Dispositions communes à tous les types daide sociale |
2340 |
RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Recours en récupération - Succession - Légataire particulier |
Dossier no 120195
Mme X...
Séance du 9 octobre 2012
Décision lue en séance publique le 19 octobre 2012
Vu, 1o, le recours, en date du 22 décembre 2011, présenté par Mme Y..., tendant à lannulation de la décision du 27 septembre 2011 par laquelle la commission départementale daide sociale de lAisne a rejeté son recours tendant à lannulation de la décision du 18 mai 2010 en tant que par cette décision, le président du conseil général de lAisne a prononcé la récupération de la somme de 5 484,95 euros à son encontre en tant que légataire à titre particulier de Mme X..., de son vivant bénéficiaire de laide sociale et décédée le 29 septembre 2009 ;
Mme Y... soutient que le légataire particulier nétant pas tenu de payer les dettes de la succession, le recours exercé par le département à son encontre nentre pas dans le champ dapplication de larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles ni dans celui de larticle R. 132-11 du même code, pris pour son application ; que si son recours était rejeté, elle se verrait obligée de porter laffaire devant la juridiction civile, dès lors que la juridiction administrative ferait supporter au légataire particulier un passif de succession en totale contradiction avec larticle 1024 du code civil ;
Vu la décision attaquée ;
Vu le mémoire en défense, en date du 19 juin 2012, présenté par le président du conseil général de lAisne, qui conclut au rejet du recours ; il soutient que si le Conseil dEtat reconnaît aux légataires universels les mêmes conditions de récupération que les héritiers pour lesquels la récupération sur succession est soumise à un seuil, le légataire particulier ne bénéficie pas dun tel régime ; que, dès lors, aucun seuil nest opposable à lencontre du légataire particulier ; que la commission départementale daide sociale de lAisne na pas fait une inexacte appréciation des circonstances de lespèce ;
Vu les nouveaux mémoires, en date des 24 mai et 4 octobre 2012, présentés par Mme Y..., qui reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ; elle soutient en outre que laide personnalisée dautonomie nest au nombre des aides récupérables par le département ;
Vu, 2o, le recours, en date du 16 février 2012, présenté par M. Z..., tendant à lannulation de la décision du 27 septembre 2011 par laquelle la commission départementale daide sociale de lAisne a rejeté son recours tendant à lannulation de la décision du 18 mai 2010 en tant que par cette décision, le président du conseil général de lAisne a prononcé la récupération de la somme de 159,06 euros à son encontre en tant que légataire à titre particulier de Mme X..., de son vivant bénéficiaire de laide sociale et décédée le 29 septembre 2009 ;
M. Z... soutient que le légataire particulier nétant pas tenu de payer les dettes de la succession, le recours exercé par le département à son encontre nentre pas dans le champ dapplication de larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles ni dans celui de larticle R. 132-11 du même code, pris pour son application ; que si son recours était rejeté, elle se verrait obligée de porter laffaire devant la juridiction civile, dès lors que la juridiction administrative ferait supporter au légataire particulier un passif de succession en totale contradiction avec larticle 1024 du code civil ;
Vu le mémoire en défense, en date du 19 juin 2012, présenté par le président du conseil général de lAisne, qui conclut au rejet du recours ; il soutient que si le Conseil dEtat reconnaît aux légataires universels les mêmes conditions de récupération que les héritiers pour lesquels la récupération sur succession est soumise à un seuil, le légataire particulier ne bénéficie pas dun tel régime ; que dès lors, aucun seuil nest opposable à lencontre du légataire particulier ; que la commission départementale daide sociale de lAisne na pas fait une inexacte appréciation des circonstances de lespèce ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté de présenter des observations orales, et celles dentre elles ayant exprimé le souhait den faire usage ayant été informées de la date et de lheure de laudience ;
Après avoir entendu à laudience publique du 9 octobre 2012 Mme Sophie ROUSSEL, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Considérant que les recours présentés respectivement par Mme Y... et M. Z... sont dirigés contre la même décision et présentent à juger les mêmes questions ; quil y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant quil résulte de linstruction que Mme X... a bénéficié de laide sociale aux personnes âgées au titre de laide ménagère à domicile durant la période du 1er octobre 2006 au 29 février 2008 pour un montant de 3 050,54 euros et au titre de laide à lhébergement en maison de retraite durant la période du 30 juin 2009 au 29 septembre 2009, date de son décès, pour un montant de 2 593,48 euros ; que par une décision du 18 mai 2010, le président du conseil général de lAisne a prononcé la récupération de la somme de 5 484,95 euros à lencontre de Mme Y... et de 159,06 euros à lencontre de M. Y..., légataires à titre particulier de Mme X... ; que, par une décision du 27 décembre 2011, la commission départementale daide sociale de lAisne a rejeté les recours de Mme Y... et de M. Z... dirigés contre la décision du 18 mai 2010 ; que Mme Y... et M. Z... font appel de cette dernière décision ;
Considérant, en premier lieu, que contrairement à ce qui est soutenu, les montants perçus au titre de laide sociale par Mme X... pendant la période du 1er octobre 2006 au 29 février 2008 puis pendant la période du 30 juin 2009 au 29 septembre 2009 ne relèvent pas de laide personnalisée dautonomie régie par le chapitre II du titre III du livre II du code de laction sociale et des familles et qui, en application de larticle L. 232-19 du même code, nest pas récupérable sur la succession du bénéficiaire, sur le légataire ou sur le donataire, mais de laide ménagère à domicile et de laide à lhébergement des personnes âgées régies par le chapitre Ier du même titre du même livre du même code, qui sont au nombre des aides récupérables par le département sur le fondement de larticle L. 132-8 du code ; que, par suite, les montants daide sociale perçus par Mme X... au titre de laide ménagère et de laide à lhébergement en établissement spécialisé peuvent légalement faire lobjet dune action en récupération exercée par lEtat ou le département sur le fondement de larticle L. 132-8 du même code ;
Considérant, en second lieu, quaux termes de larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles : « Des recours sont exercés, selon le cas, par lEtat ou le département : 1o Contre le bénéficiaire revenu à meilleure fortune ou contre la succession du bénéficiaire ; / 2o Contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande daide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande ; / 3o Contre le légataire. » ; quen vertu des dispositions de larticle R. 132-11 du même code : « Les recours prévus à larticle L. 132-8 sont exercés, dans tous les cas, dans la limite du montant des prestations allouées au bénéficiaire de laide sociale. / En cas de donation, le recours est exercé jusquà concurrence de la valeur des biens donnés par le bénéficiaire de laide sociale, appréciée au jour de lintroduction du recours, déduction faite, le cas échéant, des plus-values résultant des impenses ou du travail du donataire. / En cas de legs, le recours est exercé jusquà concurrence de la valeur des biens légués au jour de louverture de la succession. / Le président du conseil général ou le préfet fixe le montant des sommes à récupérer. Il peut décider de reporter la récupération en tout ou partie. » ; quaux termes de larticle R. 132-12 du même code : « Le recouvrement sur la succession du bénéficiaire, prévu à larticle L. 132-8, des sommes versées au titre de laide sociale à domicile (...) sexerce sur la partie de lactif net successoral qui excède 46 000 euros. Seules les dépenses supérieures à 760 euros, et pour la part excédant ce montant, peuvent donner lieu à recouvrement » ;
Considérant quil résulte de lensemble de ces dispositions, éclairées par les débats parlementaires qui ont précédé lintervention de la loi du 13 juillet 1982 relative aux prestations de vieillesse, dinvalidité et de veuvage, dont larticle 29 est à lorigine de lintroduction du seuil dexonération visant certaines catégories de prestations daide sociale aujourdhui mentionné au dernier alinéa de larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles, quen cas de recours en récupération contre la « succession » dun défunt, il ny a pas lieu de distinguer entre la situation des héritiers institués par la loi et celle des légataires universels ou à titre universel venant aux droits du défunt en vertu du testament de ce dernier dès lors que ces personnes bénéficient des mêmes droits et sont sujettes aux mêmes charges ; que, par suite, les dispositions du 3o de larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles doivent sentendre comme visant uniquement la situation du légataire à titre particulier qui, à la différence du légataire universel, nest normalement pas tenu des dettes de la succession ;
Considérant quil suit de là que, contrairement à ce qui est soutenu, la situation des légataires à titre particulier est bien régie par le 3o de larticle L. 132-8 du code de laction sociale et des familles et nest pas soumise au seuil mentionné au dernier alinéa de cet article et précisé par larticle R. 132-12 du même code, qui ne sapplique quau recouvrement sur la succession du bénéficiaire de laide sociale ; que ces dispositions, issues dune loi spéciale postérieure, dérogent légalement au principe général fixé par larticle 1024 du code civil selon lequel le légataire particulier ne sera point tenu des dettes de la succession ; que, par suite, en jugeant quaucun seuil nest opposable dans laction en récupération à lencontre du légataire particulier, la commission départementale daide sociale de lAisne na pas commis derreur de droit ;
Considérant quil résulte de tout ce qui précède que Mme Y... et M. Y... ne sont pas fondés à soutenir que cest à tort que, par la décision attaquée, la commission départementale daide sociale de lAisne a rejeté leurs recours,
Décide
Art. 1er. - Les recours de Mme Y... et de M. Z... sont rejetés.
Art. 2. - La présente décision sera transmise à Mme Y..., à M. Z..., au président du conseil général de lAisne et à la ministre des affaires sociales et de la santé, à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 9 octobre 2012, où siégeaient M. SELTENSPERGER, président, M. CENTLIVRE, assesseur, Mme ROUSSEL, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 19 octobre 2012.
La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président La rapporteure
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer