Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

2200
 
  DÉTERMINATION DE LA COLLECTIVITÉ DÉBITRICE  
 

Mots clés : Détermination de la collectivité débitrice - Compétence
 

Dossiers no 120172

M. et Mme X...
Séance du 1er juin 2012

Décision lue en séance publique le 4 juin 2012

    Vu, enregistré au secrétariat de la commission centrale d’aide sociale le 4 août 2011, le recours par lequel le préfet de l’Aude demande au juge de l’aide sociale de mettre à la charge du département de l’Aude l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) ainsi que les frais d’hébergement et d’entretien de M. et Mme X... à l’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) situé dans l’Aude où les intéressés ont été admis le 1er mars 2011 à l’initiative du comité d’entraide aux Français rapatriés (CEFR) dès leur retour d’Afrique du Sud par les moyens que, malgré les informations complémentaires sollicitées, les demandes transmises par le conseil général ne comportaient pas les éléments justificatifs permettant d’apprécier les circonstances exceptionnelles de l’arrivée en France des époux X... et le choix libre ou contraint de leur arrivée dans le département de l’Aude ; que les demandes ne comportaient pas non plus les informations relatives aux quatre obligés alimentaires ; qu’au surplus, il résulte de l’article L. 232-12 du code de l’action sociale et des familles que la prise en charge de l’allocation personnalisée d’autonomie ne relève pas de l’Etat ;
    Vu la lettre en date du 28 avril 2011 par laquelle le président du conseil général de l’Aude a transmis au préfet de l’Aude le dossier de demande d’aide sociale des époux X... ;
    Vu, enregistré le 2 décembre 2011, le mémoire en défense du président du conseil général de l’Aude tendant au rejet du recours au motif qu’une personne de nationalité française arrivant d’un pays étranger, où elle avait un domicile fixe reconnu, pour être admise directement dans un établissement social ou médico-social est prise en charge par l’aide sociale de l’Etat, conformément à la jurisprudence administrative, si elle est impécunieuse ;
    Vu, enregistrées le 11 janvier 2012, les observations du comité d’entraide des Français rapatriés qui gère l’EHPAD de l’Aude tendant au rejet des conclusions du recours du préfet de l’Aude ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 1er juin 2012 M. GOUSSOT, rapporteur, et après en avoir délibéré, hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Sur la lettre en date du 10 janvier 2012 du secrétaire général du comité d’entraide des Français rapatriés ;
    Considérant que cette lettre doit être analysée eu égard aux conditions dans lesquelles elle a été adressée à la commission centrale d’aide sociale par le comité d’entraide des Français rapatriés qui n’a pas eu communication en provenance du secrétariat de la commission centrale d’aide sociale des mémoires échangés par les parties non comme une intervention accessoire au soutien des conclusions du président du conseil général de l’Aude mais comme une simple lettre tendant à appeler l’attention sur l’urgence du règlement du litige compte tenu de la charge de trésorerie supportée par le gestionnaire dans l’attente de la décision de la commission centrale d’aide sociale et entendant apporter à ladite commission des éléments d’information sur la situation spécifique de l’espèce au regard des conditions générales de rapatriement des Français résidant à l’étranger par l’Etat et de leur admission subséquente dans des établissements sociaux ou médico-sociaux que d’ailleurs, à supposer même que cette lettre eut dû s’analyser comme une intervention accessoire au soutien des conclusions en défense du président du conseil général de l’Aude tendant au rejet de la requête de l’Etat, il serait difficile de déterminer indépendamment de l’urgence à raison rappelée par le comité qui s’attache pour lui à la solution rapide du litige en quoi la solution à adopter serait susceptible de préjudicier à ses droits puisque de toute façon la commission centrale d’aide sociale décidera de l’imputation financière de la dépense à l’une ou l’autre collectivité d’aide sociale, voire, en quoi elle serait même susceptible de porter atteinte à un intérêt du comité, à le supposer suffisant dans le présent litige de plein contentieux, au motif seul que la position du préfet de l’Aude est contraire à celle constamment affirmée par l’Etat dans des situations semblables et récurrentes de rapatriement de Français demeurant à l’étranger pour admission immédiate dans des établissements sociaux ou médico-sociaux au regard des dispositions de l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles, l’existence d’une position divergente d’un représentant de l’Etat par rapport à celles d’autres représentants (ministre[s] ou préfet[s]) ne paraissant pas suffisante pour justifier d’un intérêt à agir du seul fait d’opportunité pour le gestionnaire d’une position constante et stable de l’Etat ;
    Sur la requête du préfet de l’Aude ;
    Considérant que si aux termes de l’article R. 131-8 du code de l’action sociale et des familles : « I. - Lorsqu’un président de conseil général est saisi d’une demande d’admission à l’aide sociale, dont la charge financière au sens du 1o de l’article L. 121-7 lui parait incomber à l’Etat, il transmet le dossier au préfet au plus tard dans le mois de la réception de la demande. Si ce dernier n’admet pas la compétence de l’Etat, il transmet le dossier au plus tard dans le mois de sa saisine à la commission centrale d’aide sociale, qui statue dans les conditions de l’article L. 134-3 » et si les délais de recours contentieux fixés par ce texte sont impartis à peine de nullité, la lettre de transmission du président du conseil général de l’Aude au préfet de l’Aude du dossier d’admission à l’aide sociale de M. et Mme X... ne comportait pas, en toute hypothèse, la mention des voies et délais de recours contre une décision de refus de reconnaissance de sa compétence d’imputation financière ; que les délais de recours ne courent que pour autant que les décisions attaquées comportent cette mention et qu’il n’existe en droit aucun motif d’appliquer une règle différente à l’égard des services de l’Etat destinataires d’un refus de reconnaissance d’imputation financière par un département de dépense d’aide sociale ; qu’ainsi la requête est recevable ;
    Mais considérant qu’à supposer même que les circonstances de l’arrivée en France des époux X... (qui vivaient depuis de nombreuses années en Afrique du Sud et ont été, après avoir exercé leurs activités professionnelles, progressivement victimes d’un état d’indigence qu’après l’apparition de la dépendance, à tout le moins, de Mme X... l’allocation aux adultes handicapés de M. X... et les subsides versés à Mme X... ne permettaient plus de combler sur place) ne puissent être qualifiées d’exceptionnelles au sens et pour l’application des dispositions de l’article L. 111-3 du code de l’action sociale et des familles selon lequel « les personnes dont la présence sur le territoire métropolitain résulte de circonstances exceptionnelles et qui n’ont pu choisir librement leur lieu de résidence, ou les personnes pour lesquelles aucun domicile fixe ne peut être déterminé, ont droit aux prestations d’aide sociale (...) » à charge alors selon l’article L. 121-7 de l’Etat, il résulte de l’instruction qu’à leur arrivée en France en provenance d’Afrique du Sud, d’où ils avaient été rapatriés pour les motifs ci-dessus évoqués par les services consulaires, les époux X... ont été immédiatement, le jour même, transférés de l’aéroport à l’EHPAD de l’Aude où leur hébergement par le comité d’entraide des Français rapatriés avait été prévu, d’ailleurs, sans autre possibilité de choix pour eux, dès avant leur rapatriement et en conséquence, d’ailleurs, en toute hypothèse, implicitement mais nécessairement, la prise en charge par l’aide sociale des frais d’hébergement et d’entretien non couverts par leurs res sources qui devaient être constituées par la seule allocation aux adultes handicapés de M. X... ; que dans ces conditions et alors même que la demande d’aide sociale n’a été formalisée, conformément aux engagements pris par l’Etat et les époux X..., qu’après l’arrivée de ceux-ci en France, ils se trouvaient dans une situation assimilable à celle des « personnes pour lesquelles aucun domicile fixe ne peut être déterminé » dont l’article L. 111-3 et l’article L. 121-7 précités prévoient la prise en charge des frais d’aide sociale par l’Etat ;
    Considérant que le préfet soulève deux moyens qui, compte tenu de ce qui précède, ne peuvent être accueillis ; qu’en premier lieu, les éléments transmis par le président du conseil général de l’Aude ne permettaient pas d’apprécier le caractère exceptionnel des circonstances de l’arrivée de M. et Mme X... en France et le choix libre ou contraint de cette arrivée dans le département de l’Aude ; qu’en toute hypothèse, compte tenu de ce que la situation des époux X... est à tout le moins assimilable à celle des personnes sans domicile fixe revenant directement de l’étranger pour être accueillis dans un établissement social ou médico-social sans résider autrement en France, le moyen est inopérant ; qu’en second lieu, le préfet fait valoir que les demandes ne comportaient aucune information relative aux obligés alimentaires ; qu’il appartient toutefois aux services de l’Etat, financièrement compétents pour instruire la demande, de pourvoir à la production desdits éléments et d’admettre immédiatement à l’aide sociale les époux X... postérieurement à la notification de la présente décision, alors qu’il résulte des pièces du dossier que soit la localisation, soit l’acceptation des obligés alimentaires de pourvoir à une telle obligation sont aléatoires et que s’agissant de ceux qui sont localisables elle ne pourra être fixée par l’autorité judiciaire qu’au terme d’une procédure elle-même aléatoire, compte tenu des relations entretenues tant par M. X... que par Mme X... avec leurs enfants avec lesquels ils avaient depuis de très nombreuses années cessé toute relation voire dans le cas des enfants de M. X... n’en n’avaient jamais eu ; que quoi qu’il en soit les circonstances alléguées au soutien du second moyen demeurent sans incidence sur la détermination de l’imputation financière de la dépense d’aide sociale ; qu’enfin, le présent litige concerne les frais d’hébergement qui sont à la charge de l’Etat dans le cas des personnes relevant des articles L. 111-3 et L. 121-7 du code de l’action sociale et des familles et non l’allocation personnalisée d’autonomie dont le préfet évoque de manière inopérante en l’instance que la prise en charge n’incombe jamais à l’Etat, y compris en cas d’absence de domicile fixe ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter la requête du préfet de l’Aude,

Décide

    Art. 1er.  -  La requête du préfet de l’Aude est rejetée.
    Art. 2.  -  La présente décision sera immédiatement notifiée par les soins du secrétariat de la commission centrale d’aide sociale au préfet de l’Aude, au président du conseil général de l’Aude et, pour information, au secrétaire général du comité d’entraide aux Français rapatriés.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 1er juin 2012, où siégeaient M. LEVY, président, Mme AOUAR, assesseure, M. GOUSSOT, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 4 juin 2012.
    La République mande et ordonne à la ministre des affaires sociales et de la santé, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer