée à l’aide d’une grille nationale, (...) définies par voie réglementaire » ; qu’enfin, selon l’article L. 232-14 du même code, « Le président du conseil général dispose d’un délai de deux mois à compter de la date du dépôt du dossier de demande complet pour notifier au bénéficiaire sa décision relative à l’allocation personnalisée d’autonomie. » ; qu’à défaut de réponse de sa part dans ce délai « l’allocation personnalisée d’autonomie est réputée accordée pour un montant forfaitaire (...) jusqu’à ce que la décision expresse le concernant soit notifiée à l’intéressé » ; qu’il suit de ces dispositions que l’attribution d’une allocation personnalisée d’autonomie forfaitaire présente un caractère provisoire jusqu’à la notification de la décision du président du conseil général d’accorder ou de refuser le bénéfice de l’aide ;
    Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article L. 232-25 du code de l’action sociale et des familles, la prescription par deux ans de l’action en demande de paiement de l’allocation personnalisée d’autonomie engagée par le bénéficiaire contre la collectivité débitrice de l’aide sociale « est également applicable, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration, à l’action intentée par le président du conseil général ou le représentant de l’Etat, pour la mise en recouvrement des sommes indûment versées » ; qu’en application de l’article 2221 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile par la création d’un régime de prescription extinctive, « La renonciation à la prescription [était] expresse ou tacite ; la renonciation tacite [résultait] d’un fait qui suppose l’abandon du droit acquis. » ; qu’il suit de ce qui précède que l’ordonnateur de la dépense d’aide sociale dispose d’un délai de deux ans pour émettre l’ordre de recettes tendant au recouvrement des aides indûment versées, sous peine de se voir opposer la prescription d’assiette qui ne peut être levée qu’à la suite de la renonciation tacite ou expresse à ce droit de la part du débiteur ; que le litige porte sur cette seule prescription et non sur la prescription de l’action en recouvrement du comptable prévue à l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales ;
    Sur l’objet du litige :
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mme X..., assistée alors de Maître Christophe DESURMONT, avocat au barreau de Lille, a saisi les premiers juges d’un recours tendant à l’annulation du titre de recettes rendu exécutoire le 8 mars 2007 par lequel le département du Nord a entendu procéder à la répétition de l’indu d’allocation personnalisée d’autonomie à caractère forfaitaire versée à tort à l’intéressée du 25 février 2002 au 30 juin 2003 ; que le litige ne porte donc pas sur la demande de remise gracieuse de la dette que le conseil de Mme X... a présentée par ailleurs, le même jour, au président du conseil général du Nord dont il a déféré le refus à la commission départementale d’aide sociale par demande du 28 mars 2008 alors [même] que dans cette demande, jointe par la commission à la précédente, il indique que « le présent recours ne fait que reprendre le précédent recours qui avait été adressé à votre organisme le 3 avril 2007 » ; que le recours de première instance soulève expressément le moyen de la prescription à l’appui de ses conclusions d’annulation auxquelles les premiers juges ont fait droit ;
    Sur le bien-fondé de la décision des premiers juges :
    Considérant qu’à la suite d’une intervention bénigne, suivie de complications, Mme X... a dû être hospitalisée pendant cinq mois ; que ses enfants ont entrepris, sans qu’elle y soit associée, au vu du dossier soumis à la commission centrale d’aide sociale, des démarches en vue de lui faire obtenir le bénéfice de l’allocation personnalisée d’autonomie ; qu’elle a déposé, le 11 février 2002, à la suite de démarches qui auraient été faites par le service social de la clinique où elle était hospitalisée, une demande en ce sens auprès des services du département du Nord ; qu’à défaut d’avoir traité cette demande dans le délai de deux mois, le président du conseil général du Nord a accordé provisoirement, le 2 mai 2002, le bénéfice de l’allocation personnalisée d’autonomie forfaitaire à l’intéressée à compter du 25 février 2002 ;
    Considérant que le 14 novembre 2002 l’équipe médico-sociale chargée d’évaluer le degré d’autonomie de Mme X... a estimé que l’intéressée pouvait accomplir sans difficulté les actes essentiels de l’existence de sorte qu’elle l’a classée dans le groupe isoressource 5-6 ; que, par suite, le président du conseil général du Nord a refusé, à titre définitif, le bénéfice de l’allocation personnalisée d’autonomie à Mme X... par une décision, non contestée, du 28 janvier 2003 ; que l’intéressée, par lettre datée du 20 janvier 2003, faisant référence à cette décision du « 28 courant » et donc probablement du 29 ou du 30 janvier 2003 mais enregistrée le 25 juin suivant seulement, a demandé au département d’interrompre les paiements et de lui proposer un échéancier de remboursement ; que l’administration a néanmoins poursuivi en sa faveur le versement de l’allocation personnalisée d’autonomie forfaitaire jusqu’au 30 juin 2003 ; que, par lettre du 19 septembre 2003, la collectivité débitrice de l’aide sociale lui a signifié qu’elle entendait procéder à la répétition de l’indu pour la période du 18 mars au 31 mai 2003 et non du 25 février 2002 au 30 juin 2003 ; qu’à cette occasion, le département du Nord n’a pas fixé le quantum de sa créance ;
    Considérant que les services du département ont laissé l’affaire en l’état jusqu’au 5 mars 2007, date à laquelle ils ont émis à l’encontre de Mme X... un titre de recettes de 8 336,27 euros, rendu exécutoire le 8 mars 2007 par le payeur départemental, aux fins de recouvrement de l’allocation personnalisée d’autonomie forfaitaire versée à l’intéressée du 25 février 2002 au 30 juin 2003 ; qu’il ne figure au dossier aucune pièce attestant de la volonté de Mme X..., durant la période du 20 septembre 2003 au 8 mars 2007, de renoncer à la prescription d’assiette par deux ans que le département du Nord a d’ailleurs reconnue acquise, nonobstant la circulaire qu’il invoque, enjoignant néanmoins au payeur de procéder au recouvrement et les circonstances nées du refus du payeur de procéder à celui-ci qui ont conduit à en demander l’annulation obtenue du tribunal administratif de Lille par jugement du 7 février 2006 qu’il a explicitées en instance d’appel, alors que la requête initiale ne concernait pas, ainsi qu’il a été précisé à l’audience, l’intimée et qu’il lui eût appartenu de saisir le payeur du dossier de celle-ci puis de déférer le refus ainsi intervenu au tribunal administratif, le jugement invoqué de celui-ci étant sans incidence sur l’écoulement du cours de la prescription dans la présente instance ;
    Considérant qu’il suit de ce qui précède que Mme X... et les premiers juges étaient fondés à opposer ladite prescription au département du Nord,

Décide

    Art. 1er.  -  L’appel du président du conseil général du Nord est rejeté.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 14 décembre 2012 où siégeaient M. LEVY, président, Mme AOUAR, assesseure, M. GOUSSOT, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 17 janvier 2013.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer