Dispositions communes à tous les types d’aide sociale  

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  RECOURS EN RÉCUPÉRATION  
 

Mots clés : Recours en récupération - Donation - Contrat d’assurance-vie
 

Dossier no 110425

M. X...
Séance du 29 février 2012

Décision lue en séance publique le 8 mars 2012

    Vu le recours, enregistré le 16 juillet 2010, formé par Mme Y... contre la décision du 2 avril 2010 par laquelle la commission départementale d’aide sociale de Paris a rejeté son recours contre la décision du 25 novembre 2009 par laquelle le président du conseil général de Paris a requalifié en donation le contrat d’assurance-vie de M. X... et prononcé la récupération de l’intégralité des primes versées sur ce contrat, soit 33 847,50 euros au titre du recours contre donataire ;
    La requérante soutient que le contrat d’assurance-vie souscrit en 1998 par son oncle ne peut pas être requalifié en donation indirecte ;
    Vu la décision attaquée ;
    Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 janvier 2011, présenté par le président du conseil général de Paris, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que l’âge de M. X... à la date de souscription du contrat d’assurance-vie ainsi que le montant des primes versées au regard de son actif disponible justifient la requalification du contrat en donation au bénéficie de sa nièce, la requérante ;
    Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
    Vu le code civil ;
    Vu le code de l’action sociale et des familles ;
    Les parties ayant été régulièrement informées de la faculté de présenter des observations orales, et celles d’entre elles ayant exprimé le souhait d’en faire usage ayant été informées de la date et de l’heure de l’audience ;
    Après avoir entendu à l’audience publique du 29 février 2011 M. David GAUDILLERE, rapporteur, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à l’issue de la séance publique ;
    Considérant, d’une part, qu’aux termes du 2o de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles : « Des recours sont exercés, selon le cas, par l’Etat ou le département (...) contre le donataire lorsque la donation est intervenue postérieurement à la demande d’aide sociale ou dans les dix ans qui ont précédé cette demande » ; qu’aux termes de l’article R. 132-11 du même code : « Les recours prévus à l’article L. 132-8 sont exercés, dans tous les cas, dans la limite du montant des prestations allouées au bénéficiaire de l’aide sociale (...) » ;
    Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 894 du code civil : « La donation entre vifs est un acte par lequel le donateur se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée en faveur du donataire qui l’accepte » ; qu’un contrat d’assurance-vie soumis aux dispositions des articles L. 132-1 et suivants du code des assurances, par lequel il est stipulé qu’un capital ou une rente sera versé au souscripteur en cas de vie à l’échéance prévue par le contrat, et à un ou plusieurs bénéficiaires déterminés en cas de décès du souscripteur avant cette date, n’a pas en lui-même le caractère d’une donation, au sens de l’article 894 du code civil ;
    Considérant toutefois que l’administration de l’aide sociale est en droit de rétablir la nature exacte des actes pouvant justifier l’engagement d’une action en récupération ; que le même pouvoir appartient aux juridictions de l’aide sociale, sous réserve, en cas de difficulté sérieuse, d’une éventuelle question préjudicielle devant les juridictions de l’ordre judiciaire ; qu’à ce titre, un contrat d’assurance-vie peut être requalifié en donation si, compte tenu des circonstances dans lesquelles ce contrat a été souscrit, il révèle, pour l’essentiel, une intention libérale de la part du souscripteur vis-à-vis du bénéficiaire et après que ce dernier a donné son acceptation ; que l’intention libérale doit être regardée comme établie lorsque le souscripteur du contrat, eu égard à son espérance de vie et à l’importance des primes versées par rapport à son patrimoine, s’y dépouille au profit du bénéficiaire de manière à la fois actuelle et non aléatoire en raison de la naissance d’un droit de créance sur l’assureur ; que, dans ce cas, l’acceptation du bénéficiaire, alors même qu’elle n’interviendrait qu’au moment du versement de la prestation assurée après le décès du souscripteur, a pour effet de permettre à l’administration de l’aide sociale de le regarder comme un donataire, pour l’application des dispositions relatives à la récupération des créances d’aide sociale ;
    Considérant qu’il résulte de l’instruction que M. X..., né le 12 mai 1910, a bénéficié de l’aide sociale aux personnes âgées pour la prise en charge de ses frais d’hébergement à l’hôpital H... du 7 février 2000 au 4 décembre 2005, date de son décès ; que les sommes avancées à ce titre par le département de Paris se sont élevées à 58 504,50 euros ; que le montrant de l’actif net successoral, qui s’élevait à 3 303,65 euros, n’a pas permis au département de recouvrer l’intégralité de sa créance du département ;
    Considérant que M. X... a souscrit le 12 décembre 1998, à l’âge de 88 ans, un contrat d’assurance-vie, sur lequel un montant total de primes de 33 847,45 euros a été versé ; que ce contrat a été souscrit au profit de sa nièce, Mme Y..., la requérante ; qu’après le décès de M. X..., Mme Y... a perçu l’intégralité de la somme versée sur ce contrat ;
    Considérant que le contrat d’assurance-vie en cause a été souscrit moins d’un an avant la demande d’aide sociale formée par M. X... le 17 novembre 1999 en vue de son entrée en établissement, soit dans le délai de dix ans prévu par les dispositions précitées de l’article L. 132-8 du code de l’action sociale et des familles ; qu’en raison de l’âge de M. X... à la date de souscription du contrat d’assurance-vie ainsi que de l’importance des primes versées par rapport à l’actif disponible de l’intéressé, la souscription de ce contrat doit être regardé comme procédant d’une intention libérale ; que, par suite, c’est à bon droit que le président du conseil général de Paris a estimé que Mme Y... avait bénéficié d’une donation de la part de son oncle ;
    Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mme Y... n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par la décision attaquée du 2 avril 2010, la commission départementale d’aide sociale de Paris a rejeté son recours et a maintenu l’action exercée par le département de Paris pour la récupération de l’intégralité des primes versées sur le contrat d’assurance-vie de son oncle M. X...,

Décide

    Art. 1er.  -  Le recours de Mme Y... est rejeté.
    Art. 2.  -  La présente décision sera transmise à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient d’en assurer l’exécution.
    Délibéré par la commission centrale d’aide sociale dans la séance non publique, à l’issue de la séance publique du 29 février 2012 où siégeaient M. SELTENSPERGER, président, Mme GUIGNARD-HAMON, assesseure, M. GAUDILLERE, rapporteur.
    Décision lue en séance publique le 8 mars 2012.
    La République mande et ordonne à la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Le président Le rapporteur

Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale d’aide sociale,
M. Defer