Dispositions communes à tous les types daide sociale |
2320 |
RECOURS EN RÉCUPÉRATION | ||
Mots clés : Aide sociale aux personnes handicapées (ASPH) - Placement - Ressources |
Dossier no 110829
M. X...
Séance du 27 avril 2012
Décision lue en séance publique le 16 mai 2012
Vu, enregistrée au secrétariat de la commission centrale daide sociale le 20 juillet 2011, la requête présentée pour M. X..., par lY... de Haute-Marne, tendant à ce quil plaise à la commission centrale daide sociale réformer la décision en date du 31 mai 2011 de la commission départementale daide sociale de Seine-et-Marne rejetant sa demande dirigée contre la décision du président du conseil général de Seine-et-Marne du 12 mars 2010 renouvelant la prise en charge des frais dhébergement de M. X... au foyer de vie de V... en tant quelle subordonne ce renouvellement à la clôture préalable dun contrat dassurance vie décès dont lintéressé est titulaire par les moyens quune telle obligation est illégale en tant que condition dadmission à laide sociale qui suppose la prise en considération des revenus du travail et des revenus du capital et non du capital lui-même, que les revenus du capital soient fictifs ou réels ; que ses revenus ainsi déterminés sont insuffisants pour couvrir la prise en charge de M. X..., même en prenant en compte la revalorisation dun contrat GMO qui nest dailleurs pas un revenu ; que le président du conseil général ne doit pas confondre admission à laide sociale soumise à condition de ressources et récupération a posteriori et que cest uniquement dans le cadre dune récupération que le contrat pourrait être pris en compte en tant que donation déguisée ; quau surplus la récupération seffectue au jour du décès du donateur sur les donations faites dans les dix ans précédant la demande daide sociale alors que le contrat litigieux est en tout état cause ancien de plus de dix ans ; que sur le fond la décision attaquée est illégale en tant quelle plafonne la prise en charge des dépenses déductibles à hauteur de 10 % du montant de lallocation aux adultes handicapés ; que la circonstance quil dispose sur ses revenus de 30 % du montant de lAAH laissés à sa disposition ne fait pas obstacle à lapplication des règles générales définies par la jurisprudence du Conseil dEtat du 14 décembre 2007 imposant la prise en compte de toutes les charges obligatoires imposées par les lois et règlements pour le demandeur ; quà ce titre la prise en charge des mutuelles contractées par les bénéficiaires de laide sociale relevait de lexistence dun droit à la protection sociale garanti par le Préambule de la Constitution ; que la contribution de lhébergé sur ses revenus aux frais de placement doit être appliquée sur une assiette diminuée de ces dépenses ; que de même doivent être déduites la part du tarif restant à charge de lassuré social du fait des dispositions législatives et réglementaires du forfait journalier prévu à larticle L. 174-4 ou encore les cotisations dassurance maladie complémentaire nécessaires à la couverture de ces dépenses ; quainsi 30 % du montant de lAAH doit rester entièrement à la disposition de lassisté et que ce pourcentage simpute sur les ressources brutes, préalablement diminuées comme ci-dessus ; quen conséquence un plafonnement de la prise en charge des dépenses déductibles serait de nature à compromettre le droit à la protection sociale ; que linstauration du plafonnement ne peut quaboutir à une déduction partielle des dépenses déductibles à la charge du conseil général ; que larticle L. 121-4 du code de laction sociale et des familles interdit au règlement départemental daide sociale dinstaurer des conditions moins favorables que celles prévues audit code pour le motif au surplus du respect du principe dégalité des citoyens devant la loi sur lensemble du territoire national ;
Vu la décision attaquée ;
Vu, enregistrés les 3 octobre 2011 et 2 novembre 2011, les mémoires en défense du président du conseil général de Seine-et-Marne tendant au rejet de la requête par les motifs que le juge des tutelles a estimé que la demande de clôture du contrat dassurance vie-décès litigieuse faite par le département ne lésait pas les intérêts dun demandeur daide sociale ; quil na pris en compte ni le montant du capital, ni les intérêts pour déterminer la part contributive de lintéressé, aucun revenu de capitaux mobiliers ou montant de la rente CNP (assurance vie) nayant été communiqué par la tutrice ; que la demande de clôture na pas pour but de récupérer le capital pour régler les frais actuels mais pour permettre la récupération éventuelle au moment du recours sur succession ; que la décision de prise en charge précise que lintéressé doit reverser à létablissement 70 % de lAAH mais que dans les faits cette contribution est ramenée à 60 % puisque le département admet une déduction supplémentaire de 10 % pour les frais de mutuelle, de tutelle et de lassurance responsabilité civile ; quil prend ainsi en compte les frais de mutuelle et de tutelle et en outre les frais dassurance responsabilité civile qui ne sont pas au nombre de ceux quil doit obligatoirement retenir ; quainsi ces dispositions sont plus favorables que celles de la législation en vigueur ; que bien que le contrat dassurance vie nait pas été clôturé, le département a toutefois réglé les frais daccueil du 4 septembre 2009 au 31 janvier 2011 ; que devant la commission départementale daide sociale le requérant na pas contesté le pourcentage de contribution aux frais daccueil mais uniquement la demande de clôture du contrat dassurance vie et que la question se pose de savoir si dans ces conditions lassociation tutélaire est en droit de contester ce pourcentage devant la commission centrale daide sociale ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu le code de laction sociale et des familles ;
Après avoir entendu, à laudience publique du 27 avril 2012, Mme ERDMANN, rapporteure, et après en avoir délibéré hors la présence des parties, à lissue de la séance publique ;
Sur les conclusions relatives à la contestation « du plafonnement de la prise en charge des dépenses déductibles à hauteur de 10 % de lAAH » et de « la déduction de (ces) dépenses à hauteur de la dépense réelle » :
Considérant que le président du conseil général de Seine-et-Marne est regardé soulever la fin de non recevoir tirée du caractère nouveau en appel des conclusions dont il sagit et quen toute hypothèse une telle irrecevabilité est dordre public ; qualors même que la demande à la commission départementale daide sociale de Seine-et-Marne nest pas au dossier transmis à la commission centrale daide sociale, il résulte des visas de la décision attaquée qui font foi jusquà preuve contraire en labsence dailleurs de toute contestation en réplique par le requérant que devant le premier juge M. X... na contesté que la subordination de ladmission à laide sociale à la clôture préalable dun contrat dassurance vie-décès et au placement des capitaux dont il sagit sur une autre forme de placement ; que la demande relative à la fixation de la participation de lassisté sur ses revenus et en conséquence à celle de la participation de laide sociale aux frais dhébergement présente le caractère dune demande nouvelle en appel et est comme telle irrecevable ;
Sur les conclusions tendant à la réformation des décisions attaquées en ce quelles subordonnent ladmission à laide sociale à la clôture préalable dun contrat dassurance vie-décès souscrit par M. X... :
Considérant que, sil résulte du mémoire du président du conseil général de Seine-et-Marne du 2 novembre 2011 que pour la période litigieuse qui est expirée le président du conseil général na pas en fait appliqué la condition posée dans sa décision dadmission et que le département a ainsi couvert la charge des frais de celle-ci, cette circonstance qui concerne lexécution de la décision attaquée, alors dailleurs que lunion départementale des associations familiales de Haute-Marne requérante qui na produit aucun mémoire en réplique na pas acquiescé sur ce point aux indications fournies, ne rend pas sans objet les conclusions susanalysées ;
Considérant quaucune disposition législative ne permet de subordonner ladmission à laide sociale à la clôture préalable dun contrat dassurance vie-décès et à un placement des capitaux ainsi dégagés sur une autre forme de placement ; que le principe de subsidiarité évoqué par les premiers juges est sans aucun emport à cet égard puisquil ne sapplique que sous réserve des dispositions législatives et réglementaires qui en définissent précisément les modalités dapplication au stade de ladmission à laide sociale et quaucune disposition de la sorte ne prévoit ni nimplique lobligation impartie à M. X... par le président du conseil général de Seine-et-Marne ; que la circonstance également invoquée par les premiers juges qu« au moment du décès le contrat dassurance vie échappe à la succession et que les intérêts dun nouveau placement "pouvant" quant à eux alors être récupérés au titre des ressources », outre que le sens de sa formulation par la décision attaquée est difficile à comprendre, est en toute hypothèse sans incidence dès lors, quen application de larticle R. 132-1 du code de laction sociale et des familles les intérêts demeurant capitalisés sur un contrat dassurance vie-décès souscrit par le stipulant nen sont pas néanmoins susceptibles dêtre pris en compte au titre de revenus pour le pourcentage forfaitaire prévu par ces dispositions et quaprès le décès de lassisté le président du conseil général dispose du recours contre le donataire sil établit lintention libérale du stipulant à légard du bénéficiaire de second rang lors de la passation du contrat ; que pour le surplus la circonstance également invoquée au titre des conséquences du principe de subsidiarité que « M. X... dispose de différents livrets et dune assurance vie dun montant de 71.634,00 Euro est également sans aucune incidence dès lors quau stade de ladmission à laide sociale ainsi que le rappelle le requérant seules les ressources en revenus et non en capital peuvent être légalement prises en compte ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient dans son mémoire en défense le président du conseil général de Seine-et-Marne, la circonstance que les capitaux versés par le promettant au bénéficiaire de second rang au décès du stipulant ne soient pas pris en compte au titre de lactif successoral nimplique pas, comme il a été rappelé ci-dessus, que ladministration ne puisse procéder à « aucune récupération » de lavance de laide sociale dès lors quelle établit lexistence de lintention libérale du stipulant le contrat souscrit par celui-ci pouvant alors être requalifié en donation indirecte - et non déguisée comme lindique lY... - et en conséquence le bénéficiaire recherché au titre du 2 de larticle L. 132-8 ;
Considérant que la circonstance que le juge des tutelles ait « validé » la condition illégale mise par le président du conseil général de Seine-et-Marne à ladmission à laide sociale en considérant quelle nétait pas contraire aux intérêts de M. X... est sans incidence sur lapplication par le juge administratif des dispositions de la loi daide sociale ;
Considérant que la circonstance que le département de Seine-et-Marne nait pas mis en application la décision attaquée en ce qui concerne la prise en charge des frais pour la période litigieuse ci-dessus rappelée et expirée à la date de la présente décision ne prive pas, comme il a été dit, dobjet la demande de lY... de Haute-Marne dès lors que la décision attaquée na pas été retirée par son auteur et quil nest pas établi, ni même allégué, que celui-ci, qui en défend du reste toujours la légalité, ne soit pas susceptible en revenant sur la position quil a prise de pourvoir à sa mise en application ; quainsi, en létat du dossier, il y a bien lieu, comme il a été dit plus haut, de statuer, la commission nétant par ailleurs saisie daucune demande de lune ou lautre des parties tendant à la prise en compte des intérêts produits par le contrat pour le pourcentage forfaitaire de 3 % prévu à larticle R. 132-1,
Décide
Art. 1er. - Les décisions de la commission départementale daide sociale de Seine-et-Marne et du président du conseil général de Seine-et-Marne des 31 mai 2011 et 12 mars 2010 sont annulées en ce quelles subordonnent ladmission à laide sociale à lhébergement de M. X... pour la période du 4 septembre 2009 au 31 janvier 2011 à la condition que « Lassurance vie CNP (...) doit être clôturée » préalablement « et les capitaux seront placés sur un compte productif dintérêts ».
Art. 2. - Le surplus des conclusions de la requête de lY... de Haute-Marne pour M. X... est rejeté.
Art. 3. - La présente décision sera transmise à la ministre de lécologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, à qui il revient den assurer lexécution.
Délibéré par la commission centrale daide sociale dans la séance non publique, à lissue de la séance publique du 27 avril 2012 où siégeaient M. LEVY, président, Mme NORMAND, assesseure, Mme ERDMANN, rapporteure.
Décision lue en séance publique le 16 mai 2012.
La République mande et ordonne à la ministre de lécologie, du développement durable, des transports et du logement, à la ministre des solidarités et de la cohésion sociale, chacune en ce qui la concerne, et à tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à lexécution de la présente décision.
Le président La rapporteure
Pour ampliation,
Le secrétaire général
de la commission centrale daide sociale,
M. Defer